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C'est pas mon idée !

mercredi 31 octobre 2012

Société Générale teste un nouveau jeu éducatif

Tirelire connectée
L'an dernier, Société Générale avait déjà lancé abcBanque, un espace ludo-éducatif autour du thème de l'argent, destiné aux jeunes enfants. Aujourd'hui, la banque lance une nouvelle expérimentation sur une cible similaire, mais avec une approche un peu plus concrète, grâce à la tirelire interactive du canadien Ekomini.

L'annonce est apparue sur SG & Vous, la plate-forme de co-création de l'établissement, et se présente résolument comme un test limité : 50 participants pourront recevoir (gratuitement) une de ces fameuses tirelires et accéder au site associé pendant 6 mois (espérons tout de même que tout ne sera pas fermé à l'issue de cette période). Ces premiers utilisateurs seront naturellement invités à partager leur expérience, ce qui aidera probablement à décider de l'avenir de l'opération.

Mais comment tout cela fonctionne-t-il donc ? Le cœur du dispositif est d'abord une tirelire, équipée d'un système de reconnaissance de pièces de monnaie, qui devra être connectée (via un câble USB) à un PC. Le jeune utilisateur doit ensuite se rendre (avec son navigateur web préféré) sur le site dédié et y créer un compte. Dès lors, chaque fois qu'il glisse une pièce dans la tirelire, le total de son contenu est maintenu à jour (il est aussi possible d'ajouter des billets, mais ils devront être enregistrés manuellement).

Par rapport à d'autres approches éducatives, l'introduction d'une tirelire stockant des pièces sonnantes et trébuchantes a certainement la vertu, pour les enfants, de rendre plus concrètes les "leçons" de gestion de finances personnelles qui leur sont proposées.

Ecran Ekominiville

La deuxième composante (selon la présentation qu'en fait Ekomini, le partenaire de Société Générale pour l'occasion) est donc un site web, privatif, où l'enfant aura accès à différentes activités. Dans un espace conçu comme une ville virtuelle, il pourra notamment découvrir et apprendre à gérer son argent et à épargner, sous une forme ludique, ou encore mettre en pratique ses connaissances avec les économies qu'il a placées dans sa tirelire.

Il sera ainsi incité à préparer son "budget", en répartissant les fonds disponibles entre ses dépenses, des dons à des associations et son épargne. Dans cette dernière rubrique, une interface lui permet de créer ses "objectifs" (avec une description et un montant cible), dont il suivra ensuite les progrès au fur et à mesure de l'allocation de ses économies à leur réalisation.

Les parents disposent également de leur propre compte sur la plate-forme, afin de suivre les progrès de leur progéniture et, si nécessaire, intervenir pour, par exemple, ajuster les objectifs fixés.

Société Générale prend soin de préciser que le site associé à la tirelire n'a aucune vocation commerciale. En revanche, en cas d'extension de l'expérimentation, et comme le suggère Ekomini dans sa proposition de partenariat aux institutions financières, une initiative de ce genre n'est pas dénuée d'intérêt pour une banque : elle permet de multiplier les points de contact avec ses clients, d'établir une première relation avec les enfants, de fidéliser leurs parents... tout en favorisant l'éducation financière.

mardi 30 octobre 2012

Socialware qualifie les prospects dans le graphe social

Socialware
Si toutes les grandes entreprises ont désormais une stratégie sur les médias sociaux, celle-ci reste généralement assez empirique et probablement embryonnaire. Dans la majorité des cas, même avec les outillages les plus élaborés, elle se résume à deux axes principaux : surveiller la réputation et engager une conversation porteuse de valeur avec les internautes.

Le domaine est encore émergent et il ne fait aucun doute que de nouvelles approches pour "exploiter" le potentiel des réseaux sociaux vont continuer à se développer. Socialware est l'un des premiers à s'aventurer hors des sentiers battus. La startup proposait jusqu'à maintenant une plate-forme dédiée aux institutions financières, leur permettant d'ouvrir la porte des médias sociaux à leurs employés, tout en assurant le respect de la réglementation en vigueur (enregistrement et traçabilité des échanges) et des politiques internes (contrôle a priori des messages publiés).

Cette offre, directement positionnée sur l'axe "engagement des internautes", s'enrichit maintenant d'une nouvelle dimension d'"écoute", dont l'objectif est de capitaliser sur les relations de l'utilisateur (et non sur la totalité du web social, comme c'est le cas dans le suivi de réputation). Concrètement, en analysant les conversations des contacts du conseiller, le système va pouvoir automatiquement émettre des alertes lorsque son réseau bruisse des échos d'un mariage, d'une naissance à venir, d'un changement d'emploi...

Or, ces évènements majeurs sont souvent aussi l'occasion d'une évolution dans le portefeuille financier des personnes concernées, par exemple la réalloacation des priorités du patrimoine, la souscription d'une assurance vie ou l'ouverture d'un plan pour la retraite... Le conseiller disposera ainsi d'un tableau de bord lui présentant automatiquement les opportunités de contact qualifiées au sein de son graphe social. Bénéfice supplémentaire, une relation initiée à l'occasion d'une date importante de la vie a toutes les chances d'être durable.

Listening gets personal

Les "mécanismes" sociaux mis en œuvre par Socialware ne sont pas nouveaux, puisqu'ils correspondent peu ou prou aux pratiques habituelles de générations de conseillers, qui établissent, dans le monde réel, une relation (un peu) personnelle avec leurs clients et en "jouent" dans leur rôle professionnel.

La transposition de ce modèle sur les réseaux sociaux en ligne ne va cependant pas sans risques, d'abord de maladresses, car les relations virtuelles sont plus délicates à gérer que les rencontres en face à face, et aussi celui de susciter des réactions virulentes à l'automatisation sous-jacente, qui pourrait être perçue comme une violation de la vie privée. Comme toujours avec ce qui touche aux médias sociaux, il faudra avancer avec prudence dans l'utilisation de solutions telles que celle de Socialware.

Il est vrai que le danger est encore lointain pour la plupart des institutions financières, qui n'osent toujours pas laisser leurs collaborateurs (conseillers, agents...) dialoguer avec leurs clients et prospects sur Facebook ou Twitter... Mais, à celles-là, l'exemple qu'offrent Socialware et les 125 clients de ses produits pourrait ouvrir les yeux !

lundi 29 octobre 2012

Gartner lance la saison des prédictions 2013

Prédictions
Avec une certaine avance sur son calendrier habituel, Gartner révèle ses nouvelles prédictions sur le secteur informatique pour les quelques années à venir. Contrairement à la récente liste des 10 technologies stratégiques pour 2013, cette boule de cristal nous réserve quelques surprises...

En préambule, Daryl Plummer, qui présentait les prédictions lors du Symposium à Orlando la semaine passée, rappelle les incertitudes qu'affrontent les DSI, alors qu'ils doivent continuer à répondre aux exigences de leur direction générale, notamment en termes de disponibilité et de fiabilité des systèmes, tout en ayant à coordonner un spectre d'activités qui dépasse de plus en plus largement le périmètre sur lequel ils exercent traditionnellement leur contrôle.

Passons maintenant en revue les prédictions les plus intéressantes (avec ma touche personnelle, comme d'habitude)...

Les entreprises bouderont Windows 8

Microsoft est aujourd'hui à la croisée des chemins : le monde a basculé du PC, où ses systèmes régnaient en maîtres incontestés, au mobile (smartphones et tablettes), où sa présence est marginale. De ce fait, Windows 8, qui tente de jouer la convergence des deux univers, est une tentative de reprendre la main, un peu à quitte ou double.

Windows 8

Or, pour les analystes de Gartner, 90% des entreprises éviteront un déploiement à grande échelle de cette nouvelle édition du système d'exploitation, au moins jusqu'à 2015. La prudence qui prédomine toujours vis-à-vis de logiciels trop jeunes s'ajoute à la (probablement coûteuse) révolution de l'expérience utilisateur de Windows 8 pour repousser au maximum l'échéance.

Cette estimation représente une nouvelle d'autant plus mauvaise pour Microsoft que ses espoirs d'imposer son OS mobile dans l'entreprise seront également affectés, puisque les collaborateurs ne pourront bénéficier de toutes les synergies mises en avant par la stratégie de convergence de l'éditeur...

Les "big data" souffriront d'une pénurie de talents

Même pour celles qui considèrent que "big data" est surtout un effet de mode, l'analyse de données et le décisionnel (ou encore la "business intelligence") sont de plus en plus indispensables au fonctionnement de toutes les entreprises, générant des bénéfices tangibles, tant financiers que sous la forme d'avantages compétitifs.

Cependant, les nouvelles technologies qui accompagnent cette tendance réclament des expertises rares et diverses, de la gestion de données à la connaissance du métier de l'entreprise en passant par les calculs statistiques, mais aussi par des savoir-faire plus originaux, telles que les qualités artistiques et de design utiles pour la représentation visuelle des données.

