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C'est pas mon idée !

samedi 31 décembre 2011

Rétrospective 2011 en 7 annonces

L'année 2011 s'achève, l'actualité est assez morne et je vais donc sacrifier à la tradition des rétrospectives, avec les 7 innovations les plus importantes (à mon avis) parmi toutes celles que j'ai pu relayer dans ces colonnes au cours des 12 mois écoulés. Les "Trophées de C'est Pas Mon Idée !", en quelque sorte...

Banque 2.0

Tookam.com
Parmi les nombreux établissements de nouvelle génération qui ont éclos en 2011, et même s'il n'est pas aussi disruptif que les startups BankSimple et Movenbank, celui que je retiens tout particulièrement est TooKam, pour son originalité parmi les "agences en ligne" qu'ont créées toutes les grandes banques françaises ces derniers mois.

Une originalité qui se traduit par la création des Tookets, monnaie virtuelle solidaire, autant que par son mode d'incubation, au sein d'une sorte de "startup" interne qui continue d'ailleurs à générer des idées (cf. Kam&Leo).

Assurance 2.0

Friendsurance
Dans le secteur de l'assurance, la palme de l'innovation revient haut la main à Friendsurance et à son modèle mixant intelligemment assurance traditionnelle et mutuelle P2P ("pair à pair").

Cette étrange combinaison permet en effet de proposer aux consommateurs des prix attractifs, tout en réduisant les risques et les coûts portés par les compagnies partenaires, la communauté prenant en charge les sinistres de faible montant.

Banque mobile

Westpac Impulse Saver
Les publications d'applications de banque mobile se sont succédées tout au long de l'année mais il s'est agit pour l'essentiel d'évolutions ou de variations sur les thèmes que nous connaissions déjà.

Dans ce contexte, je préfère donc une solution simple (simpliste ?), mais qui fait preuve d'une véritable originalité et d'une pertinence indiscutable : "Impulse Saver" de Westpac, dont le seul rôle est de transférer une somme déterminée sur un compte d'épargne par le simple appui d'un (gros) bouton.

Assurance mobile

AllState
Pour les compagnies d'assurance, au-delà des quelques exemples de déclaration de sinistre sur mobile, il semble difficile d'imaginer des applications "métier" capables de séduire les clients.

C'est précisément la raison pour laquelle je souhaite distinguer l'initiative "App Attack!" de AllState. Car ce concours interne de création d'applications mobiles est une réponse possible au déficit de créativité du secteur mais il constitue également un exemple à imiter pour toutes les institutions financières en mal d'innovation.

Banque P2P

BBVA Friends and Family
Dans le monde entier, l'année écoulée n'a pas été très rose pour les pionniers de la finance P2P, souvent handicapés par une réglementation de plus en plus stricte.

En conséquence, la seule innovation que je retiens dans ce domaine est l'initiative "Friends & Family" de la banque espagnole BBVA. Sans chercher à concurrencer les sites de prêt-emprunt entre particuliers, cette plate-forme de "crowdfunding" propose aux consommateurs de faire appel, via les réseaux sociaux, à leurs amis et à leur famille pour financer leurs projets.

Paiement mobile

Square
PayPal et Google Wallet ont créé la sensation avec leurs annonces de ces derniers mois. Pourtant, ni l'un ni l'autre n'a transformé le paysage du paiement mobile en 2011 comme Square.

La société se vante désormais d'avoir conquis plus d'1 million de commerçants aux États-Unis (à comparer au total de 8 millions acceptant les paiements par carte) et de traiter plus de 10 millions de dollars par jour.

Non contente de fournir des solutions aux marchands, Square développe aussi activement son offre à destination des consommateurs, leur proposant désormais un véritable porte-monnaie mobile.

Co-innovation

Alpha Projet sur FaceBook
Parmi les multiples expériences de co-innovation dont j'ai pu parler ici, l'Alpha Projet du Crédit Agricole d'Ile de France n'est peut-être pas le plus médiatisé mais il n'en constitue pas moins une référence, par son approche pragmatique, inscrite dans la durée.

Dans son agence pilote (et non "agence concept"), les clients qui le souhaitent sont invités à découvrir les nouveautés qui leurs sont proposées mais aussi, et surtout, à "dessiner la banque de demain".

Le premier anniversaire du projet devrait d'ailleurs nous donner prochainement l'occasion de réaliser un point d'étape. A suivre...

jeudi 29 décembre 2011

L'innovation à l'œuvre chez Forrester

Innovation
Parfois, les cabinets d'analystes ne se contentent pas de théorie et il arrive aussi qu'ils appliquent leurs recommandations à leurs propres organisations. Josh Bernoff, co-auteur de "Empowered", relate[1] ainsi la démarche d'innovation interne que vient d'expérimenter Forrester Research autour de sa plate-forme collaborative "HERO Platform".

L'objectif principal de l'auteur est de souligner quelques bonnes pratiques, pour la plupart conrètes et précises, dont peuvent profiter toutes les initiatives du genre, en particulier dans les entreprises qui ne sont pas familières d'une telle démarche. La première d'entre elles, bien que constamment ressassée, mérite toujours d'être rappelée : une démarche d'innovation requiert un processus clairement défini et formalisé. Et tous les autres conseils ne viennent finalement qu'aider à à ajuster les détails de ce processus.

Pour la première partie de la démarche de Forrester Research, consistant à recueillir les idées, l'accent est d'abord mis sur l'impératif de définir et afficher l'objectif à atteindre (dans ce cas, il s'agissait justement de mettre en place un "système" permettant de "canaliser" les velléités d'innovation pré-existant, et souvent frustrés, dans l'entreprise). Autre classique dans le domaine, l'opération a été lancée sur une période déterminée (quelques jours ou quelques semaines), dans un esprit de concours, ce qui en renforce l'attractivité et évite un délitement des efforts.

Plus concrètement, Josh se félicite de n'avoir utilisé ("institutionnellement") la messagerie qu'une fois, pour annoncer le lancement de l'initiative, comptant ensuite exclusivement sur la plate-forme et les participants pour maintenir l'intérêt parmi les troupes. Les mécanismes traditionnels des outils collaboratifs – avis et notations, commentaires et discussions – s'avèrent indispensables pour stimuler une communication "spontanée" dans la durée.

Particularité méritant d'être notée, il était demandé à tous ceux qui soumettaient une idée de préciser s'ils l'imaginaient simple à réaliser ou nécessitant une étude détaillée, d'en estimer les coûts et les bénéfices et de décrire comment ils envisageaient leur implication dans une éventuelle mise en œuvre (c'est-à-dire s'ils souhaitaient la mener, y participer ou voir quelqu'un d'autre s'en occuper). Autant de questions (et de réponses) qui peuvent aider à mesurer la valeur des suggestions émises.

Dans cette première phase, 65 idées ont été proposées, discutées, évaluées et classées par les utilisateurs de la "HERO Platform". L'étape suivante, indispensable dans un processus formalisé, consistait à préparer l'implémentation des meilleures d'entre elles.

Tout d'abord, 15 personnes, dont une bonne partie haut placées dans la hiérarchie, ont été mises à contribution pour juger les suggestions. En dehors de leur séniorité, un autre critère de sélection des "jurés" était la diversité de leurs profils. Ils ont été séparés en 2 groupes, traitant séparément les idées "rapides" et celles qui demandaient une étude approfondie, mais toutes sur des critères identiques (coûts et bénéfices potentiels, inscription dans la stratégie), aussi objectifs que possible, et qui doivent être explicites dès l'origine.

Ce qui surprendra dans cette démarche est l'absence de prise en compte dans cette sélection officielle des avis des participants à la première phase. Je suppose que le classement "communautaire" n'est considéré que comme une technique d'animation mais je m'inquiéterais tout de même de l'impression qu'en retiendront les collaborateurs.

Après un premier travail d'évaluation, les 16 idées restant en "compétition" (8 dans chacun des 2 groupes) ont été soumises à une nouvelle épreuve de sélection finale. Celle-ci s'est déroulée sous la forme de 2 réunions de 3 heures, au cours desquelles chaque "innovateur" disposait de 8 minutes pour présenter sa proposition, suivies de 6 minutes de questions-réponses. Ce format relativement court a l'avantage de faciliter l'implication des responsables de haut niveau de l'entreprise.

Les idées retenues à l'issue de cette dernière étape sont désormais en phase d'incubation. Malheureusement, Josh ne parle pas de cette suite logique dans le processus d'innovation...

