Free cookie consent management tool by TermsFeed
C'est pas mon idée !

dimanche 30 novembre 2014

L'IT Société Générale vue de l'intérieur

Société Générale
Le 17 novembre dernier, Société Générale inaugurait un nouveau compte Twitter – SG InsideIT – doté d'une mission originale : mieux faire connaître les dessous de ses Systèmes d'Information, par l'intermédiaire de ceux qui les construisent et les font fonctionner. Objectif ? Séduire de futurs collaborateurs, mais peut-être pas seulement…

L'initiative émane de la DRH (Direction des Ressources Humaines) du Groupe, pour laquelle la recherche de nouveaux moyens d'attirer les candidats dans les métiers de l'informatique ne peut surprendre (nonobstant les tensions observées dans certains d'entre eux). En effet, quand ils ne rêvent pas de créer leur propre startup, les jeunes diplômés qui choisissent cette orientation aujourd'hui sont évidemment beaucoup plus fascinés par les géants du web – Facebook, Google et consorts – que par les banques.

Il s'agit donc de leur démontrer que ces dernières ne sont pas aussi ringardes qu'ils sont tentés de le croire a priori. Alors, quelle meilleure manière de procéder qu'en adoptant les codes de communication modernes – mixant réseaux sociaux, intimité, sincérité, transparence… – avec lesquels ils sont les plus à l'aise ? Voilà comment une vénérable institution se retrouve à étaler sa vie interne sur Twitter : chaque semaine, un collaborateur différent prend le contrôle du compte SG InsideIT et raconte les petits et grands événements de son quotidien.

Il faut avouer que les deux premiers à relever le défi avaient une actualité exceptionnelle à partager, entre participation à un hackathon (encore !) pour l'un et journée de bénévolat pour l'autre. Mais ils ont également joué le jeu pendant leurs activités « normales », donnant ainsi un aperçu plus équilibré de leur vie professionnelle, sans paillettes. Les candidats au recrutement y trouveront un récit honnête et réaliste – même s'il n'est pas hyper-excitant tous les jours – dans lequel ils peuvent se reconnaître.

Au-delà de la cible « officielle » de la démarche, il est également possible d'y voir deux intentions secondaires. D'une part, la mise en lumière – publique – de leur activité constitue un excellent instrument de reconnaissance et de valorisation à destination des collaborateurs des multiples directions informatiques du groupe. D'autre part, en miroir, c'est aussi une visibilité sans pareil qui leur est offerte vis-à-vis des autres métiers de la banque, qui tendent à ignorer (et, parfois, mépriser) leur rôle pourtant essentiel.

Il en est du marché de l'emploi comme d'autres : les individus ne veulent plus entendre les messages stéréotypés assénés par les grandes marques, leur préférant les avis et les retours d'expérience de leur famille, de leurs amis et de leurs pairs. De manière intelligente, l'initiative SG InsideIT s'inscrit directement dans cette logique…

Lancement SG InsideIT

samedi 29 novembre 2014

Modernisation et rationalisation au menu d'ING

ING
Rattrapée – comme ses consœurs du monde entier – par la révolution numérique, la branche néerlandaise d'ING annonçait il y a quelques jours de nouvelles avancées dans sa stratégie de modernisation. Celle-ci s'accompagne – sans surprise, hélas – d'une réduction massive d'effectifs (1 700 emplois concernés, soit environ 8% du total).

Les efforts de transformation portent prioritairement sur l'intégration des canaux – agence, web, mobile, centre d'appel – afin d'offrir aux clients une expérience transparente, quel que soit le support qu'ils choisissent pour leurs interactions à un instant donné. En résumé, la cible d'ING est donc ce qu'on appelle désormais la banque « omni-canal ». Sachant que les systèmes informatiques gérant chaque média sont actuellement distincts, il est aisé de comprendre que la tâche est immense…

Afin de mettre en place les nouvelles solutions qui permettront de rompre avec ces silos hérités de l'organisation interne du « front-office » (la relation client), la banque va investir 200 millions d'euros au cours des 3 prochaines années. En perspective, c'est une vision de services universels, dont l'accès deviendra uniforme à travers tous les canaux disponibles, en laissant la liberté aux utilisateurs (internes et externes) de passer de l'un à l'autre au gré de leurs envies, de leurs besoins ou des circonstances.

Or, il se trouve que la convergence des systèmes ainsi esquissée constitue également un important facteur de rationalisation de l'informatique et de son organisation : remplacer par une seule les 4 grandes briques mono-canal existantes – ainsi que la « tuyauterie » qui les relie entre elles – ne peut que rendre l'ensemble plus compact et plus cohérent. Pour cette raison, ING peut clamer que son initiative, non contente d'améliorer la qualité de service, sera source d'économies, à hauteur de 270 millions d'euros par an…

Alors, nécessairement, ce sont des emplois qui pâtissent des gains d'efficacité. Pour une fois, aucune fermeture d'agence n'est à l'ordre du jour et ce sont les back offices, les centres d'appel et… l'informatique qui seront touchés par les suppressions de postes. En réalité, l'optimisation des opérations n'explique pas seule cet impact : après des années de développement anarchique et d'accumulation de strates de logiciels, les plus anciennes, devenues obsolètes, doivent disparaître, emportant avec elles les collaborateurs qui n'ont pas appréhendé la vague « digitale ».

Si cette réalité affecte aujourd'hui ING, elle déferlera bientôt sur l'ensemble du secteur, car tous les établissements historiques sont frappés des mêmes symptômes et devront tôt ou tard se lancer dans des chantiers similaires s'ils veulent survivre. Demain, la banque numérique sera portée par des compétences qui ne sont résolument pas celles qui ont créé les générations précédentes de systèmes d'information. Dans ce domaine aussi, la mutation du marché du travail prédite par Gartner (entre autres) est en marche et nous n'en sommes encore qu'aux prémices…

Mainframe IBM

vendredi 28 novembre 2014

MoneyGram en pleine diversification

MGiAlloy
Progressivement, les opérateurs de transferts internationaux tels que Western Union et MoneyGram se voient menacés par des acteurs émergents (Azimo, TransferWise…), qui appliquent des modèles disruptifs à leurs activités historiques. Qu'à cela ne tienne, ils se mettent désormais eux-mêmes à étendre leur champ d'action…

C'est en tous cas la démarche qu'adopte MoneyGram, le numéro 2 du secteur, avec le lancement d'une nouvelle plate-forme technologique. MGiAlloy – c'est son nom – est destinée à toutes les entreprises qui souhaitent proposer des services financiers « alternatifs » à leurs clients mal équipés en la matière. A la clé, la promesse d'une meilleure fidélisation, grâce à une offre adaptée, simple, pratique et disponible à travers une multitude de canaux (agent, web, mobile, GAB, kiosque…).

Au-delà de son socle technologique, la solution de MoneyGram repose sur une approche plutôt originale. En effet, son cœur est constitué d'un module de gestion des clients (à « 360° ») – consacré autant à la conformité réglementaire qu'à l'optimisation marketing – sur lequel viennent se greffer les services financiers proprement dits. Parmi ceux-ci, figurent naturellement les transferts de fonds, mais également le paiement de factures, le rechargement de forfaits mobiles, l'encaissement de chèques…

Dans ce dernier cas, c'est un partenaire, Ingo Money, qui est à l'origine de la fonction. Et il s'agit justement là d'une des particularités de la plate-forme MGiAlloy : elle est conçue pour accueillir et intégrer de nouveaux services (fournis par des tiers) au sein d'une interface unique, fédérée autour de la relation client. Ainsi, l'objectif est de créer une offre complète qui devrait être à même de répondre, à terme, à tous les besoins de ses utilisateurs, alors qu'ils sont aujourd'hui obligés de jongler avec différents interlocuteurs.

