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C'est pas mon idée !

vendredi 30 novembre 2012

Les banques tchèques misent sur le QR code

Komerční banka
Quand on évoque paiement et mobile dans les banques, ce sont immédiatement les technologies sans contact (NFC) qui viennent à l'esprit. En République Tchèque, une approche plus pragmatique et immédiatement opérationnelle est en cours de déploiement, à base de QR codes. Komerční banka (Groupe Société Générale) est la première à se lancer.

C'est au sein de son application de banque mobile (pour iPhone, Android et Windows Phone) que Komerční banka (KB) a introduit cette nouveauté. Son fonctionnement est simple et sans prétention : lorsque le client reçoit une facture pourvue d'un QR code, il pointe l'appareil photo de son téléphone sur celui-ci, l'application en décode les détails et prépare l'ordre de virement correspondant, qu'il ne reste plus qu'à valider pour en finaliser l'exécution.

Pour l'utilisateur, le système n'est donc qu'un moyen de faciliter la réalisation de l'opération de règlement, en évitant une saisie fastidieuse de références bancaires, mais sans impact particulier sur les processus de paiements classiques. En ce sens, il rappelle les expériences précédentes de Danske Bank (en Suède), OCBC (à Singapour) ou encore Rabobank (aux Pays-Bas), qui, toutes, proposent déjà ce type d'application, avec quelques variantes spécifiques.

Komerční banka sur iPhone

La particularité de l'approche en République Tchèque est que ce lancement a été précédé par une initiative de l'association des banques tchèques de définir un standard national de QR codes de paiement. Komerční banka n'est donc pas lancée dans une opération isolée, mais est en fait la pionnière d'une tentative de l'ensemble du secteur de promouvoir une certaine forme de paiement sur mobile.

Et il convient également de noter que la technologie sélectionnée ne cible pas uniquement les émetteurs de factures et peut couvrir des besoins plus larges. Un des premiers utilisateurs est d'ailleurs un site d'e-commerce (smarty.cz), qui permet à ses clients de régler leurs achats en ligne grâce à un QR code affiché sur la page de check-out (en offrant dans ce cas un surcroît de sécurité). Une transposition dans le commerce de proximité, bien qu'elle ne soit pas évoquée à ce stade, serait tout aussi facilement envisageable.

Pour basique qu'il soit, le dispositif de paiement "imaginé" par les institutions financières tchèques est redoutablement efficace pour faciliter la vie des consommateurs et des commerçants (et facturiers) sans introduire de disruption dans les habitudes de paiement. Si on ajoute à cette qualité l'intérêt qu'il présente d'être entièrement sous le contrôle des banques (même les réseaux de cartes en sont écartés), il a certainement un potentiel de séduction non négligeable...

Le QR code n'est certes pas aussi sexy que le "sans contact" mais il a l'immense avantage d'être immédiatement accessible à la quasi totalité des smartphones existants et de ne requérir aucun investissement pour fonctionner. Plusieurs startups (citons Skimm et Flashiz, entre autres) en avaient pris conscience depuis longtemps, il est rassurant de voir que des banques parviennent à la même conclusion. Il leur reste tout de même, comme avec tout nouveau moyen de paiement, à évangéliser les utilisateurs (marchands et consommateurs).

jeudi 29 novembre 2012

BBVA Compass passe au temps réel

BBVA Compass
L'ampleur du chantier a de quoi effrayer les plus braves mais les banques sont tout de même de plus en plus nombreuses à franchir le pas de la refonte de leur cœur de système informatique ("core banking"). Dernière venue dans le camp des rénovatrices, l'américaine BBVA Compass annonce la migration de sa plate-forme, à l'issue d'un projet de 362 millions de dollars.

A ce niveau de budget, les enjeux doivent évidemment être à la hauteur. Pour BBVA Compass, comme pour les autres avant elle (CommBank, Crédit Agricole...), il s'agit de faire entrer l'informatique bancaire au 21ème siècle, avec un système fonctionnant en "temps réel". Un beau message marketing, derrière lequel se cache aussi une réalité incontournable : les infrastructures conçues et élaborées il y a plusieurs dizaines d'années ne sont résolument plus adaptées à la banque multi-canal et aux attentes des clients d'aujourd'hui.

Pour ne prendre qu'un exemple, l'arrivée des services en ligne à la fin des années 90 a conduit les banques a empiler de nouvelles couches applicatives, en dupliquant les données existantes, car les systèmes historiques étaient incapables de supporter la charge induite par les millions de clients accédant directement à leurs comptes (ce qui n'était pas imaginable à l'époque de leur création). Ces solutions ont suffi pendant un temps mais les transformations technologiques accélérées et les exigences accrues des consommateurs les rendent rapidement obsolètes.

BBVA Compass, qui est l'une des premières banques aux États-Unis à ainsi moderniser son système et à passer au temps réel, vise des gains importants, économiques autant que qualitatifs, grâce à cette avancée majeure. Premier de ceux-ci, classiquement, l'existence d'une plate-forme unique permettra de garantir aux clients une information toujours cohérente, qu'elle soit consultée en agence, sur mobile, sur Internet, sur GAB... et favorisera la continuité de la relation, en toute transparence, indépendamment des transitions d'un canal à l'autre...

Pour l'instant, seuls les comptes de dépôt et d'épargne ont migré (les crédits, hypothécaires compris, le seront prochainement). Autre axe stratégique de progrès, quand tous les produits bancaires seront intégrés au sein de la plate-forme, la banque deviendra aussi véritablement centrée sur le client, faisant tomber les silos fonctionnels habituels.

En parallèle, la transformation opérée est également source d'augmentation de l'efficacité et de réduction des coûts, en évitant, par exemple, de nombreuses ressaisies en back office ou encore en réduisant les temps de traitement sous l'effet de la rationalisation sous-jacente (le délai d'ouverture d'un compte de dépôt passerait de 40 minutes à moins de 5). Dernier bénéfice évoqué du système rénové, le développement et la mise sur le marché de nouveaux produits et services pourraient être accélérés de manière dramatique.

Le pari, risqué mais apparemment réussi, de BBVA Compass doit donc lui permettre d'améliorer ses ratios d'efficacité (l'objectif est un gain de 10% à moyen terme) tout en lui donnant, grâce à la nouvelle "orientation client", un avantage concurrentiel immédiat dans un environnement où les grandes banques sont restées sur leurs modèles de fonctionnement historique (y compris, dans le cas de Citi, après une récente refonte "trop" prudente). L'opportunité était trop belle pour la laisser passer...

mercredi 28 novembre 2012

[Hors-sujet] L'écosystème parisien des startups

Startup Genome
Le temps est révolu où toutes les startups dignes d'intérêt naissaient aux États-Unis, voire, plus précisément, dans la Silicon Valley. Aujourd'hui, des écosystèmes solides et florissants se sont développés aux 4 coins du monde. Le "Startup Genome" a compilé et analysé les données issues de 50 000 jeunes pousses pour évaluer la maturité des zones les plus actives, dont Paris fait partie...

Et les résultats de la capitale française, parfois surprenants, permettront peut-être de relativiser quelques idées reçues et, surtout, pourraient aider à faire porter les efforts d'amélioration sur les points faibles avérés...

Premier enseignement de l'index global, qui compare les 20 principaux écosystèmes dans le monde : Paris obtient une relativement bonne onzième position au classement général, qui, en excluant l'Amérique du Nord (largement dominante), devient une troisième place, derrière Tel Aviv et Londres, mais devant Berlin, Sydney...

En observant de plus près les critères d'évaluation, on s'aperçoit que la principale qualité des startups parisiennes est leur "performance", telle que mesurée en prenant en compte les revenus, la création d'emplois, la croissance... Vient ensuite le "réseau de support", matérialisé essentiellement par une offre de services riche et facilement accessible (alors que, dans le même domaine, les opportunités de mentorat et la variété des sources de financement laissent plutôt à désirer).

A l'opposé, la première faiblesse identifiée porte sur le "talent" des entrepreneurs : leur jeunesse, leur inexpérience, leur manque d'expertise, entre autres, les place près du bas du tableau. Autre handicap notable, ils ne sont pas particulièrement enclins à adopter rapidement les toutes nouvelles technologies, techniques de management ou business models. Ceci pourrait être particulièrement inquiétant puisque, pour les auteurs de l'étude, ce critère serait un bon indicateur de succès futurs (sur lequel Sydney et Berlin se distinguent).

Le profil détaillé de l'écosystème parisien montre une large similarité avec celui de la Silicon Valley, émaillée de quelques points de divergence béants, qui expliquent certainement les faiblesses citées précédemment. Par exemple, les entrepreneurs sont beaucoup moins nombreux en France à avoir plusieurs startups à leur actif, d'où leur manque d'expérience. Presque caricaturale, la comparaison des motivations de part et d'autre de l'Atlantique me semble tout à fait caractéristique de l'hexagone : nos compatriotes veulent prioritairement "créer un produit" et sont beaucoup moins intéressés à changer le monde...