[1] Article en 2 parties : "générer des idées" et "des idées à l'implémentation".

mercredi 28 décembre 2011

CodeSprint, un "hackathon" pour recruter

Interview Street
De nos jours, l'informatique est au cœur de l'activité de nombreuses entreprises, dans le secteur financier plus que dans tout autre. La recherche des meilleurs talents devrait donc être primordiale pour elles. Dans cet objectif, l'approche originale de CodeSprint pourrait constituer une source d'inspiration pour les spécialistes du recrutement de développeurs.

La société à l'origine de cette initiative, InterviewStreet, proposait jusqu'à maintenant une plate-forme en ligne de tests de compétence pour les candidats à l'embauche de quelques startups plus ou moins connues (AirBnB, DropBox, Facebook...) de la Silicon Valley et d'ailleurs. Elle ne s'intéresse cependant qu'à des profils bien particuliers, de développeurs de logiciels, et les tests dont il est question sont exclusivement des exercices de programmation ou de conception d'algorithme. Au fur et à mesure des challenges qu'ils résolvent, les participants accumulent des "points", qui leur permettent de se faire repérer par leurs entreprises préférées.

Poussant sa logique un peu plus loin, la société lance maintenant des "CodeSprints", sortes de campagnes de recrutement "flash", prenant la forme de "hackathons" en ligne. En pratique, pour l'édition qui commencera le 6 janvier prochain, les internautes du monde entier seront invités à se pencher, pendant 48 heures, sur une série de problèmes algorithmiques et de programmation (dérivés de cas réels soumis par les recruteurs). Les "meilleurs" développeurs, jugés par le nombre et la qualité des solutions apportées, seront ensuite contactés, pour des entretiens d'embauche, par les startups de leur choix parmi les 63 qui participent à l'opération.

Pour les candidats, l'avantage du CodeSprint est de concentrer une partie de leurs efforts de recherche d'emploi sur une courte période (2 jours), dans une approche concrète et pragmatique, tout en ciblant un nombre conséquent de recruteurs (attractifs) potentiels. Pour ces derniers, le bénéfice sera de pré-filtrer rapidement les jeunes développeurs sur leurs compétences de programmation sur un mode aussi objectif que possible, quitte à devoir faire valoir leurs qualités propres (par rapport à leurs concurrents) dans la suite du processus de sélection.

En France, malgré l'importance de l'informatique pour la banque ou l'assurance, il est difficile d'imaginer de telles méthodes pour le recrutement de développeurs dans ces organisations, n'est-ce-pas ? Et il me semble tout autant irréaliste de l'envisager dans les SSII (sociétés de service) qui fournissent désormais une grande partie des troupes des DSI modernes.

Je crains en effet que les qualités de programmation ou d'algorithmique soient bien peu valorisées dans l'hexagone : sans aller jusqu'à un hackathon, combien d'entreprises ont-elles encore recours à des exercices pratiques pour juger des candidats ? Et tous les débutants n'aspirent-ils pas à devenir chef (de projet) le plus rapidement possible ? En prolongeant ce raisonnement, on pourrait même se demander si le déficit de startups françaises à succès ne serait pas aussi (un peu) du à cet état d'esprit...

Pourtant, le succès des grandes entreprises comme de celles émergeant tout juste passe de plus en plus souvent par une maîtrise des technologies, qui devrait donc être considérée à sa juste valeur...

lundi 26 décembre 2011

Bilan de mes anti-prédictions pour 2011

Ouverture de cadeau
Au début de l'année, je cédais, comme beaucoup d'autres, à la tentation de jouer les oracles, avec 5 anti-prédictions pour les banques françaises en 2011. Un an plus tard, je vous propose de faire le point sur leur réalisation et de mesurer ainsi les progrès accomplis (ou non) dans les 5 grands domaines d'innovation du moment.

PFM

En 2011, la gestion de finances personnelles (PFM) a continué sa progression dans le monde, prenant parfois de nouvelles directions (la ludification, par exemple). Si de nombreuses banques américaines ont maintenant adopté ces outils, les progrès en France sont restés plutôt timides.

Cependant, la situation a évolué plus rapidement que je ne l'envisageais en janvier : outre les progrès du "MoneyCenter" de Boursorama, devenu multi-banques, BNP Paribas a fait un premier (petit) pas en direction de la gestion de budget au sein de son service de banque en ligne tandis que le Crédit Agricole enrichissait les fonctions de gestion financière disponibles dans son application mobile (notamment sur iPad).

En parallèle, les acteurs indépendants ont continué à se développer dans l'hexagone. Linxo, qui réoriente sa stratégie vers un modèle payant et une application mobile, a ainsi été rejoint récemment par Bankin, dont les recettes sont à peu près identiques. Et, malgré les risques qu'elles présentent pour la sécurité des données bancaires, ces approches semblent rencontrer leur public et confirmer, s'il en était besoin, l'intérêt des consommateurs pour la gestion de finances personnelles, surtout en temps de crise.

Paiement mobile

Le paiement via le téléphone n'a toujours pas décollé en 2011 mais le secteur a (enfin !) vécu quelques bouleversements prometteurs.

Du côté du paiement sans contact (NFC) sur mobile, sans surprise et comme prévu, la situation n'a quasiment pas évolué en France, avec des expérimentations qui se multiplient (en particulier sous la bannière Cityzi), sans objectifs bien clairs ni résultats probants... C'est donc de Google qu'est venue la nouveauté, avec Wallet, et, bien qu'elle ne concerne pas encore le vieux continent, cette irruption va très certainement secouer les apathies actuelles.

En ce qui concerne les paiements P2P (de "pair à pair"), les banques françaises se sont montrées plus actives. Se sont ainsi succédés la BRED (groupe Banque Populaire), avec NotreBanque, le Crédit Mutuel, qui a "réveillé" Pay2You à l'occasion du lancement de BeMix (ces deux-là ne sont pas très mobiles, cependant), et BNP Paribas et son application "Mes Transferts" incluse dans sa palette de nouveaux services mobiles... Mais, surtout, le Crédit Agricole a lancé Kwixo, qui pourrait devenir un vrai concurrent français (européen ?) de PayPal.

Malgré tout, il est encore trop tôt pour voir dans ces initiatives l'engouement que j'espérais il y a un an. Les dernières tendances dans le domaine (par exemple Kaching de CBA ou PayPal et son incursion dans le commerce de proximité) laissent penser que l'avenir est probablement plus aux solutions intégrées, couvrant toutes les problématiques de paiement sous une interface universelle...

Banque mobile

Comme il était facile de le prévoir, les services de banque mobile ont progressé dans la continuité, sans introduire les modèles disruptifs que promettent toujours certains acteurs.

L'année écoulée a néanmoins apporté son lot de nouveautés, dont certaines esquissent ce que pourraient être ces vraies transformations attendues. Je pense par exemple à l'épargne d'impulsion inventée par WestPac ou encore l'AppStore (quoiqu'un peu trompeur) de La Caixa.

En France, on s'intéressera à l'affrontement entre deux approches distinctes, représentées par, d'une part, BNP Paribas qui multiplie les applications mobiles à usage "ciblé" (par exemple la consultation "immédiate" du solde de compte), et, d'autre part, le Crédit Agricole dont la solution "Mon Budget" commence à rassembler le meilleur de la banque dans un logiciel intégré.

Cloud computing

S'il faut en croire la communication officielle (ou, plutôt, son absence) le cloud computing a connu une année encore plus noire que je ne le pressentais.

A travers le monde, quelques retours d'expérience sur l'utilisation des "nuages" publics ont pu émerger ça et là (par exemple celui de Bankinter) mais ce sont surtout des implémentations de "clouds internes" qui ont été mises en avant (comme chez JP Morgan ou ING).

Et encore, la plupart de ces cas concernent-ils des applications non critiques, quand il ne s'agit pas de "cloudwashing" (c'est-à-dire une qualification abusive de cloud pour de simples efforts de virtualisation).

En France, aucune banque n'a annoncé la moindre initiative, ce qui traduit bien l'attentisme actuel, même s'il est certain que quelques implémentations ont été réalisées (en particulier dans les fonctions "support", telles que les DRH).

Green IT

Pour le Green IT aussi, l'année a été peu propice aux progrès et, plus généralement, il semblerait que le développement durable soit passé directement de l'effet de mode à l'oubli, non seulement en France mais aussi à l'échelle de la planète entière.