MGiAlloy est déjà déployée dans quelques commerces (dont le points de vente du géant de la distribution Tesco, au Royaume-Uni) et aussi dans plusieurs centaines d'agences bancaires américaines. Pour tous ceux-là, l'attractivité de la solution réside dans sa capacité à capter des clients qui ne peuvent être correctement servis par les institutions traditionnelles (y compris Tesco Bank) et que connait bien MoneyGram, par son métier historique. Si elle parvient à séduire les partenaires qui lui permettront d'en faire une offre suffisamment riche, elle aura de sérieux atouts pour réussir.

MGiAlloy

jeudi 27 novembre 2014

Twitter teste les offres liées à la carte

Twitter
Toujours à la recherche de nouveaux modèles économiques, après avoir déployé un bouton « acheter » il y a quelques mois, Twitter profite maintenant de l'approche du fameux « Black Friday » pour commencer à tester une solution d'offres liées à la carte (« CLO ») avec quelques commerçants américains.

L'initiative était en fait attendue depuis l'acquisition de CardSpring, en juillet dernier. Le dispositif mis en place ne présente donc pas de grande surprise tant il est proche de celui qu'avait conçu la startup dès ses débuts. Ainsi, lorsque l'utilisateur clique sur une « Twitter Offer » apparaissant dans son flux de messages, il n'aura qu'à saisir les données de sa carte bancaire pour en bénéficier : dès qu'il réalisera un achat qualifiant, il sera remboursé du montant de l'offre directement, sans aucune autre action de sa part.

Ultérieurement, les informations de paiement étant enregistrées par le réseau social (espérons que la sécurité est à niveau !), le fonctionnement deviendra encore plus simple : dès la deuxième utilisation, un simple clic suffit à enregistrer une promotion. Cette facilité d'accès est un des arguments forts de Twitter pour tenter de convaincre les marchands d'adopter sa solution. En complément, ces derniers disposeront également d'une visibilité complète sur les indicateurs de qualité de leurs campagnes.

Fonctionnement de Twitter Offers

Par rapport à d'autres offres du même acabit, y compris la version originale de CardSpring et la tentative (ancienne) d'American Express, l'intégration d'un système de « CLO » par Twitter présente un avantage primordial : le ciblage ! En effet, la société promet aux annonceurs des capacités de personnalisation susceptibles de démultiplier leurs performances et l'analyse de l'ensemble des données disponibles sur le réseau social est un atout majeur pour ce faire (qui, de plus, continue à s'enrichir, comme l'indique l'introduction récente d'un recensement des logiciels installés sur le téléphone des utilisateurs de son application mobile).

Pour l'instant, les « Twitter Offers » ne font l'objet que d'une expérimentation, qui doit permettre de valider l'approche avant une éventuelle généralisation. Il s'agira autant de mesurer l'appétence des annonceurs pour un nouveau format publicitaire que d'observer les réactions des consommateurs, notamment face à l'idée de fournir les informations de leurs cartes bancaires. De ce point de vue, si Twitter parvient à transformer l'essai, qui sait ce que concoctera ensuite le réseau social avec cette précieuse manne de données supplémentaires…

Twitter Offers sur iPhone

mercredi 26 novembre 2014

Bankinter investit dans une startup du bitcoin

Coinffeine
La jeune « crypto-pousse » espagnole Coinffeine, qui s'était déjà fait remarquer au printemps en devenant la première entreprise du monde capitalisée en Bitcoins, fait une nouvelle fois les titres de l'actualité avec l'annonce d'un investissement de la part de la filiale de capital risque de Bankinter, via sa fondation pour l'innovation.

L'événement est notable car l'intérêt des institutions financières pour l'univers Bitcoin reste essentiellement de l'ordre de la curiosité et des prises de participation dans des entreprises actives du secteur sont encore rares. Il est vrai que la solution que concocte Coinffeine a potentiellement des usages qui dépassent le seul contexte de la cryptomonnaie puisqu'elle esquisse une méthode totalement sécurisée et sans intermédiaire financier pour réaliser des échanges entre pairs (« P2P »).

La clé de son fonctionnement est l'utilisation de mécanismes du protocole bitcoin permettant de gérer automatiquement un dépôt de garantie. Chacune des deux parties d'un échange va placer sous séquestre virtuel une somme donnée (en Bitcoins), puis les transferts effectifs vont être exécutés par tranches d'un montant inférieur à celui de cette « caution », chacun devant être validé avant de passer aux suivants. Si l'un des intervenants venait à faire défaut, il engagerait son dépôt de garantie, ce qui décourage donc les tentatives de fraude.

Page d'accueil Coinffeine

La technologie de Coinffeine sera d'abord mise en œuvre pour gérer des achats et ventes de Bitcoins, contre des monnaies fiduciaires. L'objectif est alors de remplacer les plates-formes de change centralisées (qui ne sont pas immunes aux abus, cf. le scandale MtGox) par un modèle de transactions directes entre personnes. Cependant, la beauté de l'approche est qu'elle est applicable à des transferts de toute nature. Bankinter évoque ainsi une déclinaison pour des mouvements de titres et autres produits financiers.

Un investissement en capital risque n'implique pas que la banque espagnole va (rapidement) lancer des services autour de bitcoin. Il n'en constitue pas moins le signal d'une prise de conscience de la réalité et de l'ancrage dans la durée d'un phénomène qui n'est désormais plus réservé à un petit club de « geeks » (parfois) activistes. De plus, le choix spécifique d'une solution telle que Coinffeine révèle un intérêt beaucoup plus marqué pour les concepts sous-jacents – dont le potentiel est à peine effleuré à ce jour – que pour la cryptomonnaie elle-même.

mardi 25 novembre 2014

Generali adopte le crédit P2P avec Prêt d'Union

Generali
Née en 2011, Prêt d'Union fait figure de pionnière du crédit entre particuliers en France et peut se targuer d'une expérience significative, avec 120 millions d'euros de prêts accordés à ce jour. Elle franchit aujourd'hui un cap majeur dans son développement en signant un partenariat de distribution avec Generali France.

Les termes de l'accord permettront aux conseillers en gestion de patrimoine affiliés à la compagnie d'assurance de proposer de nouvelles solutions de placement à leurs clients. Celles-ci se composeront des 4 fonds commercialisés par Prêt d'Union, aux profils de maturité, de risque et de rendement diversifiés. Leur avantage principal est que ces produits offrent, en moyenne, un niveau de performance attractif, régulier et correctement sécurisé, sensiblement plus intéressant que les livrets d'épargne classiques.

Pour mémoire, le modèle adopté par Prêt d'Union est un peu hybride, par rapport à la « norme » de la finance participative. En effet, les dossiers de demande de crédit (à la consommation) déposés par les emprunteurs sont qualifiés de manière traditionnelle par la startup. Les prêts effectivement accordés sont alors convertis en parts de fonds de placement (sans transparence d'attribution), distribuées auprès des candidats à l'investissement (qui, selon la réglementation en vigueur, doivent être « qualifiés »).

Prêt d'Union

Il est probable que cette approche intermédiée du crédit P2P (de « pair à pair ») est un des éléments importants qui favorisent un rapprochement avec Generali. Ainsi, non seulement les nouveaux produits sont-ils aisés à intégrer (« techniquement ») dans l'offre existante mais ils en sont également suffisamment proches (d'un point de vue financier) pour être faciles à appréhender par les conseillers, tout en leur donnant une opportunité de jouer sur la corde (marketing) de l'investissement dans l'« économie réelle ».