Incidemment, la proximité des profils entre Paris et la Silicon Valley n'est pas nécessairement à considérer comme un avantage. En effet, l'étude développe l'argument selon lequel la Silicon Valley est (plus ou moins) imbattable sur son secteur et suggère au contraire que les écosystèmes les plus susceptibles de réussir sont ceux qui s'écartent de ce modèle et créent des approches originales. L'index global tend d'ailleurs à refléter cette vision, battant ainsi en brèche toutes les velléités de créer une Silicon Valley française.

L'analyse macroscopique de l'environnement révèle enfin un handicap majeur pour les startups françaises : le potentiel de financement dans les étapes avancées de développement est proche de 0. Cela signifie que les entreprises qui, atteignant une certaine maturité, recherchent des fonds pour industrialiser leur modèle et globaliser leur marché n'ont d'autre choix que de se tourner vers des capitaux étrangers. Logiquement face à ce constat, la recommandation aux politiques est de favoriser (fiscalement) ce type d'investissement.

En conclusion, les "difficultés" des startups parisiennes peuvent être imputées, pour l'essentiel, à deux facteurs étroitement liés. Le premier, celui des lacunes du système de financement, ne peut pas réellement étonner. Le second, moins intuitif, incriminerait plutôt la culture des entrepreneurs français (voire européens) : ils n'auraient pas, en majorité, l'ambition de construire des "empires" qui changent le monde, préférant souvent copier des modèles existants et les adapter à un marché local. Ce ne sont clairement pas les incitations classiques à la création d'entreprise qui corrigeront ce défaut...

mardi 27 novembre 2012

Le Crédit Agricole teste la signature sur iPad

Crédit Agricole des Savoie
Après une longue période d'observation et quelques timides expérimentations, il semblerait que l'heure de l'iPad ait sonné dans les agences bancaires. Une initiative ambitieuse du Crédit Agricole des Savoie, lancée en octobre, vient s'ajouter à d'autres indices récents pointant dans ce sens (par exemple chez Barclays).

Ici, il n'est pas question (pour l'instant, du moins) d'utiliser l'iPad comme un outil de support de vente. Le rôle qui lui est assigné est en fait de recueillir les signatures des clients. Ainsi, lors de l'exécution d'une opération, ceux-ci se voient désormais proposer de signer le reçu ou le contrat correspondant sur la tablette, en lieu et place du formulaire imprimé habituel. Dans ce cas, la version électronique du document est automatiquement mise à leur disposition dans leur espace de banque en ligne dès le lendemain.

En pratique, l'iPad, installé sur un socle fixe, présente le document complet au client, qui peut donc en consulter la totalité du contenu. Précisons qu'aucune saisie d'information n'est réalisée sur la tablette. Détail notable, pour faciliter (et fiabiliser) la signature, la banque a choisi d'adopter un stylet, qui rend le geste plus naturel pour les utilisateurs.

Signature sur iPad

A ce stade, le dispositif est encore en expérimentation, dans 6 agences de la caisse régionale des Savoie. Mais la généralisation est déjà planifiée et ne laisse pas la place aux atermoiements, puisqu'elle devrait atteindre la totalité des 39 caisses du Crédit Agricole en avril 2013. En parallèle, l'utilisation, initialement limitée à des opérations "de caisse" (virements, retraits...) sera étendue aux contrats dans le courant de l'année, avec une perspective de dématérialiser l'entrée en relation à l'horizon 2014.

Il faut dire que les premiers résultats de ces tests d'appropriation (autant par les conseillers que par les clients) sont, selon les dires des premiers "testeurs", étonamment positifs. En ce qui concerne les consommateurs, au-delà des populations jeunes, qui apprécient le côté ludique et moderne de la signature sur un iPad, les clients plus mûrs aussi se laissent apparemment convaincre assez facilement, beaucoup étant conquis par le geste pour l'environnement que représente l'abandon du papier.

Les avantages de la dématérialisation sont classiques : meilleure sécurisation des documents (les risques de perte sont plus faibles), intégration immédiate dans les applications back-offices, possibilités de transmission électronique, économies de papier (et bénéfices associés sur l'environnement)... A ceux-là, le choix de l'iPad vient en ajouter d'autres, grâce à son caractère de matériel "banalisé", par opposition aux équipements spécialisés qui étaient, jusqu'à maintenant, généralement adoptés pour ce type de fonction. On pensera notamment aux coûts d'implémentation réduits, à la capacité de démultiplier les usages possibles, au-delà de la signature...

Si l'entrée des tablettes dans les agences est inéluctable, l'option retenue par le Crédit Agricole des Savoie d'aborder le sujet par la signature électronique semble particulièrement judicieux. En effet, même s'il est probable que les freins juridiques à la dématérialisation de la signature ont été nombreux (la gestation a duré plusieurs années...), le projet a le mérite de pouvoir afficher un retour sur investissement objectif et vérifiable. Voilà un argument convaincant pour promouvoir une innovation ! Et, une fois les iPads dans la place, les nouvelles applications pourront se multiplier...

lundi 26 novembre 2012

Apps mobiles : la forme prend le pas sur le fond

MoneyMobile par MoneyDesktop
Dans le domaine du PFM (gestion de finances personnelles), il existe maintenant tellement de solutions offrant plus ou moins les mêmes fonctions et exploitant à peu près les mêmes données (fournies par Yodlee, aux États-Unis) qu'il devient difficile pour l'une ou l'autre de se distinguer. Afin de lutter contre l'uniformité, la différence commence maintenant à se faire sur la visualisation de l'information.

Une illustration particulièrement éclatante de cette tendance émergente est offerte par la nouvelle application mobile de MoneyDesktop, un fournisseur d'outils de PFM destinés aux banques, distingué au dernier FinovateSpring. S'écartant résolument des traditionnels camemberts et "barres" de suivi, MoneyMobile propose par exemple une représentation des budgets à base d'un nouveau concept baptisé "BubbleBudgets" à la fois riche, graphique et intuitif (supposément).

Les "bulles" catégorielles qui la compose exposent plusieurs dimensions d'information : leur couleur indique leur état (le rouge signalant un dépassement), leur taille mesure leur valeur relative (dans l'ensemble du budget et par rapport aux autres catégories) et diverses informations plus précises sont également accessibles (par exemple le progrès, par le "contour").

MoneyMobile

Le souci esthétique et la volonté de "faire différent" ne sont pas les seules ambitions qui ont présidé à cette idée. En effet, le responsable du marketing de MoneyDesktop avance une autre justification qui rappellera les discours sur la ludification : sans aller jusqu'à faire un jeu du PFM, l'ajout d'une touche d'amusement dans l'interface, telle que l'ajustement du budget en faisant pivoter les bulles (dans les "BubbleBudgets"), permet de renforcer l'engagement utilisateur.

Je dois avouer ne pas être totalement convaincu par cet argument car je doute que le "plaisir" ressenti à la première utilisation ne fasse effet très longtemps. En revanche, l'adoption de représentations graphiques élaborées permettant de mieux exposer l'information, de rendre plus rapidement visible ce qui requiert l'attention, de combiner différents axes sous une forme simple... a certainement beaucoup plus d'importance et peut s'avérer critique pour faciliter la prise en main de concepts non triviaux (et la gestion de budget est perçue comme complexe par une majorité de consommateurs).


Les applications (mobiles) de PFM ne sont pas les seules touchées par cette nouvelle mode, qui doit aussi certainement à l'exigence d'afficher une information riche dans l'espace limité d'un écran de smartphone. Elle se retrouve également, entre autres, dans le domaine de l'information boursière, où les enjeux sont finalement assez proches. La nouvelle version de la solution de Fidelity Investments en constitue un cas éloquent, avec son damier coloré en fonction des tendances haussières ou baissières des valeurs surveillées.

Fidelity sur Android

Celle-ci a un autre avantage à faire valoir, déjà mentionné dans le billet que je lui avais consacré mais qui prend ici un relief différent : la possibilité offerte à l'utilisateur de personnaliser son écran d'accueil permet d'éviter un rejet total de l'application par ceux qui ne sont pas sensibles à cette représentation. Car, hélas, quelle que soit la qualité d'un format graphique, il ne conviendra pas à tous !


Dernier exemple de cette série (moins réussi, à mon avis), la nouvelle application pour iPad de Fortuneo inclut une vue originale des marchés boursiers. "Treemap" affiche les tendances sur tous les titres (toujours avec les échelles de rouges et de verts), regroupés par secteur et sous forme de dalles dont la taille est proportionnelle à la capitalisation de la société qu'elles représentent.

