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C'est pas mon idée !

lundi 31 octobre 2016

Pourquoi l'agence n'est pas (encore) désertée

CEB
Voici une réflexion intéressante et originale que celle que propose John Fishback, consultant pour le cabinet CEB, dans un récent billet de blog abordant l'inépuisable sujet de la préférence persistante d'une bonne partie des clients des banques pour une relation en agence plutôt que pour les outils « digitaux » mis à leur disposition universellement.

Il est vrai qu'il subsiste un certain mystère dans les comportements des consommateurs (observé par l'auteur aux États-Unis mais vraisemblablement visible ailleurs) : bien qu'ils déclarent – totalement ou majoritairement – préférer les canaux web et mobile pour leurs interactions avec la banque, y compris parmi les générations plus âgées (près de la moitié des plus de 55 ans, aux côtés de 73% des 18-24 ans), ils persistent à se rendre dans les agences. Ainsi qu'on l'entend parfois : si le « digital » est si important, pourquoi y a-t-il encore des files d'attente devant nos guichets ?

Une première réponse à cette question (légitime) tient à un facteur maintes fois évoqué dans ces colonnes : un certain nombre d'opérations ne sont aujourd'hui pas accessibles sur les supports de libre service, soit parce qu'elles ne sont tout simplement pas disponibles, soit parce que l'expérience utilisateur en décourage la mise en œuvre (quel est l'intérêt, par exemple, de souscrire un produit sur le smartphone, s'il faut ensuite imprimer une série de formulaires et les retourner par courrier postal ?).

Cependant, derrière ce diagnostic, il pourrait exister une raison un peu plus subtile à l'incohérence apparente des clients. En effet, il semblerait que la facilité avec laquelle il est possible d'entrer dans une agence afin de réaliser une transaction (probablement combinée à des habitudes profondément ancrées) est une motivation essentielle du choix du canal. À l'appui de ses dires, John Fishback compare les attitudes des consommateurs selon leur lieu de résidence, entre grandes villes, banlieues, petites villes et milieu rural.

Le résultat est surprenant : les citadins montrent à la fois l'appétence la plus élevée pour le « digital » dans les services non financiers et la plus faible pour les activités bancaires ! À l'exact opposé, les habitants des campagnes sont adeptes de la banque en ligne, alors qu'ils ne se déclarent pas très épris des outils numériques. La principale différence entre ces populations ? Si les premiers disposent d'agence dans le voisinage de leur domicile ou de leur travail, les seconds en sont souvent à des dizaines de kilomètres…

Le constat soulève un sérieux dilemme, en révélant que les clients qui en sont les moins demandeurs sont mieux servis par les réseaux d'agence que ceux qui en seraient les utilisateurs les plus assidus. Le problème est d'autant plus gênant qu'il paraît insoluble… À moins de prendre conscience de l'importance de procurer aux consommateurs les solutions dont ils ont besoin là où ils en ont besoin, selon leurs préférences.

Pour les zones rurales, la seule solution envisageable – partielle – consiste à offrir un service de proximité itinérant. Pour le reste, il faut continuer à développer les interactions en ligne, de manière à en renforcer l'attractivité (même si John Fishback considère qu'il est inutile de dépasser le seuil du risque d'attrition) et, surtout, inventer, concevoir et mettre en place les modèles nativement « digitaux » qui, n'ayant aucun sens dans une relation en agence, feront des canaux électroniques une évidence.

Queue devant la Banque de France à Orléans en 1914

dimanche 30 octobre 2016

N26 lance une carte haut de gamme

N26
Inlassablement, N26 enrichit son catalogue de produits et services en y intégrant les offres de partenaires divers et variés. Son dernier ajout [PDF] en date est une carte de paiement haut de gamme, qui réplique et dépasse les garanties des Visa Premier et autres Mastercard Gold grâce à un contrat d'assurance dédié, concocté avec Allianz.

La nouvelle carte N26 Black pourra être commandée depuis l'application mobile de la néo-banque dans les tout prochains jours, en Allemagne, Autriche et Irlande, et vers le milieu du mois pour la France, l'Italie et l'Espagne. Outre son design original (dont l'impression de son numéro au revers, pour plus de discrétion !), celle-ci inclut, pour un abonnement de 5,90 euros par mois, un ensemble de garanties conçues spécifiquement pour la cible de jeunes professionnels que privilégie la startup.

Sont ainsi incluses les classiques couvertures destinées aux voyageurs (remboursement des frais médicaux d'urgence à l'étranger, indemnisation des retards de vol, prise en charge des frais lors de perte des bagages…) et les extensions de garantie des achats qualifiés (applicables quel que soit le moyen de paiement utilisé – même PayPal ! – pourvu qu'il porte sur un compte N26). La liste comprend également le mobile, en cas de vol, et les sommes dérobées lors d'agression dans les 4 heures d'un retrait sur GAB.

N26 Black

Voilà donc tout l'intérêt d'un contrat dédié par rapport aux solutions traditionnelles proposées par les grands réseaux : les détails des polices souscrites sont ajustés à la population visée et peuvent aisément être étendues au-delà de la carte de paiement (ce qui conduit, d'ailleurs, N26 à parler de « compte bancaire premium »). Idéalement, cette approche pourrait aussi permettre une intégration transparente de la déclaration de sinistre dans l'expérience client. En l'occurrence, celle-ci est effectivement initiée dans l'application, mais semble devoir se poursuivre directement avec Allianz.

À partir de cette initiative, il n'est pas difficile d'imaginer un couplage toujours plus étroit entre banque et assurance, aboutissant à une personnalisation extrême des protections offertes. L'idée d'un contrat ciselé selon les besoins précis du consommateur (telle qu'elle est esquissée, par exemple, par Back Me Up) pourrait en effet être optimisée par la connaissance du client qu'il est possible de déduire de ses dépenses, avec des garanties automatiquement adaptées pour les grands voyageurs, les sportifs, les geeks…

samedi 29 octobre 2016

Le paiement par mobile ne décolle pas

Apple Pay
Lancé en 2014, Apple Pay apparaissait alors comme la solution qui allait (peut-être) enfin permettre au paiement de proximité via mobile de s'imposer. Deux ans plus tard, il faut se résoudre à l'évidence : tout indique que le succès n'est pas au rendez-vous, autant pour la marque à la pomme que pour les concurrents qui ont émergé entre temps.

Les enquêtes s'enchaînent et toutes confirment, mois après mois, les tendances initiales. Les consommateurs sont désormais largement familiers avec les options – Apple Pay, mais aussi Android Pay, Samsung Pay… – qui leur sont proposées par leurs banques et autres acteurs. Certes, bon nombre d'entre eux expérimentent ces solutions, par curiosité. Mais, en majorité, ils en restent à ce premier test, se demandant où est le bénéfice avant de revenir rapidement à leurs modes de paiement habituels, carte ou espèces.

Est-il nécessaire de répéter la raison de ce désamour ? Il n'y a pas de miracle : quoi qu'on en dise, les méthodes existantes fonctionnent, avec une fiabilité et une robustesse largement éprouvées, leurs utilisateurs n'ont donc aucune raison de vouloir en changer. Entre une absence d'argument décisif pour emporter l'adhésion et une acceptation par les commerçants encore loin d'être universelle (dans la plupart des pays du monde), il ne subsiste guère que quelques geeks pour s'enthousiasmer pour le m-paiement.

Depuis des années (une dizaine ?), les « spécialistes » martèlent que le seul moyen de stimuler l'adoption et de provoquer une bascule des usages est de procurer aux consommateurs une expérience d'achat de bout en bout, transparente et porteuse de valeur ajoutée. Les initiatives en la matière ne manquent pas, avec la montée d'une véritable marée de « m-wallets » (à l'image de ceux Fivory + Wa!, pour ne citer qu'un français, ou – dans une approche absolument incompréhensible – d'IBM).

