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C'est pas mon idée !

dimanche 31 octobre 2021

Un chatbot au service de l’éducation financière

Truist
L’histoire est croustillante. Face aux constats généralisés de l’impact du stress financier sur la qualité de vie et la productivité des salariés, un dirigeant de banque imaginait que ses employés seraient moins sujets à ce risque. Une enquête auprès des intéressés a révélé qu’il n’en était rien. Au contraire. Ainsi est née la plate-forme Truist Momentum.

Pour le groupe, issu de la fusion en 2019 de BB&T et SunTrust, qui le place désormais dans le top 10 des banques américaines, la découverte que 60% de ses effectifs manquent de confiance dans leurs compétences financières, entraînant, selon ses estimations, un coût moyen annuel de 5 000 dollars par personne en raison du temps passé à s'inquiéter de questions d'argent (28 heures par mois), a constitué un véritable moment de révélation, qui l'a incité à investir dans des mesures concrètes.

Les quelques 50 000 collaborateurs de l'établissement se voient donc proposer, sur un site dédié, un programme pédagogique extensif assorti d'un catalogue de ressources (articles, vidéos…) afin de parfaire leurs connaissances, en alignement avec un ensemble de valeurs fondamentales. Cerise sur le gâteau, Truist offre une prime (initialement de 1 000 dollars, apparemment ramenée depuis à 750) à tous ceux qui parviennent au terme du parcours d'apprentissage, destinée à amorcer ou compléter leur réserve d'urgence.

En complément de ces contenus essentiellement statiques, la petite équipe en charge du projet souhaitait également fournir aux utilisateurs un dispositif capable de répondre à leurs interrogations spécifiques, en particulier sur les problématiques qu'ils rencontrent au jour le jour, de celles qui, justement, occupent l'esprit jusqu'à trouver une solution. À défaut de pouvoir engager les importants moyens que requerraient la mise en place d'un véritable centre de support, c'est un chatbot, baptisé Mo, qui assume ce rôle.

Truist Momentum

Contrairement à la plupart de ses congénères, Mo ne se contente pas de faciliter la consultation d'une base de connaissances pré-existante. Ses concepteurs ont dû imaginer les préoccupations les plus courantes des consommateurs, puis définir la meilleure manière de les adresser, avec, autant que possible, des conseils opérationnels. À l'heure du lancement de sa deuxième génération d'expertise, l'outil semble se tirer correctement d'affaire puisqu'il affiche un taux de succès de 80% sur ses contributions.

Forte de ses résultats, Truist a décidé de distribuer son service, exempt de toute référence à ses produits, à l'extérieur de ses murs, dans une approche à but non lucratif. À ce jour, 300 entreprises, ne payant donc que pour ses coûts de fonctionnement, l'ont adopté dans le but d'accroître la culture et le bien-être financiers de leurs 150 000 salariés. En revanche, étonnamment, rien n'est dit d'une éventuelle déclinaison pour les clients, qui mériteraient pourtant de bénéficier d'un accompagnement du même acabit…

samedi 30 octobre 2021

Multiverse, l'informatique quantique en low-code

Multiverse Computing
La construction d'ordinateurs opérationnels, prêts pour un déploiement industriel, n'est pas le seul défi que doit relever l'informatique quantique pour s'imposer. La conception des algorithmes, qui fait appel à une approche radicalement nouvelle, doit aussi s'adapter. Afin de faciliter la transition, Multiverse imagine une approche « low-code ».

Le fonctionnement de ces machines, reposant sur une logique d'états non binaires superposés remet fondamentalement en cause les principes de programmation en vigueur depuis Ada Lovelace. Conséquence directe, les compétences requises sont aujourd'hui quasiment inexistantes et, au vu à la fois de la complexité de la discipline et de l'impératif de réinventer, à partir de rien, un cursus d'apprentissage, ce qui prendra longtemps, la pénurie de talents risque de devenir un obstacle majeur à l'épanouissement de la technologie, même s'il faut 10 ans avant d'obtenir un matériel au point.

Dans ce contexte, la proposition de valeur de Multiverse consiste donc non seulement à permettre aux institutions financières (le marché que la startup cible en priorité) de commencer au plus tôt à intégrer l'informatique quantique dans leur arsenal, sans attendre d'acquérir l'expertise nécessaire, mais également d'anticiper une carence durable de spécialistes capables d'en exploiter toutes les opportunités. Sur le premier volet, plusieurs grandes enseignes se sont laissé convaincre, dont BBVA et Crédit Agricole.

Accueil Multiverse Computing

Concrètement, la solution met à la disposition des entreprises un ensemble de librairies optimisées prédéfinies, exécutables sur différentes infrastructures (celles d'IBM, de D-Wave, de Pasqal et bien d'autres), couvrant les grands domaines d'application où sont espérés les bénéfices les plus importants, la détection de fraude et la valorisation de portefeuille figurant en tête du palmarès. Afin de tenir la promesse de démocratisation, l'accès aux fonctions est simplifié au maximum, prenant la forme d'une feuille de calcul.

Naturellement, l'approche externalisée de Multiverse présentera rapidement l'inconvénient d'égaliser la concurrence. Elle devrait pourtant se pérenniser et devenir progressivement la réponse idéale au manque de professionnels pour tous les besoins élémentaires, sur lesquels l'industrie n'aura d'autre choix que d'adopter l'informatique quantique pour se maintenir au niveau de l'état de l'art. Cependant, elle n'empêchera pas, en parallèle, l'émergence chez les acteurs les plus en pointe de petites cellules dédiées qui pourront focaliser leur entière attention sur de vrais facteurs de différenciation compétitive.

vendredi 29 octobre 2021

La collaboration holographique selon Webex

Webex
Il y a 12 ans, bien avant les pitreries de certain homme politique, John Chambers, alors directeur général de Cisco, présentait publiquement, sur scène, une démonstration ébouriffante des possibilités de l'holographie, en expliquant que cette technologie représentait l'avenir de la collaboration à distance. Aujourd'hui, Webex s'empare de l'idée.

Depuis son rachat par Cisco, le pionnier de la conférence en ligne s'est endormi et se trouve désormais largement distancé par ses concurrents (Zoom, Microsoft Teams…). Le retour en force de ces outils à l'occasion de la crise sanitaire, qui lui a tout de même valu d'enregistrer une belle croissance, a apparemment stimulé un regain d'activité dans la division. Parmi les nouveautés présentées lors d'un événement consacré au travail hybride, la plus marquante et la plus différenciante est Webex Hologram.

Cette fois, il ne s'agit plus de simple coup publicitaire, le produit est entre les mains de quelques clients privilégiés et les entreprises intéressées sont invitées à se manifester pour organiser des expérimentations. Il est vrai que l'ambition reste ici mesurée, puisque le principe consiste à mettre en présence virtuelle des personnes distantes, avec un rendu en trois dimensions de haute qualité, via des lunettes de réalité augmentée telles que MagicLeap ou Microsoft HoloLens. L'holographie est donc plutôt une simulation.

L'ensemble rappelle distinctement la solution développée et mise en production (?) par BNP Paribas Real Estate dans le but de gérer les projets immobiliers avec des intervenants dispersés, dévoilée lors de VivaTech 2019. En comparaison de cette réalisation spécifique dédiée à un cas d'usage, Webex tente maintenant de faire du concept une option standard de la visioconférence, au profit d'interactions enrichies, autorisant notamment le partage de contenus numériques et physiques.

Webex Hologram

La généralisation, au cours des dix-huit derniers mois, des réunions et autres échanges par écrans interposés a révélé les sévères limitations des dispositifs existants, autant en termes de lassitude et d'inconfort que de déperditions dans les relations entre individus. Ces constats génèrent depuis quelque temps une importante recrudescence d'innovation en la matière, qui fait la part belle aux expériences immersives, à travers des approches extrêmement variées et probablement complémentaires entre elles.