Fortuneo pour iPad

Malheureusement, là où les "BubbleBudgets" permettent de voir d'un coup d'oeil les postes budgétaires les plus importants et les plus sensibles et là où Fidelity rend immédiate la perception d'une tendance générale sur un ensemble de titres, je ne suis pas convaincu que "Treemap" apporte une valeur utile aux clients de la banque, à vouloir intégrer trop d'information, sans parvenir à en hiérarchiser la perception de manière simple.


Dans les AppStores où des centaines de milliers d'applications souvent semblables se disputent l'attention des consommateurs, la forme devient nécessairement un critère de différenciation. En parallèle, l'utilisation de représentations graphiques "intelligentes" pour faciliter l'accès à l'information est un moyen puissant de capter l'intérêt des utilisateurs pour des concepts qui peuvent les intimider. La combinaison de ces deux facteurs explique aisément la tendance qui émerge actuellement...

En revanche, il faut se garder des excès. Des graphiques magnifiques qui ne rendent pas un service visible et durable aux utilisateurs peuvent s'avérer contre-productifs. Il est impératif pour réussir de connaître la cible d'utilisateurs de l'application, ainsi que leurs "frustrations", afin de leur proposer les modèles qui seront les plus à même de satisfaire leurs attentes. Ensuite, l'imagination et la créativité n'ont pas de limites : dalles, bulles, patatoïdes... tout est possible !

dimanche 25 novembre 2012

5 idées innovantes pour l'entreprise (et son DSI)

Innovation ?
Parler de la révolution qui attend les DSIs (Directeur du Système d'Information) d'entreprise, comme le faisait encore récemment Gartner, est presque devenu une tarte à la crème. Plus difficile est de proposer des idées concrètes qui permettront effectivement aux responsables informatiques de passer de gestionnaires des infrastructures à des acteurs de la stratégie d'entreprise.

Sans prétendre apporter une réponse définitive à cette ambition, Eric Lundquist proposait récemment dans les colonnes d'InformationWeek, au retour de la conférence E2 Innovate, 5 tendances innovantes prometteuses, suggérées par de "vrais" DSIs, qui peuvent aider les départements informatiques à apporter de la valeur à leur organisation. Et ne vous y trompez pas, même si le message est adressé aux DSIs, les bénéfices envisagés concernent tous les secteurs de l'entreprise.

Ludification

Avant que l'expression ne soit totalement dévoyée et ne devienne plus qu'un argument marketing à la mode, revenons encore une fois sur les enjeux de la "ludification" (ou "gamification", en anglais). Une proportion incroyable de logiciels d'entreprises (la moitié, selon certaines estimations) n'est jamais, ou presque jamais, utilisée, en raison d'un rejet des utilisateurs, qu'il soit dû à des difficultés d'apprentissage, à un refus du changement ou à toute autre cause.

Si vous doutez de cette assertion, regardez la situation des outils collaboratifs (ou, maintenant, des réseaux sociaux d'entreprise) dans votre organisation et mesurez-en l'utilisation effective par les collaborateurs...

Ajouter des mécanismes de récompenses et de reconnaissance dans ces logiciels peut constituer un bon moyen d'essayer de limiter le gaspillage. Par exemple, proposer un parcours d'initiation semé de "badges" à conquérir peut favoriser l'apprentissage d'une solution nouvelle, comme l'attribution d'un "statut" particulier aux visiteurs fidèles peut aider à développer l'engagement de tous les collaborateurs au sein d'une plate-forme globale.

Progressivement, les progiciels devraient prendre en compte cette tendance, qui constituera un critère de choix supplémentaire à l'heure des appels d'offres, et les projets internes pourraient également s'en inspirer pour faciliter leur acceptation.

Chef d'orchestre

Malgré les réticences générales, certains DSIs ont déjà changé leur approche de leur métier. Ceux-là ont fait le choix d'un partenariat avec leurs homologues des autres métiers, à qui ils laissent le choix d'identifier les services informatiques les mieux adaptés à leurs besoins départementaux. Leur reste alors la tâche (certes difficile) d'orchestrer ces décisions locales afin d'en faire émerger une plate-forme d'entreprise cohérente, dont l'architecture est leur responsabilité la plus critique.

Fédération d'identité

La gestion des identités dans l'entreprise (ou, plus prosaïquement, la gestion des identifiants) est un cauchemar depuis (presque) toujours et la prolifération de progiciels, d'applications spécifiques et de solutions en cloud, combinée aux silos que représentent les différents départements de l'entreprise, rend, de nos jours, la situation réellement apocalyptique.

Typiquement dans leur rôle de chef d'orchestre, les DSIs peuvent apporter de l'ordre dans ce chaos, avec la mise en place d'une solution de fédération d'identité. Il s'agit d'un projet extrêmement ambitieux mais dont la valeur est incommensurable.

Transparence

Encore une idée qui n'est pas très naturelle pour la majorité des DSIs, quoiqu'elle revête une apparence triviale. En effet, quoi de plus naturel, au sein de l'entreprise, que d'afficher en toute transparence les coûts détaillés (réels !) des choix technologiques effectués par les utilisateurs ? Ainsi armés, ces derniers pourraient éviter des erreurs stratégiques et prendre des décisions plus avisées, d'autant plus s'il leur est clairement offert une palette de services adaptables à leurs besoins...

SaaS aggrégateur

Ce concept sera, de loin, le plus dérangeant de cette liste, mais il suit une évolution naturelle inéluctable. Dans toutes les organisations, le SaaS ("Software as a Service") est une approche de distribution du logiciel (sous forme de service, dans le cloud) qui ne fait plus débat, même si elle ne s'est pas encore imposée dans certains domaines stratégiques (par exemple le "core banking").

Or, de la même manière que les fournisseurs de services en "nuage" publics (Google, pour n'en citer qu'un) exploitent la masse de données dont ils disposent, les éditeurs SaaS vont se trouver en position de "fédérer" l'information qu'ils gèrent, dont l'analyse leur permettra de dégager des bonnes pratiques à répliquer ou d'identifier des tendances majeures utiles pour tous leurs clients (et monnayables).

Bien entendu, les questions de confidentialité et de sécurité que soulève cette hypothèse la rendent encore un peu lointaine. Il est cependant presque certain qu'elle prendra corps petit à petit, dans les offres, probablement d'abord sous une forme anodine.

En revanche, dans ce cas, le DSI ne sera pas à l'origine de l'innovation...

samedi 24 novembre 2012

Variations autour de l'épargne mobile

KeyBank myControl Banking
Les bonnes idées se développent, se combinent et s'enrichissent continuellement. La nouvelle application mobile de KeyBank, baptisé "myControl Checking", est justement de celles qui s'inspirent des réalisations antérieures, quelques-uns de ses "modèles" pouvant être repérés parmi, entre autres, (Bank)Simple, ImpulseSave ou encore, peut-être, Wells Fargo.

Le concept de base, désormais relativement classique, consiste à proposer aux clients d'associer à leur compte d'épargne des objectifs clairs et concrets ("s'offrir le nouvel iPad", "préparer les prochaines vacances"...), qui ont la vertu de mieux inciter les consommateurs à économiser régulièrement. Naturellement, l'application mobile permet de définir et suivre ces objectifs très facilement.

De l'autre côté, l'utilisateur a accès à son solde de compte courant et, plus intéressant, à son solde prévisionnel. Celui-ci est déterminé en prenant en compte les transactions enregistrées mais non exécutées (par exemple, les virements ou paiements de facture planifiés) ou les opérations récurrentes (salaires, règlements périodiques...). Si le cœur lui en dit, le mobinaute pourra même inscrire manuellement les futures transactions dont il a connaissance, pour affiner sa position.

Enfin, à la croisée du solde et de l'épargne, l'application présente son tableau de bord récapitulatif, sous une forme très graphique. Grâce à l'aperçu immédiat qu'il a des fonds disponibles sur son compte, le client va pouvoir réaliser un virement vers son compte d'épargne, en quelques gestes du doigt, et en affecter le montant à ses différents objectifs. Une autre manière de concevoir sa situation financière...

KeyBank myControl Banking

L'option choisie par KeyBank va à l'encontre de la tendance actuelle à intégrer dans la banque en ligne et mobile l'analyse des dépenses par catégories, qui devient aujourd'hui plus ou moins synonyme de "PFM". Pourtant, cette approche par l'épargne peut tout autant être qualifiée de "gestion de finances personnelles", d'autant plus qu'elle incite à l'action et ne se contente pas de laisser l'utilisateur simple spectateur de sa situation.