Ces systèmes « enrichis » ont-ils plus de chances de réussir qu'un Apple Pay ? Rien ne permet, pour l'instant, de le supposer. Aussi séduisante soit la théorie, elle semble complexe à mettre en pratique. Déjà, le parcours étendu promis se réduit bien souvent à ajouter des coupons et autres programmes de fidélité au paiement. Et puis, ce modèle ne peut se développer sans les commerçants, apparemment peu emballés. En outre, la situation risque d'empirer avec le temps, au vu de l'explosion du nombre de solutions concurrentes, qui accroit la confusion pour toutes les parties prenantes.

Pour revenir à Apple, il reste à s'interroger sur les mots de son PDG, Tim Cook, quand, dans une interview impromptue récente, il affirme vouloir « tuer le cash ». Si une telle déclaration est susceptible de capter l'attention des journalistes, elle peut difficilement justifier une stratégie : alors que rien à ce jour n'a réussi à remplacer les espèces, il est irréaliste d'imaginer le paiement via le téléphone y parvenir avant qu'il n'ait lui-même pris la place des cartes… Une perspective qui s'éloigne de plus en plus…

Accueil Apple Pay

vendredi 28 octobre 2016

Les startups ont les solutions, les grands groupes ont les clients

Startup !
Les observateurs les plus attentifs de la scène FinTech française auront reconnu dans le titre de ce billet un clin d'œil à un article récemment publié par Yves Tyrode – CDO (« Chief Digital Officer ») fraîchement nommé du groupe BPCE – dont l'argument qu'il développe me semble dangereusement susceptible d'interprétations hâtives et erronées…

Sous le titre « les start-up ont pour elles les idées, les grands groupes, la capacité à les industrialiser », le texte (court) justifie la tendance généralisée des startups et des grandes entreprises à vouloir collaborer ensemble afin de mettre en commun leurs forces (ou pallier leurs déficiences) respectives. Si je reste réservé sur la pertinence de ce mouvement, sa réalité est indéniable et la raison en est incontestablement une certaine complémentarité entre les deux modèles que ces acteurs représentent.

Toutefois, l'idée que les startups cherchent des partenaires pour leur « capacité d'industrialisation » ne peut manquer de faire sursauter ceux qui savent que l'ADN de ces structures émergentes inclut nécessairement la recherche compulsive d'une montée en puissance aussi rapide que possible (qui se traduit généralement par une croissance exponentielle de l'adoption de leur solution). À l'inverse, cette exigence constitue souvent un défi pour l'innovation dans les grands groupes… comme le souligne Yves Tyrode.

Ce n'est donc pas de cette caractéristique qu'il est question. En fait, ce qui intéresse les jeunes pousses dans les institutions financières historiques – hors d'éventuels besoins de financement – se résume généralement à l'accès à leur portefeuille de clients. En effet, la principale difficulté à laquelle elles font face est de susciter la confiance indispensable pour séduire et conquérir leur cible potentielle. Naturellement, les banques ont les moyens de répondre à cette attente et possèdent ainsi la clé d'un développement rapide.

Hélas, nombre de partenariats sont voués à l'échec dès leur naissance parce que les termes du contrat n'ont pas été clairement établis… ou parce que les clauses n'en sont pas respectées. Que la grande entreprise écarte d'emblée l'hypothèse ou qu'elle traîne des pieds au moment d'exposer ses clients – directement ou non – au produit de la startup qu'elle couve, elle trahit la raison d'être de l'opération, quelles que soient les autres éléments (utiles) de la relation (accompagnement, mentorat, co-construction…).

Certes, il est aisé de comprendre les réticences des banques à s'engager de la sorte : aux antipodes de leur culture (sauf exception), il leur faut un certain courage pour affronter le risque d'écorner leur propre image avec un tiers dont les agissements (et leurs effets) sont plus ou moins incontrôlables. Remarquons à ce stade que la même cause a les mêmes effets sur l'innovation interne : réaliser des expérimentations devient banal, les déployer auprès d'utilisateurs réels reste exceptionnel ou, à tout le moins, long et compliqué.

La leçon pour les startups qui seraient tentées de s'allier à un grand groupe est simple : expliciter les attentes et demander des précisions sur les modalités de mise en œuvre sont deux règles élémentaires à respecter. Il est probablement tentant de prendre un « raccourci » pour atteindre la taille critique mais les promesses creuses ne suffisent pas. L'autre option consiste à viser une croissance organique, autonome, mais qui prendra beaucoup plus de temps, laissant planer un doute sur la viabilité du modèle.

jeudi 27 octobre 2016

Payer sans contact sur le web mobile ?

Ingenico
Malgré le développement exponentiel du m-commerce, l'expérience de paiement sur le web mobile reste largement perfectible. Forte de ce constat, Ingenico expérimente une nouvelle solution – baptisée TapHero – qui met à profit la généralisation des interfaces sans contact sur les téléphones pour à la fois simplifier et sécuriser les transactions.

Le moyen de paiement le plus répandu actuellement dans l'univers de la vente à distance – la carte bancaire – n'est pas particulièrement adapté aux usages mobiles : la saisie des informations nécessaires est, pour le moins, rébarbative. Avec TapHero, ces désagréments seront rapidement oubliés, puisqu'il suffit d'approcher sa carte sans contact du lecteur NFC du smartphone (presque tous les modèles du marché sont désormais équipés) pour remplir automatiquement le formulaire de règlement et finaliser l'achat.

Outre le surcroît de confort auquel elle contribue, la méthode apporte une protection supplémentaire en imposant la possession physique de la carte lors de la transaction (et non seulement la connaissance de codes valides, susceptibles d'avoir été piratés). Ingenico évoque ainsi la possibilité d'un traitement équivalent à un paiement de proximité (mode « carte présente »), qui pourrait se révéler extrêmement avantageux pour les commerçants en ligne, les commissions applicables étant alors sensiblement plus faibles.

TapHero

L'idée rappelle inévitablement les anciennes tentatives de déploiement de lecteurs de carte afin de sécuriser le e-commerce. L'avantage aujourd'hui est qu'il n'est plus besoin de matériel additionnel pour obtenir le même résultat, ce qui en facilite l'adoption. Malheureusement, comme toujours quand il est question de paiement sans contact sur mobile, l'universalité de la solution est sérieusement compromise par la politique inflexible d'Apple interdisant l'accès aux fonctions NFC de ses appareils à tout acteur externe.

Plus gênant, le principe d'une évolution des modes de règlement en ligne reposant sur un support archaïque (je parle, bien sûr, des cartes…) laisse une impression mitigée. Le besoin sous-jacent montre pourtant clairement qu'il devient de plus en plus urgent d'envisager une transition vers des moyens de paiement réellement conçus pour le monde connecté. Mais, comme cette future génération semble tarder à s'imposer (sinon à émerger), TapHero permettra de patienter encore un peu en attendant la révolution.

mercredi 26 octobre 2016

La Caixa accompagne les PME sur le web

La Caixa
Parce que, en 2016, le commerce de proximité ne peut survivre sans une présence sur internet, La Caixa et quelques autres proposent depuis peu aux responsables de petites entreprises espagnoles une plate-forme leur permettant de se former aux pratiques de la vente en ligne, puis de lancer leur propre e-boutique, en quelques jours.

Outre la banque, l'initiative fédère plusieurs autres partenaires prestigieux (et compétents en matière de e-commerce) tels que PrestaShop, Amazon ou DMS Consulting, en plus d'être soutenue par une entité institutionnelle (Red.es), représentant le ministère de l'industrie, de l'énergie et du tourisme. L'ambition de ces acteurs est de rassembler en un lieu (virtuel) unique et facilement accessible l'ensemble des ressources dont peuvent avoir besoin les PME pour faire face aux enjeux de la révolution « digitale ».

Pour ce faire, le site « Mi Comercio Online » met d'abord librement à la disposition de ses utilisateurs, après une simple inscription, un catalogue de formations en ligne traitant de stratégie numérique, de boutique sur le web, de participation à une place de marché, de logistique, de facturation, de considérations juridiques… Concrètement, les cours ont été élaborés par les spécialistes des problématiques du commerce électronique issus des différentes entreprises contributrices, chacun selon ses compétences.