Même les promesses de réduction des coûts, qui pourraient rencontrer un écho dans une conjoncture économique difficile, ne font apparemment plus recette. Les seuls espoirs pour ceux qui se préoccupent de l'environnement résideront donc dans une hypothétique flambée des prix de l'énergie ou une improbable "taxe carbone"...

samedi 24 décembre 2011

Une autre dimension de la ludification

Dé à question
La "ludification", c'est-à-dire l'adoption de mécanismes de jeu (scores, badges, classements...) pour développer et faciliter l'utilisation de logiciels "sérieux", a le vent en poupe, ces derniers temps. Mais, finalement, le plus important ne serait-il pas de rendre les applications agréables à manipuler ? Là est le propos de Craig Roth, analyste chez Gartner et ancien développeur de jeux, dans un article qui renverse un peu le concept tel qu'on l'aborde habituellement.

Parmi les critères de succès d'un jeu vidéo, l'un des principaux est la qualité de son interface utilisateur (IHM), qui va se traduire par sa clarté, sa réactivité, son intuitivité, son attractivité, son ergonomie... Pour les éditeurs et les concepteurs, ces caractéristiques sont essentielles puisqu'elles participeront (en partie au moins) à la décision des consommateurs de payer pour pouvoir utiliser leurs jeux.

Or les développeurs d'applications d'entreprise (équipes internes, surtout, mais aussi éditeurs spécialisés) sont bien loin de ces considérations et sont beaucoup plus préoccupés par l'intégration de nouvelles fonctionnalités que par le soin apporté aux interfaces. Cela semble naturel puisque les utilisateurs finaux seront, de toutes manières, obligés de s'adapter au fonctionnement qui leur est imposé et que le fournisseur sera évalué principalement sur le nombre de fonctions présentes dans le produit final.

Mais cette vision peut s'avérer contre-productive et pas seulement par les coûts de formation ou la perte de productivité induite par des applications peu ergonomiques. Craig prend ainsi l'exemple d'une plate-forme de gestion des connaissances : lorsque la saisie d'informations optionnelles est portée par une IHM de mauvaise qualité, les collaborateurs seront moins enclins à l'affronter et s'en tiendront à un usage minimaliste. L'objectif même de la solution est alors en péril, puisque la richesse des informations recueillies sera moindre.

Prendre soin de l'interface utilisateur peut donc être plus important qu'on ne le pense généralement et, avant d'introduire des mécanismes ludiques, les modèles d'IHM des jeux vidéo peuvent déjà constituer une source d'inspiration utile (sans cependant tomber dans l'excès).

Et le raisonnement peut encore être prolongé lorsqu'on y intègre la tendance à la "consumérisation" de l'informatique. Les consommateurs sont exposés quotidiennement à une multitude de logiciels et de services, sur le web ou sur leur smartphone, à la facilité d'utilisation déconcertante, attractifs et obligatoirement intuitifs (qui lit encore un guide d'utilisation ?). Progressivement, ces exemples constituent une référence universelle pour toutes les applications, à usage personnel ou professionnel. Si l'entreprise n'est pas en mesure de s'y conformer, cela constituera un motif supplémentaire pour le collaborateur de rejeter ce qui lui est imposé... ou de choisir une autre solution, externe...

vendredi 23 décembre 2011

Crédit Agricole SA innove avec les étudiants ... et Studyka

Challenge Hanvie
La direction des ressources humaines (DRH) de Crédit Agricole SA souhaite innover pour développer son attractivité (en tant qu'employeur) auprès des quelques 11 000 étudiants de l'enseignement supérieur en situation de handicap en France (2% du total). Pour ce faire, quelle meilleure idée que de faire appel à Studyka et sa plate-forme d'innovation en crowdsourcing dédiée aux étudiants ? Le résultat est un défi, baptisé "L'Hanvie de faire la différence".

L'objectif fixé aux participants est d'élaborer une stratégie globale pour attirer et intégrer dans le groupe des étudiants en situation de handicap, en utilisant à la fois des méthodes de communication (organisation d'événements, par exemple) et des technologies du web 2.0 (réseaux sociaux, viralité, mobile...).

Comme il est d'usage pour Studyka, une des composantes essentielles du challenge est en effet de favoriser la mixité des équipes engagées, avec des étudiants issus d'écoles et de disciplines variées, apportant leurs complémentarités à la problématique qui leur est soumise.

L'Hanvie de faire la différence

Les modalités du concours structurent le travail à réaliser en 3 parties, qui composeront un dossier final de 15 pages au maximum :
  • Un état des lieux, pour identifier les blocages existant dans l'intégration dans l'entreprise des personnes handicapées et détecter les bonnes pratiques qui pourraient être dupliquées.
  • Une stratégie de communication pour attirer les étudiants concernés vers les différents métiers de la banque.
  • Une stratégie d'intégration des handicapés dans l'environnement professionnel, en tenant compte de la culture d'entreprise, la formation...
Preuve de l'implication sérieuse de Crédit Agricole SA, les participants auront accès à des collaborateurs de la banque, pendant le déroulement du concours, pour faire des points d'étape. Par ailleurs, les enseignants sont également encouragés à coacher leurs étudiants durant l'opération.

A l'issue du concours, 10 équipes seront récompensées lors d'une cérémonie "officielle", qui constituera surtout l'occasion pour les participants les plus brillants de se faire remarquer auprès des managers de Crédit Agricole SA, à travers des présentations "flash" (en 15 minutes) de leur projet.

Ce challenge est certainement une bonne nouvelle pour Studyka, qui peine à décoller (apparemment, seules 5 opérations ont été réalisées en 1 an). Il s'agit aussi d'une première pour une banque française et, pour cet essai, le thème choisi semble remarquablement pertinent, jouant sur une double cible d'étudiants (celle des participants et celle des bénéficiaires de l'innovation) et un sujet forcément "porteur" (l'intégration des handicapés). Avec une telle recette, le succès devrait être assuré et nous suivrons avec attention les résultats, en avril-mai prochain.

jeudi 22 décembre 2011

UNX lance un appstore pour les traders

UNX
UNX, éditeur de la plate-forme de trading Catalyst, devient la première société de sa catégorie (à ma connaissance) à prendre le train de l'ouverture aux développeurs. Ainsi, après le lancement d'un site web qui leur est dédié, depuis lequel ils peuvent accéder aux outils mis à leur disposition, c'est une place de marché de solutions tierces qui vient d'être dévoilée.

Destinée aux traders institutionnels, la plate-forme Catalyst intègre depuis 1999 les différents outils, d'information sur les marchés, de suivi de portefeuille et d'exécution d'ordres, indispensables pour leur activité. Conçue dès l'origine comme un framework de portail, elle devient désormais capable d'accueillir les modules complémentaires créés et distribués par les partenaires d'UNX, qu'il s'agisse de brokers, de sociétés de trading, de marchés boursiers ou d'éditeurs de logiciels.

Ces composants additionnels pourront couvrir un large spectre de fonctions, tels que des algorithmes, des flux d'informations, des outils d'analyse, l'accès à des études et recherches, la consultation graphique de cours... Plusieurs sont présents sur la nouvelle place de marché dès son ouverture.

Première étape de l'initiative, un SDK ("Software Development Kit", kit de développement logiciel) a été mis en ligne, permettant aux développeurs de créer des logiciels qui s'intègrent, de manière transparente, dans la plate-forme Catalyst. Deuxième étape, un environnement de test a ensuite été ouvert pour vérifier et valider le fonctionnement des nouveaux modules. Dernière phase, une place de marché (un AppStore, dirait-on de nos jours) fait son apparition dans Catalyst, proposant aux utilisateurs l'ensemble des solutions complémentaires mises à leur disposition.

Comme dans toutes les démarches de ce genre, UNX espère profiter de la capacité d'innovation des développeurs externes pour enrichir son offre. Bien qu'il n'en soit pas question dans la communication officielle, il est également probable que l'éditeur dérive un revenu direct des logiciels payants qu'il distribuera sur sa plate-forme. De leur côté, les développeurs profiteront d'une exposition optimale de leurs réalisations à une population ciblée a priori. Enfin, pour les clients finaux, la diversité espérée des modules disponibles devrait leur permettre de se constituer une solution globale de trading particulièrement complète, personnalisée et intégrée.

Avec ce nouvel exemple, l'idée d'ouvrir les plates-formes technologiques propriétaires aux développeurs investit un domaine supplémentaire (après, par exemple, celui du PFM, illustré par le cas de Yodlee), soulignant l'intérêt qu'elle suscite dans tous les secteurs. Notons néanmoins qu'ici la démarche est relativement limitée plusqu'il n'est question que d'intégration "technologique" et non, comme dans les expériences les plus ambitieuses (dont celle de Yodlee), de donner accès à des données "privées".

mardi 20 décembre 2011

(Non) Prédictions 2012 (5) : ABI Research

Prédictions
Avec une approche un peu plus originale que ses 4 prédécesseurs, ABI Research se livre aussi à l'exercice des prédictions pour 2012 à travers une liste des faits et événements qui, selon ses analystes, ne se produiront pas au cours de l'année à venir.

