Free cookie consent management tool by TermsFeed
C'est pas mon idée !

jeudi 31 janvier 2019

Échos du Paris FinTech Forum 2019 (suite)

Paris FinTech Forum
Après une journée marquée par la récurrence de l'inclusion financière, voici quelques instantanés des conférences plénières de la seconde partie du Paris FinTech Forum, au cours de laquelle le même thème, encore régulièrement mentionné, cédait le pas à une autre préoccupation : les relations entre startups et acteurs historiques.

Une première approche en était offerte, dans la domaine de l'assurance, par un échange entre AXA et Ping An, le géant chinois qui, du haut de ses 30 ans d'existence, a conservé des réflexes de jeune pousse, en les adaptant à sa dimension actuelle. Deux indicateurs donnent ainsi une idée de sa particularité : la compagnie emploie 30 000 personnes en recherche et développement, dont 1 000 spécialistes de l'intelligence artificielle, qui produisent ses modèles d'évaluation de risques reposant sur 26 000 variables.

Thomas Buberl voit dans cette réussite une inspiration pour la transformation en cours d'AXA, dont la ligne directrice est de faire de l'assurance un outil d'accompagnement des clients dans leur vie quotidienne et non plus seulement l'entreprise qui rembourse les dommages subis en cas de sinistre. Pourtant, quand il évoque ce qui a été réalisé à ce jour, il s'en tient à des avancées techniques, entre adoption du « cloud », centralisation des données des clients, consolidation des systèmes informatiques…

Insurance 3.0

Le débat sur l'opposition entre innovation et réglementation est également une autre manière d'aborder un conflit latent, dont Kristo Käärmann se faisait le porte-parole, à son habitude. Il adoptait cependant une perspective renversée en citant son combat (et celui de TransferWise, qu'il dirige) pour le besoin de transparence sur les frais cachés dans les transferts de devise (130 milliards par an en Europe, selon l'OCDE), qui devrait (enfin) aboutir, 5 ans après une réaction initiale dédaigneuse de la FCA britannique.

C'est donc la députée européenne Éva Kaïlí qui défendait le principe d'une réglementation qui ne soit pas conçue pour étouffer l'innovation – comme elle l'est fréquemment, de l'aveu de Robert Ophèle (AMF). Elle soulignait, par exemple, les travaux actuels du parlement en vue de définir un cadre homogène pour les bacs à sable. Elle rappelait tout de même la limite à ce que le législateur juge acceptable de la part de nouveaux entrants avec une formule claire : « l'innovation, c'est violer les règles, mais pas la loi ».


Des réflexions similaires émaillaient ensuite la conversation à propos de la gestion de patrimoine et de la gestion d'actifs. Frédéric Janbon, directeur général de BNP Paribas AM, était explicite : la manière dont les portefeuilles sont assemblés évolue profondément, vers l'ultra-personnalisation, sous l'influence conjuguée des changements de comportement des consommateurs et des solutions développées par les « robo-advisors ». En arrière-plan, la nouvelle ère est caractérisée par l'obligation pour tous les acteurs de la chaîne de valeur de placer le client au centre des préoccupations.

Asset and Wealth Management

Le clou de la matinée était certainement la confrontation organisée entre les directeurs généraux de Swift et de Ripple. Là, aucun espoir de réconciliation, même si le dialogue restait cordial. Gottfried Leibbrandt vantait sans relâche les mérites de la plate-forme de Swift – notamment sa dernière évolution « gpi », qui supportera bientôt des interconnexions avec des systèmes concurrents grâce à des API – et assurait que ses clients sont sceptiques quant à la valeur de la blockchain pour les transferts d'argent.

Dans une large mesure, son discours avait néanmoins tendance à confirmer le point de vue de son « adversaire », qui, dès les première minutes avait donné le ton de la session en affirmant que le combat entre Ripple et Swift était réminiscent, pour lui, de la guerre entre Amazon et Walmart à la fin des années 90. Si Brad Garlinghouse défendait bec et ongles son modèle (d'avenir) décentralisé, les deux intervenants finissaient toutefois par se rejoindre sur l'exigence désormais incontournable d'ouverture dans leur activité.

Let's Send the Money

Le thème de l'impact de la FinTech sur la mutation des économies donnait l'occasion de revenir sur l'inclusion financière. Ismail Ahmed, fondateur et PDG de WorldRemit, notait ainsi que la quasi-disparition des espèces dans le quotidien des habitants du Somaliland était un extraordinaire facteur d'autonomisation des femmes. Et Charlotte Hogg, directrice générale de Visa Europe, confirmait avec lui que la « digitalisation » de l'argent permettait de lutter contre l'économie souterraine dans toutes les régions du monde.

Transforming Economies

Le sujet, proche du précédent, de la transformation « digitale », prise sous l'angle triple de la responsabilité, de la diversité et de la collaboration, offrait matière à l'échange le plus vivant du Forum. Frédéric Oudéa affirmait, d'un côté, sa conviction de l'impératif pour la banque d'accompagner et de soutenir activement le développement du continent africain, en invoquant des raisons géopolitiques. D'autre part, il soulignait l'immense défi que représente la prise de conscience que trois quarts des effectifs de Société Générale devraient changer de métier à moyen terme.

À ses côtés, Viola Llewellyn, charismatique présidente d'Ovamba Solutions, expliquait que le principal challenge auquel sa jeune pousse (américaine) est confrontée dans son activité de financement des petites entreprises africaines est de convaincre ses clients potentiels que l'accès au capital n'est pas le domaine exclusif des banques.

Digital Transformation

Au cœur de la thématique des relations entre startups et acteurs établis, la question était posée très directement : après une période d'initiatives semblant relever du théâtre, est-on enfin entré dans un âge de collaborations effectives ? En citant l'exemple de projets concrets avec des RegTech, Wim Mijs (EBF) entamait mal la discussion, si on considère que, dans ce domaine, il est généralement question de rapport (classique) entre un éditeur de logiciel et son client et non d'introduction de nouveaux modèles.

Pour leur part, les deux représentants de la FinTech (Diana Paredes pour Suade et Zach Perret pour Plaid), tout en reconnaissant un progrès certain, restent sceptiques sur la capacité des grands groupes à travailler efficacement avec l'écosystème entrepreneurial. À l'extrême, il s'avère que les tentatives d'approcher les équipes dédiées à l'innovation sont souvent contre-productives, tant ces structures sont, dans de trop nombreux cas, de simples vitrines marketing sans réels moyens de transformer l'organisation.

FinTech and Incumbents

Pour terminer, du panel sur la finance alternative, composé de dirigeants de plates-formes de prêt participatif, nous retiendrons un constat – ces entreprises sont meilleures que les banques au niveau du parcours utilisateur et de l'évaluation du risque et moins performantes sur les taux, selon Olivier Goy (October) – et une promesse – à l'avenir, les clients ne rechercheront plus leur crédit chez un spécialiste, l'offre sera directement intégrée dans une expérience globale, et les institutions traditionnelles auront d'immenses difficultés à s'adapter à cette évolution, selon Christoph Rieche (Iwoca).

Alternative Lending

Prenez note dès aujourd'hui, la prochaine édition du Paris FinTech Forum se déroulera les 28 et 29 janvier 2020 !

mercredi 30 janvier 2019

Ces investisseurs qui ne font pas leur travail

Theranos
Dans le sillage du scandale de Theranos et sa fausse promesse de révolutionner les analyses sanguines, des chercheurs s'inquiètent, selon TechCrunch, d'autres possibles cas similaires dans le secteur florissant de la HealthTech. Le diagnostic révèle en fait des lacunes généralisées dans les écosystèmes d'investissement dans les startups.