Mi Comercio Online

Après la théorie vient la pratique : une boîte à outils complète, intégrant tout ce qu'il faut pour créer une vitrine et un espace de vente en ligne (et/ou mobile), prendre en charge les paiements, assurer le suivi de l'activité…, est également proposée, dans ce but, aux apprentis e-marchands. Bien sûr, il ne peut être question pour ces derniers de passer beaucoup de temps à construire un site web, aussi le processus est-il conçu pour faciliter la tâche et rendre possible la mise en ligne d'une boutique très rapidement…

Selon toute vraisemblance, la démarche de La Caixa – et il en est de même des autres partenaires du dispositif – n'est pas totalement désintéressée : il est probable que les PME seront plus ou moins incitées à utiliser ses services (de paiement, par exemple) au moment de déployer leur présence en ligne. Quoi qu'il en soit, il reste à retenir de cette expérience la volonté d'une banque d'accompagner ses clients (ou futurs clients) au-delà de la seule vente de produits financiers, tout en se cantonnant à son domaine.

mardi 25 octobre 2016

2getherbank, la quintessence de la banque

2getherbank
Ce n'est encore qu'un concept sans réalité tangible, mais l'idée d'une banque ouverte et sécurisée, collaborative et démocratique, transparente et écologique, globale, automatisée, intégrée avec tous les services financiers existants, gérée sur une blockchain… inclut tous les mots-clés requis pour attirer l'attention. Voici 2getherbank.

Elle devrait être lancée, en version beta, en 2017 et elle ne sera probablement pas tout de suite à la hauteur des ambitions exprimées. En attendant, il n'est pas interdit de rêver à cette néo-banque en devenir, qui, si elle ne se contente pas de surfer sur les tendances, semble réellement vouloir prendre en compte toutes les bonnes idées du secteur, accumulées au cours des dernières années, et les combiner au sein d'une plate-forme universelle et résolument focalisée sur les besoins de ses (futurs) clients.

Le terme est lâché, alors précisons d'emblée que la première caractéristique – déterminante – de 2getherbank est bien de se positionner comme un socle (un « hub » dirait-on en anglais) destiné à fédérer les produits et services d'établissements divers et variés, banques traditionnelles ou startups de la FinTech. À la clé, le consommateur pourrait ainsi disposer d'un catalogue d'une largeur et d'une profondeur incomparables, derrière une interface cohérente, délivrant une expérience utilisateur optimale.

Ajoutons à cela une bonne dose d'intelligence artificielle (ou d'analyse de données), et la banque deviendra capable, en découvrant et en apprenant le comportement, les habitudes et les attentes de ses clients, de leur prodiguer des conseils individualisés, voire, s'ils le désirent (ou l'acceptent), de prendre des décisions et les exécuter à leur place. Grâce à la pluralité des offres qui seront accessibles depuis la plate-forme, la capacité de personnalisation de la gestion financière devrait atteindre des sommets.

2getherbank

Deuxième grand principe fondateur de 2getherbank, son fonctionnement démocratique. Celui-ci se traduit par un modèle qui n'est pas sans rappeler LaZooz. Il s'agit en effet de créer une crypto-devise, le 2gethercoin, qui représente, d'une certaine manière, le capital social de la banque. Ses détenteurs sont notamment associés aux décisions, et aux bénéfices, à la hauteur de leur portefeuille. Les « parts » seront distribuées aux contributeurs (participant à l'élaboration et aux opérations de la plate-forme), aux investisseurs et aux clients (selon les profits qu'ils génèrent pour la communauté).

Outre celle qui figure au cœur de la gestion du « crypto-capital », 2getherbank opère également une « blockchain » pour la tenue des comptes de ses clients, vantant l'immutabilité des enregistrements pour garantir sécurité et auditabilité sans faille. Plus intéressant, ce choix a peut-être aussi un rôle de facilitation dans l'engagement de prendre en charge les exigences réglementaires – légales ou fiscales – de tous les pays où la jeune pousse envisage d'opérer (c'est-à-dire partout dans le monde, à terme).

Il faudrait encore évoquer les vœux de transparence – autant sur les conditions (tarifaires, entre autres) appliquées par la startup elle-même que sur celles des fournisseurs dont les offres seront intégrées – et de promotion des critères sociaux et environnementaux dans l'ensemble des activités. En synthèse, la proposition de 2getherbank est très proche de ce que devrait être une « banque plate-forme » idéale. Espérons que sa concrétisation sera à la hauteur de ses promesses ! Dans l'immédiat, les volontaires, de tous horizons, peuvent soumettre leur candidature afin de faire avancer le projet…

lundi 24 octobre 2016

AmEx crée le crédit contextuel pour PME

American Express
Son offre d'avance de trésorerie aux PME à peine lancée, American Express veut déjà en simplifier l'accès. En l'intégrant directement dans l'une des plates-formes de comptabilité les plus populaires aux États-Unis, QuickBooks, l'institution permettra bientôt à ses clients d'obtenir un financement en quelques clics et en moins d'une minute.

Ce partenariat avec Intuit (éditeur de QuickBooks) prolonge une précédente collaboration, qui permet, depuis l'an dernier, aux entrepreneurs d'intégrer automatiquement dans leurs livres comptables les dépenses effectuées avec une carte AmEx, pré-catégorisées. Pensé dans la même logique d'accompagnement, le nouveau service « Working Capital Terms » ne se contente pas de faciliter la soumission d'une demande de crédit : il comprend également les fonctions nécessaires pour fluidifier les opérations.

Une fois son financement accordé, le client a ainsi la possibilité de piloter le règlement de ses factures en souffrance depuis son espace QuickBooks. En outre, les transactions correspondantes sont immédiatement comptabilisées au sein de la plate-forme, sans qu'il n'ait à se préoccuper des détails à aucun moment. Le résultat est une vraie simplification de la vie du dirigeant à un moment potentiellement critique pour son entreprise, quand un défaut de trésorerie peut mettre celle-ci en danger.

Naturellement, les bénéfices pour American Express sont évidents : non seulement sa solution acquiert de la sorte une visibilité sans équivalent, mais elle peut aussi maîtriser (et optimiser) la chaîne complète de paiement, au-delà du seul versement des fonds prêtés. On peut, par ailleurs, soupçonner que l'intégration avec QuickBooks lui procure des opportunités de collecter des informations utiles sur l'activité de ses clients (soit sur ses créanciers, lors du règlement des factures, soit, peut-être, en amont).

QuickBooks

Avec cette initiative, American Express offre une nouvelle concrétisation du concept de « banque des moments », celle qui s'infiltre de manière invisible dans la vie quotidienne (de l'entreprise en l'occurrence) afin de la rendre plus facile. Il est vrai que l'imagination laisse entrevoir des opportunités supplémentaires : pourquoi, par exemple, la plate-forme de comptabilité ne déterminerait-elle pas seule les besoins de trésorerie, jusqu'à émettre, le cas échéant, une demande de crédit, qu'il ne resterait qu'à valider ?

En attendant d'atteindre ce niveau d'« intelligence », la tendance à l'intégration des services financiers dans les outils des entreprises s'affirme résolument, même si les niveaux de maturité sont encore très variables selon les acteurs, comme l'illustrent les cas respectifs de la startup Finexkap (qui insère sa solution d'affacturage dans les outils de gestion) et de LCL (à travers son annonce récente d'un partenariat avec Fizen pour l'intégration automatique des transactions bancaires dans la comptabilité).

dimanche 23 octobre 2016

TravelBank, le PFM des frais professionnels

TravelBank
Le suivi des dépenses professionnelles et des notes de frais est un véritable cauchemar pour une majorité de petites et moyennes entreprises, entraînant souvent des dérives difficilement contrôlables. TravelBank s'attaque depuis peu à ce sujet, en lui appliquant les meilleures recettes de la gestion de finances personnelles (PFM).

D'emblée, l'ambition qui meut la jeune pousse dépasse les seules préoccupations administratives des acteurs qui se sont penchés, jusqu'à maintenant, sur la problématique des notes de frais : outre les lourdeurs bureaucratiques de gestion des formulaires de demande, des justificatifs et des remboursements, elle veut en effet donner aux entreprises les moyens de maîtriser les dépenses de leurs collaborateurs et réduire les excès qui caractérisent fréquemment, entre autres, les déplacements professionnels.