Le cabinet ayant un focus assez technologique, touchant plus particulièrement aux réseaux et aux mobiles, j'en ai extrait les quelques thèmes qui peuvent concerner les institutions financières (ou leurs DSI), plus ou moins directement.

Parmi ceux-ci, le plus pertinent est sans conteste celui qui traite du paiement sans contact (NFC) sur mobile. Ce n'est désormais (presque) plus une surprise : ABI Research considère que 2012 ne sera (encore) pas l'année du décollage. Ses arguments pour justifier cette position sont de deux ordres. En premier lieu, les atermoiements des acteurs pour se positionner sont considérés comme une des causes principales de l'attentisme qui prévaut encore.

Mais, plus important, les dernières initiatives ont aussi mis en évidence des opportunités pour de nouveaux modèles économiques (merci Google !), dont les opérateurs de télécommunication évaluent le potentiel tout en temporisant l'introduction de téléphones compatibles NFC. Conséquence directe de cette évolution, il est probable que 2012 voit finalement (et tardivement) l'émergence de quelques porte-monnaie mobiles, sous la pression d'une concurrence exacerbée. Et la situation sera alors peut-être plus claire dans un an, même si la généralisation n'est pas encore en route...

Du côté des tablettes, il faudra surtout retenir qu'elles n'atteindront pas un marché de masse à court terme, malgré leur popularité. A cela, une raison essentielle : la plupart des acheteurs choisissent les modèles équipés uniquement de WiFi (ou n'activent pas la 3G), or ces appareils étant conçus pour un usage connecté à internet, ils sont finalement utilisés surtout dans des lieux fixes (en particulier au domicile). Le passage à un vrai usage mobile interviendra certainement d'ici quelques années mais, alors, les coûts (du matériel et de l'accès au réseau) resteront un frein important à une diffusion étendue.

Plus généralement, ABI Research combat l'idée selon laquelle le mobile deviendra progressivement l'appareil principal pour l'accès à internet. La réalité est simplement que le téléphone représente pour l'instant un moyen de connexion abordable, surtout dans les pays émergents. Mais, progressivement, les PC portables et les tablettes deviendront plus accessibles et leurs grands écrans conserveront un avantage déterminant. L'avenir sera résolument multi-écrans.

Autre idée reçue battue en brèche par ces prédictions : HTML5 ne remplacera pas les applications mobiles en 2012... ni en 2014. Le premier handicap de cette technologie, pourtant prometteuse, est la rareté actuelle des navigateurs entièrement compatibles. A plus long terme, les plates-formes de développement d'applications natives continueront à être plus riches et à mieux répondre aux exigences croissantes des utilisateurs (notamment en termes de performance). HTML5 réussira tout juste à populariser la création d'applications mobiles parmi les développeurs web et un des seuls secteurs où il s'imposera est le marketing.

Quels enseignements pour les institutions financières ? Je proposerai 3 recommandations découlant de ces prédictions (que je partage, dans une large mesure) :
  • Il faudra rester très attentif aux développement des solutions de paiement sur mobile mais il va devenir de plus en plus difficile d'identifier un futur gagnant (je pense revenir plus longuement sur ce sujet dans quelques jours) ;
  • Les tablettes sont séduisantes mais, avant de développer des applications pour celles-ci, gardez en mémoire la population d'utilisateurs que vous pourrez cibler ;
  • Continuez à miser sur le développement d'applications natives pour les différents smartphones du marché, même si les coûts s'en ressentent...

lundi 19 décembre 2011

PayPal débarque dans le commerce "en dur"

PayPal InStore
Il n'aura pas fallu longtemps pour passer de la théorie (en vidéo) à la pratique (en boutique) : juste à temps pour les fêtes, PayPal lance une expérimentation de paiement par mobile de proximité avec deux détaillants suédois. Et, ô surprise, comme pour confirmer mes prédictions, la technologie sans contact (NFC) est de la partie !

Deux composantes constituent le cœur de l'initiative : l'application PayPal InStore, disponible pour Android et iPhone, et un sticker NFC, que le consommateur collera sur son téléphone. Mais, à la différence d'autres implémentations de ces "gadgets", l'autocollant de PayPal est identifié par le logiciel mobile et associé au compte de l'utilisateur, ce qui permet d'offrir, malgré son isolation "physique", un service riche autour du paiement.

Comment le système fonctionne-t-il ? Au moment de régler son achat, le client approche son téléphone du terminal sans contact du commerçant, qui transmet toutes les données de la transaction (montant à payer et identifiant du sticker) au serveur de PayPal. Celui-ci peut alors demander une confirmation du règlement au consommateur, sur son mobile, matérialisée par la saisie d'un code secret.

Le fonctionnement sans autocollant est également prévu, en tous points semblable, si ce n'est que l'identification du compte PayPal du client ne se fait plus sans contact mais par la saisie sur le terminal du commerçant d'un code fourni par l'application mobile. La suite de la transaction se déroule comme précédemment.

Finalement, à l'inverse des solutions traditionnelles, la fonction NFC ne sert donc à PayPal qu'à faciliter l'acte de paiement, dont elle n'est qu'un élément accessoire. La société peut ainsi continuer à exploiter ses modes opératoires habituels, qu'elle maîtrise parfaitement, y compris du point de vue de la sécurité. De cette manière, elle est aussi en position de réaffirmer son autonomie par rapport aux autres acteurs (fabricants de mobiles, opérateurs de télécommunications...).

Cette dernière caractéristique fait de PayPal un concurrent sérieux dans la compétition qui agite le secteur du paiement sur mobile de proximité, qu'il serait facile d'oublier au milieu du battage qui entoure le sans contact "classique". Ses initiatives ne sont en effet pas contraintes par les tiraillements entre une multitude de "partenaires" ou par l'attente de la généralisation de telle ou telle technologie. Elle est au contraire entièrement libre d'avancer à son rythme, ce que même Google (Wallet) ne peut réellement se permettre.

Bien sûr, l'expérience suédoise n'est encore qu'un test, visant d'abord à évaluer l'appétence des commerçants et des consommateurs pour une nouvelle solution de paiement. Mais au moins, dans ce cas, on peut être assuré que cette phase ne traînera pas et que PayPal en tirera très rapidement les enseignements utiles (le déploiement est déjà annoncé pour 2012). Avec ces acteurs (j'inclus Google dans la course), on saura très vite si le paiement sur mobile a un avenir et quelle(s) solution(s) réussira(ont). Enfin !

dimanche 18 décembre 2011

Brèves : Boursorama, First Direct, AmEx, Generali, SEQR

L'actualité récente a encore été riche d'annonces dans le secteur des paiements sur mobile mais les "vraies" nouveautés se font malgré tout plus rares, ce qui est probablement le signe d'une maturité (enfin) proche. Je ne reviendrai pas sur l'"affaire" des failles de sécurité de Google Wallet (montées en épingle par la presse mais pas si dramatiques qu'il y paraît) et une seule startup du m-paiement (Seamless SEQR) figurera dans cette sélection, aux côtés d'autres sujets, du m-banking (Boursorama) à la co-innovation (First Direct), en passant par les nouvelles APIs d'American Express et une idée surprenante de l'assureur Generali.


Boursorama
Boursorama Banque vient de lancer la nouvelle version de son application mobile (pour iPhone et Android) et la promotion bat son plein autour de l'intégration de l'accès aux marchés boursiers (en consultation mais aussi pour la passation d'ordres), qui était très attendue par les clients fidèles de la marque et de son activité historique.

Pourtant, c'est bien une fonction bancaire qui m'interpelle parmi les nouveautés introduites : il devient en effet possible de préparer et envoyer un chèque depuis son téléphone. L'utilisateur n'a qu'à sélectionner le compte sur lequel le chèque sera tiré, puis à saisir son montant et fournir les coordonnées du destinataire. La banque se charge de l'impression et de l'envoi du chèque, ne facturant au client que l'affranchissement (en recommandé ou non).

Alors que la profession cherche par tous les moyens à faire disparaître ce moyen de paiement archaïque et que de plus en plus de ses concurrentes (comme BNP Paribas récemment) mettent en place des services de virement bancaire "simplifiés", qui pourraient s'y substituer, le choix de Boursorama de mettre le chèque ainsi en avant ne manque pas d'étonner...