Webex ajoute ainsi l'introduction de participants holographiques dans un environnement réel, pour une collaboration augmentée, à une palette de choix qui comprenait jusqu'alors, entre autres, la téléprésence 3D de Google, encore expérimentale et impliquant un aménagement ad hoc, pour des conversations naturelles, et le métavers à la sauce Facebook, avec sa plate-forme Horizon Workrooms, dont le modèle de monde virtuel peuplé d'avatars semble initialement plus adapté à des applications ludiques.

Un point commun à ces initiatives est le recours à une représentation en trois dimensions et en haute définition, qui permet de s'approcher au mieux du ressenti d'une rencontre en face à face et d'en reproduire, autant que possible, toutes les subtilités. De ce point de vue et en corrélation avec les contraintes associées, chacune à ses avantages et ses inconvénients, plus ou moins critiques selon les utilisations. Dans le secteur financier, le système de Cisco pourrait, par exemple, s'avérer convaincant pour des échanges avec les clients… si leur équipement, vis-à-vis duquel il est agnostique, se développe.

jeudi 28 octobre 2021

La banque sans cœur devient réalité

BIAN
En 2019, BIAN lançait le projet de concevoir un modèle de banque sans cœur. Deux ans et une crise sanitaire (avec ses conséquences sur la demande « digitale ») plus tard, les premiers résultats en étaient présentés au salon SIBOS. Voilà une occasion de revenir sur les enjeux de modernisation des systèmes existants, toujours aussi critiques.

Dans la lignée de la mission que s'est fixée l'association depuis ses origines, l'idée vise à réactualiser les pratiques d'architecture informatique en vigueur dans les grandes institutions financières, de manière à passer de la préhistoire des années 60, 70 et 80 à l'état de l'art de la décennie 2020, en profitant des évolutions technologiques qui ont émergé entre temps autant que des réflexions théoriques sur le sujet, dont une bonne partie sont en outre mises en œuvre avec succès (et validées) par les géants du web.

Or un des derniers bastions de résistance des temps anciens est justement ce « core banking », un système critique dont la vocation est d'établir une référence absolue pour un certain nombre d'opérations qui lui sont déléguées par les applications de l'entreprise (la principale étant la tenue de comptes). À une époque où tous les traitements étaient exécutés sur une machine unique, cette construction avait du sens. Aujourd'hui, les nouvelles contraintes de la banque en font un point de faiblesse majeur.

La mutation numérique du secteur a entraîné une explosion du nombre de logiciels, qui induit une pression extrême sur ce composant dont dépendent (presque) tous les autres et le place entre le marteau (des exigences de performance et de tenue en charge en forte croissance permanente) et l'enclume (du risque de d'interruption totale de l'activité en cas d'incident). En parallèle, sa position de carrefour incontournable du système d'information constitue un puissant frein à son remplacement, voire à son évolution.

BIAN Coreless Banking

Parce que ce cœur est un fardeau maintenant et qu'il le sera toujours, les mêmes problématiques revenant à chaque changement de génération, BIAN propose « tout simplement » de l'éliminer. En adoptant les approches modernes de conception des systèmes complexes, l'organisme lui substitue un modèle totalement décentralisé, où chaque composant métier conserve l'entière maîtrise de son périmètre et les besoins de consolidation sont pris en charge par le recours à un format d'échange standardisé.

La plate-forme qui vient d'être dévoilée apporte un avantage supplémentaire aux institutions qui rechignent à s'engager dans l'aventure du remplacement de leur « core banking » vieillissant. En effet, son rôle de passerelle entre systèmes, qui permet de convertir les messages des outils actuels vers sa spécification, autorise l'introduction progressive d'applications conformes à sa vision, sans remettre en cause le reste du patrimoine. La stratégie de migration incrémentale devient alors plus réaliste.

La promesse est attractive et ses fondations semblent objectivement solides… sur le papier. Cependant, a-t-elle quelque chance de convaincre les principales intéressées de se lancer ? De toute évidence, si le mouvement de transition vers ce type d'architecture se produit (avec ou sans la solution de BIAN), il sera extrêmement lent, pas tant en raison d'obstacles techniques que de la sorte de « révolution mentale » qu'il requiert de la part des équipes informatiques, habituées à un style identique depuis un demi-siècle.

Même au niveau d'une direction générale, l'idée d'abandonner le nœud central de gestion des données bancaires de base au profit d'une vue virtualisée, fédérant différentes sources, risque de susciter un certain malaise… Il faudra pourtant bien en passer par là pour envisager d'entrer dans la prochaine ère de l'industrie financière, avec ses défis de distribution par API, de services enfouis, de plates-formes… et, surtout, d'agilité face aux transformations de plus en plus rapides imposées par les attentes des clients.

mercredi 27 octobre 2021

L'IA bientôt dans tous les logiciels

Mage
Bien qu'omniprésente autour de nous, l'intelligence artificielle reste cloisonnée à des fonctions dédiées, relativement autonomes. Cependant, une tendance semble émerger actuellement qui vise à la mettre entre les mains de tous les développeurs de logiciels afin qu'ils en intègrent facilement les opportunités dans leurs projets.

Coup sur coup, deux jeunes pousses positionnées sur ce créneau annoncent des levées de fonds, en phase d'amorçage. Spice AI, fondée par des anciens de GitHub et Microsoft, et Mage, élaborée à partir d'un outil « low-code » originellement conçu pour AirBnB, s'engagent dans des approches légèrement différentes mais portent toutes deux l'ambition d'autoriser l'introduction d'éléments d'intelligence artificielle dans les applications classiques, sans requérir l'acquisition préalable d'une nouvelle expertise.

Pour la première, qui distribue ses briques techniques sous licence libre, l'objectif consiste à offrir des composants prêts à l'emploi de traitement de séries de données temporelles, afin de produire les modèles requis, simplement et collaborativement (donc aussi avec des experts, le cas échéant). Ceux-ci sont ensuite encapsulés dans une coquille générique, déployable sur tout type d'infrastructure (infonuagique ou non) et permettant d'exploiter leurs capacités par l'invocation d'une interface (API) standard.

Pour la seconde, il est plutôt question d'une plate-forme de science des données accessible à des non spécialistes. Une assistance opérationnelle est donc fournie en continu afin de mettre en œuvre les outils d'analyse embarqués (issus du marché ou internes), y compris dans les phases d'entraînement, qui restituent une estimation de la performance et aident ainsi à sélectionner la ou les solutions les plus pertinentes, jusqu'à leur insertion finale dans l'application cible, là encore par l'intermédiaire d'API.

Accueil Mage

L'enjeu est de la plus haute importance. En effet, aujourd'hui, l'IA est généralement abordée comme une discipline indépendante, dont les artefacts sont utilisés en tant que tel ou, au mieux, ajoutés dans des outils sans être réellement intégrés à leur fonctionnement intime. Or la valeur qu'elle promet de délivrer pourrait être décuplée en immergeant ses services au cœur des interactions gérées par les logiciels du quotidien, pour exécuter, par exemple, la prochaine action probable ou le conseil prodigué.

La principale difficulté de ce genre de scénario tient à l'isolation qui s'est établie entre deux catégories de population, les développeurs et les scientifiques des données. Mais il ne s'agit pas seulement d'un silotage organisationnel, leurs méthodes de travail sont également divergentes. En particulier, les premiers n'ont pas la préoccupation qu'ont les seconds, dans la plupart des cas, de suivre la qualité des modèles déployés, les ré-entraîner et les mettre à jour régulièrement, parfois directement en production.

