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C'est pas mon idée !

mercredi 31 décembre 2014

Quelle belle année 2014 !

2014
Le dernier jour de l'année est arrivé et, avec lui, l'occasion de faire un rapide (et traditionnel) bilan de l'innovation dans le secteur financier – avec un cru 2014 qui s'est révélé particulièrement prolifique – ainsi qu'une ouverture sur les perspectives (pré)visibles pour 2015 – promettant déjà d'être tout aussi excitante…

En guise d'entrée en matière, jetons d'abord un coup d'œil sur les billets de « C'est pas mon idée ! » que vous, lecteurs, avez le plus appréciés. Dans le top 10 des nombres de vues, AXA se distingue en occupant la moitié des places, avec des sujets aussi variés que son premier hackathon (avec Salesforce), son partenariat avec Facebook, sa nouvelle application mobile universelle « Mon AXA », le lancement de son produit e-réputation pour les entreprises ou encore sa stratégie numérique globale.

Cette domination écrasante ne doit pas surprendre : l'entreprise donnait le ton dès le mois de janvier et ses efforts pour se transformer en « leader du digital » ne se sont jamais relâchés tout au long de l'année. Il s'agit également d'un indicateur d'un autre changement important. En effet, le secteur de l'assurance, jusqu'alors relativement timide par rapport à l'innovation, s'est brusquement réveillé et a multiplié les initiatives. Un billet sur la menace émergente de Google, aussi dans le top 10, confirme la prise de conscience.

Malgré son hégémonie sur le classement, AXA n'occupe pas la première marche du podium. Et je dois avouer que le sujet le plus consulté m'a surpris. C'est à Fivory, le porte-monnaie virtuel du Crédit Mutuel-CIC, que revient cet honneur. Ainsi, en dépit des hésitations et de l'absence de réel engouement sur le marché, les solutions de paiement par mobile continuent à fasciner. Sans surprise, le nouveau venu ne fait plus beaucoup parler de lui, alors qu'il n'est toujours utilisable qu'à Boulogne-Billancourt, 8 mois après son lancement en fanfare.

Pour faire bonne mesure, le déploiement de « beacons » dans les agences du Crédit Mutuel Arkéa, en troisième position, marque l'éveil de la curiosité vis-à-vis de ces balises, dont la plupart des banquiers se demandent encore quel pourra être l'usage. Dans un autre registre, le tollé qu'ont suscité les velléités exprimées par ING (aux Pays-Bas) d'exploiter commercialement les données de ses clients a fortement retenu l'attention, probablement parce que toutes les grandes institutions ont des projets du même ordre.

Ce panorama ne serait pas complet sans le billet du top 10 qui traite d'innovation (en tant que sujet à part entière) et, plus particulièrement, des profils qui la paralyse dans les grandes entreprises. Alors que les lecteurs du blog sont habituellement plus attirés par les actualités concernant leurs confrères et concurrents, cette intérêt sensible pour un thème plus générique mérite d'être noté…

Je souhaite compléter ce hit-parade par 3 grandes tendances qui me semblent se dégager de cette année 2014. En premier lieu, la multiplication des hackathons dans les grands groupes (AXA, Crédit Agricole, Crédit Mutuel Arkéa, Société Générale, Banque Populaire, BNP Paribas…) illustre une volonté de plus en plus manifeste de changer les habitudes et les cultures, afin de rendre les organisations « génétiquement » innovantes face à un monde qui évolue à une vitesse extraordinaire.

Autre motif de satisfaction, la « FinTech » à la française prend de l'ampleur, avec un nombre croissant de startups (au hasard : Inspeer, Finexkap, Paymium ou Anatec), désormais capables de concevoir et concrétiser des modèles originaux et qui parviennent (quoique encore difficilement) à faire financer leur développement. En revanche, les applications des « big data » n'ont pas connu la généralisation attendue, l'heure semblant toujours être aux expérimentations.

Il reste à espérer que 2015 sera aussi fertile, et tout laisse penser que tel sera le cas. Sans vouloir tomber dans le jeu des prédictions, il paraît raisonnable d'imaginer que les objets connectés vont progressivement devenir un enjeu majeur, d'abord pour les compagnies d'assurance, et que les frémissements déjà observés autour des crypto-monnaies (le Bitcoin et la « blockchain ») s'apprêtent certainement à déboucher sur des initiatives, au moins dans quelques banques.

En attendant ces beaux projets (auxquels je rêve de participer), je vous souhaite à tous une excellente année d'innovations !

Bonne année 2015 !

mardi 30 décembre 2014

2015, année du paiement par mobile ?

Apple Pay
Depuis 10 ans que se dessine le rêve du paiement sans contact par téléphone mobile, jamais aucune initiative n'a donné plus d'espoir à ses promoteurs que le lancement d'Apple Pay cet automne. La magnitude de l'événement laisse espérer à de nombreux observateurs qu'il déclenchera (enfin !) la vague d'adoption tant attendue…

Longtemps perçu comme le chaînon manquant du paiement par mobile, Apple a donc fini par rejoindre le clan des adeptes du NFC (la technologie sans contact utilisée pour ces applications). Comme il fallait s'y attendre de la part de la marque et de son obsession du design, son arrivée sur ce terrain pourtant fort encombré se fait de très belle manière, proposant une expérience utilisateur exceptionnelle, dont aucun autre acteur n'était jamais parvenu à approcher la simplicité.

Les premières mesures du niveau d'utilisation d'Apple Pay donnent pourtant des résultats relativement mitigés. D'un côté, selon les estimations d'InfoScout, moins de 10% des propriétaires d'iPhone 6 auraient testé le service en un peu plus d'un mois, tandis que, de l'autre, ITG affirme qu'il représenterait 1% du montant des paiements numériques aux États-Unis, en novembre. Le seul enseignement à tirer de ces études est probablement qu'il est encore trop tôt pour conclure au succès ou non.

En revanche, il est déjà possible de mesurer l'extraordinaire impact d'Apple Pay sur le secteur des paiements. Ainsi, le ralliement presque immédiat de toutes les grandes banques américaines – malgré les conditions financières qui leur sont imposées – montre à quel point celles-ci sont désemparées face à l'émergence du paiement sur mobile. Entre une solution coûteuse dans laquelle leur rôle (et leur marque) est préservé et la menace des innombrables porte-monnaie mobiles qui veulent les remplacer, elles n'ont visiblement aucune réponse propre à apporter.

Apple Pay sur différents appareils

Ce choix pourrait cependant rapidement se retourner contre elles. S'il faut en croire les échos des banques britanniques en cours de négociation avec la marque à la pomme, les termes proposés leur laissent entrevoir un avenir sombre. Car, en dépit des assertions réitérées d'Apple selon lesquelles les données de paiement ne sont pas exploitées, c'est bien sur la collecte d'information que les discussions achoppent aujourd'hui. La crainte des établissements concernés est de voir le paiement se transformer en cheval de Troie pour envahir peu à peu l'ensemble des services financiers aux consommateurs.

Les voici donc confrontés à un dilemme qui était inévitable : poursuivre la stratégie actuelle d'investissements réduits dans un marché aux marges extrêmement faibles et laisser de nouveaux entrants y prendre position puis, potentiellement, s'infiltrer dans d'autres domaines ou bien développer des solutions – dont les chances de succès sont faibles – pour continuer à maîtriser de bout en bout la chaîne de valeur des finances personnelles des clients ? Les décisions qui se prennent actuellement auront des implications profondes à terme…

En ce qui concerne le paiement par mobile, les perspectives sont désormais plus claires. D'une certaine manière (assez irrationnelle, d'ailleurs), Apple Pay représente la dernière chance pour le sans contact de s'imposer. Encore faudra-t-il que les autres participants à l'écosystème égalent la qualité de son expérience utilisateur, les iPhones ne représentant plus qu'une minorité de l'équipement des consommateurs. Une certitude, en tous cas : les opérateurs de télécommunication ont disparu du champ de bataille.

lundi 29 décembre 2014

Le DSI doit-il devenir schizophrène ?