First Direct
Le Lab de First Direct, invitant les consommateurs à participer à la création des services de la banque britannique, fête son premier anniversaire et un retour d'expérience récent permet de revenir sur cette initiative.

Le cas en question est parti du constat que les clients souhaitaient que les cartes de débit et de crédit de l'établissement soient mieux différenciées pour les identifier plus facilement. Les propositions de nouveau design de carte de débit qui leur ont été soumises via le Lab ont suscité une participation soutenue (128 commentaires et plus de 320 votes), ce qui constitue un certain succès pour cette démarche.

En revanche, le résultat final a du être difficile à admettre pour First Direct, puisque la majorité a rejeté les nouveaux designs, préférant conserver le format actuel. La banque doit cependant être applaudie car, allant au bout de sa logique, elle accepte ce verdict et prépare de nouvelles propositions (pour sa carte de crédit, cette fois).


American Express
L'ouverture des données et services financiers aux développeurs est (presque) un classique des grandes entreprises technologiques du secteur (PayPal en tête) mais les exemples sont beaucoup plus rares parmi les établissements historiques.

American Express franchit le pas en dévoilant ses APIs ("Application Programming Interfaces", interfaces de programmation). Celles-ci donneront accès, naturellement, aux services de paiement du réseau mais également à ses outils de gestion d'autorisations et de sécurité (prévention de fraude).

Logiquement, je devrais me réjouir d'une telle ouverture mais je crains qu'il ne s'agisse ici que d'un demi-effort. En effet, les modalités techniques d'utilisation des services d'AmEx ne me paraissent  pas aussi simples qu'elles pourraient l'être et, surtout, il semblerait que seuls les partenaires de la marque pourront en bénéficier, ce qui en limite singulièrement l'intérêt. Décidément, ce genre d'exercice est bien difficile pour les institutions financières...


Generali
Pour les compagnies d'assurance, les applications mobiles constituent une nouvelle opportunité de maintenir une relation avec leurs clients, qui se réduit généralement aux courriers de facturation des primes annuelles. Encore leur faut-il trouver les bonnes idées pour intéresser les consommateurs dans la durée.

Generali a choisi une approche originale pour développer et maintenir sa présence sur l'AppStore d'Apple, en offrant gratuitement (à tous) le téléchargement d'une application habituellement payante.

Le titre choisi pour cette opération est tout de même surprenant : "Quick Invoice" est une solution de facturation sur mobile, qui permet donc de préparer, créer et envoyer (par mail) des factures. Outre son peu de rapport avec le secteur de l'assurance, sa traduction française approximative donne une impression de mauvaise qualité assez peu compatible avec l'image de Generali...


Seamless SEQR
La startup du paiement sur mobile de cette série sera une suédoise, Seamless, dont la solution SEQR, sans être révolutionnaire, me semble introduire une part de nouveauté dans son approche, combinant virements bancaires et QR code.

La société se positionne comme un intermédiaire technologique dans un écosystème complet de paiement, comprenant consommateurs, commerçants et banques.

Le fonctionnement de SEQR est relativement simple pour ses utilisateurs. Le commerçant enregistre la transaction sur son terminal, qui la transmet aux serveurs de Seamless. Le client, de son côté, scanne sur son téléphone le QR code de la caisse, celui-ci est envoyé aux mêmes serveurs, qui sont alors capables de réconcilier les deux parties. Une confirmation est demandée au consommateur, toujours sur son mobile, après quoi le système réalise le virement correspondant.

Si cette solution a le mérite d'une certaine originalité "technique", ses grands principes (virements et échanges tri-partites) sont finalement assez classiques. Il est difficile de croire au succès alors que les "grands" (Google ou PayPal) investissent le secteur du paiement de proximité avec des moyens autrement plus importants.

McKinsey : la montée du rôle de l'informatique

Etude McKinsey
Pour la sixième année consécutive, McKinsey a interrogé près d'un millier de cadres dirigeants, dont une moitié de DSI (ou équivalent) et une moitié occupant des postes fonctionnels, pour évaluer les utilisations, les budgets et les attentes des entreprises vis-à-vis des technologies de l'information.

Sans changement par rapport aux années précédentes, les premières exigences exprimées concernent l'amélioration de l'efficacité et de la productivité des processus d'entreprises. Plus surprenant, la réduction des coûts informatiques, qui reste la préoccupation principale des DSI, n'est plus autant partagée par leurs pairs dans les organisations.

Cette distorsion s'accompagne d'un renversement progressif de tendance sur les budgets, dont la croissance (ou la stabilité) est attendue par 60% des répondants, avec un accent de plus en plus fort mis sur de nouveaux investissements, ciblant notamment la communication, la collaboration, l'innovation et les capacités analytiques. Les infrastructures et les systèmes "cœur de métier" risque donc tout de même de continuer à pâtir des restrictions budgétaires.

En parallèle, cette volonté d'investir s'accompagne de nouvelles attentes auxquelles les DSI doivent faire face. L'une des plus flagrantes, puisqu'elle arrive en deuxième position des priorités "idéales" des répondants, est de participer à la création de nouveaux produits et services.

Conséquence logique, les entreprises commencent à adopter "sérieusement" les technologies émergentes pour atteindre cet objectif, ainsi que pour améliorer l'engagement client : outils décisionnels avancés, plates-formes sociales d'entreprise, médias sociaux publics, cloud computing, mobile... Les cas de généralisation sont encore minoritaires mais toutes progressent rapidement.

Les mêmes attentes s'expriment aussi au niveau des comités exécutifs : pour les responsables interrogés, ceux-ci devraient dépasser le stade actuel, limité à l'approbation des très grands projets informatiques, pour prendre un rôle actif dans l'inscription des technologies au cœur de la stratégie et l'évaluation des impacts sur l'organisation des tendances majeures à venir.

samedi 17 décembre 2011

TransferWise invente le bureau de change 2.0

TransferWise
Tous ceux qui ont eu un jour à réaliser un virement transfrontalier en devise étrangère le savent, les banques facturent très chèrement ce service. C'est le constat qui a motivé, pour deux estoniens résidant en Grande-Bretagne, la création de TransferWise, une solution de transferts en euros et en livres sterling à un prix défiant toute concurrence, grâce à modèle combinant crowdsourcing et P2P ("peer-to-peer").

A la base, le fonctionnement de TransferWise est trivial puisqu'il consiste à rapprocher des demandes complémentaires de transferts et à équilibrer celles-ci par des transactions locales. Concrètement, imaginons le cas (exagérément simplifié) d'un français (A) qui veut envoyer 800 GBP à un correspondant (X) en Angleterre et d'un écossais (B) qui doit 1000 EUR à un ami belge (Y) : A envoie 1000 EUR à Y et B transfère 800 GBP à X et l'affaire est réglée, à moindre frais, car les virements "locaux" sont peu coûteux, voire gratuits.

Le modèle réel de TransferWise est à peine plus complexe. Tout d'abord, la société détient des comptes dans les deux devises traitées, qui lui permettent de jouer le rôle d'intermédiaire de confiance, et d'isoler les différents participants. Plus important encore, elle assure la "liquidité" du marché en constituant une "réserve" de demandes, qu'elles peut ensuite combiner et réconcilier les unes avec les autres (d'où le rapprochement avec le principe du crowdsourcing). Enfin, naturellement, par rapport à l'exemple cité plus haut, elle gère aussi le taux de change réellement appliqué aux transactions, qui est toujours celui du marché, à l'instant de la transaction, pour les deux parties.

Pour délivrer une qualité de service optimale, la société ajoute quelques fonctions complémentaires utiles à cet ensemble. Tout d'abord, elle prend à sa charge les transferts qui ne trouveraient aucune contrepartie en 2 jours. Les utilisateurs sont ainsi assurés que leur demande sera traitée dans ce délai. Autre exemple, le client peut fixer une limite au taux de change auquel la transaction sera effectuée (puisqu'il ne peut être connu à l'avance).

Pour ce service, TransferWise facture ses clients une commission, généralement fixée à 1 EUR/GBP, pour chaque transaction. La différence avec les frais de virement international en vigueur dans une banque, sans parler des taux de change "particuliers" appliqués à ces transactions, est éloquente…

La société affiche aujourd'hui un millier de clients, échangeant environ 1,5 millions d'euros par mois. Il n'y a évidemment pas dans ces chiffres de quoi inquiéter les banques. Pourtant, l'émergence d'un tel service démontre la capacité disruptive que peuvent amener les technologies et quelques entrepreneurs intelligents, dès qu'une niche d'innovation est décelée. Et rien n'interdit de penser que le modèle de TransferWire pourrait se développer à grande échelle…

CaixaWallet revisite la carte bancaire virtuelle

CaixaWallet
Lancé en France en 2002, le service "e-carte bleue" n'a pas évolué depuis lors et il ne semble pas fortement promu par les banques malgré la croissance de la fraude en ligne. La nouveauté nous vient donc d'Espagne, avec le lancement par La Caixa de CaixaWallet qui, tout en adoptant une approche différente, modernise le concept, lui ajoute quelques fonctions utiles et esquisse une vision plus globale du porte-monnaie électronique.