En comparaison des réticences de la plupart des banques à s'engager avec des acteurs émergents, l'initiative de Generali constitue un signe supplémentaire de l'avance que reprennent les compagnies d'assurance, depuis quelques mois, en matière d'innovation dans le secteur des services financiers. Peut-être ont-elles même là l'occasion de prendre une revanche sur leur relatif échec avec la convergence de la « bancassurance » : et si elles devenaient demain les championnes de la banque alternative ?

lundi 24 novembre 2014

Alibaba crée un géant de la banque 2.0

Ant Financial
Lorsque des chiffres sont évoqués à propos du leader du e-commerce chinois Alibaba, la démesure est de mise. Or, il en est de même avec ses incursions dans le secteur financier. Le récent lancement de sa nouvelle marque fédératrice, Ant Financial, nous donne l'occasion de mesurer l'étendue de cet empire émergent…

Tout a commencé par un service de paiement en ligne, Alipay, étroitement associé à la plate-forme de e-commerce, un peu à la manière dont PayPal a initialement décollé avec son intégration dans eBay. La différence ? La chinoise compte maintenant 300 millions d'utilisateurs inscrits (environ le double de son alter ego américain) et gère 80 millions de transactions chaque jour (8 fois plus !). Il y a un an, elle a logiquement ajouté à sa panoplie un porte-monnaie mobile, Alipay Wallet, qui totalise déjà plus de 190 millions d'adeptes et est encore en pleine expansion.

Au-delà de ces marques extrêmement visibles, Ant Financial comprend aussi une part majoritaire dans Yu'e Bao, le fonds de placement le plus important du pays (125 millions de clients et l'équivalent de plus de 90 milliards de dollars sous gestion). Zhao Cai Bao, quant à elle, est une plate-forme ouverte de financement pour les PME (adoptant une sorte de modèle de prêt-emprunt P2P), tandis que le micro-crédit aux e-commerçants, basé sur l'analyse de données, est le domaine d'une autre entité, Ant Credit.

Enfin, Alibaba a obtenu en septembre dernier l'accord du régulateur pour le lancement de la première banque d'initiative privée en Chine, MYbank. Et il n'est résolument pas question de développer une institution financière de plus, aux côtés des plus de 200 déjà présentes dans le pays : celle-ci aura vocation à servir les particuliers, ainsi que les petites structures et les micro-entreprises, en exploitant au maximum les opportunités qu'offrent internet, le « cloud » et le traitement des « big data ».

En synthèse, Ant Financial combine donc toutes les grandes tendances de la finance à l'ère du e-commerce, du mobile et des médias sociaux. Quand les banquiers de tout poil évoquent (sans y croire) l'hypothèse terrifiante du lancement d'un établissement concurrent par un géant du web (Google, Facebook, Amazon…), ils peuvent dorénavant voir concrètement la forme qu'il prend. Les institutions financières chinoises sont aujourd'hui directement menacées, celles des autres pays suivront rapidement…

Merci à Laurent pour avoir inspiré cet article !

Alibaba

dimanche 23 novembre 2014

RBS rafistole ses systèmes informatiques

RBS
La semaine passée, RBS a conclu un accord avec les autorités financières britanniques aux termes duquel elle paiera un total de 56 M£ d'amendes (en plus de celle de 3,5 M£ infligée en Irlande) dans le cadre de l'incident informatique majeur qui, à l'été 2012, a privé ses millions de clients de tout accès à leur argent pendant plusieurs jours.

Après les effets désastreux de cette affaire sur l'image de la banque et les plus de 70 M£ versés aux clients (et à quelques non clients), en compensation des désagréments qu'ils ont subis, la facture continue donc toujours à s'alourdir… Mais, s'il faut en croire le rapport [PDF] que vient de publier l'établissement, ces montants ne sont, en réalité, qu'une goutte d'eau en comparaison des efforts consentis pour tenter de remettre à flot ses systèmes informatiques vieillissants.

Ce sont ainsi 750 M£ qui sont investis sur 3 ans, uniquement pour garantir la sécurité et la résilience des infrastructures et applications existantes et minimiser le risque qu'une catastrophe du même ordre que celle de 2012 n'ait un impact aussi dramatique sur les clients. Et le détail de quelques grands chantiers engagés – au-delà de l'amélioration et de la rationalisation des services, dont notamment les paiements internationaux et les accès mobiles – montre à quel point la situation est désespérée…

Il y a tout d'abord la mise en place d'une « banque miroir ». Derrière ce concept se cache une idée simple : une copie à l'identique des principaux composants informatiques – traitements des transactions par carte, consultation des soldes de compte et des dernières opérations… – est mise en œuvre et maintenue en permanence, capable de prendre rapidement le relais en cas d'indisponibilité des systèmes primaires. Dans une reconnaissance pathétique de son incapacité à assurer une fiabilité satisfaisante, RBS surenchérit donc dans la complexité.

Mirror Bank RBS

Deuxième axe prioritaire des initiatives engagées, la banque vise à simplifier ses traitements « batch » (c'est-à-dire toutes ces opérations qui sont enregistrées et mises en attente au fur et à mesure de leur arrivée et sont exécutés par lots, généralement la nuit, pour plus d'efficacité). A une ère où le monde fonctionne de plus en plus en temps réel (y compris les paiements, au Royaume-Uni), il est particulièrement triste qu'une entreprise en soit encore à tenter de rendre plus fiables ses systèmes datant d'une époque révolue.

Pourtant, le plus grave n'est pas directement dans ces chantiers, dont il est difficile de contester qu'ils sont hélas indispensables. Ce qui met réellement en danger l'avenir de RBS – tout aussi inévitablement – est la diversion créée : non seulement les efforts et les investissements consentis pour la résilience sont détournés des projets de rénovation qui auraient du être entrepris depuis longtemps mais ils constitueront aussi des facteurs de paralysie lorsqu'il faudra envisager le remplacement des systèmes en place (pas question de « jeter » ce qui vient de coûter des millions !).

Il serait facile, de la part des autres banques historiques, de rejeter les causes de cette descente aux enfers sur les erreurs passées de RBS, dont, en particulier, la réduction de ses budgets informatiques dans le sillage de la crise financière de 2008. Ce serait cependant une erreur car elles sont (presque) toutes dans une situation identique, même si l'absence d'incident d'ampleur ne permet pas d'en prendre une totale mesure. Les « rafistolages » des vieux systèmes y sont la norme, tandis que les modernisations vitales y prennent un retard inquiétant

samedi 22 novembre 2014

Le Crédit Agricole lance une solution d'identité numérique

CA Conect
Après avoir été évoquée à plusieurs reprises par ses concepteurs, notamment lors des célébrations du deuxième anniversaire du « CA Store », la nouvelle solution d'identité numérique du Crédit Agricole, baptisée « CA Connect », fait désormais l'objet d'une vidéo de présentation, qui semble indiquer un lancement officiel imminent.

Dans le monde numérique d'aujourd'hui, chacun d'entre nous utilise quotidiennement une infinité de services en ligne qui nous demandent de nous identifier et nous imposent donc de mémoriser un mot de passe pour y accéder. De plus en plus souvent, les sites web adoptent les outils de « fédération d'identité » proposés par les géants du web (Google, Facebook…) afin de simplifier ce casse-tête. Une seule connexion suffit alors pour être reconnu automatiquement sur toutes les plates-formes qui ont fait un tel choix.

Avec son initiative, le Crédit Agricole veut proposer une alternative au quasi-monopole qu'exercent les grandes entreprises américaines du web dans ce domaine (il faut également signaler l'offre de La Poste, qui se positionne cependant sur un créneau légèrement différent, avec la validation formelle de l'identité des individus). Si la banque verte atteint son objectif, nous verrons donc bientôt fleurir sur le web français des boutons « CA Connect » permettant une ouverture de session, totalement sécurisée, en un clic.

A ce stade, les entités internes du Crédit Agricole constituent les premières cibles. En effet, les multiples activités du groupe – et leurs services en ligne associés – fournissent à elles seules un cas d'utilisation pertinent : par exemple, le client qui dispose d'un compte personnel et d'un compte professionnel auprès d'une caisse régionale, d'un compte Tooket (la monnaie virtuelle solidaire originaire de Pyrénées-Gascogne), d'un livret BforBank et d'un contrat d'assurance Pacifica doit gérer 5 identifiants différents ! Un moyen d'accès unique lui facilitera certainement la vie…

Présentation CA Connect

Les origines de « CA Connect » expliquent d'ailleurs très simplement cette approche initiale, puisqu'elles peuvent être recherchées dans le système d'identification utilisé pour les applications du « CA Store », qui intègrent justement les services de la banque. Dans la même logique, les logiciels d'agrégation de comptes (du style de Bankin ou Linxo) sont également perçus comme candidats sérieux à son adoption. Puis, en perspective, le Crédit Agricole évoque une intégration possible par quelques grandes organisations (impôts, Voyages-SNCF, EDF…).