Pour des spécialistes tels que le Dr. John Ioannidis, qui avait alerté de longue date sur Theranos, bon nombre des jeunes pousses de la santé, y compris de celles qui opèrent des levées de fonds pharamineuses, sont suspectes, sinon directement suspectées de fraude, car elles ne respectent pas un principe élémentaire de la recherche scientifique : la publication d'études et de résultats soumis à la validation de la communauté. Mais, en arrière-plan, ce sont bien les investisseurs qui sont coupables de négligence…

Or le fléau touche, à un certain degré, tous les domaines d'innovation, même si les dangers qu'il engendre sont probablement moins préoccupants dans la FinTech que dans la médecine et la pharmacie. En effet, quand la logique de sélection de leurs participations par les fonds de capital-risque ne repose plus (ou presque) que sur le critère unique de la qualité de l'équipe fondatrice, la porte est évidemment ouverte à toutes les dérives, de la manipulation malhonnête au simple aveuglement.

Siège de Theranos

Le phénomène semble se répandre de manière inquiétante, notamment autour des thématiques en effervescence, dont la HealthTech et la FinTech (ou la blockchain, pour prendre un exemple extrême), jusqu'à devenir susceptible de générer de véritables bulles financières. Il n'est ainsi plus tout à fait exceptionnel de voir financer des projets sans caractère novateur, sans réel potentiel d'adoption sur le marché ou sans possibilité de modèle économique…, sous le seul prétexte d'une confiance illimitée en une personne.

Theranos, dont la créatrice, Elizabeth Holmes, possédait un charisme exceptionnel, a montré où conduisent ces excès. Certes, la personnalité des porteurs d'un projet est critique pour son succès, mais il faut aussi admettre que toutes les compétences du monde ne pourront pas faire aboutir une mauvaise idée. Et s'il est toujours envisageable d'ajuster le tir sur un concept qui ne « prend » pas, un point de départ bancal est, sinon une garantie d'échec, au moins une perte de temps et un gaspillage de ressources.

Pour les startups qui ne se lancent pas dans un secteur où la revue par les pairs est la norme, la conséquence pour les investisseurs est un impératif de recourir à une expertise du sujet traité, de préférence externe, afin d'éliminer les risques de biais. Et il ne devrait pas s'agir d'une analyse ponctuelle à l'étude initiale du dossier mais bien d'un accompagnement dans toute la phase de croissance. Cette recommandation me paraît triviale… et pourtant, elle n'est apparemment pas appliquée de façon systématique.

mardi 29 janvier 2019

Échos du Paris FinTech Forum 2019

Paris FinTech Forum
La première journée du Paris FinTech Forum 2019 s'achève, l'heure est venue d'en rapporter quelques temps forts (selon moi). Mais, avant d'entrer dans le vif du sujet, soulignons tout de même l'étonnante récurrence du thème de l'inclusion financière, dépassant paiements, blockchain, intelligence artificielle, Brexit… au top des sujets abordés.

La première interview de l'événement donnait d'emblée le ton. Ann Cairns, vice-présidente de Mastercard, estime ainsi que l'identité digitale, sur laquelle l'entreprise cherche à se positionner, est une source d'inclusion financière, car elle constitue le premier facteur d'accès à toutes sortes de services dans le monde moderne. Dans un autre registre, elle rappelait également les efforts engagés pour faciliter le recours des PME africaines au micro-crédit, qui atteint désormais 50 000 commerçants.

Interview Ann Cairns

Au cours du panel de néo-banques qui suivait, l'expérience de Tinkoff – dont on parle rarement en France, alors qu'elle a conquis 8 millions de clients en 12 ans d'existence et qu'elle est rentable depuis longtemps – a retenu mon attention. Son directeur général, Oliver Hughes, insistait sur la présence de talents informatiques extraordinaires en Russie, qui permet à la startup de disposer d'une équipe de 2 000 personnes pour prendre en charge en interne l'intégralité de ses développements logiciels.

Panel de néo-banques

Passons maintenant à la meilleure séquence de cette série, sous la forme d'un panel sur le vaste thème de l'avenir de la finance à l'ère de la FinTech. J'en retiens l'intervention de Christine Lagarde, directrice du FMI, estimant, anecdote à l'appui, que l'impact le plus important de l'inclusion financière est la réduction des violences faites aux femmes. Le lien est intéressant à établir avec une remarque qu'elle formulait un peu plus tard, selon laquelle la première responsabilité d'un état est d'assurer la sécurité de ses citoyens.

Autre participant à la discussion, Carlos Torres Vila, le nouveau président exécutif de BBVA, se lançait dans un plaidoyer appuyé pour l'exploitation des données, en affirmant d'abord sa conviction que le partage d'information est porteur de valeur sociale, puis en appelant de ses vœux, pour la concrétiser, à une extension du principe d'ouverture des données introduit dans la banque par la DSP2 à tous les secteurs et à tous les acteurs économiques, sous le contrôle de leur seul et unique propriétaire légitime : le client.

Panel Avenir de la Finance

L'échange autour de la banque et l'Europe, avec le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, et un représentant de la Commission Européenne, Olivier Guersent, réservait, à mon sens, une surprise, puisqu'il était encore question de la directive DSP2 et plus particulièrement de la mise en application des normes techniques de réglementation (RTS) sur le déploiement d'API, en septembre prochain. Malgré les propos rassurants tenus, la seule mention du sujet conduit à ressentir une certaine nervosité de l'ensemble de l'écosystème vis-à-vis du respect de l'échéance.

Panel Banque et Europe

La conversation dédiée au thème de l'inclusion financière était, selon moi, la plus inspirante de toutes, car elle mettait côte à côte Kosta Peric, directeur délégué de la Fondation Melinda & Bill Gates, et Ben Milne, fondateur et directeur général de Dwolla, une startup des infrastructures de paiement. Et c'est ce dernier qui déclarait que l'accès aux services financiers devrait être un droit humain de base, Kosta confirmant qu'il est un point d'entrée indispensable vers les autres besoins (par exemple l'accès aux soins, qui est pourtant le domaine dans lequel l'injection d'argent est le plus efficace).

Panel Inclusion Financière

La question qui brûlait toutes les lèvres a été posée lors de l'intervention de Laurent Mignon, directeur général de BPCE : quid de Fidor, dont l'acquisition faisait encore l'admiration lors de l'édition précédente du forum ? Il nous a expliqué que la stratégie du groupe avait changé. Il n'est plus question aujourd'hui de développer une nouvelle offre en France, la priorité absolue est mise sur la transformation des banques existantes. Serait-ce donc une manifestation du syndrome du changement de dirigeant ?

Un panel consacré à l'innovation dans les paiements (posant toutefois la question de sa possibilité), avec des intervenants provenant de différentes parties de la chaîne de valeur, confirmait ce que je soupçonne depuis quelque années : les acteurs ne parlent plus vraiment de rupture, ni même d'innovation, et ils parviennent tout juste à identifier leur différenciation par rapport aux entreprises historiques du secteur.

En guise de conclusion, j'ajouterai une pensée exprimée par plusieurs des dirigeants de jeunes pousses qui se sont succédés sur scène, quand ils étaient interrogés sur leur perception du risque de récession en 2019 : sans désirer un tel scénario, ils considèrent qu'il leur ouvrirait des opportunités, en les plaçant en position de mieux satisfaire les besoins des consommateurs que les banques traditionnelles. À méditer…

lundi 28 janvier 2019

Opération « 1h pour moi » à la Société Générale

Société Générale
Dans le cadre de l'évolution de son dispositif commercial et de la mise à niveau des compétences de ses employés qui doit l'accompagner, Société Générale annonce l'instauration d'un dispositif d'auto-formation « 1 heure pour moi », qui n'est pas sans rappeler les fameux « 20% Google » d'antan. Simple gadget ou réelle opportunité ?