Pour ce faire, l'application mobile de TravelBank prépare automatiquement un budget prévisionnel avant un voyage ou l'organisation d'un événement, aidée en cela par des algorithmes embarquant un soupçon d'intelligence artificielle et une surveillance permanente des prix (par exemple sur le transport aérien). Avec le même outil, l'utilisateur va ensuite enregistrer ses dépenses, via une capture des reçus ou par connexion directe au compte de sa carte de crédit, et en surveiller l'évolution. Enfin, il peut se voir récompenser s'il parvient à maintenir ses frais sous l'estimation initiale.

Accueil TravelBank

Les premiers retours d'expérience de TravelBank semblent montrer que les bénéfices de ces incitations à la modération ne se limitent pas aux économies réalisées. En faisant évoluer les comportements de leurs employés, les entreprises peuvent également observer des grains de productivité. Un article de TechCrunch cite ainsi le cas où les invitations des clients sont déduites des budgets de déplacement, ce qui encourage les commerciaux à multiplier leurs rendez-vous afin de maximiser leurs primes.

À ce stade, la startup a reçu 10 millions de dollars dans un premier tour d'investissement et n'a pas de plan définitif pour monétiser son service (entièrement gratuit, pour l'instant). En revanche, elle adopte une intéressante démarche de conquête de clients « par la base » : le collaborateur choisit d'utiliser l'application mobile pour simplifier la gestion de ses notes de frais, après quoi il cherchera à convaincre sa hiérarchie d'en généraliser l'usage et de déployer un programme de récompenses à l'échelle de l'entreprise.

Dans une période qui voit éclore une multitude de solutions innovantes à destination des PME, y compris dans le banques, celle de TravelBank mérite incontestablement une attention particulière, parce qu'elle répond à une attente profonde de sa cible, rarement adressée à ce jour, et parce que son approche mixe intelligemment – à l'instar des outils de PFM (grand public) les plus convaincants – moyens technologiques, recherche d'efficacité opérationnelle et techniques de motivation pour séduire ses utilisateurs.

samedi 22 octobre 2016

Mitsubishi teste une monnaie virtuelle

Mitsubishi UFJ
Après avoir hébergé Zerobillbank durant 4 mois dans son accélérateur FinTech, Mitsubishi UFJ Financial Group expérimente maintenant la solution de monnaie virtuelle de la jeune pousse israélienne au sein de l'une de ses filiales, sous la forme d'un programme original au bénéfice de la qualité de vie au travail de ses collaborateurs.

Le dispositif mis en place (par Kabu.com, accompagnée par l'équipe d'innovation de Mitsubishi) consiste en deux composantes complémentaires : une plate-forme d'émission de monnaie virtuelle, Zerobill-Core, et un porte-monnaie mobile, Z-Wallet. Le socle de base repose sur une « blockchain » et un environnement de « smart contracts », destiné à prendre en charge les conditions de génération et de conversion de la crypto-devise que porte le système (baptisée « Ooiri », dans cette implémentation).

De son côté, le porte-monnaie virtuel permet à ses utilisateurs de collecter des « Ooiri » lorsqu'ils adoptent un comportement plus sain – par exemple en respectant leurs horaires de travail ou en marchent une certaine distance – dont les conditions pré-définies sont automatiquement vérifiées par l'application mobile. Les sommes accumulées, valorisées à un cours fixe, peuvent ensuite être dépensées, comme des yens, dans quelques commerces partenaires de l'opération ou bien échangées entre collègues.

Zerobillbank

L'initiative, qui, en cas de succès, pourrait être rapidement répliquée au sein d'une autre filiale du groupe MUFG (Bank of Tokyo-Mitsubishi), représente un moyen simple et sans (grand) risque d'appréhender les avantages et les défis liés à la mise en œuvre d'une monnaie virtuelle privative. En parallèle, elle procure également une formidable vitrine à la startup qui est à l'origine de la solution et qui trouve là une justification sans équivoque (et plutôt rare) de sa participation à l'accélérateur de la banque.

En outre, le cas d'usage retenu pour le test est lui-même une source d'inspiration. Bien que les détails de fonctionnement manquent pour valider cette hypothèse, on peut aisément imaginer que l'utilisation de « smart contracts » sur une « blockchain » pour l'émission des « Ooiri » constitue un élément clé d'acceptation. En effet, alors que l'application de Mitsubishi peut être perçue comme intrusive par les collaborateurs, ces technologies offrent – potentiellement – une garantie d'anonymat des transactions…

vendredi 21 octobre 2016

Alipay débarque en France

Alipay
Ce n'est pas réellement une surprise : l'offensive estivale d'Alipay sur l'Europe se précise rapidement et atteint [PDF] désormais l'hexagone. Elle prend cependant ici une tournure originale, en raison aussi bien de l'acteur qui accompagne le géant chinois que de l'approche retenue, totalement indépendante des modes de paiement existants.

La banque en question, Banque Edel (que je ne connaissais pas, jusqu'à maintenant, honte à moi…), est le bras financier de l'enseigne de grande distribution E. Leclerc, dont le Crédit Coopératif détient un tiers du capital. Parmi ses différents métiers (tous en relation avec les activités de son actionnaire de référence), elle intègre une plate-forme monétique de « pré-acquisition » sous la marque Paywe.L. Celle-ci porte, logiquement, le partenariat avec Alipay, qui devient ainsi accessible à tous les commerçants.

La promesse associée est alléchante. Les quelques 1,7 millions de touristes chinois visitant la France chaque année représentent des montants significatifs de dépenses et la forte proportion de ceux qui sont équipés du porte-monnaie mobile d'Alibaba (450 millions d'utilisateurs au total, à ce jour) constitue une opportunité à saisir. Le seul fait, pour un commerce, de leur permettre de régler leurs achats avec leur mode de paiement préféré (ou, pour le moins, le plus familier) est en effet un moyen simple de les séduire.

Concrètement, c'est une solution complète d'acceptation que Banque Edel propose à ses clients. Elle comprend, en particulier, un terminal d'encaissement – en réalité, une mini tablette dédiée (et sécurisée) sous Android, mise à disposition gratuitement – même si une intégration dans les systèmes existants est également possible, par l'intermédiaire d'une API (on peut regretter l'« oubli » – temporaire ? – d'une version entièrement logicielle, qui pourrait être installée sur un smartphone ou une tablette personnelle).

Alipay by Banque Edel

Outre l'absence d'impact sur les équipements en place, la mise en œuvre contractuelle se veut aussi peu intrusive que possible. Il n'est pas nécessaire d'ouvrir un compte auprès de la banque, les fonds étant dans ce cas versés sur le compte bancaire habituel du commerçant. Enfin, la solution s'accompagne d'une garantie de paiement et de facilités de gestion des transactions (suivi en temps réel, prise en charge des annulations et remboursements…) qui devraient rassurer les utilisateurs face à un outil « exotique ».

À ce stade, « Alipay by Banque Edel » est déployé en mode expérimental sur une poignée de sites parisiens (4 hôtels du groupe Accor, 2 boutiques de maroquinerie de luxe et 2 espaces spécialisés du centre E. Leclerc SO Ouest de Levallois). Cette phase pilote devrait rapidement aboutir à une commercialisation à grande échelle, qui visera non seulement le territoire national mais aussi tout le continent, de manière à accompagner les commerçants à la recherche d'une offre pan-européenne homogène.

Je ne reviendrai pas ici sur les conclusions à tirer de l'arrivée d'Alipay de notre côté de la planète, et la capacité du géant chinois à y imposer sa solution de paiement via mobile au nez et à la barbe des acteurs locaux. Si ce n'est que la démarche retenue par Banque Edel vient renforcer cette hypothèse avec une offre totalement intégrée, simplissime à souscrire et installer (la seule inconnue concerne les coûts) : quel commerçant résisterait à la possibilité de capter une clientèle attractive dans ces conditions ?

jeudi 20 octobre 2016

Les wallets mobiles Wa! et Fivory fusionnent

Fivory
Ils se ressemblent mais sont nés sous des étoiles opposées : d'un côté, Fivory, lancé par le Crédit Mutuel en 2014 et de l'autre, Wa!, annoncé par BNP Paribas, mais pas encore opérationnel. Dans les prochaines semaines, les deux porte-monnaie mobiles portés par des banques françaises fusionneront au sein d'une application commune.