Dans la bataille pour la gestion de l'identité numérique, et en dépit d'un retard important sur les géants du web, les banques ont quelques arguments de séduction à faire valoir. En premier lieu, elles disposent d'un capital confiance inégalé auprès des consommateurs, notamment en termes de sécurité et de protection de la vie privée. D'autre part, et le Crédit Agricole ne manque pas de mettre l'accent sur ce point, elles ne sont pas (aussi) intéressées par les données de connexion que les entreprises qui vivent de revenus publicitaires.

Cela suffira-t-il à à convaincre les éditeurs de services en ligne d'adopter « CA Connect » ? Il reste encore trop de questions sans réponses pour l'affirmer. Quel sera le modèle économique du service ? Sera-t-il ouvert à tous les internautes ou seulement aux clients du Crédit Agricole ? L'intégration sera-t-elle aussi simple que promis (d'un point de vue technique mais aussi contractuel et administratif) ? Les standards en matière de gestion d'identité (« Open ID », principalement) seront-ils respectés et permettront-ils une utilisation sur des sites internationaux ?

La mise en place d'un service d'identité numérique est depuis fort longtemps considérée comme une opportunité incomparable pour les institutions financières, au point qu'il est tout à fait incompréhensible qu'elle ne soit pas déjà banalisée. Or, même lorsqu'elles sont directement sollicitées, comme cela a déjà été le cas, entre autres (et sur des projets spécifiques), au Canada et au Royaume-Uni, elles ne se positionnent pas toujours (laissant la place à des acteurs tels que PayPal) ! Le Crédit Agricole fait ainsi à nouveau figure de pionnier…

La vidéo de présentation du service (également en lien sur les images et dans le texte ci-dessus) a malheureusement été retirée de YouTube ce jour (24/11/2014).

vendredi 21 novembre 2014

Suivre son portefeuille d'actions sur Oculus Rift

Fidelity
Alors que son lancement officiel semble se rapprocher, le casque de réalité virtuelle immersive Oculus Rift commence à attirer l'attention des institutions financières, qui se mettent à la recherche d'idées pour en exploiter le potentiel. A travers ses « Labs », Fidelity est l'une des premières à se lancer concrètement dans l'aventure…

Le spécialiste de l'investissement vient donc de mettre en ligne « StockCity for Oculus Rift », sa nouvelle application de suivi de portefeuille d'actions. Au-delà de la seule expérimentation d'une technologie émergente, Fidelity profite de cette réalisation pour, principalement, explorer des pistes originales en matière de visualisation d'information. Il s'agit en effet d'un domaine actuellement en pleine effervescence à l'intersection du phénomène « big data » et des évolutions des interfaces utilisateur.

En l'occurrence, l'approche retenue avec StockCity est (comme son nom l'indique) de restituer l'état d'un portefeuille d'actions sous l'apparence d'une ville, dont chacun des immeubles – regroupés par secteur économique – représente un titre, sa hauteur correspondant à son cours et sa surface au volume négocié récemment, tandis que la météo ambiante évoque la tendance du marché. L'utilisateur plongé dans cette cité virtuelle peut se déplacer dans ses rues pour consulter les détails de ses investissements sans avoir à absorber des montagnes de chiffres plus ou moins abstraits.

StockCity for Oculus Rift

Certes, l'effort est encore modeste, mais, comme souvent avec les expérimentations des Fidelity Labs, l'objectif recherché est d'abord une appropriation précoce d'un nouveau concept (technique) ainsi qu'une volonté de partager rapidement un prototype avec les consommateurs (clients ou non) afin de mesurer leur intérêt et de recueillir leurs avis et commentaires. Nul exemple n'est plus illustratif que cette tentative avec le casque Oculus Rift (encore à l'état de projet), dont il est bien difficile d'imaginer a priori quels usages il peut avoir dans le secteur financier…

Quelques banques (dont Société Générale, lors d'un de ses hackathons) ont déjà tenté de faire appel à la créativité du public pour développer des applications adaptées à la réalité virtuelle immersive. L'étape suivante, qu'a donc abordée Fidelity, est maintenant de tester les idées les plus prometteuses en conditions réelles. Contrairement à d'autres secteurs d'innovation où l'enjeu est de tirer parti d'une tendance confirmée, l'attrait particulier est ici de participer aux tout premiers pas de ce qui sera peut-être la prochaine révolution technologique. Voilà une position bien inhabituelle pour une institution financière…

jeudi 20 novembre 2014

Quel avenir pour les néo-banques ?

Simple
La vague des néo-banques – pour qualifier ainsi ces établissements sortis tout droit de la révolution numérique – n'a que quelques années, mais elle rencontre ses premiers hoquets : problèmes techniques chez Simple, changement de modèle économique pour Moven… Ces trublions approcheraient-ils déjà de leur fin de parcours ?

C'est la question que pose Stephen Greer, analyste du cabinet Celent, dans un billet de blog, en notant que les grandes institutions financières prêtent grande attention à la popularité des nouvelles entrantes, même si beaucoup d'entre elles ne les considèrent pas comme une réelle menace. En guise de réponse, il propose 3 scénarios principaux pour les néo-banques, reléguant la possibilité qu'elles deviennent une alternative viable aux acteurs traditionnels au rang de la plus grande improbabilité. Or, il me semble que cette vision est partielle (et, indirectement, partiale).

L'une des hypothèses formulées est, il est vrai, incontestable : les approches originales adoptées par les startups du secteur vont nécessairement influencer la manière dont les entreprises historiques considèrent leur métier à l'ère numérique. En particulier, l'obsession de l'expérience client est en passe de devenir une caractéristique indispensable pour survivre dans les années qui viennent. Et, en théorie, grâce à l'étendue de leurs offres, les « vieilles » banques devraient même être en meilleure position dans la course à l'excellence.

Hélas, la réalité est bien différente. Leurs lourdeurs internes limitent autant leur capacité à rattraper leur retard en matière de relation client numérique que leur faculté à intégrer leurs services dans un ensemble homogène. Dès lors, le deuxième scénario qui consiste à imaginer que les institutions financières créeront leurs propres banques « digitales » est totalement illusoire. Ainsi, les initiatives en ce sens ne sont souvent que de pathétiques ré-habillages des services existants, loin des attentes réelles de la clientèle.

Dernière option évoquée, suivant l'exemple du rachat de Simple par BBVA, les néo-banques seraient acquises par leurs « ancêtres », offrant à ces dernières un raccourci dans la mise en place d'une vision plus disruptive, en parallèle de leurs établissements classiques. Une telle stratégie fait beaucoup plus de sens que celle d'une création de nouveaux modèles en interne mais il est peu vraisemblable qu'elle se généralise tant elle est éloignée de la culture du secteur (relativement à l'innovation, au repli sur soi…).

Conséquence directe de l'immobilisme de leurs aînées, les petites agitatrices ont donc encore le temps d'affuter leurs armes et d'affiner leurs approches avant de les voir se transformer en concurrentes sérieuses sur le terrain de la banque « digitale ». L'une des voies qu'elles exploreront afin de surmonter les difficultés qu'elles doivent affronter est celle des partenariats, que ce soit entre « pairs » (pour enrichir leur spectre de services) ou, peut-être, avec des acteurs d'autres domaines (la grande distribution ?).