Avec les technologies désormais disponibles et celles, telles que l'intelligence artificielle, qui sont en passe de s'imposer, les métiers de la banque évoluent profondément, en particulier pour les conseillers qui sont en contact direct avec les clients, en face à face ou au téléphone. Afin d'éviter une catastrophe sociale quand les algorithmes auront pris l'ascendant sur l'homme en matière d'expertise financière, il est donc absolument indispensable de préparer dès maintenant leurs inéluctables reconversions.

La bonne nouvelle est que Société Générale semble avoir pris conscience, au moins partiellement, de l'enjeu et de sa responsabilité pour y répondre. Même si sa stratégie continue à comprendre des fermetures d'agences qui conduiront sans doute à des réductions d'effectifs, elle affirme notamment consacrer des moyens conséquents aux besoins de formation de ses collaborateurs, combinant des modèles classiques et des approches plus innovantes, dont cette opération « 1 heure pour moi ».

Faute de précisions à ce stade, nous ne pouvons que spéculer sur son contenu, mais il paraît raisonnable d'imaginer qu'il s'agit de donner à chaque salarié une heure sur son temps de travail pour se former sur les thématiques de son choix, en complément des programmes plus classiques proposés par l'entreprise (qui ont eux-mêmes vocation à être mieux personnalisés). L'objectif est vraisemblablement d'inciter les intéressés à se pencher sur des sujets importants pour leur avenir, mais sans les contraindre.

Dispositif « 1h pour moi » de Société Générale

L'initiative n'est cependant pas sans défaut. Je ne parle pas de l'engagement limité que représente, de prime abord, le fait d'accorder une petite heure par semaine aux collaborateurs (soit environ 3% de leur temps de présence) : mises bout à bout, elles ne sont tout de même pas négligeables et, individuellement, elles devraient suffire à une première sensibilisation sur les compétences visées. En revanche, le risque est extrêmement élevé d'introduire des confusions avec les curriculums « officiels ».

C'est bien là où la comparaison avec les « 20% Google » – qui, rappelons-le, permettait à chaque salarié en exprimant le désir de consacrer une journée par semaine à un projet personnel, en concertation avec sa hiérarchie – s'arrête. Car, à partir du moment où le domaine concerné par le temps de liberté alloué est en recouvrement avec une responsabilité essentielle de l'entreprise (la formation professionnelle, en l'occurrence), les dérives seront quasiment inévitables ou, à tout le moins, difficiles à contenir.

En synthèse, les motivations de la démarche de Société Générale sont potentiellement respectables – et il serait temps que tous les employeurs se préoccupent sérieusement des qualifications de leurs salariés pour demain – et son idée de solution mérite certainement l'attention. Si la banque ne l'a déjà fait, elle devra toutefois prendre grand soin dans sa mise en œuvre, afin que ses objectifs aient une chance d'être atteints.

dimanche 27 janvier 2019

La modernisation de Lloyds passera par le cloud

Lloyds Banking Group
Quand Lloyds investissait dans Thought Machine en novembre dernier, il ne s'agissait pas d'une simple transaction financière : selon un article du Financial Times, la banque semble avoir la ferme intention de déployer le cœur bancaire innovant de la startup pour améliorer son efficacité opérationnelle et affronter sereinement les défis du XXIème siècle.

Dans le document interne consulté par la rédaction du quotidien, la banque estime que les approches de modernisation incrémentale des systèmes existants ont leurs limites et que, par conséquent, arrive nécessairement un stade où il faut envisager une remise en question intégrale. C'est la raison pour laquelle elle s'engage dans un processus de rénovation de ses infrastructures en cherchant à profiter des solutions les plus avancées à date, de manière à maximiser les bénéfices qu'elle peut espérer en tirer.

Son choix s'est donc porté sur Vault, le produit phare de Thought Machine, qui adopte une architecture au sommet de l'état de l'art et nativement conçue pour le cloud. Inspiré des pratiques de Google, dont sont issus les fondateurs de l'éditeur, il se veut extrêmement flexible, autorisant notamment le déploiement continu de fonctions additionnelles et une capacité de montée en charge quasi-infinie, tout en offrant un haut degré de personnalisation, par exemple vis-à-vis des processus en vigueur dans la banque.

Naturellement, le remplacement d'un cœur bancaire est déjà, en soi, une opération sensible (comme l'a récemment démontré TSB, ancienne filiale de Lloyds), alors quand il s'accompagne, de plus, d'une véritable révolution technologique, le projet comporte un niveau de risque difficilement acceptable pour une institution financière. Néanmoins, l'urgence de sa transformation incite le groupe britannique à dépasser ces inquiétudes et le conduit à définir une stratégie de mise en œuvre progressive pour les maîtriser.

Thought Machine

Ainsi, c'est dans la structure 100% directe de Bank of Scotland, Intelligent Finance, qu'une première migration sera organisée. Les conditions de l'expérimentation sont doublement idéales. En effet, non seulement n'affectera-t-elle qu'un nombre relativement réduit de clients (500 000, tout de même) mais, surtout, il s'agit d'une entité en fin de vie, qui n'accepte plus de nouvelles ouvertures de comptes depuis 2013. L'investissement nécessaire ne peut évidemment pas être justifié pour lui seul, mais uniquement comme un galop d'essai en vue d'une généralisation ultérieure aux autres banques du groupe.

Avec sa future infrastructure Lloyds vise, outre d'importants gains d'agilité, à optimiser ses coûts. L'article du Financial Times indique que son objectif serait un coefficient d'exploitation proche de 40%, contre 47% aujourd'hui (ce qui est une bonne performance sur son marché), avec en ligne de mire les records atteints par certaines néo-banques (celui de N26 serait au-dessous de 30%). Les économies risquent de se faire aux dépens d'une partie des équipes informatiques en place, au grand dam des syndicats mais finalement sans grande surprise, au vu de l'évolution naturelle du secteur.

Alors que quelques établissements parmi les plus visionnaires ont mené à bien leur modernisation, parfois depuis plusieurs années, les grands programmes de remplacement de cœur se font rares. Pourtant, l'impératif d'agir ne fait que croître exponentiellement, les déficiences des anciens systèmes se faisant de plus en plus criantes, jusqu'à menacer la survie même des entreprises concernées. La démarche de Lloyds prouve que, loin d'être inimaginable, un tel bouleversement peut être envisagé avec raison et prudence.

samedi 26 janvier 2019

Fintch revisite le réseau social bancaire

Fintch
La tentation de combiner réseau social et finances personnelles est presque aussi ancienne que le succès de Facebook. Elle a vu fleurir une multitudes d'initiatives sans jamais réellement s'imposer auprès du grand public. La jeune pousse française Fintch l'aborde aujourd'hui sous une forme originale, en plaçant le crédit au cœur de son approche.

Jusqu'à maintenant, les tentatives de mariage se sont, pour l'essentiel, résumées soit à des déploiements de services bancaires sur les plates-formes les plus populaires (Facebook en tête, naturellement), soit à des créations de communautés spécialisées autour de l'argent (jusqu'aux conversations entre amis autour des dépenses). Les premières ne sont finalement pas très sociales, tandis que les secondes, relativement artificielles, suscitent une certaine réticence chez la plupart des consommateurs.