Sur le plan technique, l'opération tombe sous le sens tant les solutions ont de similitudes, notamment dans leur ambition de prendre en charge non seulement les paiements mais aussi les coupons de réductions, programmes de fidélité et autres services complémentaires. Et la relative lenteur du déploiement de Fivory auprès des commerçants confirme qu'il est préférable pour les acteurs en lice de joindre leurs forces plutôt que de s'épuiser chacun de leur côté dans une bataille qui restera rude.

D'un point de vue opérationnel, la fusion sera concrétisée par la création d'une société commune (avec, également, les actionnaires historiques de Fivory : Oney, Total et MasterCard) – dont la marque sera dévoilée à la fin de l'année – et le lancement, au début de 2017, d'une nouvelle application destinée aux consommateurs. Celle-ci sera alors immédiatement utilisable dans les réseaux de partenaires des deux solutions d'origine, comprenant notamment les enseignes des groupes Auchan (associé depuis quelques mois avec le Crédit Mutuel) et Carrefour (pour BNP Paribas).

Incidemment, l'annonce de l'union donne l'occasion, grâce à une interview publiée par Les Échos, de mieux comprendre l'articulation entre le futur porte-monnaie mobile et la solution interbancaire PayLib (que le Crédit Mutuel est désormais résolu à rejoindre), dont la fonction de paiement de proximité devrait arriver prochainement sur le marché. En effet, selon T. Laborde (BNP Paribas), un des avantages essentiels de la nouvelle venue est sa capacité à fonctionner sur iPhone alors que PayLib ne pourra y opérer, faute d'un accès à l'interface sans contact (NFC) du téléphone.

Comme il est difficile de croire que les banques françaises vont baisser les bras si facilement face à la résistance d'Apple, peut-être faut-il voir plutôt dans cette double approche un désir de prendre position (plus ou moins) rapidement, en attendant que le paysage s'éclaircisse et que la situation se stabilise. Dans cette hypothèse, les solutions finiront certainement par converger vers un modèle unique. En parallèle, il est de plus en plus apparent que les banques ont besoin de collaborer entre elles pour réussir…

Wa! et Fivory

mercredi 19 octobre 2016

Yolt, cheval de Troie d'ING ?

ING
Tandis que les banques françaises (HSBC et Crédit du Nord [PDF] en tête) semblent soudain s'emballer pour les agrégateurs de compte, ING s'empare du même sujet avec une stratégie radicalement différente. Le lancement de l'application Yolt au Royaume-Uni peut même être perçu comme un cheval de Troie de la banque « digitale » de demain.

En cédant sa filiale de banque de détail en ligne à Barclays en 2012, le groupe néerlandais avait presque quitté le pays, n'y conservant que des activités de marché. Il y revient maintenant avec une solution de gestion de finances personnelles (« PFM »). Après une première étape de tests auprès d'un petit échantillon de consommateurs et de collaborateurs (de sa banque d'investissement), il aborde désormais une phase beta plus large, l'ouverture générale au grand public étant prévue dans les prochains mois.

D'emblée, Yolt veut dépasser le concept d'agrégateur de comptes (courants et de cartes de crédit, détenus dans divers établissements) et la présentation, sous diverses formes, de l'évolution des dépenses dans le passé. L'application promet aussi la prédiction des disponibilités futures, assortie d'alertes – par exemple en cas de risque de découvert ou de changement important par rapport aux habitudes – et de recommandations « actionnables » (c'est-à-dire que l'utilisateur peut accepter de suivre d'un geste).

Cette dernière possibilité peut surprendre : comment une application de PFM autonome pourrait-elle initier des transactions ? C'est justement là que l'annonce d'ING devient intéressante, surtout quand, de surcroît, la communication officielle rapporte l'ambition exprimée par son directeur de l'innovation d'orienter le service aux clients vers un modèle de plate-forme. Prise au pied de la lettre, elle laisse entrevoir le principe d'une banque centrée sur l'expérience utilisateur, reposant sur une fédération d'offres externes.

Accueil Yolt

L'idée n'est certes pas entièrement nouvelle, mais elle est, pour l'instant, l'apanage (non concrétisé) de quelques startups. La voir adoptée par une banque serait inédit. Et si l'objectif d'ING est de (re)prendre pied dans un pays où elle n'a plus de présence, l'initiative pourrait marquer l'éclosion d'une approche originale. Car, jusqu'à maintenant, les banques envisageant une hypothèse de « plate-forme » se positionnent généralement sur l'ensemble de la chaîne de valeur et non uniquement en agrégateur.

Capitalisant sur les possibilités offertes par les réglementations émergentes (britanniques ou européennes – telles que la PSD2) imposant aux banques l'ouverture de leurs services aux acteurs tiers, ING veut peut-être explorer les opportunité d'une autre forme de banque alternative, 100% en ligne, sans catalogue de produits en propre. Le contraste est saisissant avec les tentatives hexagonales (plutôt tardives) d'intégrer des outils de gestion de finances personnelles multi-établissements au sein des services en ligne…

mardi 18 octobre 2016

Le Crédit Agricole joue l'éthique des données

Crédit Agricole
Entre le traumatisme du scandale qu'ING a déclenché aux Pays-Bas, il y a plus de 2 ans, en voulant préparer les usages futurs des données de ses clients et l'entrée en vigueur prochaine du « Règlement Général sur la Protection des Données » (GDPR, en anglais), les banques deviennent de plus en plus timorées dans leurs stratégies.

Avec un bel opportunisme, le Crédit Agricole veut maintenant faire de sa retenue en matière d'exploitation de l'information un avantage concurrentiel, en devenant la première institution financière à se doter d'une charte de la protection des données personnelles, à l'échelle du groupe. Sans nécessairement se brider pour l'avenir, la banque mutualiste se place ainsi en pointe vis-à-vis d'une préoccupation majeure des consommateurs français (80% d'entre eux expriment une inquiétude sur le sujet).

D'emblée, les termes du document [PDF] écartent toute possibilité de commercialisation de données personnelles. Leur transmission en dehors du groupe restera cependant possible, pour répondre à des exigences réglementaires ou pour assurer des prestations prédéterminées (avec des acteurs de confiance « certifiés »), sous réserve que les clients concernés soient clairement informés, au préalable. Il subsistera un peu plus de souplesse en interne, notamment pour permettre de personnaliser les conseils et les offres, mais toujours avec une contrainte d'explication et de pédagogie.

À l'appui de ses déclarations d'intention, le Crédit Agricole mettra à la disposition de ses clients une plate-forme en ligne sur laquelle ils pourront – seuls ou avec l'aide d'un conseiller – vérifier les autorisations qu'ils ont accordées et ajuster instantanément le niveau de confidentialité de leurs informations (un peu comme la console centralisée que propose Google à ses utilisateurs). Quand on connaît les arcanes du traitement des données dans un grand groupe bancaire, un tel chantier semble très ambitieux !

Charte des données personnelles - Crédit Agricole

En dépit des promesses (parfois mirobolantes) des nouveaux usages des données, rendus possibles, entre autres, par les technologies « big data », la banque reviendrait-elle à une certaine forme de raison face à la révolte latente des consommateurs ? La réalité est peut-être légèrement différente. En effet, le principal défi à relever pour faire accepter les applications par le grand public – tout en conservant sa confiance, primordiale pour les métiers de la finance – est la qualité de la communication. Dans cette perspective, il est logique de poser quelques principes de base dans une charte.