Naturellement, il serait beaucoup plus confortable pour les institutions financières de croire que les néo-banques ne sont qu'un phénomène passager et qu'elles auront tôt fait d'en absorber les impacts, via une acquisition ou grâce à leurs propres stratégies numériques. Ce serait pourtant une erreur tragique, qui les rendrait encore plus vulnérable face à l'évolution des usages…

Vidéo promotionnelle Moven

mercredi 19 novembre 2014

Société Générale expérimente avec ses clients

L'Appli Lab
Lors du lancement de « L'Appli » pour iPhone, Société Générale avait déjà proposé a ses clients de participer à sa conception en leur demandant de désigner sa neuvième fonction. Dorénavant, ils ont à leur disposition une application [iTunes] pour tester les nouveautés à venir et influer sur leurs caractéristiques.

L'« Appli Lab », qui vient de faire son apparition dans l'AppStore d'Apple (et promise pour bientôt sur Android Market), propose donc aux clients de la banque d'expérimenter une fonction originale, sur laquelle ils sont invités à donner leurs avis et proposer leurs idées d'amélioration. Après quelques itérations, si les retours s'avèrent positifs, la nouvelle option devrait être ajoutée à l'application mobile « standard » et une autre pourra alors être soumise aux utilisateurs. L'objectif serait d'atteindre 3 ou 4 cycles sur l'année.

Dans la première version, c'est un concept de « reste à dépenser » qui est mis en œuvre. Son principe est cependant différent de celui qui existe, par exemple, chez Simple (aux États-Unis) ou Axa Banque (en France). Ainsi, à partir d'une analyse des flux financiers sur un an, le logiciel détermine une enveloppe budgétaire mensuelle (qui peut également être ajustée) et offre un aperçu de la position instantanée des comptes du client par rapport à cette cible. Plus qu'un simple réaménagement (essentiellement de forme) du solde de compte, il entre ici une intéressante dimension statistique.

L'Appli Lab sur iPhone

L'idée du « reste à dépenser » est souvent plébiscitée par les consommateurs, qui y voient une vraie aide à la gestion de budget. En revanche, il est possible de la décliner dans tellement de variantes différentes qu'une approche expérimentale est largement justifiée pour tenter de satisfaire le plus grand nombre. Le défi pour Société Générale sera, bien entendu, d'avoir la réactivité nécessaire afin de faire évoluer l'« Appli Lab » régulièrement en fonction des commentaires qu'elle recevra.

Plus généralement, il faut espérer que la banque maintienne ses efforts dans la durée, contrairement à l'initiative similaire de BNP Paribas (« Le Lab », lancé au début 2012 et qui semble avoir été totalement abandonné presque aussitôt…). Il est vrai que la focalisation sur une seule fonction élémentaire – bien que probablement moins séduisante a priori pour les utilisateurs – est un moyen de mieux maîtriser le contenu de l'application et son évolution, avec un niveau d'ambition raisonnable.

Depuis longtemps, les startups et les géants du web ont habitué les consommateurs à la distribution de services non finalisés, autant pour en éliminer les anomalies (« versions beta ») que pour vérifier leur attractivité et susciter des interactions permettant de les améliorer. Si ces méthodes sont aux antipodes de la culture informatique historique des banques, elles deviennent pourtant indispensables pour mieux répondre aux attentes (changeantes) des clients et aux évolutions (rapides) de la concurrence. Société Générale est visiblement sur la voie de la transition…

L'Appli Lab

mardi 18 novembre 2014

Lloyds recrute dans la génération numérique

Lloyds Banking Group
La transformation numérique figure désormais à l'agenda de la plupart des grandes institutions financières. Cependant, pour une bonne partie d'entre elles, il s'agit avant tout de déployer de nouvelles technologies. Seules quelques-unes, plus rares, considèrent que la dimension humaine doit jouer un rôle tout aussi – voire plus – important.

Parmi ces dernières, Lloyds Bank prend le problème à bras le corps puisqu'elle met en place un cursus de recrutement spécifique, visant tout simplement à conquérir une future génération de collaborateurs, capables de dessiner la banque numérique de demain (mission qui leur est explicitement assignée). Fort logiquement, plutôt que de compter sur une hypothétique adaptabilité des populations expérimentées, ce sont les jeunes diplômés férus de « digital » qui sont sollicités à travers cette campagne.

Le programme concocté pour les candidats retenus sera lui-même adapté à l'objectif fixé. Ainsi, un accompagnement dédié sera mis sur pied, avec la participation d'experts de l'« Académie Digitale » de la banque et un soutien personnalisé assuré par une équipe de mentors. Plus original, l'intégration des jeunes recrues se déroulera en 3 grandes étapes, de 8 mois chacune, dans 3 métiers différents. Cette découverte initiale leur permettra à la fois de faire leur choix en connaissance de cause et de mieux appréhender l'environnement global de l'entreprise.

Lloyds Banking Group - Talent Digital

Il convient d'ailleurs de noter que, dans la logique de Lloyds Bank, « numérique » n'est pas synonyme de technologie. Au contraire, les domaines dans lesquels les nouveaux arrivants feront leurs premières armes comprennent, naturellement, le e-commerce et l'expérience client, mais également le développement de produits, « le marketing digital », la sécurité et la lutte contre la fraude, la gestion des risques, les opérations… Nulle part n'est évoqué le Système d'Information, même s'il est évidemment présent en filigrane !

Après l'annonce récente de la suppression de 9 000 emplois (et la fermeture de 150 agences), Lloyds Bank engage donc le deuxième volet de sa transition numérique. Et quoi de plus logique que de faire appel aux talents des nouvelles générations pour conduire celle-ci dans les prochaines années ? Encore faut-il leur en donner l'envie… L'approche adoptée ici fait preuve d'une certaine intelligence dans sa manière d'attirer l'attention des jeunes, notamment en jouant (un peu) sur leur culture de zapping.

lundi 17 novembre 2014

CNIL : démarches simplifiées pour l'assurance

CNIL
L'assurance est l'un des premiers domaines intéressés par l'émergence de nouveaux modes de production, de collecte et d'exploitation de données, dont beaucoup concernent les personnes. Afin de faciliter la tâche des acteurs du secteur dans le respect des règles en la matière, ils disposent désormais d'un pack de conformité CNIL.

Premier d'une série qui devrait progressivement couvrir d'autres domaines d'activité, ce référentiel [PDF], conçu avec les organismes représentatifs des professionnels de l'assurance, a une triple vocation : faciliter la mise en œuvre de nouveaux produits et services respectueux de la vie privée des individus, réduire les risques liés à la collecte et à l'utilisation de données personnelles et simplifier les démarches administratives engendrées par l'application des règles édictées par la CNIL.

Pour répondre à ces objectifs, le pack de conformité se présente d'abord sous la forme de 5 fiches pratiques décrivant par le menu et de manière très concrète les principes existants, déclinés dans le cadre spécifique des métiers de l'assurance. Chacune d'elles traite d'un contexte particulier – gestion des contrats, gestion commerciale, lutte contre la fraude… – et précise les finalités considérées, les catégories de données prises en compte, les destinataires possibles, les contraintes de sécurisation…

Ce corpus documentaire s'accompagne de mesures d'allègement des formalités, comprenant, selon les cas, des normes simplifiées (un engagement de conformité sera ainsi suffisant pour la gestion des contrats et la gestion commerciale) ou des procédures de déclaration unique (couvrant en une seule étape tous les traitements relatifs à la collecte des numéros de sécurité sociale, la consultation du référentiel national d'identification des personnes physiques – RNIPP – et la lutte contre la fraude).

A l'ère des « big data » et de l'internet des objets – qu'il s'agisse de mieux piloter les contrats avec des capteurs de comportement de conduite, de la recherche d'information sur les réseaux sociaux pour aider à la détection de la fraude ou encore de récompenser les bonnes habitudes de santé – la clarification des exigences de protection des données personnelles sera accueillie à bras ouverts par les assureurs, qui voient fréquemment dans celles-ci l'un des principaux freins à leurs initiatives (un autre étant la crainte du rejet par les consommateurs).

