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C'est pas mon idée !

mardi 12 mai 2020

Retour sur la débâcle de Bó

Bó
Au début de ce mois de mai, à l'occasion de la présentation de ses résultats trimestriels, le groupe britannique RBS annonçait la fermeture de , sa réponse à la concurrence des néo-banques, à peine plus de 5 mois après son lancement officiel. Ce qui aurait pu être une expérimentation utile ne sera finalement qu'un désastre absolu.

Une fois écartées les raisons politiques liées au changement de tête au sommet de l'établissement, la décision de mettre un terme à l'aventure n'est pas très surprenante, puisque la nouvelle enseigne n'est parvenue à conquérir que quelques 11 000 clients, dont une grande partie issue du cercle de proches des collaborateurs de RBS, selon les dires d'Alison Rose, sa directrice générale. En arrière-plan, ce score abyssal dénote de toute évidence un grave problème d'adéquation aux attentes des consommateurs.

D'une certaine manière, l'issue était prévisible. Le principe de Bó consistait à proposer au grand public un compte d'appoint, assorti d'une carte bancaire, destiné à encourager une gestion séparée entre les obligations financières (matérialisées par des prélèvements automatiques sur le compte principal) et les dépenses du quotidien, nécessitant un pilotage de proximité assisté par une application mobile. L'idée n'était pas inintéressante mais elle avait peu de chances de résonner telle quelle chez les clients potentiels.

En remontant le temps et en évitant le syndrome de la prescience, il s'agissait cependant d'une situation parfaite pour organiser un test et valider l'existence d'un marché. S'il faut en croire le discours tenu aujourd'hui, telle était précisément la démarche (agile) envisagée depuis le début, dont l'aboutissement est un abandon rapide, après le constat d'échec sans appel, et un lot d'enseignements et de technologies qui seront réutilisés dans d'autres initiatives (dont Mettle, la nouvelle offre aux PME de RBS).

We're closing Bó

Le récit ne résiste malheureusement pas à l'examen des faits, notamment quand Finextra révèle que le projet Bó a nécessité 18 mois de développement et 100 millions de livres sterling d'investissement. Non seulement ces données paraissent-elles incompatibles, dans l'absolu, avec une logique d'expérimentation mais encore auraient-elles dû alerter les responsables très tôt, s'ils avaient pris la peine d'étalonner leur effort par rapport aux multiples jeunes pousses du Royaume-Uni au modèle comparable.

Comme celui de Finn by Chase l'année dernière, l'arrêt prématuré de Bó souligne l'extraordinaire difficulté pour bien des acteurs traditionnels d'accoucher d'une banque « digitale ». Je soupçonne que leur longue histoire, faite d'extensions successives, la plupart oubliées, les rend structurellement incapables de recréer efficacement, en partant d'une feuille blanche, une autre version d'elles-mêmes, même à échelle réduite. Un tel exercice requiert une culture de bâtisseurs qu'elles ne possèdent simplement pas.

Il subsiste malgré tout un aspect positif à ces déconfitures : il semble que les grands groupes commencent à apprendre à tuer les innovations qui ne produisent pas la valeur attendue. Voilà certainement un progrès important pour éviter les déperditions d'énergie et mieux focaliser l'attention sur les concepts les plus prometteurs. Il faudrait maintenant ancrer l'habitude plus régulièrement, sur des initiatives moins pharaoniques…

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