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C'est pas mon idée !

lundi 31 décembre 2012

NAB, une transformation exemplaire

NAB
Le besoin de rénover en profondeur les cœurs de systèmes informatiques commence à se faire sentir dans les institutions financières du monde entier. Mais nulle part comme en Australie la tendance n'a encore pris autant d'ampleur. Un article de la revue American Banker sur le chantier en cours à la National Australia Bank (NAB) permet d'en tirer quelques enseignements utiles.

A l'instar de ses consœurs locales (j'ai déjà eu l'occasion d'écrire sur le cas de CommBank), le projet "NextGen" de NAB – qui fait partie d'un programme de transformation plus large, impliquant aussi le réseau d'agences, les centres d'appel, les médias sociaux... – a été lancé il y a quelques années (en 2009), déclenché par le constat du rythme accéléré d'évolution des technologies et des attentes des clients, auquel le système existant devenait incapable de faire face.

Et, comme dans la plupart des initiatives similaires, NAB a fait le choix d'une solution du marché (en l'occurrence il s'agit d'Oracle Banking que le géant du logiciel vient de lancer), abandonnant donc une longue tradition de développement spécifique interne (commune, hélas, à toutes les banques que je connais !). Les arguments évoqués pour justifier cette orientation sont simples : les progiciels actuels ont atteint une excellente maturité et offrent une trajectoire d'évolution (à long terme) claire et cohérente.

Cependant, la stratégie de NAB comprend également ses particularités. La première d'entre elles est son approche du déploiement du nouveau système, qui constitue évidemment un défi majeur de ce type de chantier. Ainsi, c'est UBank, sa filiale de banque exclusivement en ligne, qui a servi de cobaye pour valider l'implémentation. Un choix triplement intelligent, parce qu'il concerne une population limitée de clients (300 000, tout de même), potentiellement plus compréhensifs à des dysfonctionnements informatiques éventuels ou à des ajustements nécessaires et aussi plus réceptifs aux innovations qui deviennent possibles avec cette rénovation.

Autre originalité, dans l'infrastructure cette fois : la banque adopte le "cloud computing" pour héberger ses applications en rationalisant au maximum ses investissements. Mais le modèle retenu n'est pas tout à fait classique, puisque, bien que basé sur l'offre d'infrastructure à la demande d'IBM, tout est installé dans les centres de production de NAB. A la clé, tous les bénéfices de flexibilité d'un nuage public (y compris une facturation à l'usage) sans les inquiétudes et risques associés (notamment en termes de sécurité).

Dernier impact notable du chantier, l'organisation a été revue. La disparition du poste de CIO ("Chief Information Officer", ce qui correspondrait à peu près à un "DSI Groupe" en France) peut paraître anecdotique mais la nomination, à sa place, d'un "directeur général de la transformation d'entreprise" est certainement plus significative, reconnaissant implicitement (et concrètement, à travers sa responsabilité dans l'architecture d'entreprise, par exemple) le rôle de l'informatique dans l'ensemble des métiers de la banque.

Ecrivant ces lignes le 31 décembre 2012, cette démonstration d'une transformation réussie (jusqu'à maintenant) m'incite à proposer aux banquiers de s'en inspirer pour prendre au moins une résolution ambitieuse pour 2013 : lancer les réflexions, sinon les projets, en vue de remplacer leurs systèmes obsolètes.

dimanche 30 décembre 2012

Sur Facebook, BNP Paribas n'a pas que des amis

BNP Paribas
Avec ses plus de 200 000 fans, BNP Paribas ambitionne d'être parmi les banques les plus suivies sur Facebook. Depuis une dizaine de jour, une série de vidéos publicitaires, vantant les mérites des solutions mobiles de la marque, est diffusée sur le réseau social et me donne l'occasion d'analyser la valeur de cette stratégie.

Je dois tout de même préciser d'emblée que je ne prétends pas me livrer à une étude scientifique, que je ne suis pas spécialiste du marketing et de la communication et que je ne comprends probablement pas grand chose à la dynamique des réseaux sociaux. En dépit de cette incompétence (!), les réactions publiques à la campagne de BNP Paribas sont tellement fascinantes que je ne résiste pas à l'envie de les partager (et les commenter).

Pour donner un peu de contexte, il faut savoir que, en moyenne, les messages "habituels" publiés par le profil BNP Paribas Net recueillent quelques dizaines de "likes", suscitent une vingtaine de commentaires et sont partagés moins de 10 fois. A l'opposé, dans le cas de ces publicités, les scores explosent : jusqu'à plus de 1500 "likes" et 300 commentaires (mais à peine plus de partages). Par exemple, pour la plus récente (sur l'application KIX), 24 heures ont suffi pour atteindre 500 "likes" et plus de 100 commentaires :

BNP Paribas KIX sur Facebook

Malheureusement, ce niveau d'engagement n'est pas qu'une bonne nouvelle puisqu'il s'avère qu'environ 95% des commentaires sont négatifs, une bonne partie d'entre eux étant même relativement violents. Ce ne sont pas les produits et services présentés qui sont en cause. Les "mécontents" expriment, à une très large majorité, leur haine de BNP Paribas et des banques en général ou bien leur colère face aux publicités qu'ils reçoivent sur leur mur.

Bien entendu, je suis conscient que toute publicité a forcément ses détracteurs, que ce soit à titre individuel ou par principe. Cependant, le niveau atteint ici me semble très élevé, puisque, grosso modo, pour 5 "likes" attribués (une simple action sur un bouton), 1 utilisateur prend la peine de "rédiger" et partager sa désapprobation... Comme, de surcroît, les avis émis via le réseau social sont par nature viraux, je me demande vraiment si l'opération n'est pas finalement contre-productive ?

Avec mon regard extérieur, cette expérience m'incite en effet à penser que Facebook n'est pas un support publicitaire idéal pour les banques actuellement. A tout le moins, il doit être difficile pour les responsables de la campagne de BNP Paribas de voir autant de réactions négatives, face auxquelles ils sont assez désarmés (aucune réponse "officielle" n'est publiée et il s'agit certainement d'un choix raisonnable).

samedi 29 décembre 2012

Où en est la sécurité de la banque à distance ?

Sécurité
S'il est un sujet qui n'a pas connu en 2012 une actualité palpitante par l'innovation qui y a régné, c'est bien la sécurité de la banque à distance. Certes, de nouvelles solutions ont vu le jour, mais sont-elles arrivées au sein des sites web et applications mobiles que nous utilisons tous les jours ? Je n'en ai pas l'impression...

En revanche, du côté des menaces, il n'y a pas eu de repos et les techniques des pirates et autres fraudeurs se sont encore perfectionnées. En parallèle, de récentes enquêtes réalisées auprès des consommateurs ont de quoi susciter de nouvelles inquiétudes. Voilà deux bonnes raisons, que je vais illustrer par l'exemple, pour sonner l'alarme et suggérer aux institutions financières de redoubler d'efforts avant une catastrophe qui semble imminente.

Commençons par les nouvelles du front. Alors que les banques européennes ont désormais largement généralisé le recours à un mot de passe à usage unique ("OTP"), envoyé par SMS, pour valider les transactions "sensibles" sur leurs sites web, les attaques sur cette technologie sont en voie d'industrialisation. Depuis la première du genre, détectée il y a plus de 2 ans, les évolutions se sont suivies pour aboutir, au cours de l'été dernier, à la campagne Eurograbber, qui a permis à ses auteurs de détourner 36 millions d'euros, issus de 30 000 comptes, dans une trentaine d'établissements.

Le mode opératoire de ces logiciels malveillants n'a pourtant pas changé : les pirates introduisent un programme sur le PC de la victime, modifiant discrètement le comportement des services de banque en ligne. Lorsque l'utilisateur accède à ces derniers, il lui est demandé de fournir des informations à propos de son téléphone mobile, à des fins supposées de sécurité. En réalité, elles sont exploitées pour lui faire installer un petit utilitaire qui va simplement détourner les SMS envoyés par sa banque et donner ainsi aux malfaiteurs le contrôle total de ses comptes.

En résumé, pour les escrocs, il n'aura fallu que deux ans pour passer d'un concept expérimental à un modèle "rentable" (qui, d'ailleurs, pourrait aussi être décliné pour attaquer le protocole 3-D Secure du commerce en ligne). Il n'en faudra probablement pas autant pour qu'il devienne universel. Il est donc urgent pour les banques de ne plus considérer que le code envoyé par SMS est inviolable et de développer de nouvelles protections sur leurs systèmes.