Gartner
Il serait facile de considérer qu'il ne s'agit que d'une nouvelle marotte, mais lorsque le cabinet Gartner évoque l'impératif pour les entreprises de déployer une DSI à 2 vitesses (ou « bi-modale »), il faut se rendre à l'évidence : la révolution numérique exige bien une transformation des organisations informatiques. Reste à trouver la bonne méthode…

Peter Sondergaard, directeur des recherches de Gartner, remettait le couvert dans un récent billet de blog, en insistant sur les dangers qui guettent ceux qui persisteraient à ignorer l'avertissement. La réalité, crue et incontestable, est que les responsables « métier » sont maintenant passés à la vitesse de l'entreprise « digitale » et qu'ils ont donc besoin d'une informatique ultra-réactive et hyper-agile. Si leur DSI n'est pas en mesure de répondre à cette attente, ils vont rechercher des solutions ailleurs.

Les « systèmes de l'ombre » (« shadow IT ») qu'ils vont ainsi mettre en œuvre échappent entièrement au contrôle de l'organisation en place, ce qui peut engendrer des risques immenses à court ou long terme, notamment en matière de sécurité, d'intégration ou de maintenance. Pour répondre à ce défi, le DSI n'aurait d'autre choix que de développer une capacité à offrir les services attendus par leurs clients internes. Il devrait alors porter deux offres : l'une (traditionnelle) basée sur la stabilité et la robustesse, l'autre (innovante) faite de vitesse et de flexibilité.

L'idée semble parfaitement logique et serait même déjà en voie d'adoption : 45% des DSI consultés par Gartner lors d'une enquête déclarent avoir mis en place un mode « accéléré » et les projections porteraient cette proportion à 75% d'ici à 2017. Il n'est cependant pas précisé si les premières versions de ces organisations duales sont efficaces. Or, les exemples que nous donnent les institutions financières – par exemple autour des cycles d'évolution de leurs apps mobiles – n'incitent pas à le croire…

Alors, se pose la question fondamentale : les structures informatiques actuelles et leurs dirigeants sont-ils réellement capables de piloter simultanément deux modèles aussi divergents ? Plutôt que de leur imposer un rôle totalement schizophrénique, ne serait-il pas plus raisonnable de clairement séparer les fonctions correspondantes et les confier à des responsables distincts, sélectionnés pour leur talent à gérer soit la stabilité et la sécurité, soit l'agilité de leurs environnements respectifs ?

Depuis bien longtemps, les DSI se débattent sous la pression qui pèse sur eux de faire fonctionner l'existant sans perturbation, tout en essayant de répondre à une forte demande de porter les nouveaux projets, voire de stimuler l'innovation. L'expérience montre que cette équation est presque impossible à résoudre. Ce n'est certainement pas en la transformant en une exigence d'établir et maintenir un équilibre entre 2 approches radicalement opposées de l'informatique que la solution va émerger.

A l'inverse, les modèles qui réussissent donnent peut-être une réponse plus plausible. Ainsi, que se passe-t-il du côté des startups, en particulier les « néo-banques » ? Ces petites entreprises opèrent exclusivement en mode agile (elles en sont même l'archétype) et elles relèguent la gestion de leurs socles de base à des tiers spécialisés (fournisseurs de cœur bancaire, en particulier). Les établissements traditionnels les plus avancés n'agissent pas autrement lorsqu'ils migrent leurs systèmes critiques vers des progiciels, éventuellement gérés par un partenaire. Dans d'autres cas, l'émergence des directions « digitales » représente parfois une autre incarnation d'une tendance identique.

La clé se trouverait donc plutôt dans une division formelle des responsabilités, permettant d'éviter tout risque de dérive (dans un sens ou un autre). Chacune pourrait être confiée à une personne ayant les compétences optimales pour le rôle qui lui est assigné. En cible, l'entreprise aurait finalement 2 DSI, complémentaires et aussi importants l'un que l'autre, dont le point de contact critique serait celui de l'intégration (qui, en tout état de cause, reste le défi majeur de l'idée même d'informatique à 2 vitesses).

Manège la nuit

dimanche 28 décembre 2014

L'assurance aime la « quantification de soi »

Oscar Health
Le secteur de l'assurance confirme décidément son statut de pionnier de l'internet des objets ! Après la vague (toujours en pleine expansion) des contrats automobiles basés sur l'usage (« UBI »), le domaine de la santé semble être le prochain à sacrifier à la tendance, grâce aux opportunités offertes par la « quantification de soi ».

Parmi d'autres initiatives, celle d'une jeune compagnie américaine, Oscar Health Insurance, est probablement l'une des plus abouties à ce jour. Rien d'étonnant dans cette proposition puisque la société est une véritable startup, née dans le sillage des réformes du système de santé orchestrées par l'administration Obama, et dont l'ambition est – en toute modestie – de révolutionner le secteur grâce aux technologies. Sans surprise, l'une de ses priorités est la prévention.

C'est donc dans ce registre qu'Oscar a lancé une vaste opération à l'intention de l'ensemble de ses clients : ils recevront jusqu'à 240 euros par an en échange de quelques gestes réguliers de maintien de leur forme physique. En pratique, l'application mobile de l'assureur permet, depuis quelques jours, de commander et obtenir gratuitement un bracelet Misfit, d'une valeur de 50 dollars, grâce auquel elle sera en mesure d'enregistrer quotidiennement le nombre de pas (de marche à pied) effectués.

Chaque jour, le total réalisé est comparé à un minimum – compris entre 2 000 et 10 000 pas – établi en fonction du profil du porteur (essentiellement son âge, peut-on supposer). S'il franchit le seuil qui lui est assigné de la sorte par les algorithmes de l'entreprise, l'assuré voit son compte crédité de 1 dollar et ce, jusqu'à 20 fois par mois. Dès que la somme ainsi collectée atteint 20 dollars, elle peut être convertie en bons d'achat à dépenser sur le site Amazon.

Oscar Health sur iPhone et bracelet Misfit

Le principe rappellera certainement aux lecteurs de ce blog la récente offre Modulango d'Axa. Dans sa mise en œuvre, Oscar ajoute simplement une incitation permanente de ses clients à l'activité physique, sous forme de cadeaux. En réalité, il s'agit – ni plus ni moins, mais avec une présentation plus positive – d'un contrat dont la prime est modulée selon le comportement de l'assuré. Une transposition de l'UBI automobile à la santé, en somme… et qui ne peut surprendre tant elle était inévitable !

L'enjeu est considérable pour les compagnies d'assurance, car ces approches peuvent leur permettre de mieux maîtriser leurs risques. Certes, il est plus facile pour une startup de se lancer sur ce terrain, surtout si on considère que ses clients sont probablement plutôt des jeunes technophiles (par affinité naturelle avec son positionnement). Cependant, la méthode adoptée par Oscar peut également servir d'inspiration pour tous les acteurs qui voudraient suivre la même voie.

En effet, tout est conçu dans l'offre afin d'éviter que les utilisateurs des bracelets ne pensent que leur assureur les surveille et s'en indigne. Ainsi, seul le franchissement d'un seuil d'activité déclenche les cadeaux et tout porte à croire qu'aucune autre donnée n'est transmise. Même le mode de stimulation choisi se révèle astucieux : la distribution de récompenses permet d'éviter l'impression (pourtant bien réelle) d'un tarif ajusté en fonction du profil personnel, et donc potentiellement désavantageux.

Nous n'en sommes aujourd'hui qu'aux tous débuts de l'utilisation commerciale de la quantification de soi mais il ne fait aucun doute que le mouvement va rapidement prendre de l'ampleur. À ce stade, le défi le plus important à relever est de gagner la confiance des consommateurs et les amener à adopter les solutions qui leurs sont proposées par les compagnies d'assurance. Oscar semble l'avoir bien compris…

samedi 27 décembre 2014

Google veut automatiser l'analyse de données

Google Research
Les géants du web ont littéralement inventé le concept de « big data ». Depuis, toutes les entreprises tentent de s'en emparer. Hélas, les compétences nécessaires – celles des fameux « data scientists » – sont rares et cette pénurie limite les opportunités… Qu'à cela ne tienne, il suffit d'automatiser leur travail : voilà le nouveau pari de Google !

Certes, il existe déjà, dans le même but, quelques offres qui prennent en charge les tâches laborieuses afin de libérer plus de temps pour l'exploration des données, ainsi que des solutions qui tentent de faciliter l'accès aux techniques évoluées d'analyse. Mais pourquoi ne pas rêver à des algorithmes qui seraient directement capables de détecter des motifs ou des tendances dans des masses d'information ou, au contraire, de repérer seuls des anomalies dans des modèles statistiques ?