Les nouvelles offres telles que celles de Spice AI et Mage cherchent à résoudre ce problème en éliminant la barrière initiale de l'inclusion de modules d'IA dans les applications « normales ». Elles devraient déclencher une infusion d'intelligence dans les applications de tous les jours. Il restera cependant à faire appréhender aux développeurs auxquels elles s'adressent les contraintes particulières de l'IA dans leurs cycles de projet. À défaut, ils pourraient s'exposer, à terme, à de graves déconvenues.

mardi 26 octobre 2021

Une astuce pour stimuler l'épargne

BMO Harris Bank
Comme toutes les banques de la planète, BMO Harris Bank aimerait convaincre ses clients d'épargner plus, autant par préoccupation pour leur bien-être financier que dans son propre intérêt. Elle a imaginé dans ce but un dispositif qui, derrière ses apparences d'opération marketing triviale, recèle peut-être une piste de réflexion à généraliser…

Au premier abord, en effet, rien de plus banal que ce programme de récompense aux personnes et aux entreprises qui réussissent à mettre de l'argent de côté, à savoir un abondement de 5 dollars pour les particuliers qui ajoutent au moins 200 dollars (nets) à leurs économies ou 10 dollars pour les sociétés qui accroissent leurs dépôts de 500 dollars ou plus, mensuellement, pendant une année à partir de la date d'ouverture de leur compte (y compris si les seuils ne sont pas atteints à toutes les échéances).

La dimension économique n'est pas plus renversante. Certes, les sommes mises en jeu représentent un sérieux coup de pouce au taux d'intérêt nominal du produit (0,01%), mais, rapportées à l'ensemble des encours et aux versements habituellement réalisés, même dynamisés par la promotion (dans une proportion qui, de surcroît, a été préalablement estimée à l'occasion d'une expérience pilote), il ne fait aucun doute que la banque maîtrise totalement son risque et n'engage pas là un investissement significatif.

Quel est le point de vue des bénéficiaires potentiels ? Une première réponse réside dans les résultats obtenus lors du test préliminaire, qui a vu une multiplication par quatre des dépôts de plus de 200 dollars effectués sur les comptes individuels, déclencheurs de l'éligibilité aux primes. Le montant de celles-ci, même faible, semble donc bien agir comme une incitation à épargner. L'équilibre entre le coût vraisemblablement modéré de mise en œuvre et cette progression justifie du même coup la démarche de BMO.

BMO Harris Bank – Savings Builder Account

S'il ressemble, en surface, aux tactiques classiques de conquête des banques, passant généralement par un taux avantageux durant quelque mois, le système concocté par la filiale aux États-Unis du groupe canadien s'en distingue par plusieurs aspects, qui méritent un examen plus attentif. En premier lieu, les bonus promis sont exprimés en dollars sonnants et trébuchants et non en pourcentage, qui ne représente rien de concret pour une bonne partie de la population. L''attractivité s'en trouve démultipliée.

Deuxième caractéristique importante, la méthode retenue vise à favoriser les transactions régulières sur le compte et non à encourager à placer un maximum d'argent pour la période de promotion, quitte à en rechercher une autre quand celle-ci s'achève. L'objectif consiste à stimuler un comportement sur le long terme – et on peut espérer qu'après un an, il soit véritablement ancré – toujours au bénéfice autant de l'épargnant, qui prend ainsi soin de son avenir, que de l'établissement, qui consolidera sa fidélité.

Enfin, dernière clé, essentielle, le principe de fonctionnement repose sur un mécanisme de défi à relever, en quelque sorte un jeu assorti d'une récompense, ce qui constitue un puissant levier d'engagement des utilisateurs, à la fois dans l'exécution des gestes qui leurs sont suggérés ou demandés, mais également dans leur apprentissage et leur mémorisation profonde, idéalement jusqu'à les transformer en réflexes du quotidien.

En synthèse, BMO invente, volontairement ou pas (qui sait ?), une alternative aux modèles de rémunération traditionnels des dépôts bancaires. De fait, elle substitue aux taux d'intérêt, opaques et difficiles à appréhender pour beaucoup, une approche un peu ludique, donc captivante, sur laquelle elle contrôle à son gré les facteurs déclencheurs, afin soit d'aider ses clients à mieux gérer leurs finances personnelles, soit, motivation plus mercantile, de les orienter vers les produits et services qu'elle souhaite privilégier.

lundi 25 octobre 2021

Arkéa met un prix sur la RSE

Crédit Mutuel Arkéa
Les entreprises ont peu à peu appris à intégrer dans (ou, plus souvent, aux côtés de) leurs rapports d'activité les dimensions de responsabilité sociétale et environnementale (RSE). Faute de référence comparative, elles restent pourtant relativement opaques. Arkéa adopte [PDF] donc un modèle de conversion en euros pour une meilleure transparence.

Si les sociétés les plus importantes ont depuis plusieurs années une obligation déclarative, il reste toujours très difficile d'interpréter la qualité des efforts consentis quand sont évoqués des émissions de gaz à effet de serre en équivalents de tonnes de CO2, quand sont décrites en termes généraux les précautions prises vis-à-vis des conditions de travail chez les sous-traitants ou quand sont listées les démarches de recyclage, pour ne retenir que ces quelques exemples : sont-ils vraiment significatifs ?

Le meilleur moyen d'étalonner ces évaluations par rapport aux résultats financiers consiste naturellement à les formuler dans une même unité, monétaire. C'est donc l'objectif que s'est fixé Arkéa : rapporter chaque élément de son engagement sous son angle économique, de manière aussi objective et précise que possible, afin d'établir une vision cohérente et globale de l'impact de ses métiers sur la société et sur la planète. Simple dans son énoncé, le défi s'avère en réalité extrêmement ambitieux.

Pour le relever, la banque a conçu, en collaboration avec le cabinet PwC, une méthodologie ad hoc, destinée à quantifier le « prix » des différents éléments de son rapport RSE, positifs ou négatifs, en couvrant, comme il se doit, sa chaîne de valeur complète, depuis ses fournisseurs jusqu'à ses clients. Avant un déploiement progressif à l'ensemble du groupe, les premiers tests ont d'ailleurs été réalisés sur se branche Entreprises et Institutionnels, avec un accent mis particulièrement sur ces derniers.

Arkéa – Impacts Extra-Financiers

Concrètement, une formule complexe prend en entrée, par exemple, les données d'impact disponibles sur le bénéficiaire d'un crédit (qui, avantage dérivé de la démarche, peut être accompagné dans la préparation de son bilan extra-financier), leur applique un coefficient de valorisation en euros (le coût sur les marchés d'une tonne de CO2, le montant des retombées de la création d'un emploi…), puis en extrait la part imputable à l'institution (la proportion du passif comptable que représente le financement accordé).

Le but de l'opération menée par Arkéa ne se réduit pas à l'affichage d'une situation ajustée des enjeux de RSE, indispensable à une époque où ceux-ci deviennent critiques pour l'avenir de l'humanité. Il est également question d'action au quotidien. En partageant largement ses critères de mesure dans son organisation, elle vise notamment à insinuer une prise en compte des impacts dans les décisions et les projets courants, à partir d'indicateurs fiables, favorisant les optimisations les plus percutantes.

Le dispositif n'en est qu'à ses balbutiements et il sera constamment amélioré au fil des usages, en profitant, en particulier, de l'accès à des données supplémentaires. Il invite surtout à rêver d'une généralisation qui permettrait de décliner ses bienfaits dans toutes les entreprises. Arkéa mentionne la transparence et l'ouverture de son approche : serait-il alors envisageable qu'elle partage ses travaux initiaux avec le reste du monde, voire qu'elle initie un processus de co-construction pour les prochaines étapes ?

dimanche 24 octobre 2021

BBVA invente une néo-banque pour l'Italie

BBVA Italia
En pleine vague de désengagement, marquée par sa sortie du Chili et des États-Unis, le groupe espagnol BBVA créait il y a quelques jours la surprise avec son débarquement en Italie. Son offre, capable de rivaliser sérieusement avec les néo-banques les plus abouties, illustre son impressionnante capacité à appréhender les enjeux « digitaux ».