De son côté, le concept de Fintch est, dans un sens, un retour aux sources de la banque moderne, à savoir l'idée de financer les personnes ayant besoin de liquidités grâce aux dépôts de celles qui ont des disponibilités. Pour ce faire, elle adopte un modèle désormais classique de financement participatif, qu'elle enrobe, et là réside sa particularité, dans une néo-banque, elle même sans surprise, avec son compte courant (propulsé par l'incontournable Treezor), sa carte Mastercard et ses outils de gestion sur mobile.

Dans l'application où il suit ses comptes au quotidien, l'utilisateur a ainsi la possibilité de solliciter un emprunt (entre 200 et 2 000 euros, sur 1 à 24 mois) ou, inversement, de contribuer (à hauteur de 10 à 1 000 euros) au demandes de crédit déjà enregistrées qui correspondent à ses critères. La mise en relation s'inspire du « standard » imposé par Tinder, par glissement du doigt et, dès qu'un versement est effectué, le prêteur se voit proposer d'établir un contact direct avec sa contrepartie, par messagerie.

Accueil Fintch

Un avantage de l'intégration entre la néo-banque et la plate-forme de crédit P2P apparaît dans la gestion des flux, largement facilitée : tous les transferts peuvent en effet être réalisés sur des comptes Fintch (le prêteur dispose toutefois également d'une option de paiement par carte externe) et les remboursements mensuels sont prélevés et redistribués automatiquement. Notons que, si les financements sont sans intérêts, l'emprunteur est incité à effectuer une donation, répartie entre ses contributeurs.

La startup vise principalement une population de jeunes adultes rencontrant des difficultés à obtenir un prêt de la part de leur banque ou simplement exaspérés par les complications administratives des acteurs traditionnels. Contrairement à beaucoup de ses consœurs, elle n'a pas choisi de fournir sa solution gratuitement. Son abonnement annuel – modeste (15 euros) – contribue de la sorte à son modèle économique, avec les commissions qu'elle prélève sur les crédits (dont le niveau n'est pas précisé).

Au-delà de sa coloration sociale, Fintch se singularise surtout par son positionnement concurrentiel sur le crédit, alors que le marché hexagonal des néo-banques, qui commence à s'étoffer sérieusement, se concentre majoritairement sur des porte-monnaie mobiles. C'est là un moyen de développer une offre vraiment différenciatrice, sur un créneau où les établissements historiques sont encore peu challengés par la FinTech, en raison de sa fragmentation actuelle. Un pas est fait vers une alternative crédible !

vendredi 25 janvier 2019

Un nouvel incubateur FinTech parisien, par La Banque Postale

Platform58
Alors que Paris continue à rêver de profiter du Brexit pour s'emparer du titre de capitale européenne de la FinTech, son offre d'accélérateurs, incubateurs et autres structures d'accompagnement spécialisés reste très inférieure à celle de Londres, surtout depuis la discrète disparition du programme dédié de l'Atelier BNP Paribas. Heureusement, La Banque Postale apporte aujourd'hui son renfort [PDF].

Je ne tiens pas de liste à jour, mais les lieux réservés dans la capitale (et autour) aux startups du secteur financier doivent se compter sur les doigts d'une main (le Swave, le Truffle FinTech Incubator, le Plug and Play, le Hub de la FFA…), représentant quelques dizaines de places disponibles. Certes, les nombreux dispositifs généralistes peuvent compléter ce maigre panorama, mais ils ne sont pas aptes à délivrer des services aussi pertinents, notamment des mentors maîtrisant parfaitement les thématiques abordées.

La « platform58 » de La Banque Postale va donc significativement renforcer l'offre actuelle, puisqu'elle sera capable de recevoir chaque année jusqu'à 10 jeunes pousses en phase d'amorçage. Sa promesse de valeur est attractive : hébergement sans limitation de durée (totalement gratuit pendant 2 ans), programme de soutien actif de 12 à 24 mois, avec des professionnels de la banque et de ses partenaires (Visa, KissKissBankBank, 1000 Mercis, Télécom ParisTech…), le tout sans prise de participation.

Les candidates retenues seront sélectionnées par un comité mixte, comportant des anciens entrepreneurs et des collaborateurs issus des différents métiers de La Banque Postale (y compris dans ses filiales FinTech). Les critères appliqués intègrent à la fois le potentiel de rupture des solutions développées et une dimension d'engagement citoyen et/ou social, susceptible de définir la marque de fabrique de la « platform58 ». En tous cas, les 7 premières admises montrent une certaine diversité, entre outil d'épargne et assurance mobile, en passant par la caution locative et la cybersécurité.

Accueil Platform58

S'il faut rester prudent sur l'idée évoquée d'utiliser l'incubateur comme un moyen de rapprochement entre grand groupe et startups (dont une manifestation particulièrement néfaste est l'effet « zoo » des visites organisées), l'initiative de La Banque Postale possède au moins une caractéristique originale, ouvrant des perspectives extrêmement prometteuses : à partir de fin janvier, l'incubateur sera en effet installé – au cœur de Paris – dans les mêmes locaux que Ma French Bank, la future néo-banque de l'institution.

Avec un peu d'imagination et d'audace, la logique pourrait être poussée à l'extrême. En supposant que la nouvelle-née soit conçue – selon la tendance du moment – sur un modèle de plate-forme, elle pourrait être positionnée comme un réceptacle de l'incubation. À ce titre, elle intègrerait les services créés par les jeunes pousses accompagnées (sous conditions, si nécessaire), leur procurant ainsi une opportunité de validation sur le marché tout en accélérant drastiquement l'évolution de Ma French Bank.

Après tout, la raison d'être de la « platform58 » et l'ambition sous-jacente de La Banque Postale sont d'identifier des collaborations possibles avec des acteurs émergents… et de les concrétiser. Or sa néo-banque en gestation est le véhicule idéal pour ce faire et la mise en place explicite d'une telle approche (avec ses règles) représenterait un énorme plus pour toutes les parties impliquées. En d'autres termes, pourquoi les incubateurs s'arrêtent-ils toujours aux moyens mis en œuvre, en oubliant de définir leurs finalités ?

jeudi 24 janvier 2019

Wefinup, le directeur financier digital des TPE

Wefinup
Quand les très petites entreprises veulent se développer, elles se trouvent démunies face aux possibilités de financement. Les banques leur accordent une confiance limitée, les dirigeants sont mal informés sur les options qui s'offrent à eux, les démarches sont chronophages… Heureusement, Wefinup vient désormais à leur secours !

Bien que le patron d'une TPE ne soit pas un spécialiste, il doit bien souvent prendre une casquette de directeur financier au cours de la vie et du développement de sa société. En général, il aimerait mieux se consacrer pleinement à son métier plutôt que de courir les banques ou de parcourir le web à la recherche des stars émergentes de la FinTech afin d'obtenir l'aide nécessaire à la concrétisation de ses projets. Évidemment, il n'a pas les ressources (ni un besoin suffisant) pour recourir aux services d'un professionnel.

Pour la jeune pousse bordelaise Wefinup, la solution est technologique et prend donc la forme d'un expert virtuel, disponible 24 heures sur 24, toujours prêt à répondre à toutes les sollicitations… voire même capable de les anticiper. La mise en œuvre se veut très simple : l'entrepreneur lui donne accès à sa comptabilité et la plate-forme déploie alors ses capacités d'intelligence artificielle, mâtinées de compétence humaine, pour remplir son office et proposer les produits adaptés à (presque) toutes les circonstances.

Accueil Wefinup

Le premier résultat visible de l'analyse réalisée par Wefinup est un indicateur (quantitatif) d'éligibilité au financement, réactualisé en permanence, qui, d'emblée, procure au dirigeant une précieuse information sur sa situation et sa marge de manœuvre. Par la suite, la surveillance active des comptes de la TPE permettra de détecter (prédire ?) les moments auxquels il doit envisager une opération de financement. Dans ce cas, la startup prodigue encore ses conseils en l'orientant vers la meilleure option à sélectionner.