Il s'agit justement de l'enjeu des recherches d'une équipe de l'université de Cambridge et Google est tellement séduite par cette idée qu'elle vient de lui attribuer une donation de 750 000 dollars (sans la moindre contrepartie) pour poursuivre ses travaux sur un système d'intelligence artificielle de l'analyse de données. Il est vrai que ceux-ci sont suffisamment avancés pour qu'un démonstrateur (simplifié) de « The Automatic Statistician » ait été mis en ligne publiquement au cours de l'été (retiré maintenant, mais une nouvelle version devrait être disponible début 2015).

The Automatic Statistician

À ce stade, le moteur qui a été élaboré reste embryonnaire. Il permet uniquement l'analyse de séries de données temporelles, au sein desquelles il va identifier les tendances significatives et les éventuelles exceptions que ces dernières comportent. Dans une logique de vulgarisation de l'accès à l'information, les algorithmes produisent un rapport illustré, de 5 à 15 pages, décrivant par le menu et en anglais « simple » les résultats obtenus. Dans une future incarnation, le système sera généralisé de manière à prendre en compte d'autres typologies de données.

L'ambition des chercheurs de Cambridge est de résoudre simultanément deux grands défis de la société numérique. D'une part, la masse d'information disponible – en croissance exponentielle – ne pourra être exploitée uniquement par des experts trop rares et trop coûteux : seule l'automatisation peut démocratiser l'accès à cette ressource. D'autre part, les résultats des analyses fourmillent aujourd'hui de concepts mathématiques qui les rendent complexes à interpréter : il faut impérativement les mettre à la portée du commun des mortels afin qu'ils soient largement utilisables.

En perspective, qu'on le souhaite ou non, il ne nous sera donc bientôt plus possible d'échapper aux algorithmes prédictifs omniprésents…

Information repérée grâce à Alexander Linden (Gartner). Merci !

vendredi 26 décembre 2014

La banque en ligne pas assez séduisante ?

Les Échos
Alors que Boursorama vient de franchir la barre des 600 000 clients et qu'ING approche le million, le journal Les Échos s'interrogeait il y a quelques jours sur les raisons du succès relativement modeste des banques 100% en ligne françaises, en comparaison de leurs consœurs européennes. Vaste sujet, qui mérite un complément d'éclairage…

Ainsi, selon cet article, deux explications essentielles justifieraient que nos compatriotes ne sont pas aussi attirés que leurs voisins par les vertus des « pure players » de l'internet : la demande persistante d'une relation humaine et le faible avantage économique offert. Les clients des établissements traditionnels ne seraient pas prêts à abandonner le modèle de l'agence, qu'ils plébisciteraient pour obtenir conseil (et réassurance) de la part de professionnels, d'autant plus que le surcoût de ce service ne leur paraît pas si élevé qu'il justifierait de l'abandonner.

Je ne doute pas que ces motivations, constamment mises en avant dans ce genre de débat, jouent un rôle dans l'équilibre des forces en présence. Je pense cependant que leur prépondérance est largement surestimée – notamment parce que les paramètres qui les portent systématiquement en avant sont biaisés – et, surtout, qu'il en existe quelques autres, au moins aussi importantes, qui, si elles étaient rationalisées et exploitées (dans un sens ou l'autre), seraient susceptibles de renverser les visions conformistes.

En premier lieu, la notion de « conseil » en matière de finance est souvent un leurre. Aujourd'hui, lorsqu'ils recherchent un produit ou un service, les consommateurs s'informent d'abord auprès de leurs relations (proches ou distantes, dans la vie réelle ou en ligne), de sites spécialisés (en particulier les comparateurs, mais également ceux des institutions financières). Bien sûr, ils consultent aussi leur interlocuteur dans la banque, surtout pour les opérations complexes (assurance vie, crédit immobilier…). Mais se demande-t-on pourquoi ?

Cas le plus courant et le plus trivial : ces demandes ne peuvent être satisfaites qu'en agence et le rendez-vous avec un conseiller n'est qu'une obligation, dont la valeur ajoutée n'est pas toujours avérée. Autre possibilité, peut-être moins anecdotique qu'il n'y paraît, le client veut pouvoir dialoguer avec un être humain pour marchander… Obtenir un petit effort sur un taux d'intérêt ou une remise sur les frais de dossier, voilà qui est impossible devant l'écran d'un ordinateur. Faudrait-il voir là une explication aux disparités entre Europe du Nord et du Sud ?

Sur le volet des coûts, la réalité est que la banque contemporaine est un paradoxe en pleine expansion, puisque les frais facturés aux clients correspondent de moins en moins à leur usage effectif des services mis à leur disposition. Les cotisations des cartes payent les traitements de chèques, les économies réalisées sur les opérations effectuées en ligne par les clients eux-mêmes subventionnent les réseaux d'agence surdimensionnés… Et l'ensemble est serré au maximum, de manière à ne laisser aucune marge de manœuvre aux acteurs alternatifs.

En face des grandes structures, dont l'échelle permet de masquer l'opacité des modèles économiques, les banques en ligne – même lorsqu'elles proposent un service gratuit – ne peuvent donc guère rivaliser sur le terrain des prix. Par ailleurs, avant même de s'inquiéter de l'absence de relation en face à face pour les aider dans leurs grandes décisions financières, les consommateurs doivent se rendre à l'évidence : leur offre est insuffisamment développée. S'il faut en revenir aux établissements traditionnels au premier besoin de crédit ou envie d'investissement, à quoi bon changer ?

L'habitude qu'ont les français de s'adresser à leur banque « universelle » pour tous leurs produits et services financiers constitue un facteur majeur du maintien du statu quo. Et comme il est peu probable que les natives du web se mettent à développer à court terme une offre extensive, ce sont bien les comportements des consommateurs qu'elles devraient faire évoluer si elles désirent inverser le rapport de force. Or, il est peu probable que les promesses de frais réduits soient le meilleur moyen pour y parvenir.

En effet, cette recette est avant tout efficace pour les filiales directes des institutions historiques, qui permet à celles-ci d'optimiser leurs coûts de fonctionnement avec leurs clients les moins rentables. Dans le cas des banques 100% web, c'est plutôt la qualité qui devrait faire la différence : si elles pouvaient démontrer que leurs services sont plus performants que ceux des conseillers en agence (par exemple grâce à un accès direct à des spécialistes, par l'adoption d'outils à base d'intelligence artificielle…), elles deviendraient plus crédibles.

Une banque à New York en 1900 - New York Journal-American

jeudi 25 décembre 2014

La banque sur Facebook envahit le monde

Pockets by ICICI
Depuis 3 ans, ICICI Bank développe et enrichit continuellement ses services sur Facebook, afin de mieux conquérir les jeunes indiens, fervents adeptes du réseau social. Désormais, cette stratégie est également déployée à l'international, avec l'ouverture récente aux clients non résidents de l'application correspondante.

Naturellement, la solution proposée, Pockets by ICICI, reste aussi modeste que lors de ses débuts en Inde. Elle ne permet que la consultation des relevés, des soldes et listes de transactions récentes du compte courant et des comptes d'épargne, le suivi des demandes en cours, ainsi que l'exécution d'opérations basiques, sans risques, telles que la commande de chéquier et la mise en opposition d'un chèque. En contrepartie, l'accès est simplifié, une fois l'inscription au service enregistrée.

Avec cette application, 1,5 millions de détenteurs de comptes bancaires dans 150 pays différents peuvent donc maintenant gérer l'essentiel de leurs finances personnelles sur Facebook. De cette manière, l'effacement des distances que favorise le réseau social pour le maintien de contacts avec les amis et la famille – particulièrement important pour des populations éloignées de leur terre d'origine – s'étend à la banque et permet à cette dernière d'établir une relation numérique de proximité avec ces clients.

Pockets by ICICI sur Facebook

Incidemment, il ne s'agit pas de la seule initiative d'ICICI Bank en la matière. On pourrait également citer son application mobile de « vidéo banque », qui offre (toujours aux non résidents) un moyen simple de conduire un entretien à distance avec un conseiller, en visioconférence. Là encore, l'objectif de la banque est de donner l'impression qu'elle est en permanence aux côtés de son client, en l'occurrence avec une présence humaine, 24 heures sur 24, quel que soit le lieu où il se trouve.