Certes, ses origines lui procurent des possibilités et des moyens que ne possèdent pas la plupart des startups. Il n'en reste pas moins que, dès son démarrage, la petite dernière embarque une palette de produits et services qui, par son alignement avec les besoins des consommateurs de notre époque, la place d'emblée loin devant toutes les aventures 100% en ligne tentées par les établissements traditionnels et une bonne partie de celles émanant de nouveaux entrants, stars internationales du domaine comprises.

Commençons par les bases. Première promesse, le processus d'enrôlement, entièrement à distance, bien sûr, prend à peine plus de 5 minutes. Le socle gratuit comprend un compte courant et sa carte de débit (muette, ses informations et le CVV, dynamique, sont accessibles dans l'application mobile), les virements SEPA instantanés jusqu'à 1 000 euros (6 000 euros dans leur version ordinaire) et les retraits dans l'ensemble de la zone euro, au-dessus de 100 euros (une restriction originale afin de limiter les abus).

Parmi les petits plus, citons l'équipe locale prête à répondre aux questions des clients, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, au téléphone ou via la messagerie privée intégrée. Ou encore le programme de parrainage, probablement indispensable pour le démarrage. Et, en vue d'encourager son utilisation comme compte principal, la carte de BBVA Italie inclut pendant un an un mécanisme de récompense (« cashback »), à hauteur de 1% des dépenses réalisées (plafonnées à 250 euros), avec un accélérateur le premier mois.

Accueil BBVA Italia

Vient ensuite une collection de services qui, aussi utiles soient-ils, ne sont, à ce jour, proposés que par des acteurs tiers spécialisés ou, à tout le moins, ne sont jamais tous rassemblés au sein d'une même solution. Il s'agit d'abord des options d'épargne. L'utilisateur est invité à constituer jusqu'à 3 « tirelires numériques », qu'il associe à ses projets d'avenir et dont il va pouvoir programmer l'alimentation, selon 3 modes distincts (les classiques arrondi des achats, fraction du salaire et seuil sur le solde du compte).

Par ailleurs, dans le registre du financement, BBVA Italie incorpore un module de paiement fractionné. Afin d'en profiter, il suffit de sélectionner, dans l'historique des 90 jours précédents, un maximum de 5 transactions éligibles (supérieures à 50 euros, pour un total qui ne peut dépasser 1 500 euros) puis de choisir les conditions souhaitées pour obtenir instantanément leur échelonnement sur 3, 5 ou 10 mensualités, facturé à un prix modéré, totalement transparent. Enfin, les clients ayant domicilié leurs revenus disposeront également, en quelques gestes, d'une facilité d'avance de salaire.

Derrière l'apparente banalité du lancement d'une offre « digitale », BBVA réussit l'exploit de redéfinir ce que devrait être une banque en 2021, combinant dans une plate-forme homogène et cohérente l'état de l'art du secteur, jusqu'à présent dispersé dans des outils autonomes, au service des consommateurs et de leurs attentes d'accompagnement financier. Il lui manque encore une dimension de conseil personnalisé, mais on peut espérer qu'elle ne tardera pas à faire son apparition. Il reste désormais à voir où l'institution espagnole conduit sa stratégie : l'envahissement de l'Europe est-il en vue ?

samedi 23 octobre 2021

L'agonie du PFM de première génération

LaFinBox
Lancée en 2015 avec Budget Insight puis redynamisée en 2018, en solo, par Swiss Life, LaFinBox devait incarner le conseiller patrimonial virtuel de monsieur-tout-le-monde. Les (belles) promesses n'ont malheureusement jamais été tenues et ce qui n'était en réalité resté qu'un agrégateur de comptes fermera ses portes à la fin du mois.

Lors de ses débuts, la plate-forme tentait de se distinguer de ses concurrentes par l'intégration au sein d'une même vue de l'ensemble des avoirs de l'utilisateur, à savoir ses disponibilités, son épargne fixe, ses portefeuilles d'investissement…, sur laquelle elle déclinait des fonctions classiques, de catégorisation, d'analyse historique, de suivi des évolutions, d'alertes paramétrables… ainsi qu'un diagnostic financier portant sur la performance, la diversification et le niveau de risque des placements réalisés.

Ces quelques caractéristiques ont apparemment conquis 70 000 clients (dont beaucoup n'étaient probablement plus actifs), lesquels étaient invités à utiliser les résultats produits soit pour optimiser eux-mêmes leur gestion soit pour les partager avec leur conseiller personnel, cette dernière otpion offrant, incidemment, une piste de modèle économique pour la solution. Naturellement, ce faible nombre d'adeptes s'avère largement insuffisant pour assurer la viabilité du service, ce qui justifie logiquement son arrêt.

Un tel désamour ne constitue guère une surprise. Au vu des conditions dans lesquelles LaFinBox a été conçue et s'est développée, Swiss Life aurait pu prédire l'échec et aurait dû arrêter les frais depuis longtemps. En effet, les pionniers ont démontré au fil de la décennie écoulée que la proposition de valeur de l'agrégation de comptes « simple » ne trouvait pas d'écho durable et solide parmi les consommateurs. Les applications qui se contentent de présenter la situation financière relèvent du pur gadget, sans intérêt.

LaFinBox

Il est vrai que l'ambition évoquée au moment de l'injection de 10 millions d'euros dans le projet n'était pas celle-ci. Quelque chose a déraillé entre temps (et, d'ailleurs, où a donc été englouti l'argent investi ?). Car la cible initiale, qui consistait à créer une sorte de coach « digital » de proximité, un peu équivalent à un banquier privé du pauvre (ou du « moins nanti »), avait (et a toujours) un avenir. Elle constitue même vraisemblablement la seule voie de succès possible pour la gestion de finances personnelles.

Compléter l'approche passive historique avec des recommandations opérationnelles, personnalisées, contextuelles, activables le plus simplement possible, concernant aussi bien les dépenses du quotidien, les problématiques d'endettement ou les meilleurs moyens de faire fructifier ses économies, voilà le genre de bénéfices substantiels qui est susceptible de convaincre quelqu'un de recourir à une application dédiée, indépendante des outils déjà relativement riches mis à sa disposition par sa (ou ses) banque(s).

La fin est d'autant plus triste pour LaFinBox, en comparaison d'autres mésaventures du même acabit, que sa vision d'origine était parfaitement alignée avec les besoins de sa cible potentielle et qu'elle reste totalement d'actualité à ce jour. Hélas, elle a certainement dû paraitre trop abstraite et nébuleuse à quelques décideurs, qui l'ont tuée, sciemment, en l'empêchant de s'épanouir. Mais, alors, pour quelles raisons ont-ils attendu si longtemps avant de mettre un terme à une agonie entamée de longue date ?

vendredi 22 octobre 2021

Le retour du partage de locaux professionnels

ABN AMRO
Quelques banques (Banque Populaire, entre autres) ont au fil des ans expérimenté le partage de leurs bureaux, sous différents formats et… sans grand succès. Aujourd'hui, la crise sanitaire et le télétravail qu'elle a popularisé ont profondément changé les modes de travail, inspirant à la néerlandaise ABN AMRO une nouvelle approche de la flexibilité.