Hélas, il faudra pourtant déchanter face à la promesse affichée de faciliter le développement de nouveaux produits et services : les fiches pratiques censées détailler les modalités d'application sont totalement muettes quant aux approches émergentes. Les données citées restent (tristement) traditionnelles puisque ce sont celles qui figurent sur tous les formulaires de souscription du monde. Tant pis pour les sources d'information alternatives, les capteurs en tout genre… tout cela n'est pas à l'ordre du jour.

Ceux qui souhaiteront explorer (voire déployer) ces nouvelles opportunités devront donc en rester aux (lourdes) démarches habituelles auprès de la CNIL et espérer que le « club conformité » de l'assurance, créé simultanément et dont le rôle est de faire vivre le pack conformité, se penchera rapidement sur ces questions.

Pack de Conformité CNIL pour l'Assurance

dimanche 16 novembre 2014

Comment Fifth Third aide ses clients en difficulté

Fifth Third Bank
Pour une fois, dans ces colonnes, il ne sera pas question de technologie mais l'initiative « NextJob Homeowner Reemployment » de la Fifth Third Bank – qui vient de remporter un trophée aux « BAI - Finacle Global Banking Innovation Awards » – représente un magnifique exemple d'innovation abordée par un renversement de perspective.

Le fait est largement connu, la crise financière de 2007-2008 a profondément affecté les ménages américains propriétaires de leur logement, du fait à la fois de son impact sur le marché immobilier et de ses implications globales pour l'économie, qui ont fortement fragilisé les plus modestes. Pour ces derniers, la conséquence directe a souvent été l'expulsion, tandis que les banques qui leur avaient consenti un prêt hypothécaire ont enregistré des pertes colossales sur les défauts de remboursement.

Dans la panique qui s'est ensuivie, et dont les effets n'ont pas fini de se faire sentir, les établissements prêteurs ont, au mieux, tenté de sauver – en partie – la situation en déployant une stratégie classique : ils ont proposé à leurs clients de renégocier les termes de leur emprunt. Malheureusement, il ne peut s'agir là d'une solution pérenne puisqu'elle ne cible que les symptômes des difficultés rencontrées et non leurs causes réelles, qui sont, dans près de la moitié des cas, une perte d'emploi.

Fifth Third a donc choisi une autre approche, destinée à traiter le cœur du problème. Elle a commencé par identifier ses clients sans travail ayant accumulé deux mois ou plus de retard dans leurs paiements et elle leur a offert un programme de retour à l'emploi auprès d'une entreprise spécialisée. Bien entendu, l'objectif est de donner à ces personnes l'occasion de gagner un salaire et de retrouver ainsi une certaine stabilité financière, qui leur permettra de rembourser leur dette et de conserver leur logement. Tout le monde en sort gagnant !

NextJob Homeowner Reemployment Program

Loin d'être une simple œuvre sociale, le concept est fondé sur un raisonnement économique sérieux. Les seuls coûts de personnel générés par une forclusion sont du même ordre que le financement du programme pour une personne (environ 1 500 $), pris en charge intégralement par la banque. Une fois intégrés les pertes de revenus, les frais judiciaires et les autres charges liées à un défaut, le bénéfice devient évident. D'autant plus que, lors d'un pilote mené en 2012, 40% des clients inscrits ont effectivement retrouvé un travail après, en moyenne, 22 mois de chômage.

Un aspect étonnant et instructif de l'expérience de Fifth Third est la réticence initiale des personnes contactées, qui – autre effet majeur de la crise – sont devenues extrêmement méfiantes vis-à-vis des institutions financières. Face à cette crise de confiance, la banque a du parfois engager des efforts significatifs pour convaincre les clients de sa volonté réelle de les aider. A l'inverse, cette initiative aura certainement un impact positif important et durable sur sa réputation…

Fifth Third se décrit elle-même comme la « banque curieuse » (« The Curious Bank ») et elle mérite bien ici ce titre (dans les deux sens du terme « curieux », d'ailleurs). Dans un contexte exceptionnel, elle ne sont en effet pas nombreuses à appréhender les défis avec un œil différent et un esprit ouvert. Heureusement, dans la foulée de son succès, quelques autres établissements commencent maintenant à s'engager dans la même voie.

BAI-Finacle Banking Innovation Awards

samedi 15 novembre 2014

A quoi ressemblerait une compagnie d'assurance créée avec Kickstarter ?

Kickstarter
Dans le secteur de l'assurance plus que dans tout autre, l'innovation tend à s'imposer à petits pas, sans rupture majeure. Alors, pour imaginer ce qu'il pourrait devenir dans quelques années, un analyste de Celent, Tom Scales, propose de se projeter dans la peau d'un entrepreneur qui lancerait une nouvelle compagnie via Kickstarter

Le but de l'exercice n'est bien évidemment pas de suggérer à quiconque de se lancer dans une telle entreprise (encore que…), mais plutôt de démontrer aux acteurs historiques combien l'environnement actuel est différent de celui-dans lequel ils ont bâti leurs modèles et en quoi cela affecte la manière d'envisager l'assurance du monde d'aujourd'hui. Pour ce faire, il leur suffit de se poser la question : en partant de rien, comment serait conçue leur concurrente numérique de demain ?

Avant d'aborder les facteurs les plus intéressants, commençons immédiatement par ce qui constitue un obstacle majeur : le capital. En effet, les besoins de financement pour établir une compagnie d'assurance restent importants. Ils ne sont pas raisonnablement à la portée du crowdfunding (tant pis pour Kickstarter…) et l'argent des investisseurs se fait rare. Pourtant, ces mêmes barrières n'empêchent pas quelques banques startups d'émerger. L'idée n'est donc peut-être pas si utopique qu'il y paraît.

D'un point de vue opérationnel, comment un projet de ce type pourrait-il être assemblé ? En fait, rien de plus simple : les briques nécessaires sont désormais disponibles auprès de fournisseurs tiers. Services commerciaux et marketing, gestion financière et comptable, actuariat… tout peut être sous-traité. La vente directe, par internet ou via un centre d'appel (externalisé), est également prête à remplacer les agents. Il est presque possible de gérer une compagnie sans salariés : bienvenue dans l'entreprise virtuelle !

Naturellement, ce n'est pas ainsi que l'innovation parviendrait à s'emparer de l'assurance et cette approche ne ferait que reproduire les modèles existants, dans une version plus efficace et agile. Il peut certes s'agir d'un objectif en soi, parfaitement légitime. Ou bien elle pourrait poser les fondations d'une autre vision, dans laquelle une partie de l'activité, banalisée, s'appuie sur des solutions industrielles, tandis que la compagnie concentre ses efforts sur ses domaines d'excellence (par exemple l'expérience client ?).

Lever ou coucher de soleil ?

vendredi 14 novembre 2014

Le Crédit Mutuel Arkéa déploie des iBeacons

Crédit Mutuel Arkéa
Introduit par Apple en septembre 2013, le concept d'« iBeacon » n'a pas véritablement décollé et ses applications restent rares. Ces débuts timides n'empêchent pas le Crédit Mutuel Arkéa de se lancer [PDF] (prochainement) et de devenir ainsi la première banque française à déployer les fameuses balises dans ses agences.

Pour ceux qui l'auraient oublié, rappelons que le principe de l'« iBeacon » est celui d'un petit émetteur Bluetooth qui, disposé dans des lieux stratégiques, peut communiquer avec les téléphones intelligents des consommateurs dans un rayon de quelques dizaines de mètres au maximum, au besoin en exploitant leur position (approximative). Les usages envisagés vont, par exemple, de l'envoi de notifications géolocalisées (notamment à des fins marketing) à la reconnaissance des visiteurs.

Plusieurs banques à travers le monde ont déjà expérimenté l'utilisation de ces balises. Parmi les pionnières, l'australienne Westpac en avait installé quelques exemplaires dans un petit nombre d'agences pilotes, afin de tester la diffusion d'offres promotionnelles aux clients qui passent dans leur voisinage. En parallèle, nombreuses sont celles qui recherchent des scénarios d'application originaux (il s'agissait d'un des défis du hackathon Société Générale d'octobre dernier, entre autres).