A l'horizon de 2015, Gartner estime que les besoins des entreprises dans ce domaine atteindront 4,4 millions d'emplois potentiels, dont seulement 1/3 pourront être effectivement pourvus, faute de talents disponibles.

Les appareils personnels des employés seront infestés de malwares

Le concept "BYOD" ("Bring Your Own Device"), qui voit les collaborateurs des entreprises utiliser leurs propres appareils dans le cadre professionnel, se répand et semble désormais irréversible. Mais la sécurité de ces équipements est souvent lacunaire et leur risque d'infection croîtra à un rythme 2 fois plus élevé que les matériels fournis (et contrôlés) par l'entreprise.

Pour lutter contre ce danger, la sécurité informatique doit se déplacer vers le réseau, à travers des mécanismes qui autorisent ou bloquent l'accès au Système d'Information selon une politique de sélection rigoureuse. Il sera également nécessaire de surveiller en permanence les annonces de nouvelles vulnérabilité pour adapter les protections en quasi temps réel.

La ludification s'imposera pour accompagner les réorganisations

Environ 70% des réorganisations (profondes) d'entreprise échouent, à des degrés divers. La cause principale en est le manque d'adhésion des collaborateurs. D'après les analystes de Gartner, les approches de ludification seraient adoptées par 40% des plus grandes organisations mondiales (les "Global 1000") , d'ici 2015, pour lutter contre ce phénomène.

Attention, il ne s'agit pas de transformer les bureaux en terrain de jeu. L'idée est plutôt d'appliquer des techniques ludiques – présentation de défis, visibilité des résultats et récompenses, par exemple – pour améliorer la transparence et favoriser l'engagement de tous, afin de rendre explicite (et incitatif) l'effet des actions de chacun sur l'atteinte de l'objectif fixé.

Le marché des services informatiques va être bouleversé

Entre autres forces de disruption, l'émergence d'une offre "cloud" bon marché va mettre à mal une partie significative des fournisseurs "traditionnels" de services informatiques. Dans les 2 ans à venir, 15% de leurs revenus pourraient ainsi être cannibalisés et plus de 20% des sociétés du secteur seraient susceptibles de disparaître, via des fusions et acquisitions.

Les entreprises les plus fragiles seront celles qui n'investissent pas suffisamment dans l'industrialisation et dans l'apport de valeur ajoutée. En particulier, les solutions actuelles d'offshoring et de nearshoring seront menacées par l'apparition de nouvelles options locales à bas coût ou, inversement, par la globalisation des effectifs.

Les DSI devraient donc soigneusement évaluer les types de services auxquels ils ont recours et leurs fournisseurs actuels, et s'intéresser à ceux qui s'appuient déjà sur le "cloud computing".


Entre la (relative) disparition programmée de Windows, la transformation promise des services informatiques ou l'apparition de nouveaux paradigmes dans le Système d'Information, qu'il s'agisse de mobile, de ludification ou de "big data", les prochaines années, telles que nous les dessine Gartner, nous promettent des révolutions passionnantes à suivre...

dimanche 28 octobre 2012

Brèves : une semaine dans les paiements

L'actualité des paiements continue à se déverser sans discontinuer. Mais ce sont de plus en plus souvent les mêmes recettes, parfois archaïques, qui ressortent et l'innovation semble progressivement marquer le pas dans le secteur. Signe de cet "apaisement", quelques acteurs historiques commencent à apparaître sur le devant de la scène (sans nécessairement convaincre, cependant).


Dwolla MassPay
Dwolla est, depuis quelques temps, l'acteur qui monte dans le secteur des paiements (aux États-Unis), grâce à une solution qui veut rompre avec le statu quo en tentant de prendre la place des grands réseaux (Visa, MasterCard...). Cette option lui permet d'afficher des tarifs particulièrement alléchants et de défier le géant PayPal.

Dans la guerre qui l'oppose à son grand concurrent, la startup vient d'engager une nouvelle bataille avec le lancement, encore expérimental à ce stade, d'une option de paiement "de masse". Celle-ci permet de réaliser en une opération une série de règlements à destination d'un maximum de 2000 bénéficiaires. Dwolla peut ainsi offrir une solution intéressante aux professionnels qui doivent rémunérer une multitude de fournisseurs ou d'employés et attaquer de cette manière une nouvelle cible de clientèle.


PEX Card
Quand les banques ont tendance à négliger leur clientèle professionnelle, cela crée des opportunités pour de jeunes pousses. C'est le cas de PEX Card, qui innove dans le domaine des cartes "corporate" avec une approche prépayée spécifiquement adaptée à un contexte d'entreprise.

Le principe en est astucieux. Tout d'abord, l'organisation dispose d'un compte (prépayé) unique qu'elle alimente à volonté. Ensuite, elle attribue une carte de paiement à chacun des collaborateurs concernés. La dernière pièce du puzzle est une application en ligne à partir de laquelle l'administrateur va allouer, dynamiquement, les fonds disponibles à chacun des porteurs en fonction des dépenses qu'il aura à réaliser.

Le système intéressera particulièrement les PME qui souhaitent simplifier la gestion des frais professionnels de leurs collaborateurs mais hésitent à distribuer des cartes de crédit classiques. Le marché est sans nul doute important et a de sérieuses chances d'être séduit par la proposition de PEX Card.


Scavenger Shop par Social Cubix
Bien que je sois toujours aussi sceptique quant à l'intérêt des cartes "programmables" de Dynamics, les applications qu'elles suscitent démontrent une créativité intéressante. Dernier cas en date, l'éditeur de jeux sociaux Social Cubix prévoit de lancer un jeu dont l'avancement et le score seront conditionnés par les dépenses effectuées.

Cette nouvelle application ne révolutionnera peut-être pas le monde des paiements mais, avec d'autres, elle a au moins le mérite de démontrer la valeur qu'apporte à un écosystème son ouverture aux développeurs tiers. Car c'est bien depuis qu'elle a franchi le pas que Dynamics peut se vanter d'attirer l'attention avec des déclinaisons originales de son concept de base.


ISIS
Presque 2 ans après sa première annonce, l'initiative ISIS des principaux opérateurs de télécommunication américains voit enfin le jour, avec le lancement d'un pilote à Austin (Texas) et Salt Lake City (Utah).

Typique des tentatives de promotion du paiement sans contact (NFC), celle-ci a multiplié les délais et les retards, pour finalement accoucher d'une souris, expérimentale et sans les services à valeur ajoutée promis initialement.

Et s'il restait encore des optimistes, je conseille la consultation des étapes de la procédure à suivre pour participer à l'expérience : tout d'abord, outre l'exigence d'être basé dans une des deux villes citées, il faudra également être propriétaire d'un des 9 modèles de mobiles supportés (bien évidemment, l'iPhone n'en fait pas partie). Ensuite, il faudra demander une carte SIM spéciale à son opérateur et télécharger l'application ISIS. Pour finir, il restera à configurer dans cette dernière une carte de crédit compatible (American Express, Capital One ou Chase) ou à utiliser la carte prépayée fournie automatiquement.

Tout cela pour quoi ? Pour pouvoir payer avec son téléphone dans environ 400 boutiques dans chacune des 2 villes pilotes ! Qui peut prendre une telle farce au sérieux ?


Natural Security
La toile française s'en est largement fait l'écho : l'hexagone est le théâtre d'une des premières implantations à grande échelle de "paiement biométrique", via une expérience lancée par Auchan, dans une grande surface de la région lilloise, avec la jeune pousse Natural Security (dans laquelle elle a d'ailleurs une participation financière).

Par rapport à d'autres, la technologie retenue ici présente l'avantage d'être compatible avec les exigences de protection des données personnelles (en particulier celles de la CNIL), car les informations biométriques restent toujours en possession de l'utilisateur. En effet, elles sont enregistrées sur une carte, à laquelle le lecteur du commerçant se connecte (par réseau sans fil au standard Zigbee, apparemment) pour authentifier l'image capturée du réseau veineux du doigt du client.

Malheureusement, dans son incarnation actuelle, la solution est peu pratique, même si elle facilite réellement l'acte de paiement. En effet, le client devra toujours avoir sur lui sa carte et l'étui l'accompagnant, qui lui fournit l'énergie nécessaire pour fonctionner, et dont il faudra s'assurer qu'il est bien chargé... Il faudra donc attendre une autre génération pour un système vraiment opérationnel. Peut-être sur mobile (et en Bluetooth) ?


Moneo
En dépit du gigantesque flop qu'il a connu depuis son démarrage en 1999, Moneo continue à survivre, bon an mal an. Sa dernière "innovation" s'appelle "Moneo Resto" et consiste à transférer les titres repas imprimés sur une carte de paiement, comme cela existe dans d'autres pays (par exemple en Belgique).

Il semblerait que cette avancée n'ait jamais pu se produire plus tôt en France en raison d'une législation ambiguë. Cependant, quitte à faire un pas en avant, on aurait pu espérer une transition directe vers les technologies du 21ème siècle (le mobile ?). Las, les traditions de Moneo ont la vie dure...