Bien qu'elle établisse des limites réelles (et appréciables), celle-ci n'interdit pas à la banque d'explorer le potentiel des données, en particulier lorsqu'il s'agit de le mettre directement au service des clients (la commercialisation à des tiers n'étant probablement pas la plus grande source de valeur, au moins à court et moyen terme). Or, si la charte parvient à s'imposer dans leur esprit, avant toute tentative d'exploitation, comme une référence de la protection de la vie privée, la tolérance aux usages dérivés devrait être sensiblement rehaussée. Les projets pourront alors avancer plus sereinement…

lundi 17 octobre 2016

La Macif instaure un comité digital

Macif
Dans un monde en mutation, les entreprises commencent à comprendre que leur gouvernance ne peut rester celle des siècles passés. Alors, les plus avancées instaurent de nouvelles instances pour insuffler le changement dans leur organisation. Le groupe Macif fait désormais partie de ce petit groupe de pionniers avec son « Comité Jeunes ».

Le dispositif du mutualiste rappelle celui qu'a mis en place, entre autres, U.S. Bank au début de l'année dernière : un groupe de jeunes collaborateurs (20 personnes de moins de 35 ans, en l'occurrence) constituent un comité de direction parallèle, dont la mission est de « secouer » (un peu) les organes légitimes, notamment sur les sujets touchant à l'innovation et à la transformation « digitale », sur lesquels les générations montantes ont certainement une vision différente de celle de leurs aînés.

Les membres du « Comité Jeunes », mandatés pour 2 ans, ont été sélectionnés, sur la base de leur motivation, pour représenter la diversité de l'entreprise, de ses métiers et de son échelle hiérarchique. Le principe de leur intervention repose sur la tenue de réunions, auxquelles participeront le Directeur Général et le Secrétaire Général du groupe, quelques jours avant le Comité de Direction « officiel ». La présentation laisse entendre qu'ils pourront également être consultés dans d'autres circonstances.

Une deuxième cible de la démarche de la Macif est d'inspirer confiance parmi ses recrues récentes, en reconnaissant, en particulier, que les attentes des jeunes vis-à-vis de leur employeur évoluent, par exemple en matière de contribution à l'innovation. Dans cette perspective, les 20 membres du comité auront donc un rôle d'ambassadeur à jouer auprès de leurs collègues, en se faisant les relais du changement (et, en sens inverse, en assurant la remontée des commentaires et suggestions recueillis sur le terrain ?).

Macif

Sous une forme ou une autre, l'idée de faire intervenir les collaborateurs nés dans l'univers « digital » aux côtés des (souvent) « vieux » dirigeants paraît parfaite pour appréhender plus concrètement les transformations nécessaires dans l'entreprise. Elle est cependant extrêmement ambitieuse, car il ne suffit pas d'instituer un comité réunissant 4 fois par an quelques éléments représentatifs de l'organisation et d'attendre les résultats. Ses modalités de fonctionnement sont critiques pour atteindre le succès.

Au-delà de l'effet d'annonce, le groupe Macif devra encore prouver sa capacité à transformer l'essai, dans la durée. Il lui faudra probablement, pour cela, renforcer les interactions entre son « Comité Jeunes » et l'ensemble de ses dirigeants (pas uniquement deux d'entre eux, comme il semble que ce soit le cas initialement). Il restera enfin à démontrer que les avis et conseils formulés par ses membres (qui n'ont de valeur que consultative) seront entendus et déboucheront sur des mises en œuvre effectives. À l'avenir, la confiance des collaborateurs envers leur employeur en dépendra !

dimanche 16 octobre 2016

La réalité virtuelle entre à l'école

CommBank
Avec la commercialisation des premières solutions opérationnelles, les promesses de la réalité virtuelle seraient en passe d'être bientôt concrétisées. Pourtant, dans une large mesure, les applications restent à imaginer. Dans un registre sérieux, l'australienne CommBank tente aujourd'hui une expérience au service de l'éducation financière.

Le cadre retenu pour le test semble idéal : le programme « Start Smart » de la banque met à la disposition des écoles un ensemble de ressources permettant de proposer aux enfants un cursus d'apprentissage des bases de la gestion de l'argent (sans aucune promotion ou référence commerciale, naturellement). Créé en 2007, le dispositif a déjà touché plus de 2 millions d'écoliers – au cours de 73 000 sessions tenues dans 4 400 écoles – et est en pleine expansion avec 550 000 inscrits pour l'année 2016.

Dans les deux mois qui viennent, une partie de ces jeunes étudiants pourra profiter d'un complément de programme, sous la forme d'un livre d'historiettes, d'un casque de réalité virtuelle simplifié (il s'agit d'un conteneur en carton pour smartphone) et d'une application mobile. L'objectif de « The Teleporter Adventures » est de prolonger les cours délivrés (ponctuellement) en classe avec une expérience ludique, que l'enfant découvrira à domicile, avec ses parents, afin d'approfondir son apprentissage dans la durée.

CommBank Start Smart Virtual Reality

Dans un premier temps, CommBank s'en tient à une expérimentation. Les participants (les adultes, du moins) sont donc invités à transmettre leurs impressions et leurs commentaires, en vue d'affiner la démarche avant sa possible généralisation. Selon toute vraisemblance, une des grandes questions qui se posent est la pertinence d'exploiter la réalité virtuelle avec de jeunes enfants, ainsi que son efficacité pédagogique réelle. Les réponses ne sont pas faciles à évaluer et sont néanmoins critiques lorsqu'on sait que les principales habitudes en matière d'argent se forment avant l'âge de 7 ans…

Du point de vue de la technologie elle-même, la banque retient une approche a priori optimale pour en appréhender les enjeux et les opportunités. En effet, la réalité virtuelle est, pour l'instant, essentiellement tirée par le jeu, aussi est-il logique de rechercher les usages initiaux dans cette direction, même pour une entreprise « sérieuse ». CommBank n'en est d'ailleurs pas à son coup d'essai, puisque, depuis plus d'un an, elle introduit la simulation immersive parmi ses méthodes de recrutement.

À la vitesse à laquelle, dans le monde moderne, les technologies apparaissent et s'imposent, les entreprises doivent apprendre à les apprivoiser très rapidement. Il est indispensable, pour ce faire, de savoir identifier les contextes les plus adaptés aux mises en œuvre pilotes – qu'il s'agit ensuite d'exécuter au mieux – de manière à, d'une part, en confirmer la valeur potentielle et, d'autre part, en maîtriser les aspects purement techniques. Dans cette capacité réside une clé de la compétitivité de demain…

samedi 15 octobre 2016

Arkéa décline les usages de sa montre connectée

Arkéa On Life
Après une première application ciblant les personnes âgées, le Crédit Mutuel Arkéa introduit [PDF] maintenant une déclinaison de sa montre connectée à destination, cette fois, des travailleurs isolés. Elle est initialement adoptée par le groupe Réside-Études, dont elle équipera les personnels de nuit de son réseau de résidences pour seniors.

La solution est proposée par Arkéa On Life, la nouvelle marque de l'institution financière bretonne dédiée à la vie et la maison connectées, appliquées à l'assistance et la sécurité. Directement reliée au réseau GSM grâce à sa propre carte SIM, la montre est conçue pour répondre à deux types de situations d'urgence. D'une part, un détecteur de micro-mouvement permet d'identifier les pertes de connaissance et autres malaises. D'autre part, le porteur peut aussi déclencher l'alerte lui-même, par exemple en cas d'agression.

Dans toutes les circonstances, le contact est établi soit avec le centre d'écoute spécialisé d'Arkéa, disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, soit avec la personne désignée par le chef d'entreprise, selon les conditions de mise en œuvre retenues lors du déploiement du dispositif. La fonction téléphonique embarquée peut alors être utilisée pour une communication « normale » ou pour une écoute à distance (dans l'hypothèse d'un malaise), tandis que la localisation de la montre est transmise au correspondant, s'il s'avère nécessaire de faire intervenir des secours externes.