L'impératif est d'autant plus critique que, dans le même temps, les consommateurs ont tendance à baisser les bras face aux risques qu'ils encourent et à se reposer entièrement sur leurs institutions financières pour sécuriser leurs actifs, même s'il ne s'agit que de compenser les pertes qu'ils subissent. C'est en tous cas ce qui ressort d'une enquête réalisée par l'éditeur de logiciels de sécurité Kaspersky Lab au Royaume-Uni (et rien ne permet de supposer que les résultats seraient sensiblement différents en France).

Concrètement, moins de la moitié (45%) des 2000 adultes interrogés a pris l'initiative d'installer un logiciel de sécurité avant d'utiliser des services de banque en ligne. Au total, 4 personnes sur 5 comptent principalement ou exclusivement sur les mesures prises par leur établissement pour protéger leurs comptes. Quelle raison à cette désaffection ? Selon les auteurs de l'étude, les consommateurs sont tellement convaincus (notamment par les fictions TV et le cinéma) qu'il est impossible de faire reculer un hacker déterminé qu'ils jugent inutiles de se préoccuper eux-mêmes de la sécurité.

Conclusion, les banques vont devoir prendre le taureau par les cornes. Tout d'abord, il leur faut poursuivre et accroître leurs efforts de sensibilisation et d'éducation des consommateurs, car il serait extrêmement dangereux de laisser la dérive se poursuivre. Simultanément, il faut aussi prendre conscience des limites de cet exercice pédagogique et mettre en place les dispositifs qui vont pallier aux déficiences des clients.

La sécurité est une course permanente, qui ne peut se satisfaire de la moindre pause et requiert constamment des ajustements et des innovations pour rester pertinente.

vendredi 28 décembre 2012

US Bank Go Mobile, l'application "tout compris"

US Bank Go Mobile
Après quelques expérimentations ciblées, US Bank vient de franchir une étape décisive dans sa stratégie mobile : la nouvelle version de son application "Go Mobile" propose désormais une expérience de la carte de crédit sur smartphone, entièrement intégrée, de la souscription à la gestion des dépenses, en passant par le paiement lui-même et l'accès aux offres promotionnelles.

Ainsi, "Go Mobile" sera pour le consommateur le seul point de contact avec la banque dont il aura jamais besoin. Une fois l'application [lien iTunes] installée sur son iPhone, il suffit de suivre les instructions fournies à l'écran pour faire une demande de carte de crédit. Dans la majorité des cas, la réponse est instantanée et, si le dossier est accepté, une carte virtuelle est mise à disposition du nouveau client immédiatement.

Celle-ci comprend toutes les informations nécessaires – numéro, échéance et CVV (le code de sécurité) – pour réaliser des paiements en ligne et dans les commerces "physiques" qui acceptent cette possibilité. Cette carte temporaire est utilisable pendant 30 jours, en attendant la réception de la "vraie" carte en plastique. Dans tous les cas, l'application "Go Mobile" permet au porteur de suivre ses dépenses, de gérer ses remboursements et de profiter des promotions associées (classiques aux États-Unis).

US Bank Go Mobile

Jusque-là, l'initiative de US Bank est intéressante, sans être totalement inédite. Mais la banque ne s'en tient pas là, car elle est aussi une pionnière du paiement sans contact... Ainsi, à quelques heureux élus (résidant à Salt Lake City et Portland), elle propose d'adopter cette technologie sur leur téléphone, en complément de la carte de crédit. Pour ceux qui se laissent convaincre, l'application "Go Mobile" devient alors aussi moyen de paiement !

Évidemment, en l'état, ce scénario souffre d'un handicap majeur : l'iPhone ne disposant pas de l'indispensable interface NFC, il faudra lui adjoindre un accessoire, prenant la forme d'un étui spécial, fourni par US Bank. Bien que cette solution n'ait donc aucun avenir sous sa forme actuelle, l'approche laisse tout de même entrevoir un avenir dans lequel le consommateur pourrait utiliser son téléphone pour régler ses achats, sans limitation, quelques instants après sa souscription...

jeudi 27 décembre 2012

Planwise renverse le concept de PFM

Planwise
C'est une idée qui fait son chemin depuis quelques mois : les outils de gestion de finances personnelles (PFM) devraient aider les consommateurs à améliorer leur situation dans le futur et non se contenter de leur montrer l'état courant de leur porte-monnaie. L'américain Planwise propose justement de se concentrer sur cet objectif, avec une approche assez radicale.

Ici, donc, aucun besoin de donner ses codes d'accès aux services de banque en ligne pour explorer vos comptes. Il suffit de fournir quelques informations sur ses finances pour commencer à utiliser Planwise, gratuitement et de manière totalement anonyme (il n'est même pas nécessaire d'être enregistré pour démarrer) : solde actuel sur le compte, niveau de revenus, dépenses moyennes (détaillées ou non, à la convenance de l'utilisateur), emprunts (automobile, carte de crédit...) et patrimoine immobilier.

Une fois cette première étape franchie, Planwise prodigue immédiatement ses conseils, via des alertes qui signalent les écarts constatés entre les données saisies et les comportements "standards" des consommateurs américains, suggérant au passage d'éventuelles actions à considérer pour améliorer sa situation. A ce stade, apparaît également le modèle économique de la startup : des offres de sociétés partenaires (peut-être personnalisées ?) sont proposées à l'utilisateur.

Planwise

Mais le véritable intérêt de Planwise ne surgit que lorsque l'utilisateur commence à introduire de nouveaux scénarios dans son avenir budgétaire, couvrant jusqu'à 30 ans. Là encore, la simplicité reste essentielle : quelques informations à saisir – le type d'événement (un achat exceptionnel, la perte de son emploi, une augmentation de salaire...), la date à laquelle il est prévu et le montant correspondant – et la situation est automatiquement mise à jour, naturellement accompagnée de recommandations adaptées. Il est possible de créer autant de "plans" que l'on souhaite, par exemple pour comparer différentes options.

Ce mode de fonctionnement peut sembler exagérément sommaire pour apporter une réelle valeur, mais il s'agit probablement aussi de la qualité essentielle qui le rend compréhensible et utilisable par n'importe qui. De plus, cette facilité de prise en main permet de le tester très rapidement et de bénéficier de conseils utiles en quelques minutes (littéralement). En y ajoutant sa focalisation sur quelques données essentielles et son ancrage sur des situations de la vie courante, cette solution est certainement plus séduisante que les outils qui demandent de construire un budget sophistiqué de A à Z...

Malgré tout, Planwise n'est pas sans défauts, dont le principal est le parti pris de demander à l'utilisateur de saisir ses données financières : cette étape peut non seulement sembler un peu rébarbative, elle risque surtout d'être entachée d'erreurs (qui sait combien il dépense chaque mois ?). La société envisagerait une connexion automatique aux services de banque en ligne pour y remédier (comme les autres outils de PFM) mais, dans ce cas, l'avantage majeur du service de ne pas être intrusif serait hélas écorné...

mercredi 26 décembre 2012

Banque mobile, facteur de loyauté des clients

Mobile Banking
A travers une gigantesque enquête auprès de 150 000 consommateurs dans 14 pays dans le monde, dont plus de 8 000 en France, le cabinet Bain & Company dresse, dans un nouveau rapport de 60 pages, un état des lieux instructif de la loyauté parmi les clients de la banque de détail. Morceaux choisis...

Le premier enseignement à retenir de l'étude de Bain & Company est que, au fur et à mesure de la généralisation des services de banque mobile, ceux-ci deviennent un facteur important d'amélioration de la loyauté des clients. Cette observation est particulièrement sensible aux États-Unis, où les fonctions sophistiquées (notamment le dépôt de chèque à distance, par photographie) sont particulièrement appréciées, même si elles ne sont pas les plus fréquemment utilisées.

Avant d'aller plus loin dans les résultats de l'étude, un petit mot sur la notion de loyauté, qui est mesurée ici par un indicateur simple, le "Net Promoter® score" (NPS®). A la base, celui-ci consiste à faire noter entre 0 et 10 la probabilité pour le consommateur, à l'issue d'une interaction avec sa banque, de recommander celle-ci à ses proches. Le score lui-même est établi en faisant la différence entre les "promoteurs" (note de 9 ou 10) et les "détracteurs" (note entre 0 et 6).

De fait, en France, ce sont les services sur Internet qui restent les plus susceptibles d'influencer la propension à recommander une banque à ses relations. La raison n'en est pas un usage moins important de la banque mobile (qui concerne 26% de nos compatriotes, en ligne avec la moyenne européenne, contre 32% aux États-Unis) mais bien plutôt l'absence d'effet "wow" dans les services proposés aujourd'hui par les établissements de l'hexagone.