Tout d'abord, plutôt que d'attribuer pour chaque transaction un numéro de carte à usage unique, CaixaWallet adopte un fonctionnement plus proche de celui de PayPal : le client crée un compte virtuel, qu'il adosse à un (ou plusieurs) compte(s) ou carte(s) bancaire(s). Un numéro permanent, associé à ce compte, devient alors utilisable sur (presque) tous les sites de commerce en ligne acceptant le paiement par carte.

Outre les protections habituelles des cartes bancaires de La Caixa, la sécurité est prise en charge par la mise en œuvre d'une variété de mesures, dont certaines sont laissées au choix de l'utilisateur, selon sa sensibilité au risque : depuis la transmission de la date d'expiration et du code de validation (CVV) par SMS à la possibilité de n'activer la carte que pour 20 minutes, en passant par l'option de pré-alimentation du compte CaixaWallet, qui fonctionne alors comme une carte virtuelle prépayée, les dépenses effectuées étant automatiquement plafonnées.

CaixaWallet

Passons maintenant en revue les avantages spécifiques de CaixaWallet en comparaison du service "e-carte bleue" et qui mériteraient largement d'être introduites dans ce dernier, afin, a minima, de le remettre au goût du jour. Le premier d'entre eux est de proposer au client, à tout moment, le choix du compte rattaché à la carte virtuelle, ce qui, par exemple, offre une souplesse incomparable pour les achats sur internet ou encore permet d'accéder au commerce en ligne avec un simple compte courant. Dans un souci d'ouverture maximal, il est même possible d'alimenter le compte virtuel "prépayé" via une carte détenue dans un autre établissement.

Mais la caractéristique la plus importante, à mon sens, de CaixaWallet est d'être accessible sur mobile, via la version adaptée du site web et les applications de la banque. Cela rend la carte virtuelle, avec toutes ses fonctions (d'alimentation en mode prépayé, d'association à un compte, d'activation temporaire...), réellement utilisable en toute circonstance et sans trop complexifier l'acte d'achat. A l'inverse, l'accès à l'e-carte bleue uniquement par une application Windows ou un site web en "Flash" (qui soulève en soit des interrogations sur sa sécurité), donc rigoureusement impossible à utiliser sur mobile, est résolument archaïque.

Dernier point notable de ce "comparatif", CaixaWallet est entièrement gratuit pour le client de la banque, ce qui semble normal pour un service qui doit aussi favoriser la réduction de la fraude et des frais qu'elle engendre. De ce point de vue, la facturation de l'e-CB par la plupart des banques françaises (certes modeste, de l'ordre d'une dizaine d'euros annuels) paraît un peu déplacée...

Pour terminer, il reste à évoquer les futures extensions qu'esquisse La Caixa dans la présentation de CaixaWallet. En premier lieu, le service permet d'ores et déjà aux clients d'enregistrer les références de leurs cartes de fidélité ou de leurs cartes bancaires détenues auprès d'autres établissements. Cette fonction de simple stockage ne sera pas très utile en l'état mais peut laisser imaginer d'autres ambitions, à terme. Plus explicitement, il est également fait mention de l'intégration prochaine du paiement sans contact (NFC). La banque proposant déjà une fonction de paiement P2P ("pair à pair") avec Transfi, il ne faut pas énormément d'imagination pour voir émerger un porte-monnaie mobile complet...

mercredi 14 décembre 2011

Deutsche Bank envoie ses développeurs dans le nuage

Deutsche Bank
Le "cloud computing" a tenu le haut de l'affiche en 2011 et devrait y rester en 2012, si on en croit tous les oracles des technologies. Pourtant, les exemples d'adoption dans les services financiers, sans être totalement inexistants, sont encore bien rares. Le projet dbCloud de Deutsche Bank, qui vient d'être distingué [lien PDF] par un prix de l'ODCA ("Open Data Center Alliance"), fait donc encore figure d'exception.

Comme il se doit pour une banque, l'approche est, dans un premier temps en tous cas, très prudente, à la fois parce qu'elle concerne uniquement la population des développeurs de logiciels et parce qu'elle reste confinée dans les murs de l'entreprise. Contrairement à d'autres expériences abusivement qualifiée de "cloud" interne, celle-ci mérite sa caractérisation puisqu'il ne s'agit pas uniquement de virtualisation à l'échelle industrielle mais qu'elle s'accompagne aussi d'outils et d'une organisation facilitant grandement l'accès aux infrastructures, "à la demande".

Ces principes se traduisent concrètement par une allocation de ressources informatiques entièrement automatisée. Le développeur enregistre sa demande sur un portail de l'intranet, pour laquelle, selon son niveau d'habilitation, une autorisation est demandée à son supérieur hiérarchique (toutes ces informations sont extraites directement des annuaires de l'entreprise) et, dès l'accord obtenu, la "machine" (virtuelle) demandée est mise à disposition en moins d'une heure. Le fonctionnement est identique pour l'installation de logiciels, avec la particularité supplémentaire dans ce cas que le système gère un "pot commun" de licences, attribuées pour un temps limité (avec des relances régulières pour remettre en circulation celles qui ne sont plus utilisées).

Dans cette première expérience, Deutsche Bank a essentiellement visé un objectif de réduction des coûts. La gestion de licences logicielles partagées, l'automatisation, ainsi que la standardisation et la centralisation des composants mis à disposition des développeurs (l'administration s'en trouvant fortement allégée) y participent naturellement. Mais les efforts ont aussi porté sur le support et l'assistance, qui sont, pour une large part, assurés à travers de nouveaux outils collaboratifs accessibles en self-service.

Pour la banque, dbCloud n'est qu'une première étape, de familiarisation avec le nuage dans un environnement relativement peu risqué. Mais la voie est déjà tracée pour les futures extensions. Il s'agira tout d'abord de "sortir" des centres de productions informatiques internes et d'adapter le modèle mis en place aux offres de "cloud" publiques, une phase qui a été préparée dès l'origine du projet. Ensuite viendront les premières déclinaisons sur des applications, peu critiques, et non plus seulement sur les environnements de développement.

L'approche de Deutsche Bank constitue incontestablement un modèle à suivre pour toutes les entreprises qui croient au "cloud computing" sans être particulièrement hardies. Ses étapes successives permettent en effet aux équipes concernées de s'approprier et de maîtriser successivement chacune des spécificités de ce nouveau paradigme de l'informatique : l'administration des ressources "à la demande", puis la gestion de la relation avec un fournisseur externe, puis le pilotage des applications... L'apprentissage risque d'être long mais il sera certainement fructueux.

mardi 13 décembre 2011

BBVA Compass et son réseau social interne

BBVA
Je l'ai déjà écrit par le passé (par exemple à propos de Kudos) : les grands projets de mise en place d'un réseau social d'entreprise échouent souvent du fait d'ambitions trop importantes et d'un manque de confiance des collaborateurs. De ce fait, les initiatives plus modestes et plus ciblées ont de meilleures chances de succès et peuvent activement contribuer à introduire en douceur une culture du partage dans les grandes organisations.

C'est justement la voie choisie par la direction de la communication interne de BBVA Compass avec sa plate-forme "elevate". Son objectif est, "simplement", de faciliter le dialogue entre les employés, quelle que soit leur position hiérarchique, et le directeur régional de la banque.

Pour ce faire, la solution mise en place fonctionne en 3 temps : tous les collaborateurs sont d'abord invités à poser leurs questions (ou émettre leurs suggestions), ils ont ensuite la possibilité de voter pour leurs questions préférées (et en discuter) et, enfin, les 10 demandes les plus populaires sont sélectionnées, auxquelles le directeur apporte une réponse. Ces cycles de questions-réponses se succèdent, sans interruption, au rythme d'un par quinzaine.

Il est difficile d'imaginer un modèle plus simple et plus direct. Or, même si les participants ne le perçoivent pas nécessairement ainsi, il n'en comporte pas moins toutes les composantes élémentaires d'un vrai réseau social dont, notamment, la promotion de l'expression personnelle, sans contrainte de respect des hiérarchies (via la soumission de questions), l'incitation aux échanges et au partage (avec les discussions ouvertes autour des questions), la participation à un but commun (consistant à faire émerger les sujets les plus intéressants)...