Pour ce faire, elle s'appuie sur un certain nombre de partenaires, dont elle met les produits à la disposition de ses utilisateurs, dans un rôle de courtier (qui fournit le modèle économique, le service étant gratuit pour les entreprises). Sont ainsi aujourd'hui accessibles des solutions de crowdlending (avec Credit.fr, Lendopolis, Les Entreprêteurs), d'affacturage (avec Finexkap), de leasing (avec Corhofi), et la liste devrait s'allonger au fil du temps. Afin de tenir sa promesse de simplification, Wefinup intègre toutes ces offres dans un processus unifié, allégé, réactif et totalement dématérialisé.

Longtemps négligées, les TPE commencent à être reconnues comme des clientes désirables, autant par de nouveaux entrants (notamment des néo-banques) que par des institutions financières historiques (en particulier pour l'administration). Mais il reste bien des domaines dans lesquels elles ne bénéficient d'aucun accompagnement. Les finances et la gestion de trésorerie figurent parmi les plus flagrants et Wefinup a brillamment identifié l'opportunité d'exploiter les technologies modernes pour leur apporter une réponse efficace, potentiellement au-delà des seules problématiques de financement…

mercredi 23 janvier 2019

Les tâtonnements du paiement instantané

Boursorama
Alors que la plupart des banques françaises ayant mis en place les virements instantanés (« Instant Payment ») prétendent facturer cet « avantage », Boursorama reste fidèle à son image d'alternative la moins chère du marché en l'offrant gratuitement à ses clients. Mais son implémentation réserve tout de même une (mauvaise) surprise…

Comme je l'ai déjà évoqué récemment, il ne semble pas raisonnable de faire payer les consommateurs pour un service accessible sans frais par d'autres moyens (tels que les porte-monnaie virtuels, notamment). Suivant cette logique, l'option retenue par Boursorama Banque représente probablement la seule voie possible pour garantir une adoption large de ce nouveau mode de transfert, qui, pour ses utilisateurs, deviendra aussi naturel que la notification immédiate des dépenses par carte (là où elle existe).

En revanche, pourquoi ces virements sont-ils limités à 500 euros, quand le plafond maximal fixé par les fournisseurs des solutions sous-jacentes est de 15 000 euros ? La première raison qui vient à l'esprit est liée à la sécurité : la banque voudrait réduire son exposition – et celle de ses clients – à la fraude, sur des opérations irrévocables, pour lesquelles elle ne serait donc pas tout à fait certaine de maîtriser entièrement les risques encourus, face à des défis inédits par rapport aux systèmes historiques.

Le Virement Instantané selon Boursorama Banque

Que cette hypothèse soit vérifiée ou non, la décision de Boursorama Banque permet d'ouvrir une réflexion intéressante sur les usages potentiels des transferts instantanés. Restreints à des montants inférieurs à 500 euros, ils peuvent en effet refléter un positionnement délibéré de la banque, soit en concurrence directe des solutions de paiement de pair à pair (dont Paylib, auquel elle participe), soit comme une alternative – aujourd'hui théorique – aux règlements par carte dans le commerce de détail.

À l'inverse, certains cas d'utilisation – certes plus sensibles à la fraude – sont écartés d'emblée par ce critère. On pensera, par exemple, au recours aux chèques de banque pour des transactions importantes entre particuliers (telles que l'achat d'un véhicule d'occasion), qui mériterait pourtant d'être transformé, et d'une manière encore plus radicale que celle que proposent les startups spécialisées sur ce créneau.

Les différentes variantes de déploiement de l'« Instant Payment » dans les banques révèlent donc peut-être leurs orientations stratégiques, vraisemblablement basées sur des priorités établies à partir des comportements existants des clients. En conséquence, l'histoire n'en est qu'à son préambule et il faut s'attendre à voir progressivement apparaître des initiatives variées pour mettre à profit les capacités offertes par cette innovation, au-delà de la seule satisfaction de virements plus rapides pour les clients.

mardi 22 janvier 2019

OCBC offre un tableau de bord aux PME

OCBC Bank
Si l'argent est le nerf de la guerre pour les entreprises, il ne place pas automatiquement la banque au cœur de leur vie quotidienne. Pour y parvenir, la singapourienne OCBC, comme quelques autres avant elles (en particulier en Australie), offre gratuitement à ses clients un tableau de bord avec lequel ils pourront piloter l'ensemble de leur activité.

L'ambition de l'établissement n'est pas de devenir le fournisseur de tous les services auxquels peuvent avoir recours les PME pour exercer leur activité. Il s'agit plutôt de capitaliser sur leur utilisation croissante de plates-formes en ligne – pour leur comptabilité, leur suivi administratif, leur gestion d'inventaire, leurs ventes, leur communication… – et de mettre à leur disposition un espace unique sur lequel tous les outils qui leur sont nécessaires sont immédiatement accessibles, aux côtés de leurs comptes bancaires.

Plus de 40 applications différentes peuvent d'ores et déjà être intégrées dans la solution, permettant non seulement d'analyser les opérations et les finances de l'entreprise mais également, par exemple, ses diffusions de publicité sur Facebook, ses campagnes marketing par mail (avec MailChimp)… en regard de l'évolution du trafic sur son site de commerce en ligne (avec Google Analytics). En un coup d'œil, le dirigeant visualise tous les aspects de son business, sans avoir à jongler entre des informations silotées.

La mise en place du tableau de bord se veut très simple : les applications déjà utilisées peuvent être connectées en quelques clics, vraisemblablement grâce aux APIs que publient les fournisseurs de services. Il est en outre possible de souscrire directement à des outils supplémentaires, gratuits ou payants, ce qui, incidemment, constitue peut-être une source de revenus secondaire pour la banque. Le système prend même en charge l'initiative gouvernementale « Start Digital » qui subventionne certaines souscriptions.

Tableau de bord PME OCBC

En comparaison de certains précédents, la démarche d'OCBC est exemplaire en ce qu'elle identifie et cible précisément un besoin latent d'une partie de sa clientèle. En effet, elle ne cherche à aucun moment à remplacer les logiciels de gestion existants, dont elle sait – grâce aux données de paiement par carte qu'elle détient ! – qu'ils sont largement répandus dans les PME. Elle voit au contraire dans cette évolution la difficulté émergente du chef d'entreprise à extraire une vision cohérente de tous les outils à sa disposition.

La banque se repositionne de la sorte en interlocuteur privilégié de son client, en étant la première à répondre à une difficulté qu'il est susceptible de rencontrer, avec une légitimité soutenue par la place centrale des questions financières (qui font partie du périmètre adressé) dans ses préoccupations. Voilà une excellente manière de stimuler son engagement, qui aidera certainement à l'accompagner dans tous les moments de la vie de l'entreprise, en lui prodiguant des conseils personnalisés et contextualisés.

lundi 21 janvier 2019

L'assurance simple comme une conversation

Cove Insurance
Une part importante (et croissante) de la population mondiale accède aux services en ligne exclusivement depuis un smartphone. Forte de ce constat, la jeune pousse néo-zélandaise Cove Insurance propose une expérience de l'assurance optimisée pour ce support, ne se réduisant pas à adapter des formulaires à une taille d'écran réduite.