Il faut également noter que "myControl Checking" ne vise pas, pour l'instant, à remplacer l'application bancaire "classique" de KeyBank. Les deux ont des rôles (et, probablement, des audiences) suffisamment différents pour justifier une coexistence. Mais il serait aussi imaginable qu'à l'avenir la nouvelle venue s'enrichisse au point de fournir les mêmes services que sa grande sœur, et que soient ainsi mises à disposition des clients deux applications différentes, à sélectionner en fonction de leurs usages et préférences...

Information repérée grâce à NetBanker (merci !)

vendredi 23 novembre 2012

Invasion d'iPads dans les agences Barclays !

Barclays
Depuis sa sortie en 2010, l'iPad d'Apple séduit, autant les entreprises que le grand public. Cependant, en dehors des collaborateurs utilisant leur appareil personnel, son adoption dans les institutions financières reste assez limitée. Un des rares déploiements d'importance a été celui de BBVA (2 200 tablettes distribuées aux managers), annoncé au début de cette année.

L'information révélée aujourd'hui par "The Channel" constitue donc un événement d'importance : Barclays Bank aurait acheté 8 500 iPads ! Fait encore plus significatif, une porte-parole de la banque a confirmé que les tablettes seraient utilisées dans ses agences, afin d'améliorer les interactions avec les clients.

Aucune précision n'est donnée sur les applications qui seront mises en œuvre, mais un lecteur affirme, dans un commentaire de l'article, que certains hôtes et hôtesses d'accueil utilisent déjà l'iPad pour orienter les visiteurs. Les agences (modernisées) de Barclays étant organisées en espaces ouverts, sans guichets et sans bureaux, dans lesquels on se déplace librement, un appareil mobile est naturellement tout indiqué pour aller à la rencontre des clients.

Au-delà de ce premier cas d'usage, il semblerait qu'une application de crédit hypothécaire fasse partie des candidates à l'installation sur la tablette. Il est vrai que, pour une transaction de ce genre, relativement longue et complexe, la possibilité de partager l'écran entre le client et le conseiller, côte-à-côte, idéalement en favorisant les interactions directes, offre une expérience utilisateur incomparable par rapport à l'écran traditionnel, impossible à consulter sans contorsions, et les formulaires imprimés habituels.

Il ne s'agit là probablement que d'un début. En effet, pour justifier l'investissement consenti, qui est loin de se réduire à l'achat du matériel, Barclays va nécessairement étendre l'usage des iPads à d'autres applications bancaires, si elle n'envisage pas même un remplacement total des PCs actuels (ce qui serait tout de même extrêmement ambitieux).

Voilà peut-être une autre manière de réinventer l'agence bancaire et de la projeter au 21ème siècle, en prenant vraiment soin de la qualité des interactions entre clients et conseillers et en plaçant réellement le client au centre de la relation. Cela suffira-t-il à sauver le concept d'agence ?

mercredi 21 novembre 2012

Comment le gouvernement US soutient l'innovation

CFPB
Parmi d'autres effets plus visibles, la loi Dodd-Frank de réforme du système financier américain, issue de la récente crise bancaire, a conduit à la création du "Consumer Financial Protection Bureau" (CFPB – Agence de la Protection Financière des Consommateurs). Celui-ci vient de lancer le "Project Calatyst", une initiative destinée à promouvoir l'innovation dans le secteur des finances des particuliers.

Ce projet s'inscrit dans la mission du CFPB, d'offrir un accès pour tous les consommateurs à des marchés transparents, concurrentiels, équitables et innovants. Pour ce faire, l'organisation veut entamer une collaboration avec toutes les bonnes volontés disponibles, qu'elle soient individuelles ou qu'elles émanent d'entreprises, afin de déterminer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas dans la recherche d'une "meilleure vie financière" pour le grand public, par l'innovation.

Mais le réseau opère également dans la direction opposée. Ainsi, le canal de communication ouvert entre le gouvernement et les entrepreneurs est là aussi pour permettre à ces derniers de réagir aux réglementations émises et alerter sur les impacts qu'elles peuvent avoir sur leurs activités. De plus, le CFPB souhaite rester en contact étroit avec les tendances émergentes, de manière à préparer les éventuelles adaptations requises sur des lois conçues pour les produits d'aujourd'hui et non ceux de demain.

La première coopération mise en place vise à aider le CFPB à mieux comprendre les besoins, les attentes et les habitudes des consommateurs en matière de finances personnelles. Trois startups ont donc accepté de transmettre à l'agence les données qu'elles détiennent sur leurs clients (après anonymisation, tout de même) : BillGuard (détection des erreurs et fraudes dans les relevés de comptes), Plastyc et (Bank)Simple (deux modèles de banque "alternative"). L'objectif de cette initiative, ambitieux en soi, est d'utiliser la connaissance ainsi acquise pour prendre des décisions réglementaires éclairées !

Quand il est question de soutien public à l'innovation, on pense facilement (surtout en France) à des subventions et autres formes de financement plus ou moins direct. Sans chercher (évidemment) à se substituer à ces modèles mais plutôt dans l'optique de les compléter, le CFPB tente, avec son "Project Catalyst", d'adresser un des principaux obstacles se dressant devant beaucoup de startups innovantes du secteur financier : le cauchemar de réglementations souvent lourdes et inadaptées.

Il reste à voir si les discours seront suivis d'effets concrets mais, en tout état de cause, la démarche est pleine de bon sens et empreinte de pragmatisme. En effet, il est inutile de promouvoir ou subventionner des idées favorisant l'inclusion financière ou comblant les lacunes du système bancaire si les lois existantes les tuent dans l'œuf. Bien des jeunes pousses hexagonales aimeraient disposer ainsi d'un interlocuteur auprès de qui faire valoir leurs arguments...

mardi 20 novembre 2012

Enfin une application iPad digne de ce nom pour BNP Paribas

BNP Paribas
Rien ne sert de courir, il faut partir à point. La morale de La Fontaine est toujours d'actualité, même dans le monde digital, et BNP Paribas l'a appris à ses dépens. Première banque à lancer une application iPad en mai 2010, celle-ci a rapidement déçu ses utilisateurs et son "score" sur l'AppStore d'Apple a toujours été médiocre. Deux ans et demi plus tard, la version 2 tente de corriger le tir...

Disons-le d'emblée, la nouvelle mouture de "Mes Comptes" n'a rien à voir avec l'ancienne et permet (enfin) à BNP Paribas de concrétiser ses ambitions dans la banque mobile, même si cette réalisation n'est pas totalement exempte de défauts. Conception graphique particulièrement soignée, personnalisation de l'interface, navigation et manipulations plus intuitives, intégration avec les outils de communication... La (longue) liste des nouveautés et améliorations apportées démontre une véritable prise en compte des spécificités de la tablette tactile.

L'entreprise de séduction de l'utilisateur commence dès l'ouverture de l'application. Outre un mode "démo" (pour découvrir les fonctions proposées sans être client) et un mode "invité" (pour accéder aux services bancaires sur un iPad "étranger", sans laisser de traces), il découvrira immédiatement la possibilité de gérer les comptes de plusieurs titulaires sur un seul appareil, qui répond à la tendance observée de partager l'usage de la tablette entre les membres de la famille.

Mes Comptes sur iPad

Avec un peu d'attention, d'autres éléments révèlent le souci du détail des concepteurs : une photo d'arrière-plan illustre la météo générale des comptes (de l'orage au beau fixe) et un "double tap" sur l'image d'un profil permet d'afficher instantanément le solde du compte principal, sans authentification préalable. De plus, tout ceci peut être personnalisé : les seuils de changement de météo, l'affichage ou non du solde, les images utilisées pour représenter les utilisateurs et celles qui illustrent la "météo".

Une fois identifié, le client arrive sur un tableau de bord très complet, esthétique et, lui aussi, configurable à volonté. Il comporte une vue détaillée de l'évolution du solde du compte principal (choisi parmi tous les comptes détenus), à laquelle viennent s'ajouter des mini-modules à sélectionner parmi une liste qui devrait s'enrichir dans le futur. Une simple action sur ces "widgets" donne un accès direct à l'information complète correspondante (par exemple pour consulter le relevé d'opérations à partir de la vue du solde).

Mes Comptes sur iPad

Sont d'ores et déjà proposées des vues synthétiques pour chaque compte (autre que le compte principal), l'accès aux simulateurs, les informations de contact du conseiller... Il faut encore mentionner les modules Facebook et Twitter, qui présentent les fils d'activité de la banque et permettent d'interagir directement avec les équipes de SAV présentes sur les médias sociaux. Et le panorama sera (presque) complet avec l'option de tchat avec son conseiller.