Montre Arkéa On Life

La solution que propose Arkéa On Life constitue une réponse directe à une exigence réglementaire, qui impose aux dirigeants d'entreprises d'assurer les premiers secours aux accidentés et aux blessés (par défaillance ou agression) et qui se traduit généralement par le déploiement d'un « Dispositif d'Alarme pour Travailleur Isolé » (DATI). Or, dans une logique d'efficacité, de performance et de faciliité d'utilisation, une montre connectée représente naturellement un support idéal pour une application de ce genre.

Avec cette nouvelle initiative, le Crédit Mutuel Arkéa prolonge ses investigations dans le domaine – tout juste émergent et extrêmement prometteur – des objets connectés placés au service de la protection et de l'assistance aux personnes. En l'occurrence, cette itération autour de la montre démontre une intéressante capacité à prendre en compte et adapter intelligemment ses solutions à des besoins variés, exprimés par des clients très différents, depuis le simple particulier jusqu'à l'entreprise (et ses employés).

vendredi 14 octobre 2016

ABN Amro et les startups, épisode 2

ABN AMRO
Comme d'autres banques dans le monde entier, ABN Amro est convaincue de son intérêt de travailler avec des startups pour réussir sa mutation « digitale ». Au contraire de la plupart de ses consœurs, elle sait aussi faire évoluer son approche au fil de ses expériences, de manière à démultiplier son efficacité et la valeur dégagée.

Parmi ses initiatives, ABN Amro inaugurait, il y a un an, l'espace de co-working « TSO Munt Square », en collaboration avec la structure spécialisée The Startup Orgy, dans le but d'accompagner le développement de l'innovation à la néerlandaise. Depuis quelques jours, un deuxième lieu, aux ambitions similaires, a ouvert ses portes. Le « Tech Quarters Amsterdam », issu cette fois d'un partenariat avec Google et The Next Web (ainsi que KPMG et Booking.com), capitalise sur les enseignements acquis précédemment.

La principale nouveauté du dispositif est la désignation d'un « agent de liaison » entre la banque et les jeunes pousses hébergées. Son rôle est simplement d'être le point de contact unique lorsque les secondes ont besoin d'accéder aux services de la première ou, inversement, quand les banquiers souhaitent recourir aux talents des entreprises qu'ils soutiennent. Particularité : ce poste est occupé par une personne recrutée hors du sérail, pour l'occasion, et possédant une double culture, corporate et startup.

Les raisons de ce choix sont très claires : le recours, par le passé, à des conseillers conventionnels n'a pas donné entière satisfaction. Selon les termes employés, l'abîme qui sépare la banque traditionnelle (et ses lenteurs) de l'univers de l'innovation rapide et flexible des startups était trop important pour instaurer une coopération fructueuse. Le responsable dédié devra donc piloter la recherche des solutions aux questions financières qui lui sont posées, en assurant la « traduction » parfois nécessaire.

Tech Quarters Amsterdam

La tâche n'est pas aussi aisée qu'il y paraît, car, en arrière-plan, les responsables d'ABN Amro estiment que les besoins des jeunes pousses deviendront rapidement ceux de toutes les entreprises (un peu de la même manière que les attentes des « digital natives » se propagent progressivement vers l'ensemble des clients particuliers) et qu'il est donc essentiel d'apprendre à y répondre de manière générique. Cet objectif passera par la création de produits adaptés, imaginés et conçus avec les premiers intéressés.

Dans un autre registre, la banque veut profiter de sa proximité avec des entreprises technologiques (Google incluse) pour renforcer ses propres capacités, que ce soit à travers l'acquisition et le déploiement des solutions qu'elles peuvent fournir ou par la découverte et l'adoption de leurs modes de fonctionnement (en cycles de construction – mesure – apprentissage – itération). Naturellement, dans ce cas également, l'« agent de liaison » devra être le catalyseur des échanges entre les partenaires.

La démarche d'ABN Amro est notable à deux titres. D'une part, il faudra retenir sa volonté d'ajuster ses initiatives d'accompagnement des entrepreneurs, en prenant en compte les problèmes observés, qui lui permettra d'en maximiser les bénéfices. D'autre part, et cette leçon pourrait servir immédiatement à d'autres institutions financières, elle révèle concrètement la difficulté à établir le dialogue entre un grand groupe et une petite structure, qui est encore trop souvent sous-estimée et conduit à de nombreux échecs.

jeudi 13 octobre 2016

Dans un an, le monde aura oublié la blockchain

Blockchain
Trop, c'est trop ! À force de dénaturation du concept de « blockchain », il est temps de dire stop ! Hélas, comme la surenchère va certainement se prolonger encore quelques mois, je prédis ici que les désillusions approchent et que les mythes vont bientôt s'effondrer, enterrant enfin les promesses absurdes entendues ces derniers temps.

De nouveaux sommets sont en effet atteints en la matière, quand ANZ et Wells Fargo annoncent conjointement, à la suite d'une expérience pilote, qu'elles sont prêtes à révolutionner le système des correspondants bancaires régissant aujourd'hui les transferts internationaux. Et ce n'est pas en invoquant la mise en œuvre d'une « technologie de livre de compte distribué » (« DLT », pour Distributed Ledger Technology), expression apparemment plus sexy que le terme « blockchain », que l'idée est meilleure.

Je ne reviendrai pas sur les reproches génériques qui peuvent être faits à la plupart des initiatives récentes (voir, par exemple, ce billet sur l'utopie des économies possibles). Celle d'ANZ et Wells Fargo dépasse les bornes en proposant d'utiliser la « blockchain », en parallèle des moyens de transfert d'argent existants (via Swift, en l'occurrence), dans le seul but de faciliter la réconciliation des comptes entre correspondants. Comme s'il était impensable de mettre en place un registre partagé avec des solutions classiques…

Certes, le problème ciblé est bien réel : les établissements prenant en charge les échanges transfrontaliers doivent depuis toujours synchroniser les visions « en miroir » de leurs comptes, ce qui requiert des efforts conséquents. Pour autant, la difficulté est-elle technique ? Clairement pas. La communication des deux partenaires est d'ailleurs explicite sur ce point : au-delà de l'expérimentation qu'elles ont réalisée, elles admettent qu'une collaboration étroite entre tous les acteurs concernés est la clé de la réussite. De toute évidence, ce n'est pas l'adoption d'une « blockchain » qui peut la lever…

Évolution des recherches Google sur le terme « blockchain » entre 2012 et 2016

En réalité, le symptôme est toujours le même, à chaque apparition d'une technologie, et il est d'autant plus prononcé que le potentiel de disruption de l'innovation en question est élevé. Sous l'effet de l'emballement médiatique, ses « victimes » se mettent à prendre ce qui n'est qu'un outil pour une solution miraculeuse à leur (ancien) problème. Or, non seulement une technologie ne constitue-t-elle quasiment jamais « la » réponse, mais, en outre, sa contribution est inversement proportionnelle à l'ambition visée.

Génération après génération, le mirage technologique continue à faire oublier que les plus grandes sources d'inefficacité sont généralement liées à des contingences d'organisation, de décisions, de politique… que des outils sont naturellement incapables de résorber. Le plus triste est que, lorsque la réalité reprend le dessus et que les espérances excessives sont déçues, la faute en incombe à la technologie mise en œuvre, qui devient alors la cause de tous les maux de l'entreprise et se voit rejetée en bloc.

Il ne fait désormais plus de doute que c'est aussi le destin qui attend la « blockchain » à relativement court terme. Les expériences farfelues se multiplient, les promesses invraisemblables s'accumulent (essayez de faire le total des milliards d'économies annoncées par les gourous, la planète ne devrait plus avoir besoin d'argent), les déploiements opérationnels sont invisibles (ou presque)… Tout est donc réuni pour la chute finale. Heureusement, il restera le bitcoin et son infrastructure, qui permettront au concept de survivre et à ses applications « raisonnables » de prospérer.

mercredi 12 octobre 2016

Le porte-monnaie mobile hybride de SEQR

SEQR
Dans le domaine du paiement via mobile, il subsiste aujourd'hui deux grandes catégories de solutions : celles qui s'appuient sur la technologie sans contact, réservée aux réseaux de cartes, et les indépendantes, qui requièrent un équipement spécifique des commerçants. Grâce à SEQR, il existe [PDF] désormais une option intermédiaire.