SEPAMail
Dans le même esprit d'innovation à retardement, 5 grandes banques françaises (BPCE, Crédit Mutuel - CIC, BNP Paribas, Société Générale et Crédit Agricole) ont annoncé une initiative commune en vue de faciliter le paiement électronique de factures, basée sur la messagerie sécurisée SEPAMail.

Alors que le paiement de factures au sein des services de banque en ligne est, depuis des années, une fonction standard dans une majorité de pays développés, il y n'y a pas ici de quoi pavoiser. D'autant plus qu'il s'en faut encore beaucoup de voir une quelconque généralisation à ce qui est présenté comme une expérimentation, à laquelle il semblerait que les grands facturiers n'aient même pas encore commencé à adhérer...

samedi 27 octobre 2012

Comment Citi a créé une expérience unique sur iPad

Citibank
Plus d'un an après son lancement, l'application pour iPad de Citi reste (presque) unique par l'expérience utilisateur qu'elle offre à ses clients, parfaitement adaptée à la tablette et à ses usages. Dans une présentation [PDF] (trouvée par hasard), le directeur de la stratégie mobile de la banque décrit la démarche adoptée pour atteindre un tel résultat.

Ce qui fait la différence dans la réalisation de Citi, c'est qu'elle n'est ni une déclinaison des services de banque en ligne traditionnels ni une adaptation pour grand écran de son application pour smartphone. Le hasard n'est pour rien dans ce choix car, avant de la dessiner, ses concepteurs ont pris le temps d'analyser les habitudes des utilisateurs d'iPad et de réfléchir à la meilleure manière de s'inscrire dans celles-ci.

Première étape, une revue du marché (que j'actualise à aujourd'hui) : 100 millions d'iPad ont été vendus dans le monde, les appareils sous Android commencent à prendre des parts de marché significatives et Microsoft arrive maintenant avec Windows 8 et sa "Surface". Conséquence, Citi estime qu'en 2012 les ventes de tablettes atteindront presque le niveau des PC portables et d'autres analystes projettent les mêmes tendances. Pour achever de convaincre les sceptiques, il s'avère que les utilisateurs sont en moyenne jeunes, nantis et ont de nombreux produits bancaires : une cible rêvée !

Il est donc impératif pour la banque de se positionner sur ce créneau, qui devient rapidement incontournable.

Vient ensuite l'indispensable étude des usages et comportements. Les tablettes sont principalement utilisées pour la navigation web (notamment sur les réseaux sociaux), la consommation de contenus, les jeux vidéos... L'attitude est beaucoup plus engagée, réflective et, dans un sens, détendue, par opposition au smartphone, dédié à l'exécution d'actions.

A partir de ces données, Citi s'est posée 4 questions déterminantes pour établir sa stratégie :
  • Comment apporter de la valeur aux clients ?
  • Comment capitaliser sur la disposition d'esprit de l'utilisateur de tablette ?
  • Comment exploiter le format spécifique de l'appareil ?
  • A quel vitesse est-on capable de réaliser cela ?
Et le résultat des cogitations a abouti a une exigence prioritaire, donner du plaisir au client, à laquelle vient s'ajouter une volonté de développer l'engagement en permettant l'analyse des finances et la gestion de budget, soutenue par une forte mise à contribution des capacités graphiques et tactiles du matériel (notamment dans la visualisation des données).

Citibank

Pour réussir son pari d'une mise à disposition rapide, Citi n'a créé aucun nouveau service d'accès aux données bancaires et ce sont donc les interfaces utilisées sur les autres canaux (restitution des soldes, de l'historique des transactions...) qui sont exploitées telles quelles dans cette application, pour présenter la même information sous une forme nouvelle.

Au vu des réactions des critiques mais aussi, et surtout, des clients, l'effort en valait la peine. Pour beaucoup, Citi a réussi à créer une application qui répond réellement aux attentes de ses utilisateurs. Et les mesures effectuées confirment cette impression : l'engagement est beaucoup plus important que sur smartphone, plus de 3/4 des utilisateurs passent du temps sur plus de 3 écrans lors de chaque session... La banque a même noté que des milliers de clients ouvrent leur premier accès de banque à distance avec cette application !

Pour terminer sa présentation, le directeur de la stratégie mobile revient également sur les motivations qui ont conduit Citi à ré-appliquer une partie des leçons apprises sur iPad à ses services en ligne. La logique est imparable : les tablettes vont progressivement supplanter les PC (en volume de ventes) et leur premier usage est la navigation web. Il faut donc au moins s'assurer que les sites et applications fonctionnent correctement sur ces appareils, en particulier vis-à-vis des interactions tactiles. Une fois ce premier pas franchi, il ne faut pas hésiter à revisiter entièrement les paradigmes du web en s'écartant, par exemple, des modèles de navigation séquentielle.

L'application pour iPad de Citi (déclinée depuis sur Kindle Fire, entre autres) était en soi une magnifique source d'inspiration pour les banques qui en sont encore à répliquer sur tablette leurs services en ligne. Dorénavant, la méthode employée pour obtenir ce résultat est révélée à tous et constitue elle-même un incontestable modèle à suivre.

vendredi 26 octobre 2012

Tribed ou la banque de niche

Tribed
Le concept de "longue traîne" (long tail) caractérise la stratégie de distribution consistant à vendre un nombre immense d'articles uniques, chacun en petite quantité. Il a fait, par exemple, le succès d'Amazon et sa librairie de plusieurs millions de titres comme celui de Google et son modèle de réseau publicitaire ciblant petits annonceurs et micro-sites web. La startup américaine Tribed a été conçue pour décliner cette idée dans le secteur financier et sa première incarnation est Wag, une banque pour les amoureux des chiens.

Ouverte en beta privée, Wag ne propose pour l'instant à ses clients qu'un simple compte courant en ligne, géré par un établissement partenaire. Mais son objectif principal n'est pas de développer une offre de produits particulièrement riche. La cible est en effet plutôt de rassembler une communauté de passionnés autour d'une plate-forme sur laquelle l'argent n'a qu'une petite place et où les échanges sur le thème canin sont au contraire mis en avant.

En pratique, les clients partagent des conseils sur leurs amis à 4 pattes, via des articles ouverts aux commentaires et discussions tandis qu'un profil Facebook constitue un autre support de dialogue. De son côté, la "banque" apporte sa contribution (financière) à des associations spécialisées et offre des promotions sur des articles pour chiens. La logique adoptée est ainsi d'offrir les mêmes services qu'un autre établissement, en les focalisant sur la passion que les clients ont en commun.

Wag

Finalement, Wag est, en quelque sorte, un réseau social spécialisé auquel a été greffé un compte bancaire. L'arrimage est assez artificiel mais il peut, a minima, séduire une frange de "fanatiques". Et cela correspond justement à la cible de Tribed : au-delà des amoureux des chiens, d'autres passions (les amateurs de vin...) auront bientôt leur banque, comme il pourra aussi y en avoir pour des hobbies (les cyclistes acharnés...) ou pour des grandes étapes de la vie (étudiants, retraités...).

Dans la mesure où chacune d'entre elles sera "animée" avec sincérité, les consommateurs pourront être séduits par un établissement leur proposant une véritable relation (même en ligne), avec leur banquier et avec les autres clients, qu'ils ne trouveront jamais dans les grandes institutions traditionnelles (mais qui, aux États-Unis, existent tout de même déjà sous la forme de Credit Unions).

Quoi qu'il en soit, pour la startup, cette multiplication des "versions" de son modèle, chacune comptant relativement peu de clients, peut finir par représenter un modèle économique globalement viable, si elle sait maîtriser les coûts marginaux de chaque itération (ce qui est devenu possible aujourd'hui, grâce aux technologies). On retrouve bien là le principe de la "longue traîne".

Je terminerai ce billet en attribuant un prix de l'humour à Tribed, à la fois pour avoir nommé "Wag" sa banque de la "Long Tail" (en anglais "the dog wags its tail" est "un chien qui remue la queue") et, plus involontairement, pour avoir dédié sa première déclinaison de "niche bancaire" aux amoureux des chiens !

jeudi 25 octobre 2012

La Caixa met la bourse en musique

La Caixa Stock Music
Malgré les plus de 60 "applications" mobiles qu'elle a déjà à son actif, La Caixa ne ralentit pas le rythme et continue à produire de nouveaux titres, plus ou moins utiles, mais explorant toujours plus avant les frontières de l'innovation. Sa dernière réalisation en date, baptisée "Stock Music" représente un exemple typique de ces aventures un peu extrêmes...

Disponible uniquement pour Android, "Stock Music" propose à ses utilisateurs (tous les mobinautes peuvent la télécharger [lien Google Play]) de rester informés des tendances de la bourse, simplement en écoutant leur musique préférée. Il ne s'agit résolument pas d'une application très élaborée : une fois réalisé le choix de l'indice ou du titre à suivre, à chaque mise à jour de son cours (toutes les 15 minutes), le volume sonore du morceau en cours de diffusion est modulé en fonction de son orientation, à la hausse ou à la baisse.