Plus profondément, au-delà de l'évidente valeur apportée aux expatriés directement visés par la banque, la propagation de ses pratiques innovantes pourrait avoir un impact inattendu sur d'autres consommateurs. En effet, que se passera-t-il si d'autres jeunes découvrent – par effet viral – les vertus de la banque sur Facebook, grâce à leurs amis indiens, s'enthousiasment pour le concept et se rendent comptent alors qu'aucun établissement local n'est en mesure de leur proposer un service équivalent ?

mercredi 24 décembre 2014

Mobile, premier canal d'accès à la banque

Bain & Company
La cinquième enquête annuelle du cabinet de conseil Bain & Company sur la fidélité des clients de banque de détail le confirme sans ambiguïté : 2014 restera comme l'année qui a vu le mobile devenir le canal d'interaction préféré des consommateurs, face au web « classique », au GAB, à l'agence et au centre d'appel.

L'étude, menée auprès de 80 000 personnes dans 22 pays différents, révèle naturellement d'importantes disparités géographiques. Ainsi, la France, qui figure dans le trio de tête des interactions numériques, fait aussi partie des 13 pour lesquels le mobile est effectivement devenu le principal outil de contact (avec plus de 35% des opérations), tandis que le Canada et la Belgique (pour ne citer que des pays francophones) voient toujours une majorité de leurs relations passer par les services en ligne traditionnels (qui représentent de l'ordre de 38% du total).

Une chose est certaine : la progression du mobile est fulgurante, puisque le taux de personnes interrogées utilisant une application bancaire sur leur téléphone a globalement augmenté de presque 20 points en 12 mois, pour atteindre une moyenne de 30% dans l'ensemble de l'échantillon. Cette croissance s'est faite au détriment de tous les autres canaux, dont l'agence qui poursuit sa baisse, lente mais constante, et y compris le web, qui est pour la première fois en déclin d'une année sur l'autre.

L'évolution des usages induit également de profonds changements de comportement, mais pas toujours de la manière dont on l'imagine car, en réalité, la plupart des clients restent adeptes (pour l'instant ?) d'une relation multi-canal. Exemple flagrant de cette « préférence », la mesure de la satisfaction et de la fidélisation (par la méthode du « Net Promoter Score ») fait ressortir une performance nettement plus élevée sur les approches mixtes par rapport aux utilisateurs exclusifs de l'agence ou des outils numériques.

Cependant, c'est bien encore sur les déficiences des applications mobiles que Bain suggère de faire porter les efforts. En particulier, les « défections invisibles » sont une cible de choix : un tiers des clients ont, au cours de l'année écoulée, souscrit un produit chez un concurrent, sans que leur institution primaire ne s'en aperçoive. Or, tandis que les relations personnelles, le conseiller bancaire et le site web de la banque sont privilégiés pour les recherches d'information préalables à un achat, les applications pour smartphone sont relativement absentes du paysage.

La raison ? Le mobile est encore trop peu utilisé dans les stratégies de vente multi-canal, en particulier de produits à forte valeur ajoutée (par exemple les prêts immobiliers). Les opportunités perdues de la sorte sont particulièrement dramatiques car elles concernent des clients souvent plus fidèles que la moyenne, et donc plus faciles à conquérir et plus rentables. Pour éviter cela, il « suffirait » d'intégrer dans les applications des moyens de mettre à la portée du client les solutions dont il a besoin pendant sa démarche de prospection.

Bain & Company

mardi 23 décembre 2014

AmEx analyse les données pour la bonne cause

American Express
Dans le cadre du « Financial Innovation Lab » qu'elle a récemment fondé, American Express s'apprête à lancer ses propres expérimentations en faveur de l'inclusion financière, en s'appuyant sur son offre Serve. Caution de poids, le CFPB (l'agence de protection financière des consommateurs) est associé à cette initiative.

Relativement loin des origines de la marque (et de ses cartes de paiement exclusives), le compte American Express Serve – tout comme son cousin Bluebird, développé avec la chaîne de distribution Walmart – est avant tout destiné aux américains modestes, pour lesquels il représente une solution simple, comprenant tous les services bancaires essentiels, à coût modéré. Il s'agit donc d'un terrain idéal pour étudier les comportements des consommateurs les plus fragiles vis-à-vis de leurs finances personnelles.

Les recherches qui vont être entreprises concernent l'épargne. Pour les populations ciblées, l'enjeu est immense, puisqu'une majorité de personnes en difficulté ne dispose d'aucune réserve qui leur permettrait de surmonter un coup dur, souvent parce que leurs rentrées d'argent sont variables et aléatoires (précarité de l'emploi oblige…). L'objectif des expériences d'AmEx sera donc de déterminer quels sont les facteurs qui favorisent les gestes d'épargne parmi les clients de Serve, notamment grâce aux fonctions de gestion financière déjà incluses dans ses produits.

CFPB

En perspective, l'institution vise certainement une optimisation de son offre, qui sera d'autant plus performante et profitable – pour ses clients mais aussi, et surtout, pour elle-même – que l'épargne collectée sera plus importante. Elle n'hésite cependant pas à combiner ses ambitions commerciales avec une approche plus désintéressée, en promettant de partager les résultats de ses recherches avec le CFPB, l'agence gouvernementale mise en place après la crise de 2008 afin de veiller aux intérêts des consommateurs face aux banques omnipotentes.

La démarche semble particulièrement astucieuse. Sous couvert d'une valeur (réelle) apportée aux clients – en les incitant à mettre de l'argent de côté – et d'une participation (incontestablement utile) à un effort collectif de promotion des comportements financiers sains parmi les populations défavorisées, AmEx va pouvoir s'engager dans la voie de l'analyse de données (« big data ») au service de son marketing, sans risquer (sauf accident) les foudres des consommateurs susceptibles de se rebeller contre l'exploitation de leurs informations personnelles.

Il y a peut-être là une idée à creuser (à moins qu'elle ne soit un peu trop machiavélique)…

lundi 22 décembre 2014

Diebold imagine une agence déshumanisée

Diebold
Toutes les banques à réseau, jusqu'aux plus ferventes partisanes de leur modèle, sont convaincues que leurs agences doivent évoluer pour rester pertinentes au 21ème siècle. Mais lorsque le fabricant de GAB Diebold se met à concevoir une « capsule » 100% robotisée, il est peut-être temps de remettre en question les fondamentaux…

Certes, l'idée n'est pas toute récente (elle est déjà expérimentée ou déployée depuis 2012 en Turquie, au Brésil, au Liban…) et elle est bien dans l'air du temps, la tendance actuelle étant – baisse de fréquentation oblige – à la réduction des surfaces (plusieurs banques américaines, en particulier, testent des concepts de micro-agences) et autres tentatives de mieux rentabiliser les investissements immobiliers, tout en mettant à profit les capacités nouvelles offertes par les technologies afin de réduire simultanément les coûts de personnel.

Dans cette logique, l'installation « Responsive Banking Concept » proposée par Diebold représente incontestablement l'aboutissement de tous les efforts. Sa « capsule » (« pod » en anglais) est découpée en deux espaces distincts. L'un est géré par un conseiller virtuel interactif doté d'une intelligence artificielle à la « Watson » (le système cognitif d'IBM), tandis que l'autre est – plus classiquement – une cabine de visioconférence permettant de réaliser des transactions complexes en compagnie d'un interlocuteur humain, à distance.

L'ensemble intègre une grande partie des savoir-faire du constructeur. Détection des passants et des visiteurs grâce à des balises intelligentes (« beacons »), panneaux publicitaires dynamiques et interactifs, écrans tactiles et capteurs en tout genre, notamment pour l'authentification et la réalisation d'opérations depuis son téléphone mobile, reconnaissance vocale de langage naturel et système audio directif pour garantir la confidentialité des transactions… C'est une véritable débauche de technologies à laquelle nous invite Diebold.