La première campagne, réalisée pendant l'été, a rencontré un succès certain avec 250 questions posées et 400 votes enregistrés, ainsi qu'un record, pour ce genre d'initiative, de 150 000 pages vues en deux semaines. Ces résultats permettent de conclure que, dès le lancement, les collaborateurs de BBVA Compass ont été massivement séduits par le "concept". Fait tout aussi important, la proportion de participants actifs, sans être extraordinaire, s'est avérée largement suffisante pour entretenir l'intérêt, surtout sur une courte période.

On peut dès lors supposer que, si les réponses apportées aux 10 questions sélectionnées ont été à la hauteur de cet engouement initial, un effet d'entraînement "naturel" va graduellement inciter plus de personnes à poser des questions, participer aux discussions et voter. La "mécanique" du réseau social sera alors enclenchée et n'aura plus qu'à être déclinée sur un mode plus générique...

lundi 12 décembre 2011

Les consommateurs prêts aux concessions sur leurs données personnelles, sous condition

Consommation
Pour la cinquième année consécutive, KPMG a réalisé une grande enquête auprès de presque 10 000 consommateurs de 31 pays, pour analyser les évolutions de leurs comportements vis-à-vis du commerce électronique et, plus généralement, des technologies. Cette nouvelle édition démontre encore une fois une accélération des transformations, parmi lesquelles je m'attarderai sur celles qui pourront toucher les institutions financières.

Premier constat, l'idée de transformer le téléphone mobile en porte-monnaie virtuel fait rapidement son chemin, puisqu'elle séduit maintenant deux tiers des personnes interrogées. En parallèle, les internautes affirment un niveau de confiance élevé en leur banque pour les paiements en ligne (selon 56% d'entre eux, contre 30% pour les sites de paiement tels que PayPal et seulement 6% pour les opérateurs de télécommunication). En extrapolant ces résultats au paiement sur mobile, les institutions financières ont une belle carte à jouer...

Jusque là, rien de bien original, tout au plus une confirmation de tendances déjà connues. La vraie révélation de l'étude de KPMG concerne un autre sujet : les consommateurs, qui sont de plus en plus réticents à payer pour les contenus et services en ligne, se déclarent prêts à "partager" leurs informations personnelles, de navigation ou de localisation pour bénéficier d'offres spéciales ou de réductions. Ce choix est confirmé par 66% des répondants, un taux qui atteint même 75% dans la population des 16-24 ans (notons tout de même que les européens y sont légèrement moins favorables que les habitants des autres pays développés).

Les organisations qui disposent d'informations complètes, précises et fiables sur les consommateurs se trouvent dans une position de force pour répondre à ces attentes. Or les institutions financières sont parmi les mieux placées dans ce domaine et elles pourraient donc se créer de nouvelles sources de revenus en partageant les données de leurs clients avec les commerçants (sous des modalités respectant la vie privée).

Combinons maintenant les deux tendances et imaginons un porte-monnaie sur mobile à comportement contextuel ! L'historique des paiements de son propriétaire est exploité pour lui proposer des bons de réduction, lui suggérer des boutiques à découvrir... Cela vous rappelle quelques chose ? Oui, les modèles imaginés par Google (Wallet) et PayPal ont probablement un bel avenir devant eux. Et les banques pourraient participer au mouvement !

L'enthousiasme doit cependant être tempéré, par les barrières, classiques, que dressent les utilisateurs. Au premier rang de celles-ci figurent leurs craintes pour la protection des données personnelles et la sécurité. Il est cependant intéressant de noter que les solutions que les consommateurs suggèrent eux-mêmes sont simples, lorsqu'ils souhaitent, par exemple, une meilleure transparence sur les mesures de précaution mises en oeuvre ou la réalisation d'audits indépendants. Et, là encore, les entreprises qui convainquent bénéficient d'un fort avantage concurrentiel (un effet qui a profité à PayPal par le passé et qui est plutôt favorable aux banques).

dimanche 11 décembre 2011

Citi ouvre un "lab" d'innovation à Singapour

Citi
Le "lab" d'innovation devient un exercice incontournable pour les grandes banques à travers le monde. Pourtant, celui dont Citi annonce l'ouverture à Singapour mérite une mention spéciale, pour au moins deux raisons. D'une part, sa cible est celle des clients institutionnels (et non les particuliers, comme c'est souvent le cas) et, d'autre part, il affiche des ambitions concrètes, qui changent des opérations d'image de certaines initiatives concurrentes.

Classiquement, la vocation de ce "lab" est de promouvoir l'innovation, en particulier technologique (le mobile, le web et les outils analytiques sont notamment mis en avant), pour améliorer le service rendu aux clients. Dans le cas présent, ces derniers sont de grandes entreprises et cette cible détermine le choix des sujets traités : prévision de trésorerie, optimisation des investissements, gestion des réconciliations...

Le 'lab" est symboliquement composé de deux centres, dédiés, l'un, à l'"expérience client" et, l'autre, à la "collaboration client", qui reflètent parfaitement son mode de fonctionnement. Ses 12 collaborateurs, comprenant des experts de la division GTS ("Global Transaction Services") de la banque et de professionnels extérieurs, ont pour rôle de concevoir et créer très rapidement des solutions nouvelles. Celles-ci sont inspirées par les échanges et discussions engagés avec une sélection de clients (une dizaine pour l'instant), qui sont ensuite mis à contribution pour tester les réalisations et participer à leur amélioration.

Parmi différents projets déjà initiés, Citi cite le cas d'un service mobile de "capture des flux de paiements électroniques" élaboré pour Coca-Cola, permettant, entre autres, aux trésoriers de l'entreprise de recevoir des notifications des paiements et d'autoriser les transactions sur leur téléphone.

Outre l'engagement des clients, Citi a mis en place une structure fortement collaborative, qui lui permet aussi, par exemple, de faire intervenir ses experts internes, où qu'ils se trouvent dans le monde. De plus, des partenariats académiques ont été noués, notamment avec la "National University of Singapore", qui opèrent à double sens : contribution aux projets de la banque en contrepartie d'une participation aux programmes pédagogiques.

Citi n'en est pas à son premier "lab", celui de Singapour suivant ceux de San Francisco et Dublin. L'expérience permet ainsi à la banque de mettre en place immédiatement les recettes indispensables (mais non nécessairement suffisantes) à son succès : implication des clients, collaboration avec des intervenants extérieurs, moyens importants, objectifs concrets...

Ce qui retient mon attention est cependant ailleurs : il s'agit de l'importance accordée à la réactivité et à la vitesse de développement, qui se traduit par une volonté de mettre des solutions expériementales entre les mains des utilisateurs en quelques heures et non plus après plusieurs semaines, voire plusieurs mois. La volonté de répondre au plus vite aux attentes et aux besoins des clients s'affirme de plus en plus comme un facteur de différenciation concurrentielle et il me semble que cette tendance prend de l'ampleur dans les initiatives récentes...

Prédictions 2012 (4) : Deloitte

Prédictions
Les exercices de prédiction des tendances futures se suivent et se ressemblent. Ainsi, pour Deloitte, comme pour les autres, mobile, social, cloud et décisionnel seront les stars de 2012. Le cabinet adopte cependant une perspective assez particulière en isolant (aussi) quelques sujets plus précis au sein de ces thèmes généraux.

Les 10 prédictions de Deloitte sont séparées en deux groupes, l'un, des "facilitateurs émergents", constitué de 5 technologies déjà plus ou moins maîtrisées qui reviennent sur le devant de la scène et l'autre, des "déploiements disruptifs", comprenant 5 tendances nouvelles capables de déclencher des transformations de rupture.

Facilitateurs émergents
  • Visualisation géo-spatiale. Les représentations de l'information (en particulier pour l'analyse) profitent de l'explosion de données géo-localisées, issues des usages mobiles, de l'enrichissement collaboratif ("geo-tagging") et/ou de nouvelles sources émergentes.

  • Identité numérique. Entre les besoins des entreprises (notamment les services financiers) de gérer les identités en ligne (de leurs clients ou de leurs collaborateurs) et la prise de contrôle de chaque individu sur sa (ou ses) propre(s) identité(s), la sujet devient toujours plus complexe.

  • Données en marche. Les organisations commencent à tirer avantage de la masse considérable d'information, structurée ou non, simple ou complexe, d'origine interne ou externe. Ces approches ne se substituent pas aux outils décisionnels "classiques" mais viennent plutôt les compléter.