Stock Music

L'objectif n'est donc clairement pas, au moins à ce stade, de créer l'application du siècle. Il faut plutôt voir "Stock Music" comme une véritable expérimentation, destinée à dépasser les concepts classiques de la banque mobile, afin, peut-être, de déclencher de nouvelles idées plus pertinentes, en interne ou à l'extérieur de l'entreprise (puisqu'il existe une certaine parenté de cette application avec l'une de celles qui avaient été récompensées lors de la FinAppsParty de 2011, qui générait une mélodie selon les évolutions de la bourse).

Certes, le résultat est totalement déconcertant et, selon toutes probabilités, sa publication est aussi partiellement justifiée par la volonté de La Caixa de poursuivre l'extension de son fameux AppStore. Le concept sous-jacent à "Stock Music" n'est cependant pas entièrement dénué d'intérêt : mixer une expérience de "loisir" avec un service financier sérieux est une approche qui n'a encore été que rarement abordée par les banques et qui pourrait aider à persuader une frange de clients de s'intéresser à la bourse (dans le cas d'espèce).

Plus généralement, quoi qu'on puisse penser de l'application (et il n'y a pas de quoi s'extasier), la démarche de La Caixa s'inscrit dans la perspective de l'émergence d'une deuxième génération de solutions, conçues exclusivement pour le mobile et mettant en œuvre ses spécificités, dans des combinaisons qui ne seront pas toutes intuitives au premier abord. Le smartphone étant voué à devenir, à terme, le premier canal d'interaction des consommateurs avec leur banque, ce sont les idées radicales de demain, à imaginer dès aujourd'hui, qui feront la différence pour séduire les clients...

mercredi 24 octobre 2012

Le Crédit Mutuel Arkéa apprivoise les "big data"

Crédit Mutuel Arkéa
Les "big data" sont indubitablement à la mode depuis quelques mois mais, une fois les exagérations des éditeurs écartées, les implémentations réelles et opérationnelles s'avèrent relativement rares. Après un premier cas (modeste) identifié en début d'année, le Crédit Mutuel Arkéa révèle quelques détails de son initiative, beaucoup plus ambitieuse.

Le projet a en fait été lancé en 2009, dans un mode apparemment expérimental, avec une équipe réduite. Sans surprise, le constat de l'immense volume de données existantes, mais non exploitées, a été le principal déclencheur des réflexions initiales. Celles-ci ont abouti à la création d'un entrepôt de données centralisé basé sur une infrastructure Hadoop (l'archétype des solutions "big data"), connecté à une multitude de sources d'information hétérogènes.

En effet, l'objectif est bien de concentrer toute l'information au sein d'une plate-forme unique et transverse. Et cela comprend aussi bien des données de transactions bancaires, stockées sur les grands systèmes (mainframes), que des mails ou des discussions sur les réseaux sociaux, qu'ils concernent les domaines métiers (comptes, emprunts...) ou des éléments techniques (journaux et traces des logiciels...).

Plusieurs applications sont désormais en production (ou en passe de l'être) et elles reflètent bien cette diversité. Deux d'entre elles touchent au domaine des risques, plus précisément la lutte anti-blanchiment et les calculs de ratios de solvabilité. Dans les deux cas, les gains de productivité sont gigantesques : la première est capable d'analyser 6 mois d'historique en 20 secondes et la deuxième traite l'intégralité de la base client en 1/4 d'heure là où le système existant prenait 48 heures pour analyser un échantillon.

Dans un domaine beaucoup plus technique mais tout aussi critique, un outil de supervision des infrastructures, prenant en compte des indicateurs de toutes natures (au niveau des logiciels et matériels informatiques comme du métier), devrait permettre d'améliorer la qualité de service globale.

Pour terminer ce tour d'horizon, les clients ne sont pas oubliés puisqu'ils peuvent profiter d'un accès à 10 ans d'historique de leurs transactions, via un moteur de recherche plein texte. Une double nouveauté qui pourrait transformer la gestion des finances personnelles (un peu comme [Bank] Simple tente de la dessiner depuis quelques mois).

Après la phase pionnière, qui a vu la mise en place une infrastructure d'un peu plus d'une centaine de machines et dotée d'une capacité de 800 To, un centre d'expertise est en cours de constitution pour accompagner les projets. Et ceux-ci devraient arriver rapidement puisque les idées se bousculent, de l'analyse des commentaires libres dans les formulaires à l'exploitation des données de navigation sur le web pour affiner les ciblages marketing, par exemple...

A ce stade de la démonstration, les bénéfices de l'approche "big data", qui s'étendent sur différents axes, sont déjà évidents : accélération des traitements existants (lutte anti-blanchiment), création d'offres différenciantes (banque en ligne), amélioration de la pertinence des techniques en place (stratégie marketing)... A ceux-là, il faudra aussi ajouter les avantages, encore "invisibles", découlant notamment de l'accès universel offert à toutes les données de l'entreprise, sous toutes leurs formes.

Enfin, pour enfoncer le clou, les coûts du projet du Crédit Mutuel Arkéa ont probablement de quoi faire pâlir toutes les spécialistes du décisionnel "classique", car, outre les ressources humaines qui y ont été consacrées (1,5 personnes pendant 24 mois), la totalité de l'infrastructure matérielle représente un investissement de moins d'1 million d'euros. En regard des bénéfices affichés, le seuil de rentabilité doit pouvoir être atteint en un temps record !

Certes, la mise en œuvre complète du système a probablement été plus complexe que ne le laisse entrevoir cet aperçu et il reste à affronter la difficulté que représente l'exploitation pertinente des masses de données ainsi accumulées (qui requiert des spécialistes, rares sur le marché de l'emploi). Mais, alors que la plupart des institutions financières en sont encore à écrire des notes de prospective sur le sujet "big data" ou, au mieux, à lancer des pilotes, le Crédit Mutuel Arkéa prouve qu'il est possible de passer à l'action dès aujourd'hui et pourrait aussi démontrer très rapidement que ces technologies sont capables de lui procurer un avantage concurrentiel considérable.

Information repérée grâce à N. Guillaume (merci !)

mardi 23 octobre 2012

Gartner : 10 technologies stratégiques pour 2013

Stratégie
Chaque année, le mois d'octobre nous amène, avec la régularité immuable des saisons, le top 10 des technologies stratégiques du cabinet Gartner. Pour mémoire, cette sélection nous propose de nous arrêter sur les thèmes qui auront un impact significatif sur une majorité d'entreprises à partir de 2013, et qui devraient donc être au cœur des préoccupations de leurs DSI.

Comme d'habitude, l'édition de cette année est une évolution de la précédente, avec quelques changements notables mais sans réel bouleversement. A la source des technologies (individuelles) retenues dans sa liste annuelle, Gartner perçoit néanmoins une combinaison ("nexus") de forces convergentes – mobile, social, cloud et information – qui est en train de révolutionner les sociétés et les entreprises, suscitant l'émergence de nouveaux leaders.

Bataille des appareils mobiles
Du côté des terminaux, les tendances actuelles vont s'amplifier. Le téléphone mobile va devenir, dès l'an prochain, le premier moyen d'accès au web (au niveau mondial). En 2015, les tablettes représenteront la moitié des ventes de PC portables et Windows n'en équipera qu'une minorité. En parallèle, il sera impossible d'empêcher les collaborateurs d'utiliser leur(s) propres(s) matériel(s). Tous ces facteurs tendent vers un constat incontournable : l'ère du poste de travail universel sous Windows touche à sa fin et les organisations doivent s'adapter à un environnement sans équipement standard.

Applications mobiles et HTML5
Le débat fait déjà rage dans les entreprises mais il est impossible à trancher, pour l'instant et pour les quelques années qui viennent. Aucune architecture de développement d'applications mobiles ne peut aujourd'hui prétendre couvrir tous les besoins. Les technologies "HTML5" prendront de l'importance grâce à leur capacité à rivaliser avec la richesse des applications "natives", mais celles-ci continueront à exister encore longtemps. En attendant, il est critique pour les développeurs de cultiver les compétences spécialisées, trop rares aujourd'hui, indispensables à la production d'applications parfaitement adaptées au mobile.

AppStore d'entreprise
Avec la diversité des équipements utilisés dans l'entreprise, vient naturellement la problématique de distribution des applications. Les AppStores, supposés répondre à ce défi, sont généralement restreints à une seule plate-forme et induisent donc des casse-tête de multiplication et d'hétérogénéité des boutiques, des modes de paiement, des clauses de licences... La solution passera par la mise en place d'AppStores privés, qui transformeront les organisations informatiques en conseillers et intermédiaires et non plus (seulement) en fournisseurs.