À l'origine, le problème à résoudre était principalement la baisse de fréquentation des agences et la solution imaginée consistait à en ouvrir l'accès aux personnes recherchant un bureau de passage dans un lieu pratique. En la matière, la situation s'est aggravée, les périodes de maintien à domicile laissant inoccupée une proportion conséquente des locaux professionnels. En outre, se pose dorénavant la question des employés qui sont enjoints de rester chez eux mais n'y trouvent pas des conditions idéales.

Conçue par les équipes d'innovation d'ABN AMRO, la plate-forme Green Desk, destinée (d'abord ?) aux grandes entreprises, vise à répondre à ces enjeux d'une manière (partiellement) inédite. Son système de réservation met à la disposition des collaborateurs une vaste sélection d'espaces, soigneusement filtrés (sur des critères multiples, de sécurité, de respect de l'environnement, de proximité des transports publics…), comprenant à la fois, c'est son originalité, des lieux de « co-working » commerciaux et des positions nomades dans les immeubles des sociétés participantes elles-mêmes.

ABN AMRO – Green Desk

Pour l'utilisateur final, rien d'extraordinaire. Une application web et mobile lui permet, après avoir indiqué ses desiderata (localisation, date et heure…), de découvrir une liste d'options disponibles avec tous les détails nécessaires (adresse, photo, moyens d'accès, contact, équipements…). Il lui suffit alors de valider son choix et le tour est joué. Pour la phase pilote, seules les agglomérations d'Amsterdam, La Haye, Haarlem, Leiden, Rotterdam et Utrecht sont couvertes, mais d'autres seront ajoutées ultérieurement.

L'ambition est de procurer plus de latitude aux salariés, en aval des directives émises par la plupart des organisations, qui imposent en moyenne deux ou trois jours par semaine de présence dans leurs bureaux « officiels » et le reste en télétravail. Entre ceux qui n'ont pas chez eux la possibilité d'une installation optimale et les besoins occasionnels de se retrouver avec des collègues, en petit groupe, ou de tenir une réunion impromptue, il existe une marge de manœuvre dans laquelle Green Desk veut s'insinuer.

La solution est actuellement testée par ABN AMRO, bien sûr, mais aussi par le cabinet de conseil PwC, dont le métier se prête particulièrement à sa proposition de valeur. À long terme, la banque ne donne aucune indication sur l'avenir qu'elle pourrait réserver à son initiative mais il est probable que, en cas de succès, elle en fasse une entité indépendante. Celle-ci pourrait se consacrer pleinement aux innombrables dimensions de la transformation des modes de travail qui affecte le secteur financier… et les autres.

jeudi 21 octobre 2021

Virgin Money agit pour la RSE des entreprises

Virgin Money
Petit à petit, les banques intègrent dans leur périmètre quelques outils destinés à répondre aux préoccupations environnementales et sociétales de leurs clients. Cependant, pour l'instant, ils s'adressent surtout au grand public. Quid des entreprises ? Au Royaume-Uni, Virgin Money propose à ces dernières une solution pragmatique et concrète.

Conçue et développée en collaboration avec la fondation Future-Fit, une association qui se consacre à la transition vers une économie responsable, et Life Moments, une jeune pousse technologique qui élabore des solutions d'accompagnement vers le bien-être financier, l'application mobile « Sustainable Business Coach » fournit aux dirigeants sensibles aux enjeux du développement durable une sorte d'assistant virtuel capable de les aider à définir et atteindre des objectifs réalistes et pertinents en la matière.

Dans un premier temps, l'utilisateur est invité à remplir un questionnaire exhaustif permettant d'établir un bilan de son activité, sur toutes les dimensions à prendre en compte : ressources, opérations, locaux, produits, employés, clients, société…. En un parcours d'une vingtaine de minutes, il va préciser, en fonction de son secteur et de son modèle d'affaires, les domaines sur lesquels doivent porter ses priorités, puis il décrira les actions qu'il a d'ores et déjà mises en place en vue d'optimiser son impact global.

Une fois l'état des lieux finalisé, synthétisé sous la forme d'une jauge de performance, le logiciel élabore un programme d'amélioration personnalisé. Il présente une sélection des cibles jugées les plus urgentes, décomposées chacune en trois recommandations, assorties d'une description complète et détaillée des mesures pratiques à prendre (selon les cas, il s'agit même d'un véritable guide de déploiement). Dès que l'une d'elles est engagée, la situation est mise à jour et de nouvelles étapes sont ajoutées au plan.

Virgin Money – Change your business for good

Derrière son extrême simplicité (qui mériterait toutefois quelques raffinements, par exemple pour éviter des questions sans objet selon les réponses précédentes ou pour déclarer l'inapplicabilité de certaines préconisations), la plate-forme de Virgin Money apporte une valeur déterminante aux entrepreneurs qui, aussi convaincus soient-ils de l'importance de la RSE, se sentent souvent démunis, ne sachant par quel bout prendre le sujet et s'inquiétant, par ignorance, de la difficulté et des coûts d'une initiative.

Avec cette application, il devient en effet très facile de comprendre comment progresser vers la cible (lointaine) idéale du « net zéro », y compris à travers des décisions et des actes élémentaires, peu contraignants, et de suivre les avancées accomplies au fil du temps. Le tout en appréhendant une perspective à 360°, qui couvre autant les risques environnementaux que la qualité de vie des collaborateurs, les bénéfices pour les clients et les éventuels dangers pour la société des produits et services distribués.

Pour Virgin Money, le dispositif représente essentiellement un effort philanthropique, relativement indépendant de son métier, ajoutant un aspect positif à son image. En fait, son seul lien avec la banque est la promesse aux entreprises obtenant un score honorable d'accéder à des prêts à conditions avantageuses, ce qui devrait constituer une incitation à l'utiliser. Il paraît pourtant nettement plus utile que les approches existantes à l'intention des particuliers, qui se contentent généralement d'estimations automatisées d'empreinte carbone, sans la moindre tentative d'infléchir les comportements.

mercredi 20 octobre 2021

Le délicat équilibre de la personnalisation

Gartner
Les masses de données produites dans notre monde contemporain combinées aux techniques d'analyse désormais disponibles rendent possibles des niveaux de personnalisation des services jusqu'à présent inimaginables. Faut-il pour autant les exploiter sans réserve ? Alex de Fursac Gash (Gartner) pose les limites d'un usage raisonnable.

La question est rarement abordée. Dans tous les domaines, le raisonnement qui prévaut généralement consiste à collecter un maximum d'informations sur les clients et les utiliser (à outrance) dans le but d'atteindre le nirvana supposé : une interaction totalement individualisée. Or une telle approche n'est pas nécessairement optimale. Selon une étude menée par Gartner auprès d'un échantillon de consommateurs, l'excès est contre-productif, engendrant un sentiment de viol d'intimité et une tentation de rejet.

Face à ce phénomène (peut-être à relier au syndrome de la singularité technologique chez les robots et les assistants virtuels), la recherche d'un équilibre idéal entre performance et précision du « profilage » de la cible devient la recommandation logique. De manière générique, Alex établit une règle empirique : il ne devrait jamais être nécessaire de cumuler plus de 3 dimensions de données sur les clients. Celle-ci pourra servir de point de départ d'une réflexion… mais elle mériterait d'être approfondie.

En premier lieu, le contexte est un facteur important à intégrer. Les observations prises en référence concernent l'univers du marketing, dans lequel les seuils de tolérance des destinataires de messages sont probablement assez bas par rapport à, par exemple, une relation bancaire. D'autre part, et ce point est souligné par Alex, la nature des artefacts affectés par la personnalisation agit sur son acceptabilité : plus le résultat est perçu comme utile, plus le recours à des informations sensibles paraît légitime.