Pourtant, il ne suffit pas d'offrir des services mobiles (ou sur internet) pour ravir les utilisateurs. Ainsi, bien que les populations les plus aisées en soient (logiquement) les premières utilisatrices, leur "Net Promoter® score" s'avère souvent inférieur à la moyenne (sauf dans les pays asiatiques et émergents où ces clients bénéficient d'un traitement de faveur). La France est même, de ce point de vue, en toute dernière position parmi les 14 pays couverts par l'étude.

Il est vrai que les français ne sont globalement pas tendres avec leurs institutions financières : le score moyen de -13% qu'ils leur attribuent fait partie des plus bas et une analyse détaillée des 12 banques les mieux représentées dans le panel de l'enquête fait ressortir que seules 3 d'entre elles obtiennent un score positif (Boursorama, avec une première position impressionnante, suivie de très loin par le Crédit Mutuel et la Banque Postale).

Mais le plus inquiétant est le score abyssal obtenu par les établissements français auprès de leurs clients affluents : à -24%, il est le plus bas dans le monde à la fois en valeur absolue et en différence par rapport à la moyenne tous segments confondus. Or, il est évident que cette partie de la clientèle est la plus critique pour les revenus des banques, les rédacteurs de l'étude évaluant à au moins 10 000 USD le surcroît de valeur d'un "promoteur" par rapport à un "détracteur", dans cette catégorie.

Alors, que faire pour améliorer la situation ? Bain & Company recommande "simplement" de différencier les approches en fonction des typologies de client. La première étape est d'évaluer la satisfaction (et la loyauté) et les facteurs qui l'influencent le plus, ainsi que le coût des services apportés, par grande catégorie. Une fois cette mesure réalisée, il faudra ensuite établir les priorités et les mettre en œuvre sans état d'âme.

Il n'est pas nécessairement question de facturer les services de base aux clients les moins rentables (comme sont tentés de le faire certains établissements), l'idée est plutôt de les amener à privilégier l'utilisation des canaux de libre service. Savez-vous par exemple estimer le coût d'une interaction ? D'après l'étude, une transaction de routine coûterait en moyenne 4,25$ en agence et 2,40$ en centre d'appel, contre 0,20$ sur internet et 0,08$ sur mobile.

Voilà le moyen de réaliser des économies sensibles et d'en reporter les bénéfices sur l'investissement ("à outrance") à destination des clients aisés. Car ces derniers attendent d'autres services. S'ils sont largement utilisateurs du web et du smartphone pour les opérations élémentaires, ils demandent (toujours) une relation étroite avec un conseiller compétent et, à l'occasion, avec des experts qualifiés, lorsque leurs besoins sortent de l'ordinaire.

Au final, c'est donc (comme toujours) une vision de la banque réellement multi-canal qui émerge de la réflexion. Cependant, dans celle-ci, chaque canal, même s'il est parfaitement intégré à l'ensemble, est spécifiquement adapté à certains types d'interactions et, plus ou moins directement, à certaines catégories de clientèle. Pour garantir le succès, il faudra surtout s'assurer que ces différents canaux sont d'accès simple et intuitif.

Bain & Company - Omnichannel Banking

Alors, l'expérience (l'étude cite le cas de Coastal Federal, une Credit Union américaine) montre que les gains d'efficacité obtenus ne nuisent pas nécessairement à la satisfaction des utilisateurs, par exemple lorsque l'accès à des conseillers en vidéo leur permet de les contacter sur des horaires étendus. En effet, s'il est primordial d'"enchanter" les clients aisés, cela ne doit pas se faire au détriment de la qualité de service globale. Chacun pourra ainsi y trouver son compte...

Etude repérée grâce à M. Barbezat (B3B.ch). Merci !

mardi 25 décembre 2012

Citi consolide ses infrastructures

Citi
Longtemps, les DSI ("Directions des Systèmes d'Information") ont vécu dans le luxe et l'opulence, pouvant dépenser (presque) sans compter, bien plus parfois qu'on ne pourrait l'imaginer. Mais ces temps sont désormais révolus, les budgets sont constamment en baisse et l'expression (tarte à la crème) "faire plus avec moins" est devenue le quotidien de tous les responsables informatiques.

L'une des plus importantes institutions financières au monde, l'américaine Citigroup, fournit un exemple particulièrement représentatif des opportunités réelles de promouvoir l'innovation (technologique) tout en réduisant les coûts (et pas seulement par des coupes sombres dans ses effectifs). Un article de la revue Wall Street & Technology revient sur son gigantesque plan quinquennal de rationalisation, actuellement en voie d'achèvement.

Pour se faire une idée de l'ampleur du chantier, imaginez-vous, aux alentours de 2007, un ensemble de 70 centres de production informatique (data centers), hébergeant plusieurs dizaines de milliers de serveurs... Un patchwork d'infrastructures accumulées au fil des ans et des acquisitions, dont l'efficacité globale n'a jamais été une préoccupation, au point où certains serveurs sont utilisés à 2% de leur capacité (et restent en attente pendant 98% du temps).

Avance rapide jusqu'à 2012, il reste 20 centres de production et 40 000 serveurs ont été virtualisés, c'est-à-dire que leur charge de travail peut-être consolidée sur des machines mutualisées, dont les capacités sont enfin exploitées à leur pleine mesure (la moyenne d'utilisation est passée de 10 à 50%). Le stockage a subi le même traitement : le taux d'utilisation, initialement de l'ordre de 10% (90% de l'espace disque était gardé "en réserve"), atteint maintenant 60%.

Entre les deux, un projet titanesque a vu la création de 8 nouveaux centres. En effet, la revue complète de l'existant et des besoins, prenant en compte les hypothèses de croissance des activités, a permis d'identifier les installations vieillissantes qui ne répondaient plus aux exigences et de conclure que, dans de nombreux cas, il était préférable d'en créer de nouvelles, beaucoup plus efficaces (aussi du point de vue environnemental). A la clé, les économies réalisées sont telles que le programme de rationalisation a été auto-financé !

Centre de production informatique de Citi à Francfort
Centre de production informatique de Citi à Francfort

L'effort de virtualisation a été un préalable indispensable à la consolidation des centres de production, d'autant plus qu'il est intervenu à un moment où le nombre de transactions à traiter à augmenté à un rythme soutenu (même si les montants moyens engagés ont baissé). Grâce à cette approche, Citi considère disposer aujourd'hui (avec un peu d'exagération) d'un cloud privé lui permettant de répondre aux variations d'activité auxquelles elle prévoit d'avoir à faire face.

Il s'agit d'ailleurs là d'une raison qui conduit à limiter la charge des serveurs à 50% de leurs capacités, ce qui lui laisserait la possibilité, si cela s'avérait nécessaire, de basculer tous les traitements d'un centre sur un autre. Autre limitation de l'exercice, le nombre total d'implantations pourrait techniquement être encore réduit de moitié mais les réglementations de certains pays imposent une installation locale...

Il s'agit là d'une belle démonstration de rationalisation dans une grande banque mais quel est le rapport avec l'innovation ? Il tient dans un chiffre : alors qu'il y a 5 ans, Citi dépensait 60% de son budget informatique dans la maintenance et le fonctionnement des infrastructures, la banque peut aujourd'hui consacrer cette même part de ses ressources au développement de nouvelles applications. Une performance que beaucoup pourraient envier...

lundi 24 décembre 2012

Gartner : risques et opportunités de la ludification

Gartner
La ludification ("gamification" en anglais), qui consiste à introduire des techniques de jeu dans des activités sérieuses, particulièrement en entreprise, est très en vogue actuellement. Cependant, cet effet de mode n'est pas sans risques, entre attentes excessives, exagérations d'éditeurs et mises en œuvre sans discernement...

Les analystes de Gartner observent cette tendance au quotidien et profitent donc de leur position privilégiée pour faire le point sur le sujet, en termes de risques et d'opportunités, ainsi que pour prodiguer quelques conseils et recommandations à ceux qui voudront se lancer.

En guise d'introduction, précisons que la ludification a un champ d'application très large, couvrant notamment des scénarios de changement de comportements (accroître la fidélité des clients, promouvoir le partage de connaissance, augmenter la performance des collaborateurs...), de développement de compétences (dans les outils de formation, les pratiques de recrutement...) ou encore de résolution de problème (pour la gestion de l'innovation...).