Dans le cas du Crédit Mutuel Arkéa, la phase expérimentale est maintenant terminée et c'est donc bien à une généralisation que se préparent – pour le mois de décembre – les réseaux de ses 3 fédérations (Crédit Mutuel de Bretagne, Sud-Ouest et Massif Central). Dans un premier temps (?), les iBeacons y auront essentiellement pour rôle – également assez classique – d'alerter les conseillers de l'arrivée du client avec lequel ils ont rendez-vous, du moins si ce dernier a préalablement installé l'application idoine.

Entrez dans cette banque…

Les résultats des tests ont du être concluants, pour passer aussi « rapidement » à l'industrialisation ! La banque affirme que ses conseillers ont largement plébiscité le dispositif, tandis que les clients auraient apprécié la meilleure qualité d'accueil dont ils ont pu bénéficier. Rien de surprenant à cela, mais la question la plus importante reste en suspens : les consommateurs seront-ils nombreux à télécharger et utiliser une application qui les localisera et les identifiera dans les points de vente ?

Sans revenir sur les possibles inquiétudes vis-à-vis de l'invasion de la vie privée, il existe en effet une contradiction fondamentale dans l'approche : les petits et grands technophiles susceptibles d'adopter un outil de ce genre sont aussi, en moyenne, ceux qui se rendent moins souvent dans les agences bancaires. Ce n'est certainement pas un nouveau gadget qui changera leur comportement, aussi l'enjeu sera-t-il d'inciter les habitués des visites à leur conseiller à se mettre à l'« iBeacon ».

En réalité, ce ne peut être qu'en multipliant les usages – dont la plupart restent à inventer – que cette technologie apportera une quelconque valeur. Quoi qu'il en soit, le Crédit Mutuel Arkéa est désormais prêt pour ces futurs développements !

jeudi 13 novembre 2014

Une API pour créer son moyen de paiement

Marqeta
Dans le commerce en ligne comme dans les boutiques du monde réel, les marchands multiplient les initiatives pour conquérir et fidéliser leur clientèle. Constatant que le moyen de paiement en constitue souvent le point de convergence, Marqeta, jeune pousse américaine, a conçu un support universel pour répondre à leurs besoins.

Au premier abord, la société se présente comme un émetteur et processeur de paiements comme il en existe tant d'autres. Elle parvient néanmoins à se distinguer de la concurrence avec une offre beaucoup plus riche que la « normale ». Elle permet, entre autres, de créer des programmes de fidélité, des comptes prépayés aux innombrables options de rechargement, des systèmes fermés (fonctionnant uniquement dans certaines enseignes) ou à paramétrer (le porteur pouvant fixer des limites catégorielles)…

Toutes ces fonctions sont intégrées dans un support unique, qui peut être une carte (plastique) classique (compatible avec tous les terminaux, sans impact sur les infrastructures existantes) ou dématérialisée (ouvrant la voie aussi au porte-monnaie mobile, par exemple). Mais le véritable génie de la plate-forme réside principalement dans son API (« interface de programmation applicative »), qui donne le contrôle total et entièrement dynamique de l'ensemble de ses caractéristiques aux développeurs.

Marqeta

Avec les outils fournis et la documentation exhaustive qui les accompagne, le commerçant (ou un offreur de programme de fidélité, une institution financière…) peut donc créer un moyen de paiement précisément ajusté à ses besoins : carte « standard » adossée à une carte existante ou alimentée (automatiquement ou non) par virement bancaire, utilisation en « bon cadeau », gestion des échanges d'argent entre particuliers, contrôle des dépenses d'un enfant par ses parents… une infinité de scénarios sont envisageables et peuvent être combinés en toute simplicité.

Malgré sa jeunesse (son lancement date de 2012), la solution de Marqeta a déjà conquis quelques clients prestigieux : outre Oink (anciennement Virtual Piggy) et son offre pour mineurs, Facebook l'a également mise à contribution pour ses cartes-cadeaux. La disponibilité d'une API ouverte, facilitant grandement son intégration, devrait en démultiplier les opportunités d'adoption. Les commerçants peuvent désormais rêver de déployer un moyen de paiement propriétaire aussi performant que celui de Starbucks !

Dans une tendance inéluctable, tous les services financiers se voient « APIfier » de la sorte. Aujourd'hui l'émission de moyen de paiement, demain le crédit ou la gestion d'investissement, aucun secteur ne restera à l'écart. Et c'est ainsi que le modèle actuel de banque monolithique va progressivement laisser la place à une offre de services multi-forme, à assembler à la demande, en fonction d'un besoin spécifique. Une vision qui concerne autant les clients particuliers que les professionnels…

mercredi 12 novembre 2014

AXA toujours plus « digitale »

AXA
Après une année déjà riche de nouveautés numériques (applications mobiles Soon et Mon AXA, partenariats Facebook et Linkedin, hackathon…), AXA redouble encore ses efforts afin de devenir l'acteur incontournable de l'assurance du monde connecté et s'apprête pour ce faire à déployer une deuxième vague d'innovations.

Déclaration de sinistre sur mobile, service après-vente sur les réseaux sociaux, offre d'assurance automobile ajustée selon le comportement (« pay how you drive »), approche autour de la maison connectée… devraient ainsi arriver prochainement. L'objectif est de fournir une solution pour tous les moments clés de la vie. La stratégie de la compagnie n'est pourtant pas de basculer dans le 100% « digital » : elle cible un modèle hybride dans lequel le client a l'entière liberté de choisir le canal de sa relation avec son assureur.

Dans un registre radicalement différent, AXA ouvrira également, le 24 novembre prochain, un comparateur en ligne d'un nouveau genre : « TestezVotreAssurance.com ». Dans la lignée de « QuiALeMeilleurService.com », qui permet depuis 2012 de rechercher les services (génériques) les plus performants parmi les leaders français du secteur, celui-ci propose au consommateur de mieux comprendre les risques couverts par son contrat d'assurance automobile et de confronter les résultats à l'offre AXA la plus proche.

Le fonctionnement en est extrêmement simple tout en étant très précis : l'utilisateur (anonyme) commence par choisir sa compagnie ou sa mutuelle parmi les 12 qui sont incluses (représentant globalement 88% du marché), puis sélectionne le type et le nom de son contrat. Il ne lui reste plus alors qu'à découvrir, pour 7 situations de sinistre typiques (accident, vol, bris de glace, vandalisme…), les garanties dont il bénéficie (et les exclusions), aux côtés de celles que peut lui proposer AXA.

TestezVotreAssurance.com

Afin d'asseoir la crédibilité de sa démarche, la compagnie prend soin d'être transparente et objective dans ses comparaisons. En conséquence, il arrive parfois de trouver des protections plus complètes parmi les offres de la concurrence (c'est le cas, par exemple, pour le vol après une perte des clés du véhicule). Enfin, le volet du prix n'est pas intégré dans ces diagnostics, mais il sera possible de prolonger (et finaliser) l'expérience par une demande de devis – directement en ligne ou via une prise de contact avec un agent.

Dans un monde où les consommateurs consultent de plus en plus souvent les sites de comparaison en ligne avant de souscrire un contrat, une majorité d'assureurs se lamentent (certains vont même jusqu'à s'exclure de ces plates-formes), en déplorant que ces acteurs ne s'intéressent qu'aux prix, sans considération pour les garanties et les services offerts. A contrario, AXA choisit de prendre ces intermédiaires à leur propre jeu, en suppléant elle-même à leurs lacunes (tout en jouant sur sa position particulière, qui lui permet notamment de fournir un service anonyme).