Internet des objets
Sujet récurrent depuis plusieurs années, l'internet des objets prend progressivement de l'ampleur, dans sa définition comme dans la réalité. Il couvre désormais non seulement les innombrables capteurs connectés qui peuplent le monde autour de nous mais également les capacités de "connexion d'objet" qu'offrent les appareils photographiques des mobiles (avec les applications de reconnaissance de forme). A cet ensemble déjà large, il faut encore ajouter les multiples options de connectivité des appareils (cellulaire, WiFi, Bluetooth, NFC...). Les opportunités de nouvelles applications deviennent ainsi inépuisables !

Big data stratégique
Dans une vision peut-être un peu optimiste, Gartner estime que, depuis son utilisation actuelle dans des projets ponctuels et tactiques, "big data" est déjà en passe de devenir une brique de la stratégie de l'information ou, a minima, d'influencer l'évolution des approches. L'accroissement actuel des volumes, de la vélocité, de la variété et de la complexité des données tendrait ainsi à remettre en cause le concept de datawarehouse unique d'entreprise, pour l'éclater en multiples systèmes hétérogènes, fédérés en un entrepôt de données logique.

Décisionnel "actionnable"
Grâce à leurs progrès en termes de performance et de coût, les outils décisionnels deviennent accessibles au plus près de "l'action" et "en contexte", toujours prêts pour réaliser analyses et simulations avant exécution de la moindre action. Le développement de clients mobiles accroît encore cette capacité en la rendant disponible en tout lieu et à tout moment.

Calcul "en mémoire"
La possibilité offerte par les technologies "en mémoire" de réaliser en quelques secondes ou minutes des traitements qui prenaient autrefois plusieurs heures – permettant par exemple d'exécuter en parallèle des applications transactionnelles et analytiques, sur les mêmes informations – ouvre d'autres perspectives, telles que, par exemple, la détection en temps réel de tendances au sein de millions d'événements générés par les systèmes existants.

Cloud et informatique hybride
Du côté des DSI, le cloud progresse en maturité. Progressivement, les décideurs se rendent compte de la responsabilité qui leur incombe de veiller au fonctionnement optimal des services complexes et hétérogènes mis en œuvre (par eux ou par d'autres) dans leur entreprise ou avec ses partenaires. Ils y gagnent au passage une influence et une légitimité renouvelée là où leur rôle semblait menacé jusqu'à maintenant.

Cloud personnel
Première manifestation massive d'adoption du cloud computing, l'usage qu'en ont les consommateurs va en faire le centre de leur vie numérique et le nœud unique d'accès à toutes leurs informations depuis tous leurs appareils. L'impact pour les entreprises sera lié à la transition des préoccupations (de sécurité, par exemple) du terminal (matériel) vers les services dans les nuages.

Écosystèmes intégrés
Cette tendance est observable dans différents domaines, des mega-vendeurs de solutions d'infrastructure (IBM, Oracle...) aux écosystèmes mobiles (de Google, Apple...) et se traduit par une intégration des systèmes en packages complets et homogènes. L'utilisateur en retire une plus grande facilité d'utilisation et une amélioration de la sécurité mais laisse, en contrepartie, le fournisseur prendre un contrôle plus important.

En synthèse et pour revenir sur le "nexus" de Gartner, mobile et information (le décisionnel) constitueront les deux priorités du DSI en 2013. La préoccupation pour le premier sera d'abord d'intégrer des appareils étrangers dans le SI dans l'entreprise. Pour le second, il s'agira de démocratiser l'accès aux nouvelles solutions analytiques, dans tous les recoins des organisations. Le cloud commencera à gagner ses galons de technologie respectable, sans rupture majeure en vue. En revanche, le thème "social" est singulièrement absent de cette liste...

Et, finalement, cette édition du top 10 des technologies stratégiques s'avère décevante par son (relatif) conformisme...

lundi 22 octobre 2012

Une autre raison de moderniser les vieux systèmes informatiques

Financial Services Authority
En général, lorsque j'aborde ici les initiatives de modernisation des systèmes (informatiques) "cœurs" des banques (par exemple au Crédit Agricole ou à CommBank), c'est pour souligner l'impératif d'adapter les services bancaires au monde "temps réel" d'aujourd'hui. Mais il s'avère que d'autres raisons peuvent aussi entrer en ligne de compte, directement liées à l'obsolescence des applications historiques.

La FSA ("Financial Services Authority", le régulateur du secteur financier en Grande-Bretagne) en a donné tout récemment un exemple flagrant, en infligeant une amende de 4,2 millions de livres sterling à la "Bank of Scotland" (BOS), motivée par l'incapacité de cette dernière à tenir correctement à jour les informations des prêts hypothécaires de ses clients.

L'affaire fait presque figure de cas d'école : les données concernées sont stockées sur 2 systèmes différents et leur synchronisation repose sur des procédures manuelles (oui, des personnes chargées de ressaisir les informations de l'un dans l'autre), qui ne sont pas toujours respectées. Résultat, la banque se trouve dans l'impossibilité de déterminer avec certitude lesquels parmi 250 000 de ses clients sont éligibles à un taux variable plafonné. Ceux qui sont lésés se plaignent sur les forums de consommateurs, la FSA s'en inquiète, enquête et découvre que les anomalies courent depuis 2004 (jusqu'en 2011) !

Pour tous les banquiers du monde, il est facile de jeter la pierre à la BOS, en jurant qu'un tel incident serait impossible chez eux. Pourtant, la plupart d'entre elles ont accumulé 40 ans de logiciels de diverses générations, qui, loin de se substituer les uns aux autres, ne font en général que s'empiler en couches, pour aboutir à un mille-feuilles incroyablement complexe dont l'équilibre (souvent tenu par une poignée de "sachants") est d'autant plus fragile que chacune des strates est plus ou moins bien maîtrisée et entretenue...

Et même si ces systèmes ne génèrent pas des anomalies aussi grossières que celle de la malheureuse écossaise (qui restent malgré tout très plausibles), les inefficacités inhérentes à une telle infrastructure sont colossales. Il devient difficile de tout contrôler, les erreurs passent donc inaperçues et, à chaque nouveauté introduite (peut-être une nouvelle exigence réglementaire ?), les risques de dérives s'amplifient et le désastre se rapproche.

Certes, l'amende de la FSA est une goutte d'eau par rapport aux budgets que représentent les grands chantiers de rénovation (estimés à une fourchette comprise entre 500 millions et 1 milliard d'euros pour Crédit Agricole et CommBank), mais il faut y ajouter l'impact de l'affaire sur l'image de marque de la banque ainsi que les interventions d'urgence nécessaires à colmater les "fuites" les plus urgentes (qui sont probablement assurées par de coûteuses "petites mains" chargées de combler les lacunes des applications).

Il n'y a aucune chance que la situation s'améliore d'elle même. Au contraire, plus le temps passe, plus le navire prendra l'eau et plus les charges induites par le statu quo progresseront... Voilà donc une bonne raison supplémentaire de prendre le taureau par les cornes et d'envisager rapidement l'inévitable modernisation à venir !

dimanche 21 octobre 2012

Forrester : quel avenir pour l'agence bancaire ?

Agence bancaire
Les études et rapports qui prédisent régulièrement leur disparition prochaine sont certainement exagérés mais il est incontestable que les agences bancaires vont devoir subir de profondes transformations pour survivre au 21ème siècle. Auke Douwe Veenstra (Forrester Research) rappelle, dans un billet de blog, quelques évidences à ce sujet.

Son analyse commence par un constat évident : les implantations physiques coûtent extrêmement cher aux banques, notamment en personnel, alors que l'utilisation des canaux en libre service les remplace progressivement pour nombre d'opérations.

Les interactions de clients avec leur établissement sont depuis déjà longtemps bien plus nombreuses sur le web. Les applications mobiles sont désormais aussi en voie de dépasser les déplacements en agences, y compris en Espagne (comme le soulignait La Caixa en août dernier), pays où, pourtant, un taux record de presque 50% de consommateurs continuent à rendre visite à leur banque au moins une fois par mois.

Bien entendu, la rencontre avec un conseiller (humain) ne disparaîtra pas entièrement (du moins pas immédiatement), d'une part parce que des réglementations archaïques imposent parfois des échanges "physiques" et, d'autre part, parce que, pour certains consommateurs et pour certaines décisions importantes, un contact direct reste indispensable.

Mais ces motifs de visite transforment le rôle des agences, tel qu'il est envisagé depuis "toujours". Et, pour les banques qui n'ont pas encore pris la mesure de la révolution en cours, une seule question, qui n'est pas purement rhétorique, devrait être posée d'urgence : que deviendront leurs implantations locales lorsque, comme aux Pays-Bas, leurs clients ne seront plus que 7% à s'y rendre régulièrement ?

Agence Citibank à Tokyo

Pour l'analyste de Forrester, le salut passe par une rénovation des agences, principalement technologique, avec kiosques interactifs, GABs ("Guichets Automatiques de Banque") intelligents, équipements de visioconférence... Il s'agit d'ailleurs d'une vision globalement partagée, s'il faut en croire la multiplication des agences concept dans le monde entier, avec leur débauche d'écrans et autres gadgets numériques en tous genres.