À l'origine, la jeune pousse suédoise proposait un porte-monnaie mobile classique, reposant sur un compte dédié pré-alimenté et une interface de paiement opérant par l'intermédiaire d'un QR code. Déjà, depuis cet été, il a commencé [PDF] à prendre en charge les transactions sans contact : les utilisateurs ont ainsi acquis la capacité d'utiliser leur compte SEQR pour régler leurs achats dans les millions de boutiques à travers le monde disposant d'un terminal compatible, sans aucun impact pour ces dernières.

En complément, avec la dernière nouveauté introduite, le principe du compte prépayé est maintenant lui-même en train d'évoluer. Pour les clients britanniques (dans un premier temps ?), il est donc possible d'adosser le porte-monnaie virtuel à un compte bancaire standard, sur lequel sont directement prélevées les dépenses effectuées. De la sorte, SEQR parvient à offrir une expérience de paiement plus fluide, pour le consommateur comme pour le commerçant, équivalente à celle des solutions sans contact.

Accueil SEQR

Il n'est pourtant probablement pas question pour la startup de changer son approche. En effet, l'emprunt des réseaux de carte pour les encaissements sur les terminaux conventionnels représente un coût face auquel elle ne possède actuellement aucun modèle économique (l'utilisation du système étant entièrement gratuite pour les consommateurs). En réalité, la stratégie est peut-être similaire à celle de Lydia en France et vise avant tout à populariser l'utilisation d'un moyen de paiement alternatif qui doit convaincre une masse critique de commerçants pour prétendre à la réussite.

Dans cette logique, le choix d'adapter l'application au paiement sans contact est assurément astucieux, car il est en parfait alignement avec son objectif : il n'est jamais nécessaire de jongler entre des outils distincts selon les circonstances. Il est vrai toutefois que le principe a aussi ses limites, entre la présence de terminaux compatibles dans les magasins (d'où le lancement en Grande Bretagne, plus avancée en la matière) et l'impossibilité technique de déployer le système sur iPhone (seul Android est supporté).

Après une période de stagnation, une tendance de fond semble poindre, notamment en Europe, parmi les acteurs du paiement via mobile qui luttent pour démultiplier l'acceptation de leur produit, malgré des promesses alléchantes (de coûts réduits, par exemple). L'enjeu est alors de concilier au mieux un parcours client sans rupture et de développer la notoriété de la solution originale afin d'accélérer son développement et sa présence sur le marché, avant que les géants tels qu'Apple ou Google ne s'imposent…

mardi 11 octobre 2016

Les agents virtuels prennent du galon

SEB
Pour une fois que des analystes leur recommandaient la prudence dans un domaine émergent, les banques semblent au contraire s'emparer très rapidement de la tendance des « chatbots » et autres agents virtuels intelligents. La suédoise SEB est la dernière en date à annoncer une initiative, tandis que RBS va prolonger ses expérimentations.

Dans les deux cas, les approches sont similaires : un déploiement interne destiné à valider le concept, suivi, au bout de quelques mois, par une généralisation auprès de la clientèle. Pour la britannique, la première étape a été déclenchée au début de l'année, avec la mise en place de Luvo, un assistant basé sur la technologie Watson d'IBM initialement réservé à ses conseillers. En décembre, il sera mis en relation directe avec une partie des clients, via l'outil de discussion en ligne disponible sur le site de la banque.

La démarche de SEB est plus originale, puisque les talents d'Amelia, son agent virtuel, ont d'abord été testés dans le contexte du support informatique. Là, sa capacité à répondre instantanément et avec pertinence aux demandes des collaborateurs a pu être évaluée pendant 3 semaines, au cours de quelques milliers de conversations. Les résultats sont suffisamment probants pour envisager maintenant une déclinaison sous forme de conseillère bancaire, qui prendra en charge les questions des clients.

Amelia - Agent virtuel de SEB

Au cœur de ces solutions, les prémices de l'intelligence artificielle sont à l'œuvre, combinant analyse sémantique (pour l'interprétation des messages reçus), accès aux masses de données disponibles (sur les produits et services, sur les clients, sur l'environnement…), apprentissage automatique et divers algorithmes capables de simuler un raisonnement humain. Ils permettent, en une fraction de seconde, de comprendre une question, de la replacer dans son contexte, et d'y apporter une réponse optimale.

Mais, déjà, SEB et RBS (et quelques autres) préparent la prochaine évolution des agents virtuels, qui leur ajoutera une dose d'intelligence émotionnelle. En détectant les changements de ton de leur interlocuteur, signes d'impatience ou de mécontentement, ils sauront adapter leur « comportement » en conséquence et améliorer encore ainsi l'expérience utilisateur. À ce stade (plus proche de la réalité qu'on ne l'imagine), il commencera à devenir difficile de discerner entre un conseiller humain et un robot…

Les technologies sont prêtes et leur performance devient incontestable. La seule inconnue qui subsiste dans la marche vers la robotisation du conseil (pour au moins 90% des interactions) sera son acceptation par les clients ou, plus exactement, la « forme » que devra revêtir l'intelligence artificielle pour garantir son acceptation. Cette conjonction de facteurs est la raison pour laquelle les banques ont tout intérêt à explorer dès maintenant, en conditions réelles, les opportunités des agents virtuels…

lundi 10 octobre 2016

La réglementation doit faire sa révolution

Droit
Depuis quelques mois, un nouveau domaine d'innovation a fait son apparition : sous le nom de RegTech, il porte l'ambition d'appliquer les recettes de la disruption technologique aux exigences réglementaires qui pèsent de plus en plus lourd sur les institutions financières. Derrière cette première vague, une autre transformation se dessine…

N'étant pas spécialiste du sujet, je n'entrerai pas ici dans les détails d'un argumentaire largement et brillamment développé dans un passionnant article académique que m'a transmis un de ses auteurs, J. Barberis (merci !). Je me contenterai donc simplement d'évoquer les quelques réflexions qu'il m'a inspiré. En synthèse, il s'agit d'imaginer comment la révolution « digitale » qui affecte tous les secteurs d'activité devrait être aussi appréhendée par les régulateurs, de manière à mieux remplir leur fonction.

En effet, ce qu'on appelle RegTech aujourd'hui n'a rien de très excitant, et ce n'est pas (uniquement) dû au fait qu'il est question de réglementation : la réalité est que les acteurs qui se positionnent sur ce créneau visent principalement à exploiter les technologies modernes – notamment celles qui touchent à l'analyse de données – dans le but d'automatiser, rendre plus flexible et réduire les coûts de la conformité, impliquant trop souvent des tâches manuelles manifestement inefficaces (voir le cas de HSBC). De toute évidence, cette démarche d'optimisation n'induit aucune mutation profonde…

Toutefois, cette génération de solutions à le mérite d'exposer au grand jour de nouvelles opportunités qui pourraient s'ouvrir aux régulateurs, surtout dans une période où les métiers de la finance sont eux-mêmes en pleine évolution. La multiplication des typologies et des variantes de produits et services disponibles sur le marché (ceux des banques ou ceux des acteurs émergents) ou le développement des souscriptions en quasi temps réel, par exemple, sont des facteurs qui vont imposer de nouvelles approches.

Or les autorités de supervision ont (ou peuvent avoir) à leur disposition les mêmes outils, qui leur permettraient d'ajuster leurs méthodes. Capter des données élémentaires sur l'activité des établissements (plutôt que des rapports de synthèse ne procurant qu'une vue souvent superficielle), au fur et à mesure des opérations menées (et non une fois par jour, par mois, voire par trimestre ou plus), rendrait possible une autre perspective de la gestion des risques qui figure au cœur des missions des régulateurs.

Dans un sens, ce modèle est déjà mis en œuvre par les quelques organismes dans le monde (au Royaume-Uni, à Singapour…) qui instaurent des mécanismes de « bac à sable » pour les acteurs de la FinTech. Il ne resterait qu'à en industrialiser le principe et le généraliser pour faire passer la réglementation au siècle « digital »…

Réglementation en voie d'obsolescence