Aujourd'hui, les attentes des consommateurs sont façonnées par quelques habitudes prises dans leurs usages quotidiens : accès instantané à l'information, réponse immédiate aux questions, sur le téléphone, par messages courts, dans un langage simple… La quintessence de ces exigences s'exprime dans les plates-formes de messagerie sociale (WhatsApp, Messenger…), surtout quand elles deviennent les principaux instruments d'interaction commerciale, comme c'est le cas en Chine avec WeChat.

Dans ce nouveau paradigme, la relation avec les marques, comme avec ses proches, prend désormais la forme d'une conversation, qui, après tout, paraît plus proche du comportement humain naturel que les procédures administratives auxquelles nous contraignent tant d'entreprises. Alors, afin de respecter cette préférence qui se répand, Cove Insurance choisit d'implémenter l'ensemble de ses fonctions – souscription d'assurance, gestion de contrat et déclaration de sinistre – selon un tel modèle.

Parce qu'il représente la voie la plus directe vers cette cible, Facebook Messenger est son média privilégié pour engager la conversation avec ses prospects et ses clients. Mais une version pour le web, au fonctionnement presque identique et conçue, évidemment, d'abord en vue d'un accès depuis un smartphone, est également disponible (quoique encore incomplète à ce stade) pour ceux qui souhaitent éviter la messagerie.

Accueil Cove Insurance

Dans les deux cas, il n'est rien de très sophistiqué dans l'approche adoptée, puisqu'elle se résume à une série de questions auxquelles l'utilisateur doit répondre pour avancer dans sa démarche, mais elle reflète bien la logique de dialogue attendue. Il faut tout de même souligner, outre le recours systématique à des termes simples, les efforts réalisés dans le but de faciliter les parcours : par exemple, les caractéristiques d'un téléphone neuf à assurer peuvent être extraites automatiquement s'il est utilisé pour la souscription.

Dix ans après le début de la révolution mobile, la plupart des fournisseurs de services en ligne (les institutions financières ne sont pas les seules) persistent à penser que la seule différence entre un PC et un téléphone est la dimension de l'écran. Erreur : les utilisations et les comportements sont aussi très éloignés et requièrent des conceptions distinctes. À l'heure actuelle, les interfaces conversationnelles constituent probablement la meilleure piste à explorer pour ces appareils qui accaparent maintenant toute notre attention.

dimanche 20 janvier 2019

La banque qui conte une histoire

Garanti
Quand la filiale turque de BBVA s'inspire de Snapchat et Instagram et lance ses « Garanti Stories », elle semble se contenter d'en faire un mode de communication sur ses offres. Avec un peu d'imagination, il est cependant facile de prolonger l'idée afin d'en faire une manière différente de présenter ses finances personnelles au consommateur.

Selon la description qui en est faite, la nouvelle fonction introduite dans l'application mobile de la banque reprend le concept de « Stories » popularisé par les médias sociaux en vogue pour proposer à ses utilisateurs de découvrir sous un format original ses produits et services, les promotions et autres avantages qu'elle leur réserve, des contenus pédagogiques et diverses informations. Chacun de ces moments, apparemment personnalisés selon le profil du client, permet en outre de passer à l'action d'un geste.

Or, plutôt que de focaliser ces « histoires » sur le marketing, ne serait-il pas à la fois plus pertinent et plus productif de mettre la vie quotidienne du consommateur, telle qu'elle est reflétée par ses opérations bancaires, au centre de ce fil chronologique ? Il ne s'agirait plus alors seulement de chercher à vendre de nouveaux produits mais également de donner une perspective plus riche sur les finances personnelles, idéalement assortie de prédictions et de recommandations individualisées, toujours « actionnables ».

Garanti Stories

Le principe pourrait consister à mettre à disposition des utilisateurs, en option, une vue de l'historique de leurs transactions plus ludique, plus attractive, plus utile. Grâce à des informations complémentaires sur les dépenses – lieu, catégorie, statistiques…, un peu comme l'envisage le fournisseur de PFM Meniga avec ses « Richest Transactions » –, celles-ci pourraient devenir le support d'un récit, auquel la banque ajouterait ensuite son expertise, par l'intermédiaire, par exemple, de suggestions d'épargner, d'alertes sur des mouvements suspects ou risqués… pouvant aussi déboucher sur des ventes…

Une telle stratégie représenterait un moyen élégant de renforcer l'engagement des clients avec la gestion de leurs comptes, au-delà de la seule consultation des soldes et des opérations récentes. En combinant cette préoccupation immédiate – qui génère l'essentiel des interactions dans les applications mobiles – avec des conseils contextualisés, il deviendrait ainsi possible de les sensibiliser en douceur à l'amélioration de leurs comportements avec l'argent… sans interdire des incitations commerciales, dans la mesure où elles sont légitimes dans l'« histoire » qui se déroule.

Les tentatives de répliquer le succès des réseaux sociaux en faisant des paiements des moments d'échange avec ses proches, à l'instar de celle qu'initiait Venmo dès 2010, ont montré leurs limites : une majorité de personnes est réticente à l'idée de partager des informations généralement perçues comme intimes. À défaut, il reste tout de même d'extraordinaires opportunités de décliner leurs recettes, de manière à faciliter les relations du consommateur avec ses finances personnelles… et avec sa banque.

samedi 19 janvier 2019

Un comité consultatif équilibré pour UniCredit

Uncredit
Dans la foulée de la création d'une direction de la transformation, au printemps dernier, UniCredit annonce aujourd'hui la constitution d'un comité consultatif afin de compléter son dispositif. Bien que ce genre d'exercice s'avère généralement difficile, la banque italienne parvient à trouver pour sa composition une combinaison prometteuse.

C'est pour accompagner son ambition de définir ses métiers de demain qu'UniCredit mobilise de la sorte une équipe de haut vol, autour d'une mission transverse consistant à « explorer et évaluer les idées et les solutions innovantes qui lui permettront de fournir à ses clients actuels et futurs des produits, des services et une relation client à l'état de l'art ». Seuls quatre de ses membres, extérieurs à l'entreprise, sont cités, mais ils laissent supposer que tous les enjeux d'une telle stratégie sont bien pris en compte.

La FinTech et l'univers des startups en général, tout d'abord, sont représentés par Eileen Burbidge, figure majeure de l'investissement en capital-risque au Royaume-Uni et, accessoirement, chargée de mission auprès du Trésor britannique. Vient ensuite Theresa Payton, dont l'expérience mixte dans la banque et à la Maison Blanche (en qualité de DSI) n'est peut-être pas aussi importante que sa spécialisation actuelle dans le domaine de la cybersécurité, dans le prolongement d'un parcours dans la protection.

Pour la perspective académique et une conception probablement plus prospective des évolutions du monde, UniCredit fait appel au Dr. Carlo Ratti, professeur au MIT, qui apporte en outre ses compétences opérationnelles en matière de design et de démarches d'innovation. Enfin, la Dr. Katia Walsh, responsable des données et de l'analyse au sein de l'opérateur de télécommunications Vodafone, ajoute à ce panorama la valeur des « big data » et de l'intelligence artificielle, qu'elle approche par les besoins des clients.

Annonce UniCredit

Le résultat de cet assemblage de talents complémentaires – qui, espérons-le, devrait être reflété aussi dans les participants internes – est un espoir sérieux de réellement enrichir la vision de la banque alors qu'elle s'embarque dans son immense chantier de modernisation. Elle devrait ainsi profiter d'un éclairage diversifié sur les principales thématiques qui le porteront – l'écosystème FinTech, la sécurité, l'expérience utilisateur, l'innovation et l'intelligence artificielle – émanant de sources tout aussi variées.