Dans tous ces domaines, les perspectives sont immenses. Selon les prévisions de Gartner, la ludification sera devenue un élément essentiel d'engagement des clients des grandes marques d'ici 2016, 40% des entreprises les plus importantes (les "Global 1000") l'auront adoptée en 2015 pour conduire leurs transformations opérationnelles et la moitié l'auront introduite dans leurs processus de formation et de recrutement en 2017.

En poussant la vision un peu plus loin (à 2020), les analystes imaginent une variété de scénarios, dont la plupart sont en émergence dès maintenant. Ils évoquent ainsi, par exemple, la transformation du travail non qualifié en micro-tâches exécutées sous forme de jeu récompensant la productivité et des formes d'éducation ouverte et motivée par des techniques ludiques concurrençant les approches traditionnelles d'enseignement.

Pourtant, c'est une autre prédiction (dont je n'ai aucun doute de la véracité) qui mérite l'attention : d'ici 2014, 80% des applications "ludifiées" échoueront à atteindre leurs objectifs, faute d'une conception adaptée. Principal défaut des initiatives observées aujourd'hui, des badges, points et autres récompenses sont introduits dans les applications sans la nécessaire réflexion préalable sur les motivations profondes des joueurs.

Pour éviter les gaspillages prévisibles et, surtout, replacer les priorités dans l'ordre – c'est-à-dire chercher les éléments d'attraction des participants avant de mettre en place la "mécanique" du jeu, les analystes propose quelques recommandations de bon sens, illustrées par un "cycle de conception" en 7 étapes :

Cycle de conception

Les 3 premières phases sont intimement liées : s'il faut (évidemment) commencer par définir les objectifs de l'entreprise, sans oublier de préciser immédiatement les indicateurs de succès, l'identification de l'audience de l'application et de ses propres objectifs est absolument fondamentale. Ce n'est qu'en positionnant l'initiative sur des objectifs communs à l'organisateur et au joueur (même s'ils prennent des formes différentes) qu'elle a une chance de réussir.

Viennent ensuite les choix qui vont définir le modèle d'engagement de l'application, dépendant naturellement de la cible retenue. Sera-t-il compétitif ou plus collaboratif ? Cette deuxième option fournit souvent de meilleurs résultats dans un environnement professionnel... Quel équilibre entre habileté et chance ? Cette dernière ajoute à l'excitation... Quelle durée ? Dans la plupart des cas, il vaudra probablement mieux fixer une échéance.

Le parcours du joueur est tout aussi important. Jeu "scripté" ou "émergent" ? Le premier fixe le déroulement et est adapté à la formation, alors que le second définit des règles et un but, laissant le participant suivre son propre chemin, et sera à privilégier pour les démarches d'innovation.

Alors, seulement, pourra-t-il être question de l'économie du jeu : quels modes de récompense faut-il privilégier ? Il en existe 4 possibles : le "plaisir" (excitation, surprise...) reste plutôt réservé aux (vrais) jeux vidéo, les "choses" (points, cadeaux...) sont en déclin, tandis que le "capital social" (statut, "likes", amis...) et l'"estime de soi" (conquête, éloges...) sont de loin les plus efficaces.

Enfin, ne croyez pas aboutir à un résultat parfait au premier essai. Une fois le cycle complété, faites tester l'application par un groupe pilote et n'hésitez pas à itérer pour l'améliorer. De plus, si elle a vocation à perdurer (y compris sur des campagnes successives), vous devrez probablement la faire évoluer dans le temps, ne serait-ce que pour maintenir l'intérêt des joueurs.

Appliquée à bon escient et sous une forme adaptée à l'objectif fixé, la ludification peut donner des résultats extraordinaires dans de nombreux domaines. Mais il serait dangereux de croire qu'il s'agit d'un exercice facile, se satisfaisant de quelques recettes toutes faites ("un badge par ci, quelques points par là"). Au contraire, la réalisation d'un jeu est un art extrêmement complexe et, ultime recommandation, elle justifie le recrutement d'un spécialiste pour être menée bien.

A consulter également : webinaire Gartner sur la ludification (accès gratuit sur simple inscription).

samedi 22 décembre 2012

Chase investit dans les promotions locales

Chase Bank
Ce n'est désormais plus une nouveauté, malgré les déboires de certains acteurs (tels le pionnier Groupon), les coupons de réduction et offres promotionnelles en tout genre, de préférence ciblés et localisés, sont considérés par les institutions financières comme un gisement de revenus qui pourra compenser la baisse observée sur d'autres fronts.

Après quelques premières avancées, menées principalement par les réseaux de carte (American Express en tête) et les startups du secteur (notamment Square), sans toutefois oublier l'initiative récente du Crédit Agricole de Lorraine en France, l'américaine Chase Bank choisit une option radicale pour se positionner rapidement : la banque vient d'annoncer l'acquisition de la jeune société Bloomspot.

Contrairement à ses concurrentes plus connues, celle-ci a su établir une cible relativement élitiste, qui a certainement justifié en grande partie l'intérêt qu'elle a pu susciter de la part de Chase. Elle propose en effet des promotions dans des lieux plutôt haut de gamme (restaurants, hôtels, spas...), adressées à des "membres" soigneusement sélectionnés, avec l'objectif de leur faire découvrir de nouvelles expériences, et en évitant les simples "chasseurs de prime".

Bloomspot

Avec cet investissement, Chase vise explicitement à capitaliser sur les relations qu'elle a déjà établies avec ses clients commerçants et consommateurs. Le mariage sera également une bonne opportunité pour Bloomspot, qui va ainsi trouver un accès à un marché, plus ou moins captif, de professionnels à démarcher, alors que la conquête de clients constitue souvent la pierre d'achoppement du secteur.

Bien que les banques américaines soient en principe familières des programmes de fidélisation accompagnant leurs offres de cartes de crédit, il est intéressant de voir ici cette préférence de Chase pour une acquisition de compétence externe. Selon toute vraisemblance, il s'agit du prix à payer pour apporter l'agilité et la célérité nécessaires à l'entrée sur un nouveau marché déjà hautement compétitif.

En guise de conclusion, je voudrais cependant souligner un "risque" que j'évoquais dernièrement à propos du paiement mobile : l'engouement actuel pour les promotions, déclinées à toutes les sauces, me semble prendre des proportions excessives. Certes, il existe une myriade de (petits) marchands qui souhaitent probablement profiter de moyens marketing jusqu'à maintenant réservés aux grandes chaînes du commerce de détail. Mais représentent-ils réellement un potentiel de revenus tel qu'il justifie autant d'initiatives et d'investissements ?

vendredi 21 décembre 2012

Banque Populaire adopte l'épargne d'impulsion

Banque Populaire
Les lecteurs fidèles de "C'est pas mon idée !" le savent, j'ai depuis longtemps un faible pour l'application mobile "Impulse Saver" de la néo-zélandaise Westpac, qui offre une fonction à la fois utile et simplissime. Je suis donc ravi de voir cette excellente idée arriver en France, dans l'application Cyberplus lien iTunes des Banques Populaires.

Comme son aînée, la nouvelle fonction, baptisée "Rapid'Épargne" propose au mobinaute de mettre de côté une somme donnée (10 euros, par exemple) d'un seul geste du doigt. Petit plus par rapport à la version de Westpac, outre le fait que cette option soit intégrée aux services de banque mobile (et non proposée dans un logiciel indépendant), il semblerait qu'il soit possible de choisir entre différents montants, sans que l'interface ne devienne exagérément complexe.

D'un point de vue pratique, le fonctionnement est élémentaire puisqu'il s'agit de réaliser un virement immédiat et pour un montant pré-paramétré d'un compte courant vers un compte d'épargne. Bien entendu, l'utilisateur dispose d'une option de configuration où il pourra définir les comptes sur lesquels il souhaite affecter ses impulsions.

Rapid'Epargne

A la différence des quelques autres initiatives similaires dans le monde (notamment celles d'ING Direct Canada et d'ImpulseSave), l'extrême simplicité d'utilisation reste ici au centre du concept, ce qui est certainement essentiel pour réellement exploiter la spontanéité du geste d'épargne suggéré.

A l'inverse, il me semble regrettable que la fonction ne soit apparemment accessible qu'après authentification du client. L'obligation de saisir son mot de passe constituera un frein à l'utilisation, que j'estime superflu. En effet, les risques encourus restent très limités, même en cas de vol du téléphone, et si cela était vraiment nécessaire, la définition d'un plafond quotidien ou une option de blocage de la fonction dans les services en ligne suffiraient probablement à rassurer les utilisateurs.