Capsule Diebold

Cette impression est, en réalité, tout à fait normale, puisque la « capsule » est avant tout présentée comme un démonstrateur, à partir duquel les institutions financières pourront décliner leurs propres projets, en ne retenant que les applications qui les intéressent. Toujours est-il que cette approche de l'agence entièrement déshumanisée constitue une démonstration par l'absurde des errements auxquels peut conduire une obsession du modèle de point de vente hérité d'un autre temps.

En effet, à qui peut bien s'adresser cette vision ? Certainement pas aux clients qui continuent à fréquenter leur agence parce qu'ils demandent un contact humain. Et vraisemblablement pas plus aux technophiles, qui préféreront largement profiter des mêmes services depuis leur domicile ou, mieux, sur leur smartphone. Ce n'est d'ailleurs certainement pas un hasard si les premières expériences du genre ont lieu dans des pays où une partie de la population ne dispose pas d'un accès à Internet. Encore cette situation est-elle probablement temporaire…

Voilà donc un nouvel exemple de la schizophrénie qui règne depuis quelques temps sur le monde bancaire traditionnel. Si, comme l'affirment certaines enquêtes (sur lesquelles j'exprimerai peut-être mes doutes dans un futur billet), les consommateurs attendent vraiment de leur agence des conseils en face à face, ce n'est pas l'automatisation de la relation qui va les satisfaire. La vraie réponse dans ce cas ne peut être que la formation des collaborateurs, qui en fera les experts tellement recherchés…

dimanche 21 décembre 2014

Brillant hackathon Banque Populaire !

Banque Populaire
Si la mode des hackathons se répand rapidement parmi les institutions financières du monde entier, rares sont les initiatives qui s'adressent exclusivement aux collaborateurs de l'entreprise. C'est pourtant le choix qu'ont fait les Banques Populaires pour leur première expérience en la matière et les résultats en démontrent toute la valeur.

L'idée est née il y a quelques mois au sein d'i-BP, la filiale informatique du groupe. Elle portait une ambition « simple » : rapprocher des populations – bancaires et informatiques – qui se connaissent mal et ont souvent des difficultés à communiquer au quotidien. Une problématique d'autant plus sensible dans une structure telle que celle des Banques Populaires, dispersée sur le territoire (i-BP est présente dans 5 grandes villes françaises) et composée d'une vingtaine d'établissements distincts.

Naturellement, l'organisation de ce hackathon a dû aussi composer avec ces contraintes. Le déroulement en a ainsi été découpé en 2 grandes phases. Dans un premier temps, les « banquiers » ont été invités à réfléchir et soumettre leurs idées d'innovation sur le thème retenu : l'entrée en relation. Une dizaine de propositions a été recueillie et 4 d'entre elles ont finalement été retenues, à l'occasion d'une séance de « pitches », qui s'est tenue en visioconférence le 19 novembre.

Dès lors, les projets sélectionnés étaient présentés sur le réseau social interne des Banques Populaires et les discussions pouvaient s'engager, en particulier entre les porteurs d'idées et les 20 développeurs qui devaient participer au hackathon proprement dit. Pendant un petit mois, l'ensemble des collaborateurs intéressés avaient l'opportunité d'affiner les approches envisagées et de préparer les réalisations à venir, tout en permettant à chacun de faire connaissance avec ses collègues…

Hackathon Banque Populaire

Le 15 décembre au soir, les participants étaient réunis pour le démarrage de la partie la plus intense de la manifestation. Après une courte introduction, les porteurs d'idées « métier » exposaient leur projet en quelques minutes, dans le but de séduire les développeurs et les convaincre de les rejoindre. Il était alors temps de constituer les équipes (fixées à 5 développeurs par projet). Signe de la passion ambiante, quelques-unes commençaient immédiatement à s'organiser pour la suite des événements.

Ce n'est pourtant que le lendemain que les choses sérieuses allaient commencer, car il n'était pas question de faire travailler des salariés de nuit. Le matin venu, le démarrage semblait difficile pour beaucoup des participants : par où commencer pour produire une application complète, en 2 jours, en collaboration avec des inconnus (ou presque) ? Mais il ne pouvait être question d'hésiter longtemps et, très rapidement, la mécanique s'est mise en route : définition des priorités, répartition des tâches et en avant !

Un point d'étape, sous forme de courtes présentations, permettait de mesurer le chemin parcouru à la fin de cette première journée. Beaucoup d'optimisme, d'enthousiasme et de promesses pour le lendemain… mais point de démonstration à ce stade. Il ne faisait cependant plus guère de doutes que les résultats seraient exceptionnels, tant il était évident que les projets avaient tous déjà bien progressés. Il ne restait pourtant que quelques heures pour finaliser les réalisations.

Photo de groupe du hackathon

Enfin, mercredi 17 décembre, à 15 heures, tous les développements s'interrompent et les derniers détails des présentations finales sont mis au point. Quelques minutes de « pitch » pour chacune des équipes, une session de questions-réponses avec les membres du jury (représentants des Banques Populaires, d'i-BP et de BPCE) et les délibérations commencent, longues et certainement difficiles car tous les participants se sont véritablement surpassés.

Sans entrer dans les détails, les 4 applications créées couvrent toutes les étapes de l'entrée en relation, en mixant intelligemment « digital » et humain, dans la ligne de la nouvelle image de marque des Banques Populaires, signée #LaBonneRencontre. Depuis la préparation ludique de l'entretien avec le conseiller jusqu'à l'expression de la satisfaction du client, en passant par des outils d'amélioration de la productivité et une solution originale de découverte de l'offre numérique, c'est une nouvelle approche de bout en bout qui est ainsi dessinée et déjà largement concrétisée.

Cependant, bien plus que par ces réalisations (qui seront tout de même valorisées), le hackathon a apporté aux Banques Populaires une brillante illustration des innombrables opportunités qu'offre la révolution numérique. Tout d'abord, le rapprochement entre les banquiers et les informaticiens est une réussite incontestable : les premiers ont découvert que, contrairement à leurs préjugés, les seconds sont capables de réaliser des miracles, tandis que les seconds ont eu un aperçu de ce à quoi rêvaient les premiers, sans le prisme de cahiers des charges auto-censurés et édulcorés.

D'autre part, chacun de leur côté, les développeurs se sont eux-mêmes surpris, une fois passés les doutes des premières heures, à réaliser ce dont ils ne se croyaient pas capables, alors que les personnes trop immergées dans le quotidien de leur métier se sont mises à penser « hors cadre », en imaginant comment les technologies disponibles aujourd'hui pouvaient les aider à simplifier leur vie ou celle de leurs clients.

Les dirigeants du groupe – dont Serge Matry, directeur général d'i-BP, qui s'est pris au jeu tout au long de l'événement, mais également les membres du jury et tous ceux, nombreux, qui ont fait une apparition lors des présentations – auront également assisté à une démonstration extraordinaire de l'existence de talents cachés dans la banque, de la capacité d'engagement et la passion des collaborateurs, des vertus de nouveaux modes de travail, des possibilités de l'entreprise numérique…

Tout le monde est maintenant reparti dans son environnement habituel (quelques-uns avec leur récompense), en rêvant au prochain hackathon, désormais attendu avec impatience. Mais le plus important sera d'abord de faire infuser les enseignements de cet événement dans toutes les pores de l'organisation, au jour le jour, afin de faire évoluer en profondeur la culture interne et la tourner progressivement toute entière vers l'innovation.

Les lauréats du hackathon (avec Serge Matry)

Bravo aux lauréats, à tous les participants et aux organisateurs ! Et merci de m'avoir offert l'occasion de contribuer à cette aventure enrichissante.

samedi 20 décembre 2014

AXA défie les experts des données

AXA
Alors que sa filiale Direct Assurance doit lancer sous peu une offre d'assurance automobile aux primes modulées selon le comportement du conducteur (ce qu'on appelle « pay how you drive »), AXA organise un concours pour tenter d'affûter ses algorithmes d'analyse de données, avec l'aide des « data scientists » du monde entier.

Première grande initiative visible du « Data Innovation Lab » fondé cette année par la compagnie, la compétition est hébergée sur la plate-forme Kaggle, qui devient incontournable pour ce genre de manifestations (parmi les assureurs, globalement peu nombreux, AllState a régulièrement recours à ses services depuis 3 ans). De la sorte, AXA peut immédiatement capitaliser sur une audience potentielle de plus de 200 000 membres qualifiés, spécialistes de l'analyse de données, issus d'une centaine de pays.