Gartner – Personalization

La recette à mettre en œuvre, qui pourrait certainement se traduire sous le forme d'une équation, devrait donc s'appuyer sur le rapport entre la valeur effective (ou, peut-être plus prosaïquement, perçue ?) délivrée et la richesse de connaissance introduite dans la personnalisation, qu'il faudrait encore ajuster en fonction du consentement explicite (variable entre, disons, une tolérance aux messages d'information de l'entreprise et le téléchargement volontaire d'une application de recommandations opérationnelles).

Un conseil, valide en toutes circonstances, que formule Alex afin de trouver le dosage parfait est d'éviter à tout prix d'entamer le chemin par l'exploration des données, comme l'encouragent souvent (parfois inconsciemment) les spécialistes de l'analyse associés à ce type de projet, mais plutôt de s'interroger en priorité sur le besoin à combler, l'attente à satisfaire… puis d'identifier la cible concernée et, enfin, de déterminer comment délimiter celle-ci avec suffisamment de finesse pour une efficacité satisfaisante.

Il n'est pas question de prétendre que l'hyper-personnalisation ne mérite pas de s'y intéresser (ce qui serait surprenant de la part de Gartner, qui la positionne régulièrement dans ses radars d'innovation). En revanche, il s'agit clairement d'un terrain dangereux, en particulier pour la confiance des clients envers leurs fournisseurs. Quelques acteurs ont déjà pu le vérifier à leurs dépens, vouloir profiter à mauvais escient des options de « profilage » les plus puissantes conduit facilement à des échecs monumentaux. 

mardi 19 octobre 2021

Paykrom automatise le recouvrement

Paykrom
Moins célèbre que certaines de ses concurrentes, la néo-banque (*) française pour les entreprises et professionnels Paykrom n'en développe pas moins une offre originale et digne d'intérêt. En témoigne une des toutes dernières additions à sa panoplie, aussi essentielle qu'inédite (semble-t-il) : le recouvrement « automatique » de facture.

Les études et la presse nous le ressassent en permanence : les délais de paiement constituent un des pires cauchemars des entreprises, en particulier les plus petites, pour lesquelles les retards abusifs sont fréquemment synonymes de clé sous la porte. Or de nombreux incidents ne sont pas dus, comme on l'imagine a priori, à des difficultés de trésorerie ou à des comportements délinquants, mais plutôt à des oublis et étourderies, de règlement en temps et en heure par le débiteur et/ou de relance par le créancier.

C'est donc à ces catégories d'acteurs, de bonne foi, que s'adresse la nouvelle solution déployée par Paykrom, en complément de ses services, plus classiques, de préparation et d'émission des factures ainsi que d'envoi de rappels (en cas de besoin). En l'occurrence, l'utilisateur a la possibilité, en quelques clics, de joindre au document un mandat de règlement pour le montant et l'échéance correspondants. Une fois celui-ci signé par le destinataire, le transfert est exécuté à la date convenue, sans autre action.

Le dispositif s'adapte en outre aux conditions contractuelles complexes. Par exemple, les cas de versement en plusieurs fois (typiquement sur des modèles par abonnement ou lorsque l'opération prévoit un acompte à la commande et le solde à la livraison, avec d'éventuelles étapes intermédiaires) sont également pris en compte automatiquement, toujours dans le strict respect des cadencements décidés par les deux parties.

Recouvrement automatique Paykrom

La fonction apporte en premier lieu une simplification administrative, au fournisseur comme à son client. Dans le même mouvement, les factures et leur règlement sont enregistrés. Plus d'inquiétude pour la caisse, plus d'alerte à gérer, plus aucun risque d'erreur… Pour le premier, les écritures comptables sont même immédiatement intégrées, ce qui lui donne plus de visibilité sur sa situation prévisionnelle. Cerise sur le gâteau, le mandat de prélèvement, signé par voie électronique, offre une garantie de paiement.

La prise en charge du recouvrement fait partie de ces innombrables petits plus d'assistance que les banques peuvent aisément apporter aux TPE et PME afin de leur faciliter le quotidien et leur permettre de se concentrer sur leur métier, mais auxquels, en dépit de leur évidence, elles ne pensent, pas tant elles sont focalisées sur leurs catalogues de produits financiers. Elles doivent pourtant prendre conscience que la révolution « digitale » en cours, par les opportunités qu'elle libère, exige de plus en plus qu'elles assument un rôle de conseil et d'accompagnement au périmètre étendu.

Comme toujours, la FinTech montre la voie : les établissements historiques suivront-ils ?

lundi 18 octobre 2021

Tesla bascule dans l'assurance en temps réel

Tesla
Engagée depuis longtemps dans la création d'un produit d'assurance mieux adapté aux particularités de ses véhicules et après ses premiers pas autonomes en Californie, Tesla franchit désormais une étape supplémentaire avec le lancement récent d'une nouvelle couverture, d'abord au Texas, entièrement basée sur l'analyse des usages.

Naturellement, la tarification ajustée en fonction du comportement du conducteur n'a rien de très original en 2021. En revanche, ce qu'apporte de plus le constructeur américain est une vision de l'assurance totalement dégagée de ses contraintes traditionnelles. En particulier, il n'est absolument plus question d'exploiter des informations historiques pour juger l'automobiliste, seules sa situation courante, ses préférences et ses actions du moment, surveillées au jour le jour, déterminent le montant de ses primes.

Un premier avantage émerge lors de la souscription, qui ne requiert plus de prouver ses antécédents, ni même les détails personnels habituels (âge, statut marital, sexe… fréquemment utilisés). Le demandeur n'a plus qu'à préciser le modèle de son véhicule (toute la gamme Tesla est prise en charge), son lieu de résidence, son kilométrage moyen et les options qu'il souhaite adjoindre à la garantie responsabilité civile obligatoire (protections complémentaires, limites d'indemnisation relevées, franchise réduite…).

À ces critères élémentaires, s'ajoute un score de sécurité (Safety Score) permettant de fixer le prix mensuel définitif. Établi initialement à une valeur moyenne, il est évalué chaque mois (tout comme le kilométrage réel) sur la base des mesures effectuées en permanence grâce aux capteurs intégrés : taux de retrait de la fonction « auto-pilote », (déclenché par une inattention continue), freinages brusques et virages agressifs, nombres d'alertes aux collisions frontales et de cas de distance de sécurité insuffisante. Les accidents, du présent comme du passé, n'interviennent pas dans les algorithmes !

Tesla Insurance

En comparaison des solutions concurrentes, Tesla vante l'équipement natif de ses voitures, qui évite à l'acheteur de devoir installer un accessoire afin de profiter de l'assurance contextuelle. Cette caractéristique s'accompagne évidemment de la promesse de ne collecter et conserver (pour une durée prédéterminée) que des données sans localisation géographique, aux fins exclusives de calcul du score de sécurité, écartant notamment toute éventualité de partage ou de commercialisation auprès de tiers.

Au-delà des inévitables débats sur l'individualisation de la protection et de son impact potentiel sur la mutualisation du risque, l'approche de Tesla pointe surtout vers l'avenir du transport. En effet, son objectif semble focalisé sur l'abandon dans ses modèles actuariels des facteurs directement liés au conducteur pour ne conserver que ceux relevant du véhicule et de ses paramètres de fonctionnement. Quoi de plus logique quand on se projette dans un monde de pilote automatique et de déplacement à la demande ?

dimanche 17 octobre 2021

L'hyper-personnalisation dans l'assurance

France FinTech
Ce jeudi 14 octobre 2021, l'association France FinTech organisait la sixième édition de son événement FinTech R:Evolution. Une des premières discussions de cette journée portait sur le sujet éminemment sensible dans le secteur de l'assurance de la compatibilité de l'hyper-personnalisation avec le principe fondamental de mutualisation.