Autre nouveauté importante et attendue, l'outil de gestion de finances personnelles de BNP Paribas (PFM) fait son apparition dans l'application. Malheureusement, il s'avère assez décevant. Les principaux reproches que je peux lui adresser concernent la catégorisation des opérations, qui reste manuelle, et la durée d'historique disponible, qui ne dépasse apparemment pas 4 mois (alors que la recherche d'opérations s'étend sur les 13 derniers mois). Il faudra donc attendre encore une prochaine version pour voir des améliorations dans ce domaine.

Linxo
Pendant ce temps, la pression du PFM s'accroît sur les banques. Coïncidence de calendrier, presque simultanément à la sortie de la nouvelle version de "Mes Comptes" de BNP Paribas, les deux leaders français (indépendants) du secteur, Linxo et Bankin', publiaient coup sur coup leurs propres applications pour iPad.

Pour la première, le succès a été fulgurant puisqu'elle a atteint la troisième position des meilleurs ventes d'applications payantes (toutes catégories confondues) en quelques heures, tandis que sa déclinaison pour Fortuneo ("Budget") se classait directement en tête des applications financières gratuites.

Le détournement d'une partie des accès aux services des banques au profit de ces outils tiers est donc bien en train de se concrétiser. Or, quand l'application de BNP Paribas intègre des fonctions de souscription de produits et services ou même de simples messages commerciaux, il devient critique de retenir les clients sur sa plate-forme. Celle-ci doit impérativement être à la hauteur pour concurrencer les nouveaux entrants.

Mais ne nous attardons pas trop longuement sur cette faiblesse de "Mes Comptes", qui ne concernera, pour l'instant, que quelques utilisateurs avertis et qui, espérons-le, sera rapidement corrigée. En réalité, la majorité des clients de BNP Paribas sera certainement comblée par cette nouvelle version. D'ailleurs, les notes qui lui sont attribuées (4 étoiles en moyenne, à l'heure actuelle) et les commentaires publiés depuis son lancement en fournissent un début de preuve, venant récompenser les efforts de la banque pour fournir un outil à la fois efficace et agréable à utiliser, magnifiquement adapté à l'iPad.

Les mauvais souvenirs de la première tentative sont presque oubliés, il s'agit maintenant de commencer à préparer la version 3... :-)

lundi 19 novembre 2012

Holvi, un compte bancaire pour les groupes

Holvi
Créer une banque entièrement nouvelle (comme Metro Bank au Royaume-Uni) reste un pari extrêmement ambitieux. Mais il existe une alternative, relativement simple à mettre en œuvre bien que plus contrainte, consistant à bâtir une offre originale et parfois disruptive, en s'appuyant sur les services d'un établissement "traditionnel".

C'est, entre autres, le modèle adopté par (Bank)Simple, avec un objectif de transparence dans la relation client, c'est aussi le choix de Tribed, qui veut constituer des communautés d'intérêt autour des finances personnelles. C'est désormais aussi l'option retenue par Holvi, une startup basée à Helsinki, qui propose de créer des comptes bancaires "de groupe".

Si vous gérez une association ou une petite entreprise, si vous organisez une collecte, si vous réalisez un projet à plusieurs... le site web de Holvi vous permet d'ouvrir un compte bancaire en quelques clics de souris. Vous pouvez ensuite en partager l'accès avec les membres de votre "communauté", soit en leur attribuant des droits complets, soit en autorisant seulement la lecture (une option qui pourrait être utilisée pour assurer la transparence d'une association recueillant des dons, par exemple).

Le premier avantage du compte Holvi est sa facilité et sa rapidité d'ouverture (ainsi que sa gratuité, seules les transactions donnent lieu à des frais), qui est mise en avant pour suggérer son utilisation pour tous les projets de groupe de la vie courante. Il faut noter au passage que cette capacité est apparemment rendue possible par la mise en place d'un service de vérification d'identité des demandeurs auprès de leur banque (une particularité finlandaise ?).

Holvi

La proposition de valeur de Holvi dépasse cependant très largement ce seul bénéfice. Un ensemble de services additionnels vient en effet compléter la seule gestion du compte bancaire. Sont notamment fournis un module de gestion de budget, un outil de création de boutique en ligne et de facturation, une solution de compatibilité et même une gestion de contacts (un mini-CRM, en quelque sorte).

Le tout fonctionne évidemment en mode collaboratif (avec tous les participants déclarés) et est totalement intégré, de manière à faciliter la vie (financière) de la communauté ! Par exemple, une facture va être automatiquement comptabilisée dès son émission, puis son règlement sera enregistré à la réception du paiement, en même temps que les informations du "payeur", tout en suivant en permanence les écarts par rapport au budget pré-établi.

Jusqu'à récemment, il semblait impossible de pouvoir déranger l'ordre établi de la banque. Or, en s'associant avec quelques institutions un peu plus visionnaires que les autres (pour Holvi, c'est la filiale finlandaise de Nordea qui joue ce rôle), de plus en plus de startups se lancent dans l'aventure et commence à construire les banques de demain, aux approches jusque-là inexplorées. Certes, elles sont encore handicapées par leur dépendance à un établissement traditionnel, mais le mouvement est lancé et sera irrésistible, à terme.

Actualité repérée grâce à L. Penou et O. Pekelman (merci !)

dimanche 18 novembre 2012

La banque de détail devient-elle plus innovante ?

EFMA
Comme chaque année, l'EFMA a réalisé, avec le concours d'Infosys, une grande étude internationale sur l'innovation dans la banque de détail, vue par les banquiers. Au-delà des grands titres qui annoncent une augmentation des budgets dans 70% des établissements, ce travail est une excellente opportunité d'analyser les orientations actuelles.

Sur le front des bonnes nouvelles, plusieurs tendances se révèlent largement positives. Point le plus important, un consensus se dégage parmi les responsables interrogés pour considérer que l'innovation est une de leurs priorités. De plus, même dans les régions développées, la cible privilégiée est la conquête de nouveaux clients et la croissance des revenus et non, comme on pourrait le craindre en ces temps économiquement difficiles, de réduire les coûts ou de se conformer aux dernières exigences réglementaires.

Bien évidemment, l'augmentation des budgets alloués à l'innovation en 2012 (par rapport à 2011), qui concerne presque 3 établissements sur 4 (73%, exactement), permet de confirmer les déclarations par les faits. Il en est de même pour l'importante part de ces ressources dévolue aux canaux d'interaction, au service client et à l'expérience utilisateur, qui s'inscrit donc dans la logique de croissance affichée.

La situation n'est cependant pas entièrement au beau fixe. La première faiblesse identifiée concerne la mesure de la performance. Seules 2 banques sur 5 ont mis en place des indicateurs d'évaluation de leurs processus d'innovation, généralement basés sur les revenus générés et/ou l'augmentation de la satisfaction utilisateur induite par l'introduction de nouveaux produits ou services. Or, si les budgets augmentent sans mesure des résultats, les risques de gaspillage croissent "naturellement".

En plongeant dans les détails des canaux pour lesquels l'innovation est jugée la plus importante, Internet et le mobile (classé premier en Europe) recueillent (heureusement !) les suffrages de la majorité des répondants. Et, fort logiquement, 87% reconnaissent l'importance des technologies pour atteindre leurs objectifs. Malgré tout, les investissements informatiques destinés aux agences restent lourds (27% du total), par rapport aux canaux web (25% globalement, 28% en Europe) et mobile (20%).

Au-delà de cette vision "individualisée" du paysage, l'intégration multi-canal est également considérée comme stratégique. Mais ceci n'est pas une nouveauté !

Encore plus précisément, quelles sont les pistes concrètes qu'explorent les banques ? Sur mobile, la localisation d'agence et de GAB ("Guichet Automatique de Banque") par réalité augmentée arrive en tête des innovations déployées (citée par 38% des banques), juste devant le paiement par mobile (35%). Pour l'avenir, les applications pour tablette devraient bénéficier de budgets significatifs dans les prochaines années et les promotions personnalisées et géolocalisées sont en émergence.

Sur le web, les outils de gestion de finances personnelles sont présents dans 29% des banques, tandis qu'un quart d'entre elles ont intégré les médias sociaux dans leur stratégie et un peu plus d'une sur 5 a adopté le tchat ou le click-to-call. La prochaine frontière visée est la souscription en ligne, qui devrait être entièrement automatisable, y compris pour les produits complexes, d'ici 3 ans. A plus long terme, la configuration automatique des produits semble faire partie des plans des banques.

Malgré ces statistiques flatteuses, le taux de déploiement d'innovations relatives aux canaux d'interaction reste faible, à ce jour. Ainsi, sur 22 idées qui leurs sont soumises, l'étude révèle que 58% des banques interrogées en ont déployé 4 ou moins, seulement. S'il faut en croire les déclarations des répondants, une forte accélération serait en cours mais il reste à voir si elle se confirme…

Innovation dans la Banque de Détail

En conclusion, les résultats de cette étude me semblent mitigés. Certes, les déclarations et les budgets pointent vers un progrès sensible de l'innovation dans les banques. Mais, à y regarder de près, il est aisé de percevoir un certain décalage avec la réalité : pour ne prendre que cet exemple, les offres promotionnelles personnalisées, envisagées seulement à moyen terme, risquent d'accuser un sérieux retard sur un marché qui commence déjà à se développer, sans les banques.