Les modalités pratiques du concours sont relativement classiques. Le problème à résoudre, clair et précis, est accompagné d'un jeu de données de test. Les participants soumettent les résultats de leurs algorithmes et ils obtiennent en retour un score qui en détermine la qualité sur une partie de l'échantillon fourni. Ils peuvent alors re-travailler et affiner leurs modèles, puis recommencer le processus, jusqu'à 5 fois par jour. Après 3 mois, les propositions finales seront mesurées sur l'ensemble des données, afin de désigner les lauréats, qui se partageront 30 000 dollars de récompenses.

Qu'est ce que cette compétition ?

Comme évoqué en introduction, l'objet de la compétition est directement lié à l'analyse des comportements au volant. En conséquence, les données mises à disposition des participants décrivent 200 parcours différents (sérieusement anonymisés) d'un échantillon de 2 500 automobilistes, par l'intermédiaire de la position de leur véhicule seconde par seconde. Il n'est pas difficile d'imaginer – même si rien ne le confirme – que ces informations proviennent de l'application YouDrive de Direct Assurance, dont les conditions d'utilisation précisaient les ambitions expérimentales.

A partir de ces seules caractéristiques de déplacements, la mission assignée aux experts en lice est de concevoir un modèle de « signature » capable de qualifier aussi précisément et infailliblement que possible le comportement habituel de chaque automobiliste. Pour évaluer la performance des algorithmes proposés, quelques trajets « étrangers » ont été introduits parmi les différents profils de l'échantillon fourni et l'enjeu du concours est de permettre la détection de ces « anomalies » par une simple comparaison de « signatures ».


Compétition AXA sur Kaggle

Au-delà des bases de l'assurance « pay how you drive », que la compagnie doit déjà largement maîtriser (notamment en termes de corrélation avec les risques d'accident), il s'agit donc pour AXA d'améliorer la qualité des données qu'elle utilisera dans ce cadre. Elle vise en l'occurrence à identifier les changements de conducteur sur les véhicules équipés de ses futurs capteurs de mesure de comportement. Soit pour repérer les tentatives de tricherie pour l'obtention de tarifs avantageux, soit (et c'est le plus probable) pour gérer plus finement ses contrats…

Seulement 5 jours après le démarrage de la compétition, déjà plus de 160 participants se sont inscrits et ont soumis presque 700 propositions, dont les meilleurs atteignent un score honorable (le premier au classement obtient actuellement un taux de confiance de 86%, en simplifiant un peu). Il ne fait presque aucun doute que les résultats finaux seront impressionnants et valideront sans contestation possible le potentiel du crowdsourcing pour des problématiques complexes, surtout autour de l'analyse de données…

vendredi 19 décembre 2014

Stockpile investit les pièces jaunes

Stockpile
Sans remonter jusqu'à l'opération pièces jaunes, il existe aujourd'hui une multitude de services proposant aux consommateurs d'arrondir le montant de leurs dépenses, qui pour en faire don à des associations, qui pour constituer une épargne. Avec Stockpile, il est désormais aussi possible d'investir des centimes dans sa société préférée.

A l'origine, la startup a d'abord imaginé un concept – exclusif – de bons cadeaux exprimés en valeurs boursières. En pratique, l'utilisateur choisit un titre (par exemple sa marque favorite) et la somme offerte, sans aucune contrainte. Le destinataire n'a plus qu'à s'inscrire sur la plate-forme et valider le code qui lui a été transmis avec son cadeau. Il reçoit alors les fractions d'actions correspondantes dans son portefeuille, dont il peut suivre l'évolution, et qu'il peut naturellement revendre à tout moment.

Grâce à un partenariat avec l'agrégateur de comptes Yodlee, Stockpile ajoute maintenant une nouvelle corde à son arc. Ciblant cette fois une population de petits investisseurs occasionnels (voire même seulement aspirants investisseurs), ce deuxième service va analyser les dépenses payées par carte, au jour le jour, et réaliser un arrondi virtuel de chacune d'elles au dollar supérieur. Le montant total de ces centimes de monnaie sera prélevé en fin de mois et placé automatiquement dans l'action préférée de l'utilisateur.

Accueil Stockpile

En synthèse, Stockpile est donc une solution supplémentaire d'épargne « sans douleur », dans un paysage qui en compte décidément beaucoup… Par l'intermédiaire de son approche de division des titres unitaires, elle dispose cependant d'une capacité unique d'ouvrir les marchés financiers (et leurs valeurs cotées, sans passer par des fonds) à tous les consommateurs, y compris ceux qui n'y ont généralement pas – ou pas facilement – accès, en raison des seuils d'investissement nécessaires (tout le monde ne peut s'offrir une action Google à 500 USD, sans parler des frais associés).

D'autre part, et comme pour toutes les initiatives du genre, l'objectif est également de convaincre des personnes a priori réticentes à placer leurs économies – surtout en bourse, en l'occurrence – de franchir le pas, en rendant l'opération totalement automatique et transparente. Enfin, et il s'agit là aussi d'une tendance en progression, Stockpile tente, avec une offre distinctive et fidélisante, de séduire les institutions financières, ainsi que, plus originalement, des spécialistes du couponing, des commerçants…

jeudi 18 décembre 2014

Insikt attaque le crédit à la consommation

Insikt
Après avoir fondé Progreso Financiero pour rendre le crédit plus accessible aux américains hispanophones, James Gutierrez a créé Insikt, dont la mission est d'offrir aux commerçants – petits et grands – leur propre solution de crédit à la consommation, en toute indépendance vis-à-vis des institutions financières traditionnelles.

Cette première partie de l'activité de la startup repose sur « Lendify™ », une plate-forme de « Lending as a Service » (LaaS), mise à disposition en marque blanche. Elle permet à toute entreprise – qu'il s'agisse d'une boutique, d'une chaîne de magasins, d'un site de vente en ligne ou même d'une banque qui souhaiterait élargir son champ d'action – de proposer à ses clients (particuliers) un prêt immédiat, sous sa marque, sans aucune exigence préalable d'expertise, d'investissement ou de capital.

Une spécificité de l'approche d'Insikt, issue de l'expérience acquise précédemment avec Progreso Financiero, est que son offre de prêt est accessible aux populations qui en étaient écartées jusqu'alors. En effet, au lieu d'utiliser les méthodes classiques d'évaluation du risque de défaut (basées essentiellement sur un score de crédit, réservé à une certaine élite), la société a développé ses propres algorithmes d'analyse, traitant des milliers de données issues de sources multiples et variées (dans une logique de « big data » qui se généralise actuellement).

En parallèle, la startup adopte aussi un mode de financement original. Les prêts contractés sur la plate-forme sont « titrisés » et les fonds ainsi constitués sont placés auprès d'investisseurs accrédités qui souhaitent entrer sur le marché du crédit P2P (« pair à pair ») sans s'embarrasser d'une gestion individuelle des transactions. A la fin de cette année, 4 de ces fonds auront déjà été créés ainsi que 3 autres à taux fixe, représentant un capital total de 40 millions de dollars.

Accueil Insikt

En dépit de sa jeunesse, le concept proposé par Insikt semble inspirer confiance puisque la société vient de boucler [PDF] un deuxième tour de financement de 16 millions de dollars et, surtout, d'obtenir une facilité de trésorerie de 70 millions qui lui permettra de développer ses opérations. Les participants à ce montage – qui comprennent notamment Capital One, Northeast Bank, et Silicon Valley Bank – démontrent que quelques institutions financières (au moins) prennent conscience du potentiel des modèles alternatifs de crédit et d'investissement…

Avec le lancement d'Insikt, James Gutierrez considère que les banques n'ont plus désomais de légitimité particulière à proposer leurs offres de crédit dans les commerces. Au contraire, selon lui, il devrait s'agir d'un service distribué directement par les marchands. En tout état de cause, même ceux qui ne croient pas aux approches alternatives peuvent tirer un enseignement utile de cet exemple : de plus en plus, la commercialisation des produits financiers doit s'intégrer au cœur de l'expérience du consommateur et non plus être abordée comme une fin en soi.

mercredi 17 décembre 2014

Digit, le service qui épargne à votre place

Digit
Qu'elles émanent de banques ou de startups, il existe désormais une multitude de solutions destinées à inciter les consommateurs à mettre de l'argent de côté, à grand renfort de notifications contextuelles, de techniques ludiques, d'offres promotionnelles… Une nouvelle venue, Digit, propose une autre vision : le « robot d'épargne ».