Le danger est évident. La technologie disponible aujourd'hui, notamment dans l'analyse de données, autorise une qualification toujours plus fine des risques, grâce à laquelle les compagnies peuvent ajuster les conditions de leurs contrats (presque) selon la situation et le comportement de chaque personne ou entreprise. Mais cette individualisation va à l'encontre de la nature statistique de l'assurance, qui garantit sa viabilité par la massification : beaucoup payent peu pour les sinistres coûteux de quelques-uns.

En dépit de leurs origines opposées, les deux intervenants du débat, Brune de Linares (directrice des ventes d'Akur8, jeune pousse spécialisée dans l'intelligence artificielle pour la tarification d'assurance) et Didier Bazzocchi (directeur général fraîchement retraité de MMA), convergent rapidement sur une notion d'équilibre optimal, intégrant une différenciation sur des critères dont le client a le contrôle, dans les limites de la réglementation (qui fixe des frontières absolues) et de l'éthique (qui reste subjective).

Un exemple emblématique d'interdit est celui de la moindre incidence des sinistres automobiles des femmes par rapport aux hommes, qui, légalement, ne peut donner lieu à un avantage. Bien sûr, les outils modernes sont capables d'identifier les modèles de conduite des premières puis d'apprendre à les repérer dans l'ensemble de la population et en dériver de la sorte une option de modulation des prix « dé-genrée ». Mais l'utilisation d'un contournement de ce type pourrait ne pas être appréciée des autorités.

Faut-il alors oublier les opportunités les plus avancées de la micro-segmentation des usages et de l'hyper-personnalisation des services ? Pas nécessairement, si on pense à un autre angle pour les aborder. Et Christophe Dandois, co-fondateur de LeoCare, nous fournissait justement un indice dans la séquence suivante de la manifestation, consacrée à l'évolution de la distribution d'assurance. En l'occurrence, il « suffit » d'envisager une proposition de valeur radicalement différente à partir de ces immenses possibilités.

À l'heure où les acteurs les plus avancés misent de plus en plus sur la prévention, non seulement dans le but de réduire les risques couverts et les coûts des dommages indemnisés mais également en vue de stimuler l'engagement des assurés (une des caractéristiques dont se vante LeoCare), voilà un domaine dans lequel la connaissance intime des comportements mériterait d'être exploitée – sinon sans limite du moins avec une certaine latitude – afin de renforcer son efficacité et sa performance globale.

Il s'agirait par exemple de détecter les petits défauts et autres faiblesses de la personne (ou de son environnement, ou du moment…), de manière à lui prodiguer des conseils contextuels précis, idéalement adaptés à ses modes de communication de prédilection (en termes de canal, de ton, de langage, de fréquence…) : un rappel amical de la limitation de vitesse sur la route pour celui qui semble souvent trop pressé, une alerte à une étourdie récidiviste pour lui éviter d'oublier l'alarme de sa maison en partant…

Dans un sens, la question posée initialement dénote un biais fâcheux mais répandu dans l'industrie : les capacités d'analyse de données sont d'abord appréhendées dans la perspective de leur bénéfice pour l'entreprise, même indirectement et/ou inconsciemment, avant de se préoccuper de l'intérêt du client. Or, quand ce dernier est remis au centre des réflexions et des projets, il devient généralement beaucoup plus facile de trouver des solutions aux obstacles qui se dressent et de valoriser les opportunités offertes.

FinTech R:Evolution 2021 – France FinTech

samedi 16 octobre 2021

Singapour centralise la lutte anti-blanchiment

MAS
Afin de renforcer l'efficacité de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, quelques régulateurs ont élaboré des protocoles de partage de données entre institutions. La MAS singapourienne franchira bientôt un pas supplémentaire avec la création d'une plate-forme centralisée… qui soulève quelques questions.

Au premier abord, l'idée coule de source : l'accès à l'information sur les malversations précédemment détectées dans les établissements concurrents représente un puissant levier d'amélioration des dispositifs de protection. Elle est d'autant plus pertinente que, de plus en plus, les criminels essaient d'éviter d'attirer l'attention justement en répartissant leurs activités sur un maximum d'opérateurs distincts. Chacun n'en observant qu'une partie a moins de chances de mesurer la gravité des actes auxquels il participe.

Forte de cette observation, l'Autorité Monétaire Singapourienne a donc initié le projet COSMIC (pour « Collaborative Sharing of ML/TF Information & Cases ») qui verra, en 2023, la naissance d'une sorte de base de données de place des transactions et des acteurs suspects. Conçue et développée conjointement avec les 6 plus grandes banques du pays (DBS, OCBC, UOB, SCB, Citibank et HSBC), elle a vocation à s'ouvrir au reste du marché, son usage devenant progressivement obligatoire sur certains aspects.

Son fonctionnement repose sur le travail existant, strictement réglementé, de dépistage et de signalement des opérations répréhensibles, susceptibles d'être impliquées dans des circuits de blanchiment, de financement du terrorisme ou de développement d'armes de destruction massive. Celles-ci devront simplement être transmises à COSMIC, soit sous forme de déclaration, si le risque est sérieux, soit en consultation, pour confirmation (ou non), si quelques indices engendrent un doute, tout en restant sous le seuil d'alerte.

MAS - COSMIC

Derrière le principe apparemment évident, il existe pourtant un danger qui explique pourquoi, en dépit de ses immenses bénéfices potentiels, aucun autre régulateur dans le monde n'a à ce jour envisagé de créer un tel dispositif : la centralisation de données hautement sensibles, concernant des individus, des organisations et des transactions, dont la moindre fuite pourrait avoir de lourdes conséquences, non seulement en cas de cyberattaque mais également dans une hypothèse d'espionnage entre concurrents.

Bien entendu, la MAS n'ignore par la menace. Elle insiste sur les mécanismes de sécurité qui seront mis en place en vue d'interdire les intrusions et sur les précautions légales qui seront prises afin de limiter l'exploitation des informations aux seules fins de la lutte contre la criminalité et de prévenir toute diffusion indue. Il faut cependant être un peu naïf pour imaginer que ces bonnes intentions suffiront à empêcher un incident.

En réalité, la démarche engagée est peut-être légèrement prématurée. En effet, les récentes avancées technologiques devraient permettre bientôt (?) de proposer une solution au problème posé, sans les risques inhérents. Entre chiffrement homomorphique et calcul sécurisé multi-partie, il devient possible d'envisager l'équivalent de la base de données de COSMIC sans requérir le déplacement des informations, sans nécessiter leur décryptage avant traitement et sans jamais avoir à exposer les éléments sensibles.

vendredi 15 octobre 2021

Et si les clients ne veulent pas du changement ?

Starling Bank
Au Royaume-Uni, la limite de paiement sans contact (unitaire) est passée en cette fin de semaine de 45 à 100 livres sterling. Mais les consommateurs britanniques ont-il été consultés et, surtout, ont-ils vraiment envie de cette évolution ? Rien n'est moins certain. Alors Starling Bank leur donnera le choix de fixer leur propre plafond.

Ce sera une nouvelle initiative de la catégorie « ces petits détails de l'attention au client qui font la différence » à porter à l'actif de la jeune pousse. La décision de relever le montant maximal des transactions ayant été prise unilatéralement par les autorités, elle s'est en effet posé la question qui aurait probablement dû être envisagée en amont : quel est l'avis des porteurs de cartes ? A priori, il n'ont jamais exprimé explicitement une telle attente et aucun signe tangible ne montre un besoin implicite en la matière.