En comparaison d'initiatives similaires (on se souviendra notamment de celle de Santander, en 2016), le conseil consultatif d'UniCredit peut donc se révéler être un instrument concret de sa transformation, même si sa portée reste modeste, et non uniquement un support de communication. Il offre en effet une opportunité rare et essentielle de challenger, en commençant par le haut de l'organisation, la culture bancaire traditionnelle et de la confronter à d'autres modèles, certainement instructifs.

vendredi 18 janvier 2019

ING démocratise la data science dans ses rangs

ING
On nous dit que, si la banque doit devenir une entreprise technologique, alors tous ses collaborateurs doivent acquérir une culture informatique. De la même manière, si elle doit être pilotée par les données, alors ils doivent aussi appréhender les bases de l'analyse de l'information. C'est pourquoi ING va créer une académie sur ce thème en 2019.

Le mouvement a été amorcé depuis quelque mois, notamment dans la banque d'investissement, avec, par exemple, la formation des nouveaux analystes de JPMorgan au langage Python (un incontournable dans la data science) ou les exigences émergentes des opérateurs de marché américains lors du recrutement de leurs traders. Pour Görkem Köseoğlu, directeur de l'analytique d'ING, c'est une évidence : la donnée est la compétence de demain et il veut aider ceux qui ne la possèdent pas encore.

Pour ce faire, il va donc lancer une académie dédiée, ouverte à tous les employés de la banque, dont l'objectif prioritaire est, fondamentalement, de « combler le fossé qui existe entre les métiers et les spécialistes de la donnée ». En effet, il ne s'agit pas spécialement de transformer tous les salariés en experts, mais plutôt de leur inculquer les bases qui, peut-être, leur permettront de concevoir quelques modèles simples et, surtout, faciliteront le dialogue avec leurs collègues ayant vocation à leur fournir la matière première de leur future activité quotidienne et leur apprendront comment l'exploiter.

Görkem Köseoğlu – Chief Analytics Officer ING
Görkem Köseoğlu – Chief Analytics Officer ING

En arrière-plan, ING a probablement une deuxième cible avec cette initiative, qui fait écho à la description de sa difficulté à attirer des talents, rares et exigeants, pour compléter sa petite équipe de 80 « data scientists », chargés de développer les projets d'intelligence artificielle pour toutes les entités du groupe. Dans cette optique, toutes les opportunités de réduire la pression sur ces véritables stars sont bienvenues et la possibilité de reporter les tâches les moins complexes – dont l'interprétation des résultats des modèles – vers les utilisateurs finaux est naturellement l'une des plus efficaces.

Sous un angle inverse, l'initiative d'ING mérite également d'être soulignée dans sa dimension d'accompagnement des collaborateurs de l'institution financière dans la mutation de leurs métiers (en espérant que cet aspect ne soit pas qu'une simple coïncidence). Même si la stratégie pilotée par les données ne se concrétise pas à court terme, il est important de préparer au plus tôt les personnes dont les professions actuelles sont menacées aux rôles qui, demain, les remplaceront et deviendront essentiels.

jeudi 17 janvier 2019

Les telcos flirtent avec l'assurance

Groupama
La tendance est en marche depuis quelques mois. Il y eut d'abord l'introduction d'Alexa Guard par Amazon, puis le Pack Sécurité présenté par Free avec sa nouvelle offre Delta. Aujourd'hui, Orange annonce avec Groupama le lancement d'une solution de télésurveillance, Protectline… Demain, ces acteurs distribueront des assurances.

La convergence des deux mondes est inéluctable. Qu'il s'agisse d'assistant vocal interactif ou de « box » internet, accompagné ou non d'accessoires additionnels, les technologies qui s'invitent désormais systématiquement dans nos maisons et appartements embarquent de plus en plus fréquemment des capacités de contrôle de l'environnement et de prévention des risques. Celles-ci résonnent directement avec les contrats traditionnels de protection contre les intrusions et autres types de dommages.

Alors que ces approches se contentent (pour l'instant ?) de fournir des outils avec lesquels l'utilisateur veille lui-même sur sa résidence, Orange aborde le sujet par son autre extrémité, en co-créant une plate-forme de télésurveillance dont tout ou partie peut initialement opérer sur un modèle classique, en particulier avec les équipements dédiés proposés par Groupama. Cependant, à plus ou moins court terme, les capteurs – logiciels ou matériels – devraient être intégrés sous une forme ou une autre avec la « box ».

Offre Groupama Box Habitat

Si cette première vague peut être considérée comme une simple tactique opportuniste, consistant, en quelque sorte, à faire des produits des entreprises technologiques des chevaux de Troie de services de prévention, elle pourrait être suivie d'une deuxième lame, de fond, qui comprendrait cette fois de véritables solutions d'assurance. Car, en parallèle de l'avantage d'une présence incontournable dans le foyer, ces acteurs disposent potentiellement d'arguments exclusifs pour convaincre leurs clients.

En effet, dans l'ère à venir de la protection individualisée, les objets connectés que déploient ces différents fournisseurs ouvrent des possibilités de mieux maîtriser les conditions des garanties mises en œuvre, par exemple en devenant capable d'ajuster en temps réel les primes et les risques couverts, selon la présence ou l'absence des occupants, l'organisation de réceptions, la mise à disposition du logement sur Airbnb…

Reste une question majeure : les opérateurs parviendront-ils à concrétiser cette vision ? Les tentatives passées de certains d'entre eux de s'immiscer sur de nouveaux marchés n'incitent pas nécessairement à l'optimisme. Plus profondément, peut-être faut-il également voir dans ces efforts une phase transitoire de la mutation de l'assurance. Après tout, la mise en place d'un accès internet dans une nouvelle résidence a une forte probabilité de devenir elle aussi un service enfoui, dans l'expérience d'emménagement…

mercredi 16 janvier 2019

Belfius s'offre des services non bancaires

Belfius
Quand la banque deviendra invisible, la belge Belfius a la ferme intention de rester très présente aux côtés de ses clients. Aussi commence-t-elle dès aujourd'hui à introduire deux premiers services non financiers dans son application mobile, sous la bannière du module « Pop-Up » qu'elle présentait à la presse en décembre.

C'est fort logiquement dans le domaine du m-commerce que la diversification prend ses marques. L'addiction des utilisateurs, dont une partie consultent leurs comptes plusieurs fois par jour sur leur téléphone, constitue un argument attractif pour les marchands qui y perçoivent un moyen de conquérir des clients. Dès le mois de janvier, sont ainsi intégrés l'achat de billets pour un événement sportif (les championnats EuroHockey) et une option de plein d'essence dans les stations Lukoil de Belgique et du Luxembourg.

Cette dernière, développée avec la startup spécialisée CarPay Diem, attire plus particulièrement mon attention car elle ne se contente pas de prendre en charge l'acte de paiement mais l'ensemble du parcours client. En arrivant à la station, l'automobiliste sélectionne sa pompe et confirme le règlement sur son smartphone. Il remplit alors son réservoir et est notifié de son opération dès qu'il repose le pistolet. Le cas échéant, l'application pourra, en complément, proposer des promotions spécifiques.

L'idée n'est pas évoquée, mais il est facile d'imaginer une évolution future de ce système vers une expérience presque entièrement transparente. Le logiciel pourrait en effet détecter automatiquement, par géolocalisation, l'entrée dans une station-service, peut-être même identifier la pompe choisie (moyennant un dispositif similaire aux beacons – vous savez, ces balises de proximité dont on n'entend plus parler !), et procéder à l'activation de la distribution d'essence et à la validation du règlement d'un simple geste.