Malgré ce (petit) défaut, dont il faut espérer qu'il sera rapidement corrigé, "Rapid'Épargne" mérite les éloges, à la fois pour l'innovation qu'elle représente dans un paysage français de la banque mobile qui tend à s'assoupir et aussi pour l'exemple qu'elle donne de l'intérêt qu'il peut y avoir à répliquer une bonne idée (dans la mesure où, comme je le crois, l'exemple de Westpac a effectivement inspiré Banque Populaire).

Enfin, il faut noter que les premiers commentaires des clients vis-à-vis de cette option inédite en France sont très positifs, même s'ils ne peuvent être considérés comme représentatifs d'une véritable tendance, à ce stade. Après tout, il est logique que les consommateurs apprécient une fonction qui cherche à les aider à mieux gérer leur budget et l'image de la banque ne peut qu'en ressortir grandie...

Nouveauté repérée grâce à Sémaphore Conseil (merci !)

jeudi 20 décembre 2012

Retour sur ma prédiction pour 2012

Prédiction
Au tout début de cette année, je me suis hasardé, comme beaucoup d'autres, à lancer une prédiction, sur le sujet alors brûlant des paiements via mobile. L'échéance approchant, il est temps de faire le bilan des 12 mois écoulés dans ce domaine qui domine toujours autant l'actualité et de vérifier si mes hypothèses se sont réalisées...

Pour résumer celles-ci, j'estimais alors que 2012 serait une année charnière pour le paiement via mobile dans les commerces "physiques", au cours de laquelle au moins un acteur du paiement par internet (par exemple PayPal) prendrait suffisamment d'ampleur pour esquisser la disparition prématurée des solutions sans contact (NFC).

Évidemment, il serait un peu exagéré de prétendre que cette prédiction s'est entièrement réalisée. Cependant, à regarder de près le paysage actuel du secteur, je pense qu'une bonne partie des arguments que j'ai développés il y a un an sont plus que jamais pertinents. Qui plus est, il semblerait qu'ils commencent désormais à être partagés par d'autres observateurs.

La réalité la plus incontestable est le piétinement persistant du paiement sans contact sur mobile. Les expérimentations continuent, notamment en France, sans aucune avancée notable, l'initiative américaine ISIS des principaux opérateurs de télécommunication a accouché d'une souris avec des mois de retard, Google Wallet a quasiment disparu des radars... Et, comme prévu, l'iPhone 5 n'intègre toujours pas la technologie NFC.

Face à cette situation, le réalisme commence à prendre le dessus. D'une part, les principaux intéressés (y compris quelques opérateurs) deviennent plus prudents, parlant de plus en plus d'une généralisation à l'horizon de 2017 et misant sur d'autres applications que le paiement pour déclencher la transition. D'autre part, quelques grands noms de la distribution décident de ne plus attendre et lancent leurs propres initiatives (entre autres, McDonald's et, plus récemment, Auchan, en France, ou Starbucks et le Merchant Customer Exchange, en Amérique du Nord).

A l'opposé, les "porte-monnaie mobiles" (m-wallet) basés sur Internet (les transactions sont gérées sur un serveur avec lequel communique le téléphone du consommateur et/ou le terminal du commerçant) se sont multipliés à l'infini, au point que je pense qu'il existe maintenant plusieurs centaines de solutions de ce type. Mais, contrairement à ce que je prédisais, aucune n'a réellement montré le moindre signe d'une domination en émergence.

Certes, Square a encore progressé, considérablement, mais son modèle repose toujours, pour l'essentiel, sur les paiements par carte et la perspective de l'introduction du standard EMV aux États-Unis (qui deviendrait obligatoire d'ici 2 ans) menace sérieusement son avenir. Quant à PayPal, le géant dont on attend l'arrivée effective dans le commerce "en dur", il a poursuivi ses expérimentations, toujours aussi variées, sans pour autant s'affirmer sur le secteur.

Paiement mobile PayPal

Alors, où en est-on aujourd'hui ? Comme le suggère David Marcus, président de PayPal, dans ses propres prédictions pour 2013, je pense qu'il est définitivement temps d'enterrer la technologie NFC pour le paiement. Même si les problèmes auxquels elle est confrontée maintenant étaient résolus, les quelques années qu'il faudrait pour y parvenir seraient suffisantes pour qu'une autre solution prenne sa place, si le paiement via mobile a réellement un avenir.

Car, dans l'état du marché actuel, il devient difficile de croire à un succès, quelle que soit la technologie retenue. Pour la plupart des acteurs, la raison de l'échec latent du sans contact serait liée à la complexité de l'écosystème (impliquant, en premier lieu une convergence d'intérêts entre opérateurs, institutions financières et fabricants de mobiles). C'est ce qui justifie la prolifération récente de porte-monnaie à base de QR codes, permettant à peu près les mêmes usages en toute autonomie.

Or, et David Marcus le rappelle aussi, ce sont là des solutions à un problème qui n'existe pas : les modes de paiement historiques sont non seulement inscrits au plus profond de nos cultures (donc difficilement remplaçables), ils sont également simples et rapides, quoi qu'on en dise, en comparaison des propositions alternatives. Pour réussir, il faut donc trouver une autre valeur à offrir, aux commerçants et aux consommateurs.

Conséquence directe, tout le monde s'est emballé pour la dernière tendance censée répondre à cette exigence : les porte-monnaie mobiles doivent intégrer le marketing, des offres promotionnelles, des bons de réduction, des cartes de fidélité... Incidemment, il s'agit du seul levier pour définir un modèle économique, les marges sur les paiements étant trop faibles pour cela. L'idée semble raisonnable mais est-elle réellement viable ?

Pour ma part, j'ai un doute... Les consommateurs seront naturellement intéressés mais les commerçants, qui devront en supporter les coûts, risquent de trouver la pilule amère. A minima, il faudra leur prouver que l'investissement qu'ils devront consentir sera rentable, ce qui s'avèrera probablement délicat. Et la multiplication des options disponibles dans ce domaine, qu'elles intègrent le paiement ou non (les promotions s'infiltrent partout !), est un facteur de confusion supplémentaire.

Je pense donc que cette solution miraculeuse pour l'adoption du paiement sur smartphone est un miroir aux alouettes. Je reste persuadé que seules de nouvelles expériences seront capables de faire changer les habitudes des consommateurs et qu'elles restent à inventer (encore que le "paiement automatique" de Square constitue pour moi un modèle du genre). David Marcus évoque ainsi les possibilités ouvertes par la géolocalisation ou par la capacité du point de vente à venir à la rencontre du client, mais il y en aura d'autres.

Pour conclure sur une nouvelle prédiction, sans regret pour celle de 2012, je propose celle-ci, en demi-teinte : les paiements via mobile (en boutique) resteront marginaux en 2013, en France, mais j'espère voir apparaître de nouveaux modèles, radicalement différents de ceux qui prévalent aujourd'hui, capables de donner une vraie impulsion au porte-monnaie sur smartphone.

mercredi 19 décembre 2012

Le CA de Lorraine adopte le Passbook d'Apple

Crédit Agricole de Lorraine
Annoncée avec la dernière version en date du système iOS qui équipe iPhones et iPads, l'application Passbook d'Apple a initialement suscité beaucoup d'intérêt, malgré l'absence de toute fonction de paiement. Trois mois après son lancement, la vague d'enthousiasme qui l'entourait est largement retombée, alors que son potentiel reste encore peu exploité.

Certes, les quelques marques qui l'ont adopté sont promptes à vanter un taux d'utilisation important mais la réalité semble tout de même être en demi-teinte. Tout d'abord, l'intégration de Passbook par les grandes enseignes reste une exception : en France, Auchan, E. Leclerc et McDonald's sont (à peu près) seuls dans ce cas, en plus des principaux agrégateurs de cartes de fidélité (notamment Fidall et FidMe). De plus, la lecture des commentaires des utilisateurs tend à révéler des dysfonctionnements récurrents.

Dans ce contexte plutôt morose, il est intéressant de voir une banque se lancer dans l'aventure, d'autant plus qu'il s'agit apparemment d'une première mondiale (au moins pour l'intégration dans une application purement bancaire). Cet "exploit" est à porter au crédit du Crédit Agricole de Lorraine, dont la nouvelle version de "Mon CA" lien iTunes propose des "Bons Plans" qui viennent s'insérer dans le Passbook et profiteront donc (du moins peut-on l'espérer) des capacités de géolocalisation et de "chrono-marquage" (mes excuses pour ce néologisme) concoctées par Apple.