Plus que la multiplication de ses applications mobiles et autres services en ligne, qui sont, finalement, plus ou moins attendus de la part d'une entreprise moderne, « TestezVotreAssurance.com » est peut-être la meilleure démonstration que peut faire AXA de sa compréhension des enjeux de la transformation numérique : les nouveaux usages sont là pour rester – il serait totalement illusoire de croire que la tendance passera ! – et la seule solution envisageable pour éviter la submersion est de les accompagner, au besoin en empruntant les recettes des trublions…

mardi 11 novembre 2014

Vers une informatique à 2 vitesses

Forrester
La transformation numérique du monde affecte profondément les institutions financières et, en leur sein, les directions informatiques se trouvent souvent particulièrement désemparées face aux défis qu'elles doivent affronter. Les analystes de Forrester et Gartner suggèrent que l'avenir verra émerger des approches « à 2 vitesses ».

Je dois tout de même avouer que le parallèle que j'établis ici est un peu audacieux, car les perspectives des deux cabinets sont radicalement différentes… Ainsi, selon le point de vue de Jost Hoppermann (Forrester), c'est le système dans son ensemble qui va se diviser entre les établissements à la pointe, ayant modernisé leurs infrastructures, et ceux qui persistent à conserver leurs plates-formes antiques, inadaptées aux enjeux du XXIème siècle et les rendant inaptes à satisfaire les nouveaux besoins de leurs clients.

En revanche, dans le cas de Gartner, les analystes décrivent plutôt une dichotomie au cœur même des DSI (« Direction des Systèmes d'Information »), alors devenues bi-modales, dans lesquelles coexisteraient une organisation classique, stable et peu réactive, avec une autre, beaucoup plus rapide et agile, adaptée aux exigences de l'ère numérique. D'après une enquête, 45% des directeurs informatiques auraient déjà mis en place un tel modèle accéléré, et ce taux pourrait atteindre 75% à l'horizon 2017.

Les réflexions convergent cependant sur les symptômes. Dans une vision « externe », Forrester rappelle que la mutation en cours, loin d'être une simple évolution technologique, a fondamentalement transféré le pouvoir au client. Cette inversion du rapport de forces implique une indispensable focalisation de tous les collaborateurs sur les attentes des utilisateurs, notamment dans les équipes de développement logiciel, celles-ci étant l'origine des applications qui deviennent des points de contact privilégiés.

Pour Gartner, le constat en interne, directement lié aux mêmes tendances, est celui d'une dissémination de la technologie dans les différents départements de l'entreprise. Afin de se rapprocher de leurs clients, les directions opérationnelles fonctionnent de plus en plus comme des startups numériques (toutes proportions gardées), gérant leurs propres budgets informatiques, faisant appel à des ressources extérieures (par exemple dans le « cloud »). Le salut de la DSI passera alors par sa capacité à devenir un partenaire agile de ces entités relativement autonomes.

Si quelques cas – CommBank en Australie ou BBVA Compass aux États-Unis, pour ne citer que les plus emblématiques – donnent un certain crédit à l'idée d'une banque « Formule 1 », de bout en bout, la réalité, pour une immense majorité d'établissements, est que la refonte intégrale de leurs infrastructures est un chantier inimaginable. En attendant l'opportunité qui rendra la révolution incontournable, leur meilleure (seconde) option est donc bien d'accélérer les parties de leur organisation qui sont les plus sensibles aux nouvelles exigences de leurs clients.

Hélas, cette opération chirurgicale, apparemment cosmétique, n'est guère plus facile à réussir qu'une rénovation intégrale, car les implications en sont immenses. Tout d'abord, même s'il ne s'agit que d'une partie des équipes, où va-t-on dénicher les indispensables talents, capables de maîtriser les technologies, d'appréhender les enjeux numériques, tout en restant en symbiose avec les responsables « métier » ? L'habitude d'isolation de la DSI – sans même évoquer les excès de l'externalisation – n'a pas produit de tels profils depuis bien longtemps…

Quand bien même ces oiseaux rares seraient trouvés, les difficultés ne sont pas toutes résolues pour autant. En effet, la coexistence de deux modèles d'informatique dans une entreprise induit un risque majeur de « frictions » au niveau de leurs interfaces : aucun système n'étant isolé, les nouvelles solutions doivent toujours interagir, d'une manière ou d'une autre, avec les composants historiques. Faute d'effort important de modernisation des points d'échanges, ces derniers constitueront le cimetière de l'espoir d'agilité.

Quoi qu'on en pense, les services financières à deux vitesses sont déjà une réalité : que ce soient les quelques banques qui ont procédé à leur transformation globale ou les acteurs émergents nativement « digitaux », la menace pour les institutions historiques de se retrouver à la traîne est avérée. Et elles se trouvent confrontées à un cruel dilemme, entre les dangers d'un programme pharaonique de refonte et les risques d'enlisement prolongé dans les lourdeurs des systèmes en place (dont il est facile de repérer quelques exemples symboliques dans l'actualité)…

Daryl Plummer sur la scène du Gartner Symposium
Daryl Plummer sur la scène du Gartner Symposium

lundi 10 novembre 2014

Avec Bsavi, le PFM devient prescripteur

Bsavi
Lorsque Bsavi présente une nouvelle solution de PFM, à l'occasion du Web Summit, l'idée qui vient immédiatement à l'esprit est qu'il ne s'agit que d'une plate-forme de plus ! Pourtant, la découverte de la vision portée par ses concepteurs fait rapidement apparaître une autre réalité : voilà peut-être l'avenir du conseil financier…

A ce stade, avec une application mobile disponible uniquement en test privé, Bsavi n'est certes qu'une promesse, mais elle a de quoi séduire. Passons donc rapidement sur les fonctions « classiques » telles que l'agrégation des comptes courants, d'épargne ou de cartes détenus dans divers établissements, la catégorisation automatique et la visualisation graphique des transactions, les alertes… Le premier petit indice d'originalité est une option de connexion aux réseaux sociaux permettant d'établir un lien entre un achat et les amis et relations qui y sont associés.

Mais, beaucoup plus important que son approche conventionnelle de l'analyse des opérations passées, Bsavi introduit un mode prédictif, qui fournit à l'utilisateur une vue de son budget de la semaine à venir. Prenant en compte ses dépenses récurrentes, ses besoins identifiés, ses habitudes… automatiquement déterminées par une analyse de ses comptes, l'application va lui proposer un plan de dépenses pour chacune de ses journées, pour son week-end à venir… Et, dès que sa trésorerie le rend possible, l'outil pourra également lui suggérer des gestes d'épargne.

Bsavi

Ce n'est pas tout ! La plate-forme est aussi conçue pour accompagner les décisions du consommateur. Pour ce faire, les recommandations peuvent se transformer immédiatement en actes concrets : de l'achat en ligne intégré (en bénéficiant de réductions, le cas échéant) au changement de banque en un clic, en passant par les applications en tout genre qu'imagineront les développeurs exploitant les APIs (« interfaces de programmation applicative ») fournies, il devient possible de passer de la contemplation des comptes à un pilotage actif des finances personnelles.

Dans ce registre, la perspective de Bsavi n'est pas uniquement mercantile (même s'il est probable que c'est là que la startup voit son modèle économique). Il s'agit au contraire de faire de la solution de PFM une plaque tournante de données – financières et sociales – que les consommateurs choisiront de partager (ou non) avec des entreprises tierces afin de bénéficier d'offres personnalisées. Les premiers projets pilotes mis en œuvre par quelques partenaires consistent d'ailleurs à proposer des crédits à des individus sans historique financier, rejetées par le système traditionnel.

Originaire d'Afrique du Sud, Bsavi a d'immenses ambitions puisqu'elle vise un déploiement global, dans tous les grands pays du monde. Qu'elle réussisse ou pas, son modèle mérite l'attention des institutions financières, qui pourraient y trouver une menace inattendue. En effet, au-delà de la promesse (presque anecdotique) de changement d'établissement en un clic, la plate-forme de la jeune pousse esquisse avant tout, grâce à ses capacités de conseil « actionnable », une désintermédiation des banques beaucoup plus réelle et plus disruptive que jamais auparavant.