Certes, une telle approche s'accorde parfaitement avec un objectif de réduction des coûts, notamment de personnel. Mais répond-elle vraiment aux attentes des clients ? Je ne le crois pas : quand ils préfèrent utiliser le web et, surtout, le mobile pour gérer leurs finances, c'est d'abord pour pouvoir le faire où et quand ils le souhaitent et non parce qu'ils préfèrent interagir avec un écran plutôt qu'avec un conseiller. Il est donc douteux qu'ils aient envie de se rendre dans une agence pour y réaliser des transactions accessibles sur leur téléphone ou à leur domicile.

En revanche, le besoin de conseil pour des actes importants ou, exemple plus anecdotique, pour être initié à l'utilisation des outils en ligne, est l'axe qui devrait être privilégié pour la transformation de la relation "physique", à la fois pour l'aménagement des lieux et pour la formation des conseillers, qui seront appelés à devenir des experts des opérations complexes. La technologie mise en œuvre ne sera certainement pas l'aspect le plus important de cette agence du futur !

samedi 20 octobre 2012

ReadyForZero : le PFM passe à l'action !

ReadyForZero
Jusqu'à maintenant, la gestion de finances personnelles (PFM), qu'elle soit proposée par des banques ou par des startups indépendantes, se limite généralement à de (magnifiques) représentations graphiques de l'historique des transactions réalisées et quelques options permettant de définir un budget pour l'avenir, en fonction des tendances passées.

Pour l'immense majorité des consommateurs qui peinent à suivre leurs dépenses, cela constitue déjà une avancée considérable. Mais, comme le rappelle Yann Ranchère ("Tekfin") dans un article récent, ces mêmes personnes n'ont souvent pas les connaissances de base d'une gestion de compte avisée et la plupart des outils actuels ne les aident en rien à combler cette lacune.

C'est là une opportunité que les fournisseurs de solutions de PFM doivent impérativement saisir, s'ils veulent continuer à séduire leurs utilisateurs. A défaut, ceux-ci risquent en effet de se lasser rapidement de voir leur situation financière continuer à se dégrader, en dépit des efforts qu'ils consacrent à respecter un budget soigneusement élaboré. Pour ce faire, les produits devraient offrir des conseils pratiques (et objectifs, naturellement), composés en fonction des données accumulées. D'un point de vue technique, une telle ambition semble largement accessible.

Dans un domaine spécialisé, la startup ReadyForZero représente une parfaite illustration de la direction que pourrait prendre ce PFM du futur. Son idée est née d'un constat : les consommateurs américains utilisent une multitude de cartes de crédit, sur lesquelles ils accumulent les dettes sans chercher (en général) à optimiser leurs paiements pour réduire les intérêts dûs. Le service propose donc de rassembler automatiquement les informations sur tous les comptes détenus, à partir desquelles des recommandations de remboursement peuvent être émises.

Cerise sur le gâteau, la dernière nouveauté introduite avec "ReadyForZero Plus" permet désormais d'exécuter les ordres de virement directement depuis le site. Il devient alors possible, en quelques clics de souris, par exemple, d'être notifié de l'arrivée d'un dépôt exceptionnel sur un compte courant, le message étant accompagné d'une recommandation de transférer une partie de la somme reçue vers une carte de crédit, et de réaliser immédiatement la transaction correspondante.

ReadyForZero Plus

Le cycle est complet et entièrement intégré : depuis la collecte des données, en passant par l'analyse et la recommandation personnalisée, jusqu'à l'exécution finale de l'opération qui fera économiser quelques frais faciles à éviter. Il s'agit exactement, dans un périmètre restreint, de ce que devrait être la gestion de finances personnelles à l'ère de l'automatisation.

Accessoirement, ReadyForZero estime que ses utilisateurs sont prêts à payer (4,95 $ par mois) pour son option "Plus". Si cette hypothèse se vérifie, elle pourrait esquisser un nouveau modèle pour les outils de PFM aujourd'hui gratuits.

S'ils étaient consultés, les consommateurs considéreraient très certainement que ce type de service devrait leur être fourni par les banques. Pour celles, de plus en plus nombreuses, qui promettent transparence et mise en avant des intérêts du client, une telle approche, probablement déclinable dans d'autres domaines que la carte de crédit, pourrait constituer un pas dans la bonne direction. Peut-être même pourrait-il être envisagé des cas où l'automatisation totale (sans aucune intervention humaine) serait judicieuse.

Encore faudra-t-il, pour des conseils réellement pertinents, qu'elles acceptent d'agréger les données issues de multiples comptes, y compris d'établissements tiers. En attendant, les acteurs indépendants peuvent tenter de prendre l'avantage...

vendredi 19 octobre 2012

L'innovation technologique selon Sberbank

Sberbank
Sberbank, première banque de Russie (et d'Europe de l'Est), a lancé en 2010 une grande offensive sur le terrain de l'innovation, avec la création d'un centre de recherche et développement (R&D) et la constitution d'un "Conseil de l'Innovation Technologique". Son responsable, Mircea Mihaescu, en décrit les détails sur son blog, dans une retranscription d'une interview donnée à un magazine russe...

En 6 mois d'existence (l'article date de février), le centre de R&D a été mis sur pied, avec une stratégie formalisée, une équipe (presque) complète et des processus définis. Quelques premiers projets ont pu être menés à terme, de l'idée jusqu'à l'industrialisation, en passant par des phases d'expérimentation. L'un de ceux-ci, exemplaire de la démarche adoptée et de ses cycles de 3 à 12 mois, ciblait une rénovation des services de banque en ligne.

Le concept consistait à proposer un espace personnalisable au client, qui lui permette d'avoir un accès rapide aux informations qu'il juge importante et de masquer ce qu'il n'utilise pas. En quelques semaines, une solution spécialisée a été retenue (il s'agit du portail et des widgets de BackBase) et une maquette (avec des données fictives) était créée et présentée. La transformation en un vrai pilote, connecté au Système d'Information (SI) de la banque, a abouti environ 4 mois plus tard. L'étape suivante est la proposition de passage en production, qui marque la fin de la période d'incubation.

Pour 2012, l'équipe de Mircea a planifié une vingtaine de projets, sur 4 domaines principaux. Le premier est celui des "big data", sur lequel Sberbank souhaiterait faire partie des pionniers. L'objectif initial est de collecter toute l'information générée par la banque, pour l'analyser et produire ainsi toutes sortes de résultats, permettant de réduire les coûts, d'améliorer les offres, mieux connaître les clients... Très rapidement, les données internes pourraient être complétées de celles que les consommateurs publient sur les médias sociaux, s'ils acceptent de les partager avec la banque.

Autre sujet d'intérêt, beaucoup plus technologique, le "cloud computing" est abordé par la création d'un nuage privé, qui serait parfaitement justifié au vu de la dimension de la banque. Vient ensuite une vision baptisée "Bank 2.0", en référence à l'ouvrage de Brett King, qui explore les technologies émergentes (réseaux sociaux, traitement du langage naturel... en l'occurrence) et en recherche les applications pour la banque. Et le quatrième axe de réflexion est le paiement mobile, pour lequel les expérimentations sont plutôt présentées comme des "bouteilles à la mer", servant à déterminer ce qui est acceptable ou pas par les consommateurs.

S'il est intéressant de connaître les thèmes de prédilection d'un directeur de l'innovation d'une grande banque, l'organisation qu'il décrit est, malgré tout, relativement classique. Ce qui l'est moins est l'autre versant de sa stratégie, concrétisé par la constitution d'un fonds de capital risque, doté initialement de 100 millions de dollars.

Le raisonnement qui a présidé à ce choix est tout à fait logique : lorsque la banque adopte la technologie d'une startup, elle offre à celle-ci, de fait, une source de revenu, une validation de son modèle et une référence prestigieuse, ce qui en fait presque automatiquement une opportunité intéressante d'investissement. Qui plus est, la réalisation d'un pilote en amont de la relation représente la meilleure des due diligences pour évaluer le potentiel de la société.

Mircea explique également, à travers des exemples, la technique à 3 degrés qu'il utilise pour repérer les technologies susceptibles de faire partie de sa sélection. Il cite ainsi les rapports "cool technologies to watch" du Gartner pour les sociétés relativement avancées, les conférences telles que Finovate, lui permettant de rencontrer celles qui ont un produit fini à présenter et les concours de startups, dont il fait parfois partie du jury, lui donnant l'occasion de voir des projets en émergence.

Cette initiative de capital-risque est encore en rodage, mais Sberbank souhaite déjà prolonger cet effort, d'ici 2 ou 3 ans, en portant le fonds à 700 millions de dollars, en partenariat avec d'autres grands établissements qui ne seraient pas en concurrence directe. Sont notamment évoqués les noms de Bank of America, Santander, Agricultural Bank of China mais aussi, de manière moins précise, deux banques françaises...