Le concept consiste à décharger totalement l'utilisateur des décisions relatives à ses économies. Pour ce faire, il va tout d'abord fournir les codes d'accès à son compte bancaire (oui, cette étape peut paraître inquiétante). Dès lors, les algorithmes de la jeune pousse vont analyser son profil et son comportement financier et, dès qu'ils le jugent opportun (si le solde est suffisant et que les dépenses prévisibles avant le prochain versement de salaire l'autorisent), transférer une partie des fonds disponibles vers un compte d'épargne, sans la moindre action de sa part.

Afin de maintenir le contact avec ses abonnés en dépit de cette automatisation, Digit leur envoie chaque jour un SMS, comprenant quelques informations sur leur situation. Le plus souvent, il rappellera le solde de leur compte, parfois il s'agira du montant mis de côté au cours de la semaine ou du mois écoulé… En complément d'un site web privatif au contenu extrêmement sobre (simplicité oblige !), l'ensemble des opérations est accessible par le biais de commandes SMS, notamment la fonction de retrait qui permet d'effectuer à tout moment un virement depuis la cagnotte vers le compte courant.

Accueil Digit

Avec son épargne sans intérêts, Digit ne s'adresse évidemment pas à la minorité de personnes qui gèrent leurs économies activement. Au contraire, l'objectif de Digit est de donner la possibilité de se créer une petite réserve d'argent à tous ceux – et ils sont nombreux ! – qui ne parviennent pas à s'astreindre à la discipline nécessaire pour le faire eux-mêmes. Comme l'explique Ryan Lawler dans un article pour TechCrunch, les 1 000 dollars mis de côté pour lui ne représentent pas grand chose mais ce sont 1 000 dollars de plus que ce qui lui resterait s'il n'utilisait pas le service.

De manière générale, les innombrables solutions d'épargne actuelles, proposées en particulier sous la forme d'applications mobiles, tentent – avec plus ou moins de succès – de convaincre leurs utilisateurs de gérer leurs économies alors qu'ils y sont peu enclins naturellement. Plutôt que de chercher vainement à lutter contre cette tendance passive et laxiste des consommateurs, Digit adopte donc une approche pro-active de substitution, en leur proposant de laisser un « robot » (intelligent) prendre les décisions à leur place.

Si le dispositif mis en œuvre est relativement sécurisé, il requiert tout de même une confiance quasi-aveugle de la part des nouveaux inscrits. Afin de lever ce handicap, ainsi que dans un but de rationalisation de son fonctionnement, Digit est en passe d'intégrer sa solution avec une banque partenaire. En réalité, il est presque évident que, pour séduire largement sa cible d'utilisateurs, un outil de ce genre devrait être proposé par une institution financière… Il constituerait alors un extraordinaire premier pas dans la direction de services immergés dans la vie quotidienne des clients.

mardi 16 décembre 2014

BBVA acquiert une startup des big data

BBVA
Tandis que la plupart des grandes institutions financières commencent tout juste à s'éveiller aux enjeux de la transformation numérique, quelques pionnières passent déjà à la vitesse supérieure, pour rester au contact des exigences de leurs clients. Parmi ces dernières, BBVA mise sur des acquisitions pour accélérer sa mutation.

Après le rachat de la « néo-banque » Simple au début de l'année, qui doit l'aider à appréhender une vision différente de ses métiers (d'abord aux États-Unis), le groupe espagnol vient d'annoncer l'intégration dans son portefeuille de Madiva, une « startup », madrilène. Avec cette deuxième opération, l'objectif que vise officiellement BBVA est de renforcer immédiatement ses capacités dans le domaine émergent des « big data », dans la perspective d'adapter au mieux ses produits et solutions aux attentes des consommateurs.

La jeune société – fondée en 2008 – a en effet développé une offre de services innovante dans ce domaine, largement reconnue par les nombreuses compagnies d'assurance et banques qui lui font confiance. Sa proposition de valeur consiste à créer des opportunités commerciales grâce à l'analyse de données, structurées ou non, issues des multiples sources du monde numérique. A l'instar de Simple, Madiva conservera son autonomie dans son nouvel environnement, le seul changement d'importance pour elle étant que BBVA deviendra un client privilégié.

Accueil Madiva

La cible choisie par la banque pour poursuivre sa stratégie d'acquisition ne doit rien au hasard. Parmi les grandes tendances du moment, les « big data » sont universellement considérées comme une des plus prometteuses, notamment dans le secteur financier. Or, il s'agit d'une discipline qui requiert des compétences rares et il s'avère donc extrêmement délicat pour les entreprises de monter en puissance seules. Celles qui, comme BBVA, estiment que le sujet est prioritaire et urgent n'ont alors d'autre choix qu'une acquisition (probablement au prix fort).

Cette approche sera certainement tentante pour bien d'autres acteurs confrontés aux mêmes difficultés. Elle n'est (hélas !) pas adaptée à tous les cas. Si la banque espagnole peut raisonnablement espérer que la greffe prenne, ce n'est pas uniquement parce qu'elle laisse son indépendance à Madiva. Sa véritable force, qui a d'ailleurs certainement constitué un critère déterminant dans la conclusion de la transaction, est d'avoir su au préalable faire évoluer sa culture, qui la rend capable de travailler efficacement avec des approches disruptives. Ce qui n'est pas à la portée de toutes ses consœurs…

lundi 15 décembre 2014

La banque qui ressemblerait à Amazon…

Amazon
Il y a quelques semaines, un analyste de Celent nous invitait à imaginer une compagnie d'assurance telle qu'elle serait créée aujourd'hui, à partir d'une campagne sur Kickstarter. Cette fois, nous nous attarderons sur un exercice similaire dans le domaine bancaire, réalisé par un responsable de l'éditeur de logiciels Temenos.

Les prémices de la réflexion de John Schlesinger sont simples : les grandes institutions financières sont régulièrement alertées sur les risques d'obsolescence des systèmes informatiques qui gèrent le « coeur » de leurs activités – au point que certains régulateurs esquissent la menace d'exigences directes en la matière – mais elles ne semblent pas prendre conscience de l'urgence qu'il y a à réagir. Afin de frapper les esprits, il propose de dessiner la banque qui serait conçue en partant d'une feuille blanche et en s'inspirant d'un modèle d'entreprise numérique comme Amazon.

Sans retracer l'histoire en détail, les faits sont là. Aux débuts de l'informatique, la relation client reposait exclusivement sur les agences et les conseillers. Sont alors apparus les distributeurs de billet, qui se sont rapidement transformés en « guichets automatiques » et ont commencé à remplacer les caissiers d'antan. Puis Internet est né et s'est développé, amplifiant la tendance. Plus récemment, le mobile est arrivé, dépassant les contacts en agence en un an là où il en a fallu 10 pour le web (dans certains établissements). Or les systèmes n'ont fondamentalement pas changé.

Alors, que devrait être une banque au 21ème siècle ? Sa première caractéristique serait d'être entièrement centrée sur le service aux clients et non plus orientée sur son organisation et ses processus internes. De la même façon qu'Amazon sait me recommander des produits en fonction de l'historique de mes achats et de ma navigation, mon conseiller financier (humain ou non) devrait se souvenir de toutes mes interactions, via tous les médias disponibles (web, mobile, agence, centre d'appel…), et pouvoir ainsi répondre à mes besoins avant que je ne les exprime.

Deuxième changement d'importance, les coûts seraient clairs et transparents et la banque saurait se satisfaire de faibles marges. Il n'est résolument pas question de viser la gratuité (réelle ou factice) : les consommateurs sont prêts à payer pour les services qu'ils obtiennent, à partir du moment où il les ont choisis, qu'ils en connaissent le prix, sans la moindre ambiguïté, et qu'ils le considèrent raisonnable pour leur besoin. En parallèle, toute l'offre doit être accessible là où se trouve le client, à tout moment, sans jamais exiger qu'il se rende dans une agence.