Au chapitre des réserves, il faut encore ajouter l'inquiétante lacune dans la mesure de la performance, qui peut conduire à d'immenses déconvenues, l'aberration que représente le niveau de dépenses dans le canal agence (à mettre en regard du point précédent) ou bien le faible taux d'adoption d'innovations, qui, de plus, n'en sont pourtant plus vraiment aujourd'hui.

Avec un brin de cynisme, on pourrait croire que ce que certaines banques appellent "innovation" est en réalité une tentative de rattraper leur retard (celles qui en sont encore à envisager la géolocalisation d'agence en réalité augmentée, 50% de l'échantillon, feraient mieux de ré-allouer leurs budgets). Quand il ne s'agit pas d'initiatives qui piétinent mais dont l'échec ne peut (veut) être prononcé (sur les 35% d'établissements qui déclarent avoir implémenté une solution de paiement mobile, combien peuvent afficher des revenus correspondants ?).

Non, décidément, ce rapport n'apporte pas que des bonnes nouvelles !

samedi 17 novembre 2012

Les nouvelles expérimentations de PayPal

PayPal
Depuis plusieurs mois, PayPal expérimente aux 4 coins du monde de nouveaux modes d'utilisation de sa technologie de paiement adaptés au commerce de proximité. Après la Suède et les États-Unis (parmi d'autres), ce sont les Pay-Bas et l'Australie qui sont le théâtre des derniers tests en date, avec, comme toujours, des approches radicalement différentes.

Le premier cas, en Australie, s'appuie sur PayPal Here, la réponse de la filiale d'eBay à Square. Comme je l'avais noté lors de son annonce, cette n-ième tentative de clonage semble beaucoup plus réfléchie que les autres (notamment celles qui ont cours en Europe) car, loin de se contenter de proposer une solution d'encaissement sur téléphone, avec l'indispensable accessoire de lecture de cartes de paiement, elle s'intègre également avec le porte-monnaie mobile du client, à l'instar de Square Wallet.

Or, c'est justement de ce côté que l'expérimentation australienne s'aventure, en copiant cette fois le principe du "paiement automatique" de Square. Comment cela fonctionne-t-il ? Lorsque le client se trouve à proximité d'une boutique partenaire, l'application PayPal installée sur son smartphone l'enregistre automatiquement ("check-in") auprès du terminal de point de vente du commerçant. Ce dernier peut alors imputer directement les achats sur son compte, après avoir vérifié son nom et sa photographie, sans que le consommateur n'ait la moindre action à réaliser.

Par rapport à son "inspirateur", PayPal ajoute une touche de confort supplémentaire, en permettant à l'utilisateur de sélectionner a posteriori la carte (ou toute autre modalité de paiement disponible) à laquelle sera affectée la dépense, s'il en a lié plusieurs à son compte.

Logiquement, parmi les services complémentaires désormais "habituels" dans le domaine, les options "marketing" sont aussi présentes pour, par exemple, proposer des offres spéciales (promotion, cadeau...) lorsque le client est dans le voisinage d'une boutique ou bien pour gérer un programme de fidélité.

Une différence importante entre cette implémentation et l'approche de Square est que PayPal choisit d'intégrer sa technologie au terminaux de point de vente existants et non de développer sa propre solution (cf. "Square Register"). Ses multiples partenariats avec les fournisseurs du secteur lui permettent de s'affranchir de cet effort et, surtout, de séduire des marchands déjà équipés. Il paraît cependant probable qu'une application dédiée émerge rapidement une fois passé le stade de l'expérimentation (le cas échéant).


9 Straatjes App
La deuxième opération, qui vient d'être lancée à Amsterdam, choisit une tout autre cible, puisqu'il s'agit de combiner commerce de proximité et mobile, le paiement n'étant dans ce cas qu'une (petite) composante d'un parcours client réinventé. Une trentaine de boutiques du cœur historique de la ville, De 9 Straatjes ("Les 9 Rues") participent à cette expérience originale.

En résumé, le dispositif repose sur une application mobile dédiée et l'installation de QR codes dans les commerces partenaires. Lorsque l'utilisateur aperçoit un article qui l'intéresse dans une vitrine, il lui suffit de scanner le code du marchand pour "entrer" dans une boutique virtuelle sur son téléphone et commander en un clic le produit repéré (qu'il pourra payer via PayPal, bien entendu).

L'idée sous-jacente est de prolonger ainsi les horaires d'ouvertures des commerces "en dur" et de permettre aux consommateurs de satisfaire leurs envies d'achats (impulsifs ?) même au milieu de la nuit. Naturellement, l'objectif est aussi de limiter les transferts de dépenses vers la concurrence du commerce en ligne.


Malgré les Cassandre qui estiment que PayPal a perdu sa capacité d'innovation et va progressivement s'effacer au profit des nouveaux "disrupteurs", l'entreprise n'entend pas se laisser distancer dans la course au "nirvana" du paiement et du commerce sur mobile. Sa stratégie consistant à multiplier les expériences, toutes différentes, qui trouve encore ici une illustration exemplaire, se révélera inévitablement plus payante que celles qui s'enferrent dans un modèle unique dont personne ne veut.

vendredi 16 novembre 2012

Une carte Visa pour les enfants de 8 ans ?

PktMny
Dans le domaine des services financiers destinés aux enfants, les derniers mois ont vu se succéder, entre autres, Virtual Piggy, fonctionnant en circuit fermé et étroitement contrôlé par les parents, Bankiwi, sur un concept proche d'une tirelire en ligne, ou encore "Mighty Savers" de la singapourienne OCBC, plutôt axé sur l'épargne.

En parallèle, se sont également développés des offres de cartes prépayées ciblant spécifiquement les jeunes de 12 à 18 ans, comme celle de Bemix (Crédit Mutuel Arkea). La course aux nouveaux clients ne s'arrête pourtant pas là, puisqu'une jeune pousse britannique, PktMny, propose désormais aux parents d'allouer l'argent de poche de leur progéniture sur une carte Visa, dès l'âge de 8 ans !

Naturellement, des garde-fous (classiques) sont mis en place. Tout d'abord, la carte est conçue pour rejeter toute tentative de paiement de produits ou services réservés aux personnes majeures (alcool, tabac, bar...). Ensuite, les parents peuvent fixer leurs propres limites, et, par exemple, interdire le retrait d'espèces dans les GABs, les achats sur internet ou en boutique, spécifier les types de commerce (en ligne ou de proximité) dans lesquels son utilisation est possible ou encore fixer des plafonds de dépense par catégorie.

PktMny

L'objectif affiché pour PktMny se veut éducatif. Il s'agirait en effet, comme dans la plupart des initiatives de ce genre, de sensibiliser les enfants dès leur plus jeune âge à la gestion de leur argent mais aussi, et ce positionnement est un peu plus original, de les habituer à l'utilisation d'une monnaie dématérialisée, qui devient effectivement de plus en plus importante dans la vie courante des consommateurs. Regrettons néanmoins le choix d'une technologie (la carte) dont beaucoup espèrent qu'elle soit obsolète quand ces enfants seront devenus majeurs !

Si vous êtes choqués par l'offre de cette nouvelle startup, sachez que vous n'êtes pas seuls... L'article qu'y a consacré The Guardian suscite des réactions virulentes qui sont extrêmement intéressantes à consulter, même s'il faut rester prudent avant toute généralisation.

La principale critique concerne (évidemment) le ciblage des jeunes enfants mais il en est une autre beaucoup plus surprenante : pour certains, le fait de donner l'argent de poche sous la forme d'une carte fait disparaître la perception "physique" de la monnaie (sonnante et trébuchante) et finirait par rendre ces futurs consommateurs financièrement irresponsables ! Les aficionados de la disparition future des espèces ont du souci à se faire...

En dehors de ce "détail", le principal enseignement de cette expérience est donc qu'il existe une limite claire aux opportunités de proposer des produits et services bancaires aux enfants : il ne semble pas y avoir de résistance majeure jusqu'à 12 ans mais il est dangereux d'aller en deçà. Et le message est d'autant plus important à enregistrer qu'il est, dans de nombreux commentaires, adressé aux banques (bien que PktMny n'en soit pas une).

jeudi 15 novembre 2012

La personnalisation arrive dans les apps mobiles

Fidelity
Les applications mobiles prenant de l'importance dans les usages des consommateurs, les institutions financières sont naturellement enclines à ajouter de multiples fonctions dans leurs logiciels, parfois au détriment de leur facilité d'accès et d'utilisation. Pour lutter contre ce risque sournois, les options de personnalisation commencent à se répandre...

Maybank constituait un des premiers modèles de cette tendance, il y a 3 mois. En voici un autre, dans un registre un peu différent, avec les nouvelles versions (pour iPhone et Android) de l'application de trading que vient de dévoiler Fidelity Investments. L'approche choisie est similaire à celle de la banque malaisienne : seul l'écran d'accueil peut être personnalisé par le client, qui pourra choisir parmi les 9 configurations proposées et en adapter le contenu à ses préférences.

L'idée est particulièrement sensée pour ce type d'application, dont les profils d'utilisateurs peuvent être très différents. Ainsi, par exemple, entre les investisseurs qui se constituent une liste de valeurs à surveiller, ceux qui s'intéressent aux marchés des devises, ceux qui scrutent la position de leur compte et ceux qui veulent simplement suivre les principaux indices, il est clair que l'information à délivrer en priorité, dès la connexion, ne devrait pas être la même.

Evidemment, toutes ces options (et bien d'autres encore) restent toujours accessibles mais la navigation dans les menus sur un smartphone n'est pas toujours très pratique ni très rapide et les utilisateurs apprécieront de ne pas avoir à réaliser de multiples manipulations pour atteindre les écrans qu'ils consultent le plus fréquemment.

Fidelity sur Android

Comme toujours dans ce cas, la question se posera de l'utilisation réelle par les utilisateurs des possibilités de configuration du logiciel qui leur sont offertes. Dans le cas d'une solution de trading, dont les clients ont probablement une certaine habitude de naviguer dans des interfaces relativement complexes, le réflexe ne devrait pas être trop difficile à acquérir, surtout si l'accès à la personnalisation est suffisamment visible.

Dans un autre contexte, notamment celui d'une application bancaire "classique", la réponse risque d'être moins tranchée. Pourtant le problème va devenir de plus en plus sensible, au fur et à mesure de l'ajout de nouveaux services. L'approche consistant à multiplier les applications, chacune remplissant une fonction unique, atteint rapidement ses limites car la lisibilité d'une telle offre n'est pas idéale.

Une solution pourrait donc être de miser sur la personnalisation, mais il faudrait rendre celle-ci implicite et contextuelle, donc automatique. Dans un premier temps, le principe pourrait être simplement de rassembler sur l'écran d'accueil les fonctions les plus souvent utilisées, tout en maintenant un "socle" stable pour éviter de trop perturber le mobinaute.

Il devrait également être possible de prolonger cette logique au-delà de la première page : par exemple, proposer par défaut le bénéficiaire le plus fréquent lors d'une demande de virement (voire adapter cette sélection en fonction des dates d'opérations récurrentes...). Autre idée (inspirée par des cas existants), mettre en avant l'action la plus pertinente par rapport à la situation actuelle des comptes, en accompagnement d'une alerte ("votre compte courant va être à découvert, appuyez ici pour réaliser un virement depuis votre compte épargne").

Et comme je dis toujours : il reste tellement à inventer dans la banque mobile !

mercredi 14 novembre 2012

La réponse de Bank of America à Square

Bank of America
Deux ans et demi après le lancement de Square, son succès incontestable (validé par plus de 2 millions d'utilisateurs) a fini par réveiller les mastodontes du secteur financier. La riposte de Bank of America, avec l'annonce de "Mobile Pay on Demand", est certes "un peu" tardive mais le délai de réaction a été mis à profit pour élaborer une solution aux arguments plutôt convaincants.

Sans grande surprise, "Mobile Pay" est donc un système complet, (matériel, logiciel et service), permettant à toute personne d'accepter des paiements par carte (Mastercard, Visa, Discover, AmEx) sur son mobile (Android ou iPhone). Il s'agit vraisemblablement d'une première pour une banque américaine, si on met de côté les quelques établissements qui se sont déjà positionnés en distributeurs de solutions tierces (celles de Square ou autres).

L'approche retenue est presque exactement calquée sur l'"originale" : le lecteur de carte (exploitant la piste magnétique) et l'application pour smartphone sont fournis gratuitement, aucun frais fixe n'est facturé et la commission prélevée sur chaque paiement est alignée sur la concurrence (le taux de base est de 2,70%). Enfin, les clients possédant un compte professionnel dans la banque bénéficieront d'un accès aux fonds dès le lendemain de la transaction, y compris pour celles qui sont exécutées en dehors des heures ouvrées.

En dehors de quelques détails (notamment la complexité de la grille tarifaire dans certains cas spécifiques), le cœur de l'offre s'avère donc capable de séduire les petits marchands ciblés jusqu'à maintenant par Square. La startup conservera cependant l'avantage avec les extensions (gratuites) qu'elle a ajoutées depuis ses débuts autour de son système d'encaissement, à savoir son porte-monnaie mobile "Wallet" et son logiciel de gestion de point de vente "Register".

Mobile Pay on Demand

Pour sa part, Bank of America a aussi d'autres arguments à faire valoir auprès de ses clients, à travers ses offres marketing, qui leur offrent une visibilité incomparable auprès de millions de détenteurs de comptes. Les utilisateurs de "Mobile Pay on Demand" ont en effet accès aux plates-formes de diffusion de promotions de la banque, qui leur permettent de distribuer (en particulier dans les relevés de compte en ligne) des coupons de réduction, invitations spéciales et autres cadeaux, ciblés selon le profil du porteur de carte.

En résumé, Bank of America semble réussir son positionnement face à Square, en proposant une solution très proche sur les composants de base mais en sachant tout de même marquer sa différence, celle-ci ayant de plus le potentiel d'attirer spécifiquement la cible de clientèle (de TPE et PME) la plus profitable.

En comparaison, la situation en Europe (et, encore plus, en France) est sensiblement différente. Les clones de Square y sont tout juste émergents tandis que les banques commencent déjà à prendre leurs marques (par exemple BNP Paribas ou, bientôt, sa filiale belge, Fortis). Même si toutes ces initiatives se ressemblent, elles sont handicapées aujourd'hui, par rapport à leurs équivalentes américaines, par les exigences de sécurité propres à nos cartes à puces.

Ainsi, la nécessité de proposer une saisie de code PIN sur un dispositif séparé (donc coûteux) rend l'équation économique quasiment impossible à résoudre. Car le modèle de Square est typique de la longue traîne ("long tail") chère à Chris Anderson : il ne fonctionne que par l'existence d'une quantité importante de petits marchands réalisant chacun relativement peu de transactions. Or ils ne peuvent être "captés" que si l'accès au marché est gratuit (ou presque) pour eux, ce qui semble, de fait, exclu de notre côté de l'Atlantique.

Conclusion, je suis extrêmement pessimiste sur la possibilité d'une disruption comparable à celle qu'a créée Square aux États-Unis. Les tentatives actuelles de réplication pourront peut-être faire bouger légèrement les lignes (et les banques ont toutes les chances d'en profiter en priorité) mais il ne paraît pas envisageable d'atteindre un véritable marché de masse (seul viable pour une startup) avec les recettes existantes.

Et si la seule solution de démocratisation de l'encaissement sur mobile est de traiter les transactions en mode CNP ("Carte Non Présente", c'est-à-dire comme en paiement en ligne) ou d'utiliser des artifices complexes (comme le fait iZettle pour se conformer aux demandes de Visa), pour soi-disant satisfaire les exigences de sécurité des réseaux de paiement, alors les clones de Square sont sur une fausse piste et ce sont PayPal et ses équivalents qui détiennent les clés du succès, car les enjeux deviennent totalement différents, déplacés, entre autres, sur le terrain de la lutte contre la fraude.

mardi 13 novembre 2012

Bloomberg inaugure son AppStore

Bloomberg
Depuis son "invention" (sous sa forme moderne) par Apple et grâce à son succès phénoménal sur smartphone, le concept d'AppStore imaginé par Apple (sous sa forme moderne) suscite des vocations dans tous les recoins du secteur financier. Même les institutions "historiques" sont maintenant concernées, comme en témoigne l'ouverture de l'"App Portal" de Bloomberg.

Dès maintenant, les clients des services professionnels de Bloomberg ont ainsi accès à plus de 45 nouvelles applications qui viennent enrichir son offre originale. Ces solutions peuvent exploiter les flux de données et d'informations de la plate-forme, pour fournir des capacités complémentaires d'analyse, de gestion de portefeuille, de suivi de risque..., avec l'avantage de fonctionner au sein du terminal déjà présent sur les bureaux de 300 000 utilisateurs dans le monde.

l'App Portal ne peut (évidemment) exister que parce que son fournisseur a préalablement ouvert son système aux développeurs tiers, grâce à des APIs ("Application Programming Interface") qui leur donnent un accès programmatique à ses données. Astucieusement, Bloomberg profite de cette opportunité pour mettre la même possibilité à la disposition de ses clients. Ceux-ci pourront donc créer leurs propres applications (pour une utilisation exclusivement interne), intégrées de la même manière dans la plate-forme.

Bloomberg App Portal

Cette initiative n'est pas la première du genre : le précédent d'UNX, par exemple, date de presque un an et cible les mêmes usages. Il est possible que l'organisation relativement traditionnelle que représente Bloomberg aujourd'hui  soit "chatouillée" par l'innovation dont font preuve ses concurrentes plus jeunes et plus agiles et soit ainsi placée dans une position défensive, la poussant à se remettre en question.

La différence de culture avec un esprit "startup" reste malgré tout encore très visible, notamment dans les modalités d'accès offertes aux développeurs. A l'inverse des habitudes de l'ouverture d'APIs, les idées d'applications doivent ici être soumises à Bloomberg avant que la réalisation ne puisse effectivement commencer.

Quoi qu'il en soit, l'ambition affichée avec l'App Portal est parfaitement en ligne avec son temps. Il s'agit, classiquement, d'une part, d'offrir aux clients des solutions innovantes complétant l'offre existante et, d'autre part, de permettre à des développeurs (ou des chercheurs) aux moyens modestes d'atteindre un important marché d'utilisateurs professionnels. Bloomberg n'est pas en reste parmi les gagnants du modèle, puisque, outre la perspective d'améliorer le taux de rétention de ses clients, l'entreprise prélèvera 30% du prix de vente des services distribués dans sa boutique...

En synthèse, l'approche de Bloomberg n'est pas sans maladresses – essentiellement au niveau du processus d'enrôlement des développeurs et de l'hésitation manifeste entre l'envie de générer des revenus et la promotion de l'innovation (qui, par rapport à la concurrence, me semblerait prioritaire) – mais elle démontre que l'ouverture sur l'extérieur est accessible à toutes sortes d'entreprises et selon différents modèles !

lundi 12 novembre 2012

Gartner : le futur du Système d'Information

Gartner
Parmi d'autres facteurs, l'innovation technologique, l'évolution des cultures qui l'accompagne et le contexte économique auront nécessairement, à moyen terme, un impact profond sur l'organisation des DSI (Direction des Systèmes d'Information) dans les entreprises. Selon les analystes de Gartner, nous sommes en passe d'atteindre un point de rupture important.

Aujourd'hui, déjà, le changement devient visible, avec l'émergence d'une nouvelle génération de responsables qui considèrent que leur rôle ne se résume plus à faire fonctionner les systèmes informatiques mais est plutôt d'accompagner la stratégie de l'entreprise, grâce aux technologies. Cette tendance, sensible depuis quelques temps, s'accélère actuellement et devrait atteindre son paroxysme d'ici 5 ans.

Dans cette perspective, Gartner tente d'imaginer les scénarios de transformation les plus plausibles et leurs implications pour les responsables des DSI. C'est ainsi que le cabinet identifie 4 futurs possibles pour les organisations informatiques, qui ne sont d'ailleurs pas exclusifs et pourront être combinés pour définir leur fonction dans l'entreprise de demain. A chaque cas proposé est également associé un nouveau rôle que devra assumer le directeur des Systèmes d'Information.

La DSI en fournisseur de services
Dans ce scénario, le département informatique devient un fournisseur centralisé de services partagés, fonctionnant comme une entreprise à part entière, avec une forte focalisation sur la valeur apportée aux métiers, supportée par une approche "marketing" de son positionnement.

Rôle du DSI : intégration et optimisation.

La DSI en salle des machines
Plus proche du modèle "traditionnel", celui-ci décrit une structure conçue pour délivrer des capacités informatiques à des conditions hautement compétitives. Basé sur une expertise dans les domaines de l'optimisation des ressources et de la gestion des approvisionnements et des fournisseurs, complétée par l'attention permanente aux évolutions du marché, il permet d'offrir des solutions au meilleur prix, rapidement adaptables aux nouvelles demandes.

Rôle du DSI : ingénierie et "courtage".

Le SI est le métier
Ce scénario plus ambitieux devrait être celui à privilégier dans le secteur des services financiers. Il se fonde sur le principe que l'information est indissociable des "produits" de l'entreprise. En conséquence, le métier est organisé autour des flux d'information et le SI constitue donc un composant clé de la chaîne de valeur, à laquelle il doit apporter sa contribution directe, notamment par l'innovation. Dépassée et oubliée la classique fonction de support dévolue à l'informatique !

Rôle du DSI : exploration et innovation.

Tout le monde fait le SI
Avec cette approche particulièrement disruptive, tous les acteurs de l'entreprise adoptent les technologies et exploitent l'information, pour faire tomber les frontières entre silos traditionnels. Elle favorise la créativité et la collaboration mais, en raison de son côté quasi-anarchique, elle sera plutôt réservée à des situations non conventionnelles (dans un contexte de startup, par exemple).

Rôle du DSI : facilitation et orchestration.

Tous les directeurs de Systèmes d'Information devraient s'interroger sur le futur de leur organisation, en fonction de la stratégie de leur entreprise, et commencer à préparer l'évolution correspondante de leur rôle. Ces 4 scénarios leurs donnent les premières pistes de réflexion...

dimanche 11 novembre 2012

Quand une banque commercialise ses "big data"

UBank
Le sujet est extrêmement sensible mais rien ne semble pouvoir arrêter la tendance : l'exploitation des données des consommateurs à des fins commerciales se développe, que ces derniers le veuillent ou non. Après le cas récent de l'opérateur Telefónica, c'est une banque qui se lance cette fois dans l'aventure.

Au premier abord, l'initiative que vient de lancer UBank peut paraître anodine. PeopleLikeU propose en effet aux australiens de comparer leurs habitudes de dépenses avec celles de leurs concitoyens. Concrètement, après avoir renseigné ses caractéristiques démographiques et économiques (sexe, âge, niveau de revenus, lieu de résidence...), le visiteur va pouvoir consulter quelques statistiques sur les personnes au profil comparable au sien, sur un ensemble de postes budgétaires (alimentation, voyages, loisirs...).

L'objectif est, selon la banque, de satisfaire la curiosité naturelle des consommateurs et de leur permettre, par exemple, de déterminer les différences de comportements entre deux régions du pays ou, plus simplement, d'évaluer avec précision leur situation financière par rapport à la moyenne de leurs pairs.

L'approche n'est, jusque-là, pas très originale (elle rappelle, notamment, le Diagnostic Épargne du Crédit Agricole Pyrénées Gascogne) mais le niveau de détail que fournit le service est déjà plus impressionnant. Car, outre les budgets moyens, il présente également les fournisseurs et commerçants "préférés" dans les différents domaines couverts et pour chaque catégorie de consommateurs. PeopleLikeU illustre ainsi parfaitement la valeur des données détenues par la banque.

People Like U

Or cette valeur est également commerciale et National Australia Bank (NAB), le groupe financier dont UBank est la filiale de banque en ligne, n'hésite pas à l'exploiter. Car, en explorant les dessous du site PeopleLikeU, on découvre qu'il s'appuie sur l'offre "Market Blueprint" d'une société spécialisée dans l'analyse marketing (Quantium), dont la matière première est fournie par... NAB !

Voilà donc le premier cas (public) que je rencontre d'une banque qui vend les données (anonymisées, évidemment) qu'elle collecte à partir des transactions réalisées par ses clients. Comme le souligne la présentation de "Market Blueprint", il s'agit d'une source inestimable d'information pour identifier des positions sur un marché, déterminer les profils d'achat des consommateurs, repérer les tendances du commerce de détail...

Comme je l'évoquais en introduction, il ne faut pas être surpris d'une telle initiative, tant est forte la tentation de commercialiser la mine d'information dont disposent naturellement les banques sur leurs clients. En revanche, il est relativement étonnant qu'elle ait pu être exécutée en toute discrétion (le partenariat entre NAB et Quantium semblant dater de 4 ans, qui plus est), sans soulever, apparemment, de résistance particulière sur son utilisation de données privées.

Par contraste, la réaction virulente à la commercialisation par MasterCard du même type d'information à des fins de ciblage publicitaire démontre que le sujet peut-être très délicat à traiter. Quoi qu'il en soit, la brèche est désormais ouverte et elle risque de déclencher, d'un côté (celui des banques), une ruée vers une nouvelle source de revenus et, de l'autre (celui des consommateurs), un mouvement de rejet dangereux (encore une fois) pour l'image des institutions financières. L'atteinte de l'équilibre entre ces deux pôles d'opposition demandera un peu de temps...