Les grands départements d'innovation et autres centres de R&D suscitent généralement ma méfiance par la tendance presque inexorable qu'ont leurs membres à perdre, à moyen terme, le contact avec la réalité de la banque et, le cas échéant, de son Système d'Information. Le cas de Sberbank ne fait pas exception (son expérimentation des cartes de Dynamics laisse un peu craindre le pire) et il faudra une vraie perméabilité avec son "Conseil de l'Innovation Technologique", où tous les métiers sont représentés, pour éviter les dérives.

En revanche, l'approche combinant expérimentation et mise en œuvre de technologies émergentes avec une stratégie d'investissement dans les startups prometteuses est tout à fait digne d'intérêt. Bien qu'elle semble naturelle, je n'ai en effet pas l'impression qu'il s'agisse d'une pratique courante, à tout le moins avec cette relation étroite établie entre les 2 pans de la relation et dans cette logique de généralisation, via un fonds dédié. Les "investisseurs" comme les "innovateurs" devraient sortir gagnants d'un tel mariage.

jeudi 18 octobre 2012

V.me sur le chemin du cimetière ?

V.me
Annoncé, longtemps après ses concurrents, au printemps 2011, puis lancé en version beta un an plus tard, avec plusieurs mois de retard sur son planning initial, le porte-monnaie virtuel de Visa surgit une fois de plus dans l'actualité, pour signaler son adoption par une banque (PNC Bank). Cependant, malgré ce sursaut, il reste difficile de voir un avenir radieux pour V.me...

Certes, la solution est immédiatement proposée à 1,2 millions de clients de l'offre Virtual Wallet de PNC (en dépit de ce que nom pourrait laisser penser il ne s'agit que d'un compte en ligne), pour être ensuite étendue, courant 2013, aux détenteurs des 6,3 millions de comptes gérés par l'établissement. Malheureusement, une fois l'inscription (simple) effectuée, les utilisateurs découvriront que V.me n'est utilisable que sur une poignée de sites de commerce en ligne américains (23, précisément, au 15 octobre).

La proposition de valeur du porte-monnaie virtuel de Visa étant par ailleurs limitée, il est difficile d'imaginer qu'elle devienne rapidement la solution de paiement préférée des consommateurs. En effet, outre une utilisation réservée aux achats en ligne (alors qu'elle devait initialement permettre également échanges d'argent P2P et paiements de proximité, dont il n'est désormais plus question), son principal avantage est son mode de fonctionnement en "relais".

Démonstration V.me (PNC)

Celui-ci permet d'associer plusieurs cartes (Visa ou autres) au compte V.me – la sélection de celle sur laquelle est imputé un achat se faisant au moment du règlement – et d'automatiser la transmission des coordonnées de paiement et de livraison derrière la simple saisie de l'adresse mail et du mot de passe de l'utilisateur. Le surcroît de confort n'est pas négligeable mais, dans la jungle des nouvelles solutions de paiement, ce n'est plus un critère de différenciation.

Le cumul catastrophique de travers et de faiblesses depuis son annonce font de V.me un cas d'école qui aura, à mon avis, beaucoup de mal à survivre à ces prémices. Le premier handicap, prévisible dès le début et presque inévitable pour une entreprise telle que Visa, est son inertie : annonce prématurée, retard gigantesque du démarrage, tentative de séduire les développeurs (pourtant une bonne idée) sans produit sur le marché et sans date ferme de lancement, communication très épisodique pendant tout ce temps... Tous ces délais sont trop longs, d'au moins un ordre de grandeur !

Ensuite, il y a la réduction de périmètre, détruisant une grande partie de l'intérêt initial suscité par le produit, qui se retrouve finalement réduit à un marché déjà extrêmement encombré (le e-commerce), où Visa se fait attaquer, d'un côté, par des acteurs qui visent à réduire les coûts et, de l'autre, par des offres plus riches et plus étendues. Ajoutons encore la stratégie basée sur une recherche de partenariats avec des banques, qui, pour les plus importantes, ont leurs propres solutions concurrentes ou, pour les autres, préfèrent s'engager avec des startups moins "envahissantes".

En résumé : pas de valeur perceptible pour les consommateurs (les fonctions proposées sont trop limitées), pas de différenciation significative pour les commerçants et une cible d'intermédiaires difficile à atteindre. La recette est un peu amère... Pour ne prendre qu'un exemple, il suffit de comparer cette approche à celle de Dwolla, la jeune pousse disruptive qui monte (actuellement), pour mesurer l'écart qui sépare le succès du naufrage prévisible.

L'innovation, surtout dans un secteur aussi bouillonnant que les paiements, est décidément un exercice difficile pour une entreprise "historique". Le cas de V.me le démontre à nouveau : les tentatives qui restent ancrées dans les "traditions" (de délais, de prudence, de timidité, de conformisme...) des institutions financières sont presque inexorablement vouées à l'échec.

mercredi 17 octobre 2012

Les géants technologiques domineront-ils la banque de demain ?

Gartner
Il est souvent question de l'irruption imminente des géants technologiques (Apple, Facebook, Google...) sur les plates-bandes des banques. Selon les analystes de Gartner qui se sont penchés sur le sujet, cette hypothèse n'a en fait que peu de chances (risques ?) de se réaliser. Mais ces acteurs vont malgré tout marquer profondément l'évolution du secteur financier dans le futur.

Avec la place prépondérante que prend internet dans la relation client et les quelques premières incursions des leaders de l'internet sur leur terrain, en particulier dans le domaine des paiements, l'avenir des banques traditionnelles, avec leurs immenses réseaux d'agence, peut être facilement mis en doute.

Il est vrai que les Apple, Facebook, Google... ont quelques atouts à faire valoir, s'ils décident de s'attaquer à la forteresse des banques. Leur première force est, évidemment, leur agilité incomparable, autant dans le domaine technologique que dans leur capacité à étendre et faire évoluer leurs modèles d'affaires, y compris, si nécessaire, en s'appuyant sur des partenariats intelligents. Plus spécifiquement, ils sont également les maîtres incontestés de la gestion et de l'analyse de données (en masse), qui deviennent très rapidement des leviers de croissance dans le secteur de la finance.

Carte iBank (Apple)

Cependant, tout n'est pas à leur avantage. Pour commencer, en termes de sécurité, ces acteurs sont généralement bien équipés mais rarement au niveau atteint par les banques. Même constat pour la "robustesse" des services : leurs applications en "cloud" ont des taux de disponibilités importants mais pas au point d'éviter des interruptions et dysfonctionnements qui seraient catastrophiques pour des fonctions bancaires. Enfin, ces entreprises n'ont clairement pas l'expérience de leurs aînées pour appréhender les exigences réglementaires qui encadrent les activités financières.

Conclusion, pour les analystes de Gartner, la Silicon Valley se contentera de continuer à aiguillonner les banques, surtout sur des produits et services de niche, sans chercher à "s'emparer" du secteur. Mais les institutions financières doivent tout de même admettre que leurs modèles historiques ne sont plus applicables à une part de plus en plus large de leur clientèle.

Elles vont donc devoir définir une nouvelle route vers le futur, dont l'enjeu est critique pour leur survie. Cette tâche sera particulièrement difficile à réussir face à la multiplicité des options envisageables et en raison de ses ramifications dans toute l'organisation. Dans cet exercice, les exemples que constituent les entreprises technologiques seront les principales sources d'inspiration pour déterminer si elles doivent copier leurs modèles, développer des politiques de partenariat, se restructurer...

Si je suis globalement en accord avec les constats proposés, il me semble cependant qu'une partie du raisonnement de Gartner est faussée. Ainsi, les faiblesses attribuées aux potentiels nouveaux entrants ressemblent trop aux "excuses" habituelles des banquiers justifiant leur immobilisme. Je n'ai, pour ma part, aucun doute sur la capacité d'un Google (par exemple) à offrir une qualité de service et un niveau de sécurité identiques à ceux des plus grandes institutions financières.

J'imagine plutôt que la chance des banques est que ces disrupteurs n'ont simplement pas de visées globales sur leur domaine d'activité, au moins pour l'instant. Mais cela ne doit pas masquer la menace, réelle, qui peut venir de tous les horizons. Aux États-Unis, c'est une startup comme Simple qui tente de secouer les habitudes. Aux Pays-Bas, Aegon lance Knab, la banque qui renverse la banque (lisez son nom de droite à gauche) en appliquant les mêmes recettes (apparemment) et qui pourrait marquer le début de la revanche des assureurs sur l'histoire de la "bancassurance"...

Il serait donc dangereux pour les banques de se considérer inattaquables sur leurs marchés. Les barrières à l'entrée restent certes imposantes mais elles ne sont plus infranchissables. En conséquence, la nécessité de définir une stratégie radicalement nouvelle pour le monde de demain n'est pas à prendre à la légère !