Côté informatique, les applications seraient adaptées aux nouveaux comportements de leurs utilisateurs – dont les plus nombreux sont les clients et non les collaborateurs. Alors que ces derniers y recourent principalement pour enregistrer des transactions, les internautes et les mobinautes les sollicitent dorénavant à une écrasante majorité pour consulter des informations (peut-être 5 000 accès pour 1 transaction exécutée). Dans le prolongement de cette logique, il ne devrait plus exister aucun traitement « batch » et toutes les opérations devraient être enregistrées et validées immédiatement (ou presque), sans la moindre interruption, comme lorsqu'on passe une commande sur internet.

Je vois déjà les cheveux se hérisser sur la tête des banquiers traditionalistes à la lecture de ces lignes : tout ceci n'est que divagation et serait rigoureusement impossible à mettre en œuvre… Et pourtant, y a-t-il réellement tant de différences entre une banque et Amazon, qui justifieraient que ce que le second est capable de faire (avec succès) se trouverait inaccessible à la première ?

Aurore ou crépuscule ?

dimanche 14 décembre 2014

BNP Paribas s'immerge dans les crypto-devises

BNP Paribas
En cette fin de semaine maussade du mois de décembre 2014, une fièvre particulière s'est emparée d'une quarantaine de collaborateurs de BNP Paribas Securities Services (BP2S), rassemblés au tout nouvel AntiCafé Innovation parisien. Leurs symptômes ? Une obsession des crypto-monnaies et une idée fixe : inventer leurs futurs métiers…

Alors que le monde entier s'emballe pour le bitcoin et ses dérivés, les institutions financières commencent naturellement à s'y intéresser de près, afin d'identifier à la fois les menaces qu'ils font peser sur elles et les opportunités qu'ils pourraient leur offrir. À ce jour, les réflexions restent souvent théoriques et les initiatives concrètes sont rares et discrètes. Pour BP2S (filiale en charge de la gestion de titres dans le groupe BNP Paribas), même s'il n'est pas question de brûler les étapes, l'ambition est de développer de nouvelles activités ou d'ouvrir ses métiers existants à la révolution à venir.

Pour répondre à ce défi, les collaborateurs de toutes spécialités étaient donc invités à imaginer comment pouvaient s'immiscer les crypto-monnaies dans les produits et services de l'entreprise. Bien entendu, avant de se lancer, il était indispensable pour les participants de comprendre le sujet à traiter, il est vrai relativement complexe. Une demie-journée a ainsi d'abord été consacrée à une présentation du protocole bitcoin, de ses utilisations actuelles (intervention assurée par mes soins) ou encore de ses enjeux juridiques et réglementaires.

Cette première partie s'est conclue lors d'un « Meetup Bitcoin », accueilli par Google. Outre une présentation technique (assurée par Pierre Noizat, de Paymium), 3 startups (Brawker, Ledger Wallet et Paymium) y « pitchaient » leurs solutions. Cette séance riche procurait une occasion – unique pour la plupart des participants de BP2S – de mieux s'imprégner de la culture et du dynamisme de ces jeunes entrepreneurs et de l'écosystème des crypto-monnaies. Elle devait représenter une importante source d'inspiration pour l'exercice qui les attendait le lendemain matin.

Hackathon BNP Paribas Securities Services

Vendredi, dès 9 heures, commençaient (enfin !) les choses sérieuses. Répartis sur 4 tables thématiques, les récents convertis aux vertus de la « blockchain » commençaient à plancher, accompagnés par une poignée d'animateurs et d'experts (dont je faisais partie, en toute modestie). A partir d'une petite revue informelle des éléments importants du concept, il s'agissait d'examiner à la loupe les cas d'usages possibles dans les métiers de BP2S et d'en tirer un « business model » aussi complet et précis que possible.

Aussi étonnant que cela puisse paraître, la recette fonctionne ! Les équipes se prennent réellement au jeu, avec sérieux, et s'approprient les principes des crypto-monnaies avec une agilité impressionnante pour, ensuite, les décliner dans leur environnement professionnel quotidien. Les spécialistes techniques et juridiques sont régulièrement sollicités afin de confirmer (ou non) la viabilité et la faisabilité des idées émises, suggérant parfois une piste alternative qui fait rebondir les imaginations dans une autre direction…

En fin de journée, 4 projets – plus ou moins élaborés – seront présentés, en quelques minutes chacun. On parle alors de l'introduction de la monnaie Bitcoin dans les activités de BP2S – par exemple la création d'une ligne métier centrée sur la gestion des risques liés aux crypto-monnaies ou la simplification des problématiques de règlements en devises – et de l'utilisation de la « blockchain » en vue de sécuriser et simplifier les opérations existantes – notamment dans la transmission des instructions des clients.

L'événement est maintenant terminé, chacun rentre chez soi et retournera lundi à ses occupations habituelles. Mais la graine qui a été semée ne l'aura pas été en vain. D'une part, une quarantaine de personnes ont désormais une vision un petit peu différente de leur métier et de leur entreprise. D'autre part, les idées qui ont pris forme seront approfondies et mûries, avec ceux qui les ont concoctées, et tout sera fait pour qu'elles aboutissent. Nouveaux produits ou services, évolutions dans les processus…? Une deuxième phase commence…

Réflexions sur les métiers de BNP Paribas Securities Services

Bravo à Philippe et Johann pour une belle idée, magnifiquement concrétisée !

samedi 13 décembre 2014

Une app pour épargner sur les dépenses inutiles

First direct Saveapp
La longue lignée des applications mobiles dédiées à l'« épargne d'impulsion » – initiée en 2011 par Westpac – semble décidément vouée à ne jamais cesser de susciter de nouvelles variantes. La dernière déclinaison en date est celle de First Direct (filiale 100% en ligne de HSBC), qui introduit une fonction que je suggérais il y a 2 ans…

Dans une approche relativement originale en soi, « Saveapp » prend le parti de combiner dans un même logiciel la planification de projets d'épargne et les gestes quotidiens d'économie, ressemblant ainsi à un mélange d'ImpulseSave et des « petits sacrifices » d'ING (Canada). La mise en route comprend deux étapes simples. Tout d'abord, il faut décrire la cible fixée pour les économies futures, en indiquant une catégorie (voyage, voiture, gadget…), un montant, une échéance et, éventuellement, une photo.

Seconde étape de la configuration, l'utilisateur choisit les « mauvaises » habitudes dont il souhaite se débarrasser afin de mettre de l'argent de côté. Les options proposées sont des actes de la vie courante, de l'expresso quotidien aux téléchargements, en passant par les repas au restaurant, les verres pris au pub, les magazines… Enfin, il lui restera un dernier détail à régler : définir les alertes qui lui rappelleront ses résolutions. Il peut s'agir, trivialement, d'une alarme à heure fixe (par exemple tous les jours de la semaine à midi, au moment de sélectionner le lieu de son déjeuner…).

Saveapp sur iPhone

Cependant, il est également possible d'adopter une approche alternative, basée sur une technique de « geofencing ». Dans ce cas, il suffit de déterminer une zone géographique (peut-être le pub où les collègues se réunissent régulièrement le soir ?) pour que l'application émette une notification à son approche. La maîtrise du budget devient ainsi contextuelle et réactive, avec une petite touche ludique. Il ne resterait qu'à ajouter à l'ensemble un mécanisme d'analyse des comportements récurrents du consommateur pour la rendre entièrement automatique…

« Saveapp » n'est malheureusement pas exempte de défauts. Décision particulièrement regrettable à mon sens, First Direct a préféré concevoir une solution accessible à tous les mobinautes plutôt qu'à ses seuls clients. En conséquence, elle n'intègre aucune connexion directe aux comptes de l'utilisateur et les économies réalisées doivent donc être saisies manuellement. En fait, il lui manque la composante d'épargne d'impulsion proprement dite, qui la rendrait réellement efficace et addictive…

Quoi qu'il en soit, la réalisation de First Direct représente un intéressant premier pas vers la prochaine génération d'applications financières mobiles, centrées sur les besoins des individus et intimement imbriquées dans leur vie quotidienne. L'incitation à l'épargne constitue naturellement un terrain d'expérimentation sans risques pour ce faire. Par la suite, bien d'autres fonctions pourraient prendre la même voie, si ces premières tentatives sont couronnées de succès…