Application Mon CA

Car, rappelons-le, le porte-carte virtuel d'iOS n'a pas pour seul avantage de stocker sur le téléphone les tickets, coupons de réduction et cartes de fidélité. Il permet aussi (et, peut-être, surtout) d'en faciliter l'accès et l'utilisation en les présentant automatiquement au consommateur lorsqu'il se trouve dans une boutique où il peut en profiter ou en lui soumettant une alerte lorsqu'une échéance approche (la date d'expiration d'une promotion ou l'heure de début d'un spectacle, par exemple).

Pour anecdotique qu'elle puisse paraître et malgré le peu de détails disponibles, cette nouvelle fonction me semble digne d'attention. Elle pourrait en effet augurer d'une certaine forme de monétisation des applications mobiles du Crédit Agricole : la proposition aux marchands d'offrir des "bons plans" à ses clients particuliers à travers "Mon CA" et le Passbook sera particulièrement alléchante, au vu de la popularité des services bancaires sur smartphone, surtout pour de petits commerces qui ne peuvent s'offrir leur propre présence sur l'iPhone et son Passbook.

Rien ne dit aujourd'hui que l'intégration d'une offre sera facturée aux commerçants mais, quel que soit le modèle économique retenu, il sera gagnant pour tous. Les marchands peuvent y gagner une visibilité incomparable, les consommateurs bénéficient de promotions plus ou moins exclusives et le Crédit Agricole, a minima, fidélise ses clients (professionnels et particuliers). Il ne resterait qu'à ajouter à cet ensemble un ciblage des offres en fonction des profils des consommateurs (à la "Cardlytics") pour le rendre encore plus attractif !

Information repérée grâce à Emmanuel P-S. Merci !

mardi 18 décembre 2012

La Malaisie a sa banque sur Facebook : OctoPay

CIMB Clicks
Facebook exerce une attraction considérable sur les banques mais elles sont peu nombreuses à y avoir développé une présence qui ne se réduise pas à quelques opérations de marketing ou au support à la clientèle. ICICI était l'une des premières à offrir, en Inde, la consultation de comptes au début de l'année. C'est maintenant en Malaisie que l'innovation voit le jour avec l'application OctoPay de CIMB.

Celle-ci aborde les services bancaires sur Facebook sous un angle résolument différent de sa consœur indienne, et l'approche retenue se révèle certainement beaucoup plus conforme à l'esprit du réseau social, tout en intégrant d'emblée l'exécution de transactions. Elle propose en effet principalement aux clients de réaliser des transferts d'argent entre particuliers ("P2P").

A cette fonction déjà aperçue ailleurs (par exemple avec Serve d'American Express), et sans s'attarder sur le rechargement de compte prépayé de téléphonie mobile, CIMB ajoute une exclusivité particulièrement pertinente : la gestion de cagnotte, qui permet à l'internaute de collecter des fonds auprès de ses amis et de sa famille, pour l'achat d'un cadeau, l'organisation d'un événement, la participation à une action caritative...

OctoPay

En pratique, l'application est accessible gratuitement, moyennant une inscription préalable, à tous les détenteurs de compte courant utilisant les services de banque en ligne "CIMB Clicks" (ils sont tout de même 3,6 millions).

Afin de prévenir les réticences possibles des consommateurs (on se souviendra du récent sondage de Citi), la sécurité fait l'objet de toutes les attentions : outre l'utilisation de communications chiffrées (classiques), chaque transfert d'argent doit être confirmé par la saisie d'un mot de passe à usage unique (envoyé par SMS) et les paiements sont globalement limités à 500 RMY (environ 125 euros) par jour.

Dernier élément de protection, les échanges ne peuvent être effectués qu'entre utilisateurs inscrits au service OctoPay, ce qui permet de toujours présenter leur identité réelle (l'identifiant Facebook est associé à un compte bancaire). Malheureusement, ce choix implique aussi que les paiements ne pourront concerner que les clients de CIMB, ce qui en limite un peu l'intérêt (même si nous parlons ici d'une des plus importantes banques du pays).


Avec OctoPay, la banque malaise veut donner à ses clients les moyens de réaliser les transactions simples directement dans l'espace sur lequel ils passent aujourd'hui le plus de temps dans leur "vie en ligne". Le choix d'y installer d'abord les paiements P2P et la gestion de cagnotte est extrêmement judicieux, puisque ce sont deux activités intimement liées aux relations sociales. Il s'agit ainsi, à mon sens, d'une des tentatives les plus intelligentes, à ce jour, d'installer la banque au cœur de Facebook.

lundi 17 décembre 2012

Kreditech : "big data" pour petits prêts

Kreditech
L'idée de transformer les modèles traditionnels de calcul d'un score de crédit pour des demandeurs de prêt attire décidément les startups en tout genre. Après des exemples américains tels que Movenbank ou Cignifi (pour ne citer que ceux-là), le concept débarque en force en Europe avec Kreditech.

Cette jeune entreprise, basée en Allemagne mais dont l'équipe est multi-culturelle, aborde le sujet avec une certaine originalité. Tout d'abord, elle ne se contente pas d'évaluations théoriques, elle les exploite concrètement, à travers son site "Kredito24", pour attribuer des micro-prêts (inférieurs à 1000 euros et pour 30 jours maximum) aux consommateurs polonais, la Pologne étant le premier marché où elle a établi sa présence. C'est par ce biais qu'elle est capable d'affiner et de valider ses modèles mathématiques.

Mais ce service constitue également sa "vitrine" pour l'autre facette de son activité, en mode B2B, qui consiste à proposer un service en ligne de scoring en temps réel aux institutions financières, et qui est déjà actif en Allemagne. Elle est en effet convaincue que son approche peut être appliquée dans de multiples contextes, pour l'attribution de prêts classiques (de longue durée), pour l'identification des clients (notamment dans des initiatives KYC – "Know Your Customer") ou encore pour la génération de contacts qualifiés...

La deuxième particularité de Kreditech réside dans sa technologie. Au lieu de se contenter d'exploiter quelques sources d'information innovantes – notamment les interactions des consommateurs sur les réseaux sociaux, elle affirme collecter et analyser plus de 8000 points de référence pour établir ses scores. Ils comprennent ainsi, entre autres, des données de localisation, les (incontournables) graphes sociaux, les comportements sur les sites de commerce en ligne, les usages du mobile, les appareils et applications utilisés...

Scoring par Kreditech

Cette gigantesque masse de données prise en compte est bien ce qui justifie la mention de "big data" dans le slogan de la startup ("big data / small loans"). D'autant plus qu'elle promet de produire les scores qui en sont dérivés en moins de 5 minutes. En revanche, malgré son engagement d'utilisation responsable, sa capacité à assembler autant d'information sur les consommateurs peut être jugée inquiétante.

Naturellement, une fois cette réserve levée (ce qui constituera tout de même un défi), la proposition de Kreditech est extrêmement séduisante, surtout lorsqu'elle est comparée au fonctionnement habituel des établissements de crédit. Changer un processus de scoring largement manuel, entaché de subjectivité, utilisant tout aux plus quelques dizaines d'informations de référence (fréquemment obsolètes) et prenant plusieurs jours, pour passer à un système automatique, objectif, (presque) immédiat et plus fiable (grâce à sa couverture élargie) est probablement irrésistible.

Il s'agit en tous cas d'une éclatante démonstration de ce que le mouvement "big data" pourrait représenter pour le secteur de la finance. Kreditech, qui vise un déploiement dans 15 pays européens d'ici 2015, est assez dédaigneuse vis-à-vis de la capacité des banques à profiter de ces opportunités. Mais, après tout, sa solution est là pour combler cette déficience et ce sera bien suffisant...

dimanche 16 décembre 2012

Celent : prédictions 2013 pour la banque de détail

Prédictions
Bien que la période de fin d'année soit généralement propice aux prédictions en tout genre, il semblerait que 2013 n'inspire pas beaucoup les "gourous" du secteur de la finance. Voici, malgré tout, une petite sélection de celles des analystes du cabinet Celent, qui, cependant, tiennent plus d'un état des lieux 2012.

Paiements

Ainsi, la première tendance proposée dans le secteur des paiements ne devrait pas surprendre, puisqu'elle s'inscrit dans la continuité de ce qui a pu être observé au cours de l'année écoulée : les réductions, cadeaux et autres offres promotionnelles vont s'imposer partout et dans toutes les solutions.

Plus surprenant de prime abord, Celent croit fermement à l'avènement d'un méga-marché pour le paiement sans contact. Partant du succès (supposé) du modèle japonais, les analystes estiment qu'il est possible de le répliquer, moyennant la conjonction de plusieurs facteurs : un soutien de l'état, une coopération étroite entre établissements financiers et opérateurs de télécommunication et une forte pénétration du téléphone mobile.