Belfius Popup

Naturellement, Belfius Pop-Up représente également une opportunité pour la banque de se réapproprier les flux de paiement, car, selon toute vraisemblance, les échanges d'argent entre ses clients et les partenaires présents sur sa place de marché seront opérés par virement (instantané ?) et non par les réseaux de cartes. Incidemment, ceci constituera probablement un avantage supplémentaire pour les commerçants qui rejoindront la plate-forme, les frais de traitement étant (normalement) moins élevés.

Au-delà des deux produits disponibles actuellement, Belfius a de grandes ambitions avec cette initiative puisque sa feuille de route en comprend d'ores et déjà 3 autres (les titres-services de Sodexo, les billets de transports en commun de De Lijn et les voyages en train de la SNCB) qui les rejoindront prochainement, et elle promet ensuite d'ajouter un nouveau Pop-Up par mois. Elle envisage ainsi de capitaliser sur la popularité de son application pour en faire une sorte de plaque tournante de services mobiles, un peu à l'instar, toutes proportions gardées, des géants chinois Alibaba et WeChat.

En arrière-plan, se prépare certainement une bataille pour l'attention des consommateurs sur leur téléphone. Car, avec la maturité, ceux-ci ont tendance à concentrer leurs usages sur une poignée de logiciels, risquant donc de faire perdre à la plupart des entreprises une part importante de la relation avec leurs clients. Ceux des banques ont la chance de faire encore partie des plus fréquemment utilisés et, s'il s'agit d'une force, cette position privilégiée doit être âprement défendue… par exemple en les enrichissant.

mardi 15 janvier 2019

Hollywood à la rescousse du chatbot de TD

TD
Dans un univers d'interactions standardisées et robotisées, comment rendre un chatbot plus amical, plus intime, plus humain ? C'est la question que s'est posée la banque canadienne TD avant de lancer son assistant, baptisé Clari. Et sa réponse consiste à recruter des scénaristes de programmes télévisés pour créer sa « personnalité ».

Intégré dans l'application mobile de l'établissement, le nouveau dispositif est conçu pour offrir au client une manière différente d'accéder à l'information sur ses comptes. Au lieu de naviguer dans des menus et options parfois obscurs, il lui suffit d'engager la conversation avec Clari pour tout savoir de la situation de ses finances personnelles et de ses opérations. Et même si le chatbot est entièrement piloté par un algorithme, TD tient à faire de ces échanges un moment convivial, accordé à ses valeurs.

Une fois cette stratégie définie, le recours à des scénaristes professionnels est apparu comme une évidence. Ayant l'habitude de travailler sur des séries et téléfilms dans lesquels ils ont la lourde charge de donner vie à des personnages auxquels les spectateurs doivent s'attacher émotionnellement, ces spécialistes du dialogue ont naturellement les compétences requises pour préparer les répliques d'un représentant virtuel de la banque, capable de procurer l'illusion d'une certaine empathie humaine.

Concrètement, les équipes de TD ont collaboré avec les scénaristes sélectionnés à la rédaction d'un guide d'écriture, véritable bible du chatbot, similaire aux mémentos élaborés pour chaque protagoniste de série TV, qui listent leurs traits de caractère, leurs préférences, leur parcours de vie, leurs choix de mots et leurs phrases favorites… Cette somme de référence de Clari a vocation à garantir que l'assistant conserve un style propre à la banque, dans toutes ses interventions et au fil de ses évolutions futures.

TD Clari

Incidemment, l'initiative fait également écho aux préoccupations que je soulignais il y a quelques jours sur les difficultés de compréhension des clients vis-à-vis du jargon employé par les institutions financières dans leur communication. La préparation des textes du chatbot par des personnes qui non seulement sont externes au milieu bancaire mais sont en outre sensibilisées à l'exigence d'utiliser un langage simple afin de toucher un public large devrait être un gage de meilleure accessibilité des services.

Plus généralement, l'approche de TD propose une intéressante perspective sur sa vision des critères de succès d'un assistant virtuel. En effet, alors que la plupart des entreprises qui se lancent focalisent leurs efforts sur la fiabilité « technique » des échanges automatisés, elle semble estimer que, de ce point de vue, Clari possède un niveau suffisant et que la qualité de la relation qu'il inspire est désormais primordiale. L'étape suivante sera-t-elle une adaptation de sa personnalité en fonction de son interlocuteur ?

lundi 14 janvier 2019

Un coach financier bien timide…

Marcus
À temps pour le commencement de la nouvelle année et sa tradition des bonnes résolutions, Marcus – la banque startup de Goldman Sachs – a mis sur pied un concept de coaching financier, adapté à diverses situations, suggérant quelques actions à entreprendre pour une vie plus sereine avec l'argent. La bonne idée tourne hélas un peu court.

Le principe, basé sur une métaphore d'entraînement sportif, est aussi simple qu'efficace : l'internaute choisit son profil d'épargnant (ou de panier percé) parmi les 4 qui lui sont proposés et il obtient 6 recommandations précises et pragmatiques, correspondant, en principe, à la fois à sa situation actuelle et à ses défauts de comportement. Celui qui ne parvient pas à se fixer un objectif va être incité à accomplir de tout petits gestes, celle qui est déjà sur la bonne voie sera plutôt encouragée à optimiser sa gestion…

Incluse dans le site institutionnel de la banque, cette page a naturellement vocation à promouvoir ses offres, dont, notamment, ses comptes d'épargne, ses solutions de crédit à la consommation et sa plate-forme de pilotage des finances personnelles, Clarity Money. L'articulation de ce volet commercial avec les conseils prodigués reste toutefois suffisamment pertinente pour n'être jamais gênante. En revanche, l'initiative souffre cruellement de son caractère éphémère, aux antipodes de sa logique primitive.

En effet, l'enjeu principal du coaching, budgétaire ou autre, consiste à offrir à l'utilisateur une assistance dans la durée, avec un système de re-motivation régulière, de préférence de proximité. Tout le monde sait que le plus difficile dans les résolutions de début d'année n'est pas de les prendre mais de les tenir pendant 12 mois ! Or Marcus se contente ici de prescrire 6 bonnes pratiques – dont la plupart n'auront d'impact que par la répétition et la persévérance – sans aucun soutien supplémentaire.

Get Financially Fit – Marcus by Goldman Sachs

Bien sûr, on pourrait se satisfaire du dispositif ainsi limité, en considérant qu'il ne s'agit que d'une démarche éditoriale, légèrement personnalisée et contextualisée. Une telle capitulation ne m'inspire pourtant que d'immenses regrets, car toutes les composantes d'un vrai coach financier sont en place (même si ses compétences sont réduites) et il ne resterait, pour faire de Marcus un assistant utile, qu'à mettre en œuvre effectivement les différentes actions préconisées, en les automatisant autant que possible.

Quelques exemples : éviter d'utiliser un crédit pour un achat qui peut être payé comptant sans danger, créer une réserve minimale d'urgence, verser sur un compte d'épargne un montant équivalent aux dépenses de loisir, mettre de côté les augmentations de salaire ou les rentrées d'argent exceptionnelles (ou, a minima, la moitié), rechercher des placements plus rentables… Toutes ces idées pourraient – devraient – être proposées directement au cœur de la plate-forme bancaire, une fois le profil de l'utilisateur déterminé.

Il est tout de même surprenant que Marcus, qui, à terme, veut se positionner comme un socle technologique d'agrégation de produits, parfaitement adapté à cette vision, ne se soit pas encore emparé de l'opportunité de servir ses clients d'une autre manière, concrètement, en leur offrant un compagnon attentionné, toujours prêt à leur rappeler gentiment les meilleures options pour leur bien-être financier. Il ne tiendra qu'à une autre banque de reprendre le flambeau là où la filiale de Goldman Sachs le laisse…