  • Innovation mesurée. Le DSI est dans une position idéale pour détecter les tendances technologiques qui transformeront les métiers comme pour améliorer progressivement les processus en vigueur dans l'entreprise. L'"innovation mesurée" est une approche pragmatique pour atteindre ces deux objectifs souvent contradictoires.

  • Architecture "ouverte". La flexibilité de l'organisation devient critique et, pour la promouvoir, les modèles en silos qui prédominent doivent être remplacés par des approches "ouvertes" ("outside-in"), basées sur des écosystèmes évolutifs.

Déploiements disruptifs
  • Business social. Le développement des médias sociaux dans le grand public est en passe de transformer le fonctionnement des entreprises. Les premières manifestations réussies de ce changement ont ciblé les consommateurs mais la véritable valeur se réalisera à travers l'ensemble de l'organisation.

  • Nuage "hyper-hybride". Les offres de services en "cloud" (de toute nature) vont continuer à progresser et le système d'information devient une combinaison de multiples solutions, internes et externes. Le défi à venir est celui de l'intégration de ces ensembles hétérogènes, par exemple pour la gestion des identités ou l'orchestration de processus...

  • Mobilité d'entreprise. La première vague des applications mobiles, ciblant (là encore) les consommateurs, a déjà, dans certains cas, conduit à repenser les modèles classiques. Mais l'avenir verra émerger une nouvelle génération de solutions d'entreprise, répondant à des besoins beaucoup plus étendus.

  • Ludification. Les "jeux sérieux" et autres approches d'introduction d'éléments ludiques dans des processus métier vont se généraliser, pour en améliorer l'adoption, la performance et l'engagement des utilisateurs.

  • Autonomisation. Au-delà de ses effets sur l'équipement des collaborateurs, la consumérisation des technologies induit également des attentes nouvelles, qui ne peuvent être traitées que par le renversement des modes de fonctionnement, d'une vision orientée "système" à une centrée sur l'utilisateur. Et ce dernier a désormais accès à des solutions (en "cloud", notamment) qu'il peut adopter directement sans "interférence" du DSI.

Rendez-vous au LAB pour parler innovation

LAB
Si vous appréciez les billets de "C'est Pas Mon Idée !" et si vous êtes membre du "LAB" ("Laboratoire Assurance Banque", carrefour d'échanges professionnels des secteurs de l'assurance et des services financiers), réservez la date du 24 janvier (en fin de journée) dans vos agendas ! Ce jour-là, j'aurai en effet le plaisir, à l'invitation de Christian Ruetsch, secrétaire général, d'animer une réunion du "Centre Innovation".

L'innovation dans les services financiers sera, naturellement, le cœur du sujet de cette rencontre, à travers un panorama des "techniques" en vogue actuellement. Fidèle à la ligne que j'ai adoptée sur ce blog, je reviendrai sur quelques initiatives qui ont marqué l'actualité de ces derniers mois (de co-innovation, de crowdsourcing, d'ouverture de services aux développeurs...), puis j'essaierai avec vous d'en analyser le fonctionnement et les résultats et d'en dégager quelques enseignements "pratiques".

Au plaisir de vous rencontrer le 24 janvier !

jeudi 8 décembre 2011

La guerre du porte-monnaie mobile est déclarée

Gants de boxe
Si les sirènes du paiement sur mobile vous ont endormi(e) avec leurs chants monotones des 10 dernières années, réveillez-vous ! La révolution n'est pas encore pour demain mais l'avenir se décidera en 2012. Une infographie du magazine Fast Company présente sa vision du sujet, sous la forme d'un combat en 6 rounds et un vainqueur. Lecture, analyse et commentaires...

Notons d'emblée que, selon l'auteur, la perspective d'une adoption massive du porte-monnaie mobile, quelle qu'en soit la technologie, est encore très lointaine (envisagée entre 2019 et 2022), ce qui semble pessimiste, malgré la prudence que suggèrent les promesses non tenues du passé.

Entrons dans le vif du sujet. Au cours des 7 à 10 ans qui nous séparent de cette échéance, 6 des 7 participants à la bataille en seront successivement "exclus" :
  1. Les banques. En dépit de leurs atouts (relations avec les consommateurs et les marchands, maîtrise d'une large part du marché des paiements...), elles ne sont pas très innovantes et ont une culture d'évitement du risque qui les place rapidement hors-jeu. Elles resteront néanmoins présentes en arrière-plan dans les initiatives et nous reviendrons plus loin sur leur rôle, qui ne sera tout de même pas négligeable.

  2. Les commerçants. L'exemple de Starbucks, avec ses résultats impressionants, pourrait susciter des vocations mais, pour ces acteurs, il fait plus de sens, à terme, d'établir un partenariat avec un spécialiste à l'assise beaucoup plus large.

  3. Les startups. Toutes les sociétés émergentes, qui rivalisent d'idées originales et de développements rapides pour de nouvelles solutions de paiement, finiront par être confrontées à la difficulté critique de leur distribution. Leur avenir, pour les meilleures d'entre elles, passe donc par une acquisition par une entreprise plus importante.

  4. Les réseaux de paiement. Visa (avec payWave) et MasterCard (avec PayPass) sont déjà bien avancés dans le paiement sans contact, qui constitue un premier pas vers le mobile. Ils sont également présents (et souvent actifs) dans toutes les initiatives en cours. Mais ils n'ont pas, pour l'instant, de relations directes avec les porteurs de carte, ce qui limite leur capacité à définir le porte-monnaie du futur.

  5. Les opérateurs de télécommunication. Ils savent gérer les paiements (via leurs factures ou en mode prépayé) et ils ont décidé de s'unir pour s'imposer (ISIS aux Etats-Unis ou, sur un autre modèle, Buyster en France). Mais, comme les banques, ils ne sont pas particulièrement aptes à l'innovation et la concrétisation de leurs annonces est souvent longue et décevante...

  6. PayPal. Concurrent très sérieux, qui part de sa position de leader dans les paiements digitaux et prépare sa stratégie dans le commerce de proximité, PayPal est handicapée par son besoin d'établir des relations avec les commerçants "physiques", inexistantes aujourd'hui.

Qui reste-t-il alors en 2020 ? Les géants technologiques ! Amazon ou Facebook pourraient facilement s'introduire dans ce petit cercle mais, à défaut, les vainqueurs annoncés sont Google (Wallet) et Apple. Je laisserai (au moins provisoirement) de côté ce dernier dont, d'une part, je ne crois pas à l'entrée sur le marché des paiements et, d'autre part, il ne me semble pas disposer d'une position si avantageuse.

Dans la bataille du porte-monnaie mobile, Google a pour lui des moyens (financiers et technologiques) colossaux, une capacité d'innovation toujours solide, une relation étroite avec des millions de consommateurs, une maîtrise de l'écosystème mobile (avec Android) et une certaine influence sur les commerçants. C'est-à-dire tous les facteurs de succès que ne savent pas rassembler les autres acteurs.

Il faut noter que dans cette vision, plusieurs des participants "écartés" au fur et à mesure des rounds successifs tireront malgré tout leur épingle du jeu, si toutefois Google s'en tient à son modèle actuel : les banques et les réseaux de paiement sont essentiels à la fonction de paiement de Wallet (avec laquelle la géante californienne n'a apparemment aucune intention d'interférer), les startups peuvent espérer être acquises, les commerçants bénéficieront des effets de massification...

En revanche, ceux qui risquent de disparaître sont les opérateurs, qui sans être rejetés par Google, sont pour l'instant laissés de côté car n'apportant pas de valeur réelle dans le modèle "Wallet". Et, dans ce contexte, il n'est pas étonnant que l'un des plus puissants d'entre eux, Verizon Wireless (par ailleurs membre du consortium ISIS), ait ouvert les hostilités, en refusant la présence du porte-monnaie de Google dans les mobiles qu'il distribue. Il sera intéressant de voir si une telle prise de position est viable mais, pour ma part, je suis convaincu qu'elle ne tiendra pas longtemps, ce qui signifiera la fin d'une forme de pouvoir abusive.

Enfin, pour les acteurs français qui se croient à l'abri de ces agitations américaines, préparez-vous à l'arrivée de Google en Europe : aux dernières nouvelles, son porte-monnaie débarquerait au Royaume-Uni à temps pour les J.O. de Londres, l'été prochain. Pour les plus visionnaires, l'occasion serait belle de faire partie des premiers partenaires de Wallet dans l'hexagone. Si vous n'êtes pas à la pointe de l'innovation, n'hésitez pas (au moins) à vous raccrocher à une entreprise qui l'est et qui a besoin de vous !