Or, ces conditions sont réunies en Chine, qui serait alors le "méga-marché" dont il est question. Cette vision est également supportée par le développement rapide des infrastructures de paiement dans le pays. Finalement, il ne faudrait donc attendre aucune révolution dans ce domaine chez nous. Mais, si le tsunami chinois se concrétise, je crains qu'il ne produise, à nouveau, un excès d'optimisme chez ceux qui s'accrochent au paiement sans contact sur mobile en Europe.

Technologie

Le mouvement de remplacement des cœurs de systèmes bancaires est désormais bien engagé. En Amérique du Nord, 4 banques de taille respectable se sont lancées récemment (BBVA Compass, Sovereign Bank, RBC et Zions Bank). Grâce à ces projets, toutes seront bientôt capables de fonctionner en temps réel, ce qui deviendra très rapidement un critère majeur de différenciation concurrentielle.

La position des analystes sur le sujet, très à la mode actuellement, des "big data" est extrêmement intéressante et rejoint mes propres observations. Le concept est certes séduisant mais il semble largement prématuré de l'aborder aujourd'hui, dans la plupart des banques. En effet, celles-ci disposent déjà d'une masse de données structurées dans leurs systèmes, qu'elles n'exploitent que très peu. Elles feraient donc mieux de commencer par mettre à profit de ce gisement avant d'envisager de s'attaquer aux "big data".

Canaux numériques

Le monde numérique évolue à une vitesse incompatible avec les rythmes "normaux" des institutions financières. L'ajout de nouveaux canaux (notamment sur mobile) a dû se faire très rapidement et la situation qui en résulte devient complexe à gérer. Pour survivre, il sera impératif de préparer la convergence de la banque en ligne et mobile et l'idéal serait de concentrer l'ensemble des composants de la banque digitale au sein d'une solution unique...

En parallèle, les banques se voient de plus en plus menacées sur la plupart de leurs métiers historiques par des startups, notamment technologiques, plus agiles et plus efficaces. Pensons par exemple à Square et Dwolla dans le domaine des paiements, Simple pour les comptes de dépôt... Il est vrai que cette tendance concerne assez peu l'hexagone jusqu'à maintenant mais la situation pourrait changer en peu de temps.

Reste encore le cas des médias sociaux. Toutes les institutions financières (ou presque) y ont organisé leur présence et s'efforcent, a minima, de se mettre à l'écoute de leurs clients. Mais combien d'entre elles ont établi une véritable stratégie, avec des objectifs clairs et concrets ? Pour Celent, ce domaine va être un foyer ardent de transformation et d'activité dans les années qui viennent.

Agences

L'avenir de l'agence bancaire reste évidemment au centre des préoccupations. Comme la plupart de leurs confrères, les analystes de Celent ne croient pas à sa disparition. Ils la considèrent même toujours comme une priorité stratégique. En revanche, elle va devoir fortement évoluer parce qu'elle est en passe de devenir un canal alternatif, le web et le mobile devenant les canaux primaires de la relation client.


En synthèse, que faudra-t-il retenir de ces "prédictions" ? Pour 2013 (et les années qui suivent), 3 chantiers gigantesques attendent les banques : la rénovation de leurs cœurs de systèmes informatiques, la convergence web-mobile et la modernisation du rôle de l'agence. Voilà de quoi s'occuper !

samedi 15 décembre 2012

Twitter inspire de nouveaux services

Twitter
Dans le paysage des médias sociaux, Twitter occupe une place un peu à part, au moins pour le secteur de la finance. C'est en effet le seul où les tentatives d'installer de nouveaux services transactionnels reviennent régulièrement, même s'ils rencontrent rarement le succès. Dans des registres différents, Dwolla et La Caixa ont toutes deux dévoilé leurs dernières initiatives ce mercredi...

Pour Dwolla, l'acteur disruptif du paiement (aux États-Unis), le service proposé est dans la lignée d'une longue série dont les derniers représentants en date sont Chirpify et Pygg : il s'agit tout simplement d'émettre un paiement, à destination d'un particulier ou d'un commerçant, par l'envoi d'un tweet mentionnant le bénéficiaire (par son handle), le montant à transférer et le hashtag #dwolla (par exemple, "$10 to @cestpasmonidee #dwolla", je vous remercie par avance !).

Naturellement, l'émetteur devra au préalable avoir associé son identifiant Twitter à son compte Dwolla. De son côté, le destinataire recevra un lien pour s'inscrire, s'il n'est pas déjà enregistré.

Pound Dwolla sur Twitter

L'objectif que poursuit ici Dwolla est de faciliter l'acte de paiement, en le réduisant à la saisie d'un court message, sans requérir authentification supplémentaire. De plus, le choix de la plate-forme Twitter est parfaitement adapté à sa cible d'échange d'argent entre particuliers. Pour la startup, la méthode adoptée est aussi un excellent moyen de faire connaître et propager son nom à travers le réseau social. En revanche, s'il faut en croire les premiers commentaires, les internautes sont prompts à s'inquiéter de la sécurité du dispositif, contrepartie de sa simplicité.

Dans le cas de La Caixa, la nouveauté qui vient de faire son apparition concerne les cours des principales actions de la bourse de Madrid et de quelques indices internationaux. Ainsi, il suffit d'envoyer un tweet au compte d'information @infoCaixa, en mentionnant le hashtag #cot et le nom ou le code d'une valeur cotée pour recevoir en retour les principales données correspondantes (derniers cours connu, avec 15 minutes de retard, et variations en cours de séance).

Service de La Caixa sur Twitter

Inutile de préciser que cette option ne va certainement pas révolutionner le monde de la finance ! Il est cependant intéressant de constater que la banque espagnole semble en train de développer une stratégie autour de Twitter, puisqu'elle en est à son deuxième service d'information de ce genre. Pour mémoire, le premier offrait la recherche de ses agences, par adresse ou par géolocalisation (en utilisant l'option ad hoc de Twitter), via le hashtag #ofi.

En réalité, ces expérimentations tendent surtout à démontrer que les institutions financières sont assez démunies face à Twitter. Elles souhaiteraient y affirmer leur présence mais, face à son modèle si particulier, elles ne savent visiblement pas comment y engager une conversation pertinente avec leurs clients. Faute de pouvoir communiquer comme elles en ont l'habitude avec des messages de 140 caractères (même lorsqu'elles jouent la carte du SAV), elles essaient de développer des "applications" qui pourraient apporter une valeur aux membres du réseau social. Malheureusement, il est difficile de croire que cet objectif est atteint avec les réalisations actuelles...

vendredi 14 décembre 2012

Jumiya, la banque se préoccupe de votre santé

Jumiya
Dans la série émergente des "banques de niche" (à laquelle participent déjà, entre autres, Tribed et Holvi), un acteur supplémentaire vient de faire son apparition aux États-Unis : Jumiya. Naturellement, les approches gagnantes se cherchent encore, aussi cette nouvelle venue se distingue par plusieurs particularités, dont son choix de cible de clientèle et son modèle de distribution.

Tout d'abord, à qui s'adresse Jumiya ? A priori, elle n'est pas très sélective, puisque la startup vise tous les consommateurs souhaitant bénéficier de taux d'intérêt plus favorables (pour leurs cartes de crédit et/ou leurs comptes d'épargne). Mais, bien entendu, il y a une réserve : les conditions offertes aux clients ne deviennent avantageuses qu'au fur et à mesure des efforts qu'ils réalisent pour rester en bonne santé. L'exemple présenté sur la page d'accueil de la société montre ainsi comment une personne qui marche 16 kilomètres par jour verrait le taux de rémunération de son épargne passer de 1 à 2%.

D'un point de vue opérationnel, Jumiya établit des partenariats avec de jeunes pousses du mouvement "quantified self" (la "quantification de soi", dont l'objectif est d'atteindre de nouvelles frontières par le biais de mesures systématiques des données relatives à la personne). Celles-ci fourniront les informations objectives (distance parcourue à pied, nombre d'heures de sommeil, rythme du pouls...) qui serviront de base à l'évaluation de la forme physique des clients et, en dernier ressort et par l'application d'algorithmes propriétaires, à l'attribution d'avantages financiers.

Jumiya

La deuxième originalité de Jumiya est de ne pas se lancer directement sur le marché, même avec l'appui d'un établissement existant, comme c'est le cas pour les autres exemples déjà cités. Elle cherche au contraire à commercialiser sa technologie auprès des institutions financières et plus particulièrement les Credit Unions américaines. Dans cette logique, son modèle économique est basé sur des commissions d'apport à l'ouverture de comptes et un partage des revenus sur les taux d'intérêt négociés.