Les trésoriers réclament une banque multi-canal

Trésorerie
Malgré quelques avancées ici et , les trésoriers d'entreprises restent globalement mal aimés de leurs banques quand il s'agit de services mobiles. Si la raison de ce désintérêt tient dans une croyance qu'il n'existe pas de demande, une étude [PDF] sur les attentes en matière de banque multi-canal vient à point pour révéler une autre réalité.

Précisons tout de même d'emblée que cette enquête, conduite auprès de 200 entreprises dans le monde (dont une cinquantaine en Europe), a été commanditée par Fundtech, un fournisseur de solutions de banque en ligne "corporate" qui vient (justement !) de lancer une application pour iPad. Les résultats seront donc à prendre avec une pincée de sel, même si on peut supposer qu'ils ont pu aussi aider l'éditeur à définir sa stratégie. Autre précision à apporter dans ce préambule : pour les auteurs du rapport, les "canaux" (du multi-canal) sont le web (sur PC), le smartphone et la tablette.

La première partie de l'étude évalue les usages actuels et futurs des trésoriers. Dans une certaine mesure, la perception générale est confirmée, puisque plus de la moitié d'entre eux se contentent d'un seul "canal" (dont on peut supposer qu'il s'agit du web) pour gérer leurs activités bancaires. Néanmoins, ils sont déjà plus de 40% à avoir franchi le pas et à utiliser un mode d'accès plus mobile. Lorsqu'ils sont interrogés sur leurs projets à 18 mois, la tendance bascule et ils seront presque 60% à adopter plusieurs canaux (surtout dans les PME). La progression de l'usage de tablettes est particulièrement sensible : 40% des répondants comptent utiliser 3 médias différents...

Par ailleurs, il ne faut pas croire que les trésoriers se contenteront de demi-efforts. Ils sont déjà relativement nombreux à accorder de l'importance à un accès multi-canal aux services bancaires (moins de 16% y sont indifférents) mais ils insistent encore plus sur l'exigence d'une expérience cohérente sur les différents canaux (43% considèrent qu'elle est extrêmement importante).

Par rapport à ces attentes, les offres des banques ne sont clairement pas à la hauteur en la matière. Plus de la moitié des personnes interrogées estiment que leur établissement n'offre pas les services qu'ils attendent. Et ce taux monte à 72% en Europe ! Enfin, lorsqu'on sait qu'ils sont plus de 80% à déclarer qu'il prendrait en compte la qualité de l'offre multi-canal, dans une mesure plus ou moins importante, dans le choix d'un nouveau partenaire financier, l'alarme devrait être sonnée d'urgence...

La révolution du mobile est une réalité qui ne concerne pas que les consommateurs. Il est probable que les approches doivent être différentes mais les entreprises ont aussi, de plus en plus, des exigences à exprimer sur l'accès "multi-canal" aux services que leur offrent leurs banques. Et le point commun avec le segment des particuliers est qu'il ne faudra plus très longtemps pour que des relations se brisent ou se créent en fonction de la capacité de l'établissement à répondre à ces nouvelles attentes. La prise en compte du phénomène mobile est désormais une urgence !

mardi 16 octobre 2012

Vers la fin du trading haute fréquence ?

Inspiré d'un article du New York Times du 14 octobre 2012.

Trading haute fréquence
Accusé de tous les maux, de la crise financière aux "flash crashes" qui affectent régulièrement les marchés, le trading haute fréquence (HFT) semble en forte perte de vitesse, s'il faut en croire une estimation du courtier Rosenblatt Securities, faisant état, aux États-Unis, d'une baisse de 75% des profits (à environ 1,25 milliard de dollars) depuis le pic de presque 5 milliards atteint en 2009.

La tendance est suffisamment sensible pour conduire certains acteurs spécialisés à réduire leurs effectifs, voire, dans quelques cas, à fermer entièrement. Et l'effet sur les marchés est tout aussi visible, puisque, toujours entre 2009 et aujourd'hui, la part du trading haute fréquence dans l'ensemble des échanges de titres serait passée de 61% à 51% (selon le Tabb Group).

La première raison de cette "crise" serait liée à la diminution constante du volume global de transactions. Les algorithmes à haute fréquence cherchant à profiter des "anomalies" de cours entre l'offre et la demande, leur performance est évidemment liée aux nombres d'ordres traités. Et cette baisse se trouve accentuée par la tendance d'une certaine catégorie d'investisseurs "traditionnels" (dont les fonds mutuels) à reporter leur activité vers des marchés où les automates n'interviennent pas.

Incidemment, les bons résultats de 2008 et 2009 étaient également dus à une forte volatilité, conjoncturelle, qui s'est depuis largement calmée.

Mais un autre facteur important à prendre en compte est celui de l'évolution des technologies dans l'ensemble du secteur, qui a permis aux intervenants historiques d'adopter des stratégies jusque-là réservées aux spécialistes du HFT. Il devient donc mécaniquement plus difficile pour ces derniers de profiter des écarts dans les délais de traitement, d'autant plus que les investissements nécessaires pour rester en avance sur la concurrence – de quelques micro- ou nanosecondes – deviennent difficilement justifiables.

Alors que la question de savoir si les interventions de ces acteurs sont utiles pour le bon fonctionnement des marchés financiers n'est pas encore totalement tranchée, il est déjà certain que la baisse d'activité récente n'a pas eu d'effet négatif sur l'évolution des cours. En conséquence, les régulateurs, toujours très attentifs au sujet, restent assez enclins à accroître leur contrôle, ce qui pourrait encore réduire les opportunités pour les "survivants".

Mais, finalement, si le trading haute fréquence, en tant que tel, est bien sur le déclin, cela ne signifie pas, loin de là, la fin de la course à l'automatisation et à la vitesse sur les marchés financiers. Au contraire, ces pratiques se répandent chez tous les intervenants et sont déjà considérées, plus que le HFT lui-même, comme responsables des anomalies techniques chroniques qui affectent les cotations. Ceux qui criaient à la manipulation se réjouiront mais les risques du trading algorithmique sont plus que jamais d'actualité, surtout s'il devient accessible à des acteurs moins "experts" des technologies...

lundi 15 octobre 2012

Pelikam, le nouveau volatile du CAMPG

Pelikam
Déjà un an depuis Kam & Leo, 18 mois pour Tookam... Après une période de creux, certainement consacrée à consolider ces deux innovations majeures, le Crédit Agricole Mutuel Pyrénées Gascogne (CAMPG) a lancé aujourd'hui Pelikam, un nouveau "volatile" dont la vocation est à la fois financière (un peu) et communautaire (beaucoup).

Que fait donc ce drôle d'oiseau ? Il propose tout simplement aux internautes de s'entraider en rassemblant, d'un côté, des personnes et des associations qui ont besoin d'un coup de pouce et, de l'autre, des particuliers qui ont envie d'aider des projets à se concrétiser.

Les premiers publieront leur souhait sur le site, avec la possibilité de le relayer par mail et sur les réseaux sociaux (Facebook, Google+ et Twitter) à destination de leurs amis et relations. Outre des contributions directes, les seconds peuvent aussi apporter leurs conseils et échanger avec les autres "Pelikamers" dans un forum qui leur est dédié.

Les utilisations possibles du service sont largement ouvertes et peuvent s'étendre de la constitution d'une cagnotte (par exemple pour un mariage ou, plus simplement, pour un pot de départ) à la réalisation de véritables projets, plus ambitieux (travaux, voyages, actions humanitaires...).

Pelikam

Quand les demandeurs lancent un appel au don (un "Pelikam"), en euros sonnants et trébuchants, la plate-forme fournit la logistique nécessaire aux transferts d'argent, qui sont alors entièrement gratuits. Dans ce cas, les fonds envoyés par les participants sont placés sous séquestre et ne seront remis au bénéficiaire (moyennant une procédure d'authentification un peu lourde) que si son objectif de financement est atteint. Mais d'autres formes d'aide sont également encouragées, le "coup de palme" réclamé pouvant être, par exemple, une participation à des collectes alimentaires.

Contrairement aux précédentes réalisations du CAMPG, celle-ci semble désintéressée puisque tout dans son fonctionnement est totalement gratuit – ce qui risque de porter un coup sévère aux plates-formes similaires existantes, telles que Leetchi (sur le périmètre des cagnottes). La banque doit tout de même espérer y trouver, au moins, un bénéfice pour son image et, peut-être, un petit plus dans sa stratégie de conquête et de rétention de clientèle... Quoi qu'il en soit, ses valeurs de coopération et de proximité (dans les "coups de palme") restent au centre de cette nouvelle idée.

Avec son univers graphique décalé (pour un service proposé par une banque), l'initiative Pelikam est sympathique et elle sera certainement utile à ses futurs utilisateurs. Les amateurs de finance participative ne pourront cependant que regretter l'absence d'autres options que le don et la constitution de cagnotte, telles que le prêt ("P2P lending"), l'investissement... Il est vrai que cela supposerait une autre dimension, amènerait d'autres contraintes, plus de difficultés... mais peut-être est-ce la prochaine étape pour le CAMPG ?