Au contraire, quand les équipes de Starling Bank se sont penchées sur le sujet, elles ont d'abord rapidement constaté que, dans leur immense majorité, ses clients ne gagneraient rien au changement, les opérations susceptibles d'être concernées (entre 45 et 100 livres, donc) étant relativement rares. Par ailleurs, quand ils sont interrogés, ils affirment généralement se satisfaire des conditions de fonctionnement actuelles. En fait, il s'avère qu'ils sont plus nombreux à vouloir abaisser la limite que l'augmenter.

C'est que, en dépit de risques réels faibles, de messages réguliers de réassurance et de mécanismes de protection rigoureux, les craintes d'encaissements frauduleux continuent à inquiéter et encouragent une certaine prudence. Il faut en outre désormais ajouter au paysage la forte croissance des porte-monnaie mobiles (Apple Pay ou Google Pay), dont les systèmes d'authentification intégrés permettent de s'affranchir de toute contrainte, en totale sécurité, et qui fournissent une alternative optimale à la carte.

Starling Bank – How to set a contactless payment limit?

Forte de ces observations (et de ses convictions intimes), Starling Bank déploie donc aujourd'hui, vendredi 15 octobre, le jour même de l'entrée en vigueur des nouvelles règles, une option de personnalisation des plafonds au sein de son application mobile. Les personnes qui le souhaitent pourront alors, d'un geste du doigt, ajuster le niveau selon leurs préférences (par incrément de dix livres), voire bloquer entièrement l'interface sans contact de leur carte, en ramenant simplement le curseur à zéro.

La démarche peut paraître anodine, d'autant que la complexité technique de sa mise en œuvre est modérée dans un contexte où la configuration des caractéristiques des moyens de paiement est déjà présente, mais elle tire potentiellement une réflexion profonde sur l'attitude des entreprises – et plus précisément leur passivité – vis-à-vis d'événements externes. Combien, y compris parmi celles qui se vantent volontiers d'être « centrées » sur leurs clients, s'interrogent sur leurs conséquences et vérifient qu'ils vont dans le bon sens ou, à défaut, explorent des solutions afin de mitiger leurs inconvénients ?

Notons, pour conclure, qu'une des banques historiques concurrentes de Starling, peut-être à la suite de son annonce, semble avoir pris conscience de l'enjeu… trop tard, puisqu'elle promet d'offrir la même capacité de paramétrage… sous peu.

jeudi 14 octobre 2021

Bank of America personnalise les paiements B2C

Bank of America
Aujourd'hui, les émetteurs de paiements en volume à destination des consommateurs (organismes publics, grandes entreprises, compagnies d'assurance…) imposent leur instrument de prédilection, sans choix possible. Avec sa solution « Recipient Select », Bank of America leur propose désormais d'accepter les préférences des bénéficiaires.

L'idée émerge logiquement de la convergence de plusieurs facteurs. D'une part, les moyens de paiement se multiplient et chaque personne tend à privilégier l'un ou l'autre pour tel ou tel usage. D'autre part, dans le monde moderne, les habitudes évoluent et l'adaptation du moindre service aux habitudes et aux goûts individuels devient la norme. Enfin, bien sûr, les technologies disponibles aujourd'hui rendent possible de se conformer à de telles exigences sans induire de complications insupportables.

La réponse de Bank of America, mise à la disposition de ses clients « corporate », consiste donc en un portail où les destinataires des règlements, domestiques et internationaux, sont simplement invités à indiquer leur support de prédilection. Pour son lancement, « Recipient Select » offre une demie douzaine d'options, parmi lesquelles figurent par exemple, outre le virement interbancaire et le chèque, les transferts vers les porte-monnaie virtuels de Zelle et de Paypal. D'autres seront ajoutés au fil du temps.

La promesse de valeur aux entreprises ciblées est claire, entre la création d'une expérience personnalisée inédite pour leurs utilisateurs (en espérant toutefois que des facilités d'enregistrement permanent soient prévues, en particulier pour les opérations récurrentes) et la délégation de la gestion des détails de paiement à un spécialiste, qui devrait également contribuer à réduire les risques d'erreur et les incidents (notamment à travers l'introduction d'une validation préalable des informations fournies).

Bank of America – Recipient Select

Cependant, la banque n'est peut-être pas totalement désintéressée dans sa démarche, au-delà même de la facturation directe du service (le cas échéant). En effet, ses interactions avec les consommateurs lors de leur réception de fonds lui procurent une occasion incomparable de prise de contact et d'initiation d'une relation. La plate-forme mise en place peut ainsi représenter un formidable outil de conquête auprès d'une vaste population quasiment captive, dans un moment potentiellement favorable.

Avec cette innovation, Bank of America développe un moyen intéressant de s'approprier une activité jusqu'ici invisible, sur laquelle non seulement elle possède une légitimité incontestable mais elle se trouve aussi en position d'apporter un bénéfice tangible à toutes les parties prenantes, elle-même comprise, sous un angle relativement original (en l'occurrence l'externalisation pour les clients d'une fonction administrative, leur permettant de déployer un nouveau service). Le cas est suffisamment rare pour être souligné !

mercredi 13 octobre 2021

L'éducation financière en berne

BBVA
Dans l'univers « digital » moderne, les jeunes générations appréhendent l'information d'une manière totalement différente de celle qu'ont connue leurs aînés. Préférant les réseaux sociaux et leurs influenceurs aux médias et canaux traditionnels, leurs premiers pas avec les produits financiers ne prennent pas toujours une direction recommandable.

Le phénomène touche tous les domaines. L'impression d'une relation de pseudo-intimité avec des individus considérés comme des pairs, par proximité d'âge ou de préoccupations, par l'adoption d'un langage et de procédés familiers, induit une bascule généralisée des mécanismes de confiance vers ces quelques vedettes de YouTube, de TikTok, d'Instagram, de Facebook… au détriment des sources habituelles de conseil que sont la famille et les amis ou encore les acteurs institutionnels de toutes sortes.

Naturellement, le secteur financier est directement concerné par la tendance. Les fidèles des réseaux sociaux sont à l'affût d'explications et de recommandations, tandis que les experts auto-proclamés, parfois grassement rémunérés, ne manquent pas pour répondre à leurs attentes. Des mots-dièses tels que #FinTok, #investing ou #cryptocurrency attirent des millions (voire des milliards) de messages et de commentaires. Mais ces pratiques inquiètent car le sujet est sensible et les excès se révèlent potentiellement dangereux.

Ainsi, l'investissement constitue une des thématiques les plus prisées dans les conversations. Or les suggestions émises par les « finfluenceurs », même quand elles visent des produits éminemment hasardeux, ne s'accompagnent quasiment jamais des réserves et avertissements d'usage, et aucune précaution n'est prise quant à la vérification du niveau de connaissance de l'audience atteinte, qui comporte autant de personnes possédant quelques notions de base que de néophytes absolus.

BBVA – Finfluencers

Désormais, aux quatre coins de la planète (en Espagne, au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande, en Australie…), les régulateurs s'éveillent aux risques. Dans un premier temps, ils cherchent surtout à mettre en garde les consommateurs et leur rappellent donc quelques règles élémentaires de prudence. L'approche préventive n'exclut toutefois pas une surveillance renforcée, notamment sur quelques débordements légaux manifestes, entraînant également une sensibilisation des plates-formes elles-mêmes.

La situation devrait aussi interpeller l'industrie, sur sa faillite en matière d'éducation financière. Située en première ligne, surtout sur les instruments les plus complexes, elle porte une importante part de responsabilité si elle laisse les réseaux sociaux devenir la première source d'information de sa clientèle. Car il s'agit hélas d'un volet de ses métiers qu'elle néglige volontiers. Si, historiquement, ce sont les conseillers qui en assumaient la charge, la révolution « digitale » l'a en général entièrement oublié et les évolutions des modes d'apprentissage des jeunes rendent caducs les dernières timides tentatives.