Cependant, le plus étonnant est l'argumentaire développé par Jumiya pour séduire des établissements partenaires. En effet, son principe fondateur est qu'il existe une forte corrélation entre l'état de forme physique d'un consommateur et sa "fiabilité" financière. Celle-ci est appuyée par des études apparemment sérieuses (exposées dans le pitch de la startup aux investisseurs). Sur cette base, la proposition est d'ajuster les conditions accordées au client non plus en fonction de son score de crédit mais selon son score de forme. Et, cerise sur le gâteau, une meilleure santé assure aussi une plus grande longévité potentielle, donc des revenus durables !

Le projet pourrait prêter à sourire ou susciter le scepticisme mais, étant issu de la Singularity University, qui jouit d'une certaine réputation, il mérite l'attention. Finalement, Jumiya représente peut-être l'avant-garde d'une tendance appelée à se développer, qui verrait la création de nouveaux services hyper personnalisés, ciblés en fonction de corrélations mathématiques identifiées dans la masse de données qui caractérisent désormais chaque individu...

jeudi 13 décembre 2012

Le gouvernement britannique se met au prêt P2P

U.K. Department for Business, Innovation and Skills
Depuis les débuts de la finance participative sur le web, le Royaume-Uni fait figure d'exception dans ce domaine : le pionnier du prêt-emprunt P2P – Zopa – y est né en 2005 et, malgré de multiples déclinaisons à travers le monde, il reste à ce jour le seul pays (ou presque) où la réglementation n'a pas dénaturé le concept original. L'histoire peut maintenant aussi enregistrer que son gouvernement est le premier à participer directement au mouvement.

Quand le "Department for Business, Innovation and Skills" décide d'investir 55 millions de livres en faveur des PME, c'est pour tenter de combler les carences des banques, qui sont devenues tellement "prudentes" après la crise que les prêts aux entreprises sont en chute libre. Il n'est donc pas question de s'adresser à elles pour "distribuer" ces fonds. Alors, à l'issue d'un appel d'offres, deux startups du "P2P Lending" (*) ont été désignées (aux côtés de 2 autres établissements un peu plus "standards") pour prêter ces fonds aux entrepreneurs : Zopa recevra 10 millions, tandis que Funding Circle obtient 20 millions.

Naturellement, ces sommes sont dérisoires par rapport aux besoins globaux des petites entreprises, en Angleterre comme ailleurs. Mais ce qui est important est le message véhiculé par cette action sans précédent. En effet, c'est un véritable soutien, sans équivoque, qu'apporte ainsi le gouvernement britannique aux modèles de financement alternatifs, en précisant dans son communiqué qu'il n'est pas question de chercher à remplacer les systèmes traditionnels mais bien de les compléter, en particulier là où des lacunes béantes sont constatées.

Funding Circle

Il s'agit donc tout de même d'un sévère camouflet qu'essuient là les banques. Plus important, c'est surtout une invitation lancée à tous les britanniques pour qu'ils contribuent, eux aussi, à la croissance de leurs PME, à travers des sites de financement participatifs "officiellement" reconnus et approuvés. Voilà une belle opportunité, si la communication qui accompagne l'opération est adroite, de mettre en action un effet de levier colossal, capable de transformer les quelques dizaines de millions de livres du gouvernement en centaines de millions apportés par des particuliers ! Sans perdre de vue que, s'agissant de prêts dont le risque est en principe correctement géré, le coût final sera nul (le résultat pourrait – devrait – même être positif !).

Même s'il ne résout pas à lui tout seul la crise de financement des PME, le dispositif imaginé par le gouvernement britannique est absolument brillantissime. Le contexte économique actuel exige des solutions nouvelles et radicales, et celle-ci en est une, particulièrement séduisante. A ce titre, elle mériterait d'être copiée immédiatement par tous les pays confrontés aux mêmes difficultés (la France peut-être ?). Accessoirement, pour une fois, le mot "innovation" ne semble pas usurpé dans un titre d'organisme (surtout public, comme le "Department for Business, Innovation and Skills") et ce pourrait également être une inspiration !

(*) Pour mémoire, le principe des prêts P2P ("de pair à pair") est de mettre en contact, via une plate-forme web, des personnes ayant des fonds disponibles avec des entreprises ou des particuliers à la recherche d'un crédit. L'absence d'institution financière dans le circuit réduit les coûts et permet donc à la fois de proposer une rémunération attractive aux prêteurs et des conditions d'emprunts avantageuses aux demandeurs. D'autre part, la répartition des fonds mis à disposition sur une multitude d'opérations distinctes permet de limiter les risques financiers en cas de défaut d'un emprunteur.

mercredi 12 décembre 2012

Application mobile, web ou native ?

Caplin Systems
C'est une question qui taraude non seulement les équipes de développement mais aussi, de plus en plus, les responsables "métier", lorsqu'il s'agit de concevoir et réaliser une nouvelle application mobile : quelle architecture choisir, HTML5 ou native ? En pratique, il s'avère que les débats sont souvent faussés par des expériences malheureuses avec la première, aussi est-il temps de faire un point sur le sujet.

Le prétexte à cette réflexion est l'annonce par Caplin Systems, éditeur reconnu de plates-formes de trading (comptant Barclays Capital, Citi, Crédit Agricole, RBS, UBS... parmi ses clients), de la nouvelle version de sa solution "Caplin Trader", conçue exclusivement sur la base de technologies HTML5.

Si une entreprise spécialiste du logiciel mise entièrement sur cette approche (et elle n'est pas seule), de surcroît dans un domaine plutôt exigeant (en performance, réactivité, qualité des interfaces...), certaines légendes méritent sans doute d'être révisées.

Car, dans le cas de Caplin, aucune place n'est laissée à l'ambiguïté : la technologie HTML5 est définitivement la solution d'avenir, permettant de réaliser des applications extrêmement riches, rapidement et à moindre coût, compatibles avec une multitude de plates-formes et adaptables à tous les terminaux, du PC fixe au smartphone, en passant par les tablettes.

Caplin Trader

Bien qu'il puisse paraître très technique, ce débat sur les architectures a une importance stratégique pour les entreprises et les choix réalisés touchent au moins deux cordes sensibles : l'expérience client et les budgets. Ainsi, les arguments habituels pour justifier le choix d'une application native sont sa plus grande richesse ergonomique et ses performances sans compromis, alors que l'intérêt principal d'une application web est sa portabilité sur de multiples plates-formes et, par voie de conséquence, des coûts d'implémentation moins élevés.

En résumé, l'alternative exposée au commanditaire d'un projet est souvent, de nos jours : avez-vous le budget suffisant pour développer (et maintenir) des applications riches et performantes pour iPhone, Android, Windows Mobile (...) ou devez-vous contenter d'une version HTML5 "au rabais" ? Heureusement, ce dilemme n'est probablement pas une fatalité. Comme le démontrent certaines expériences (dont celle de Caplin), il est également possible de créer des solutions web aussi séduisantes et efficaces que des applications natives.

Certes, l'exercice n'est pas trivial, ce qui explique les déboires rencontrés par ceux qui se sont lancés un peu trop hardiment. A mon sens, la principale difficulté n'est pas technologique mais tient aux compétences : nombre de "spécialistes" n'ont pas (encore) intégré le changement de paradigme introduit par HTML5 et son modèle applicatif, qui n'a plus rien à voir avec l'approche par "sites" et "pages" dont ils ont l'habitude. Réussir une véritable application web, qui plus est parfaitement adaptée à différentes plates-formes, exige une conception et une réalisation extrêmement rigoureuses et requiert une expertise encore peu répandue.

Alors que plusieurs standards de la "nébuleuse" HTML5 sont toujours à l'état de brouillons, en attente de validation par le W3C, il est finalement logique que l'immaturité continue à régner parmi les développeurs. Cependant, il ne faut pas s'y tromper, il s'agit bien là d'une technologie d'avenir (pas nécessairement exclusive, il est vrai), notamment sur les plates-formes mobiles dont la diversité des systèmes, des formats et des équipements ne va faire que croître, induisant une explosion des coûts des projets basés sur une architecture native.

Il est donc urgent de se préparer à cette transition inéluctable, en développant dès aujourd'hui les compétences nécessaires, à travers des expérimentations "sérieuses", qu'il faudra multiplier, en commençant par des cibles moins stratégiques (par exemple des applications à usage interne).

Petite précision : la publication sur les AppStores, normalement réservée aux applications natives, n'est pas un obstacle majeur pour les applications web, sous réserve d'adopter une approche "hybride", encapsulant le site web dans une "coquille" native légère (et